La Revue Sage-Femme (2017) 16, 250—255
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TRAVAIL ORIGINAL
L’utilisation des courbes de poids personnalisées en anténatal améliore-t-elle le diagnostic des fœtus petits pour l’âge gestationnel à haut risque de morbidité néonatale ?夽 Does customized weight curves improve prenatal diagnosis of fetuses small for gestational age in a high-risk population? A. Lerebours a,∗, R. Callec a, E. Lauria b, O. Morel c a
Département de gynécologie et obstétrique, CHRU de Nancy, Nancy, France Département de néonatologie, CHRU de Nancy, Nancy, France c IADI, Inserm U947, département de gynécologie et obstétrique, CHRU de Nancy, Nancy, France b
Disponible sur Internet le 25 ao�t 2017
MOTS CLÉS Restriction de croissance in utero ; Petit pour l’âge gestationnel ; Courbes de poids personnalisées ; Échographie ; Dépistage ; Morbidité néonatale
Résumé Objectifs. — Évaluer les performances des courbes de poids personnalisées dans le dépistage échographique anténatal des fœtus petits pour l’âge gestationnel dans une population de prématurés à haut risque de morbidité néonatale. Méthodes. — Tous les enfants nés prématurés à la maternité universitaire de type 3 de Nancy pendant un an et classés petits pour l’âge gestationnel à la naissance selon les courbes personnalisées développées par Ego et al. ont été inclus dans cette étude rétrospective. Lors de l’échographie la plus proche du terme, la performance des courbes de croissance personnalisées a été comparée à celle des courbes de croissance en population pour le dépistage anténatal d’un groupe de prématurés classés petits pour l’âge gestationnel (PPAG) en postnatal par une courbe personnalisée (ce reclassement permettant d’identifier une sous-population de PPAG prématurés à haut risque de morbidité néonatale).
DOI de l’article original : http://dx.doi.org/10.1016/j.gofs.2017.05.003. Cet article a fait l’objet d’une première publication dans « Gynécologie obstétrique fertilité & sénologie », volume 45, issue 6, juin 2016, pages 335—339. ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (A. Lerebours). 夽
http://dx.doi.org/10.1016/j.sagf.2017.07.004 1637-4088/© 2017 Publi´ e par Elsevier Masson SAS.
Utilisation des courbes de poids personnalisées et risque de morbidité néonatale
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Résultats. — Au total 67 nouveau-nés ont été inclus. Cinquante et un (76,1 %) avaient été reclassés en postnatal PPAG sur des courbes personnalisées alors qu’ils étaient considérés eutrophes sur une courbe postnatale en population et 16 (23,9 %) étaient PPAG selon les 2 courbes. Le délai moyen entre la dernière échographie et la naissance était de 2,2 semaines (± 2,5). Au seuil du dixième percentile, la sensibilité d’une courbe personnalisée pour la détection anténatale des fœtus reclassés en postnatal PPAG à l’aide de courbes personnalisées n’était pas différente de celle d’une courbe en population (29,9 % versus 41,8 % p = 0,05). Conclusions. — Dans notre étude la performance des courbes personnalisées de poids n’était pas différente de celle des courbes en population pour le dépistage anténatal des nouveau-nés prématurés reclassés petits pour l’âge gestationnel en postnatal à l’aide de courbes personnalisées. © 2017 Publi´ e par Elsevier Masson SAS.
KEYWORDS Fetus small for gestational age; Intrauterine growth retardation; Customized growth charts; Ultrasound; Screening
Abstract Objectives. — To assess the accuracy of customized growth charts for the ultrasound antenatal diagnostic of fetus small for gestational age in a high-risk population of preterm. Methods. — All premature infants born in a French university maternity center for a year and classified as small for gestational age at birth by using customized growth charts developed by Ego et al. were included in this retrospective study. At the ultrasound performed closest to the term, customized growth charts and population growth curves were compared for the antenatal diagnosis of a premature infants group classified small for gestational age in post-natal by customized growth charts and more at risk of perinatal complications. Results. — Sixty-seven newborns were included in the study. Fifty-one (76.1%) were secondarily classified as small for gestational age although they were eutrophic on the basis of population growth curves and 16 (23.9%) were small for gestational age on both curves. The average time between the last ultrasound and birth was 2.2weeks. On the threshold of the tenth percentile, the sensitivities of customized growth charts and curves in population were not significantly different (29.85% versus 41.79% P = 0.05) for antenatal detection of fetus small for gestational age. Conclusion. — In our study, the use of customized growth charts does not improve the antenatal detection of most at-risk children. © 2017 Published by Elsevier Masson SAS.
1. Introduction Les nouveau-nés petits pour l’âge gestationnel (PPAG) sont définis par un poids à la naissance inférieur au 10◦ percentile selon la courbe de croissance choisie [1,2]. Cette définition inclut les nouveau-nés constitutionnellement petits mais également ceux ne concrétisant pas leur plein potentiel de croissance et qui subissent une restriction de croissance in utero. Les PPAG non diagnostiqués sont la cause d’environ 50 % des morts in utero non expliquées [3,4]. À la naissance les nouveau-nés PPAG ont une mortalité plus élevée que celle des nouveau-nés eutrophes. La morbidité est également augmentée, notamment en termes d’adaptation néonatale, de complications respiratoires et métaboliques (hypoglycémie, hypocalcémie, ictère. . .) [5—8]. Disposer d’une méthode fiable pour dépister les fœtus PPAG et adapter leur prise en charge est donc un enjeu majeur de santé publique. En France la croissance fœtale est évaluée systématiquement à l’aide d’une échographie réalisée autour de
32 semaines d’aménorrhée (SA) [9]. Le poids fœtal est estimé en termes de percentiles de poids en se rapportant sur une courbe de croissance donnée mais dans la majorité des études moins de 50 % des enfants PPAG sont diagnostiqués au cours de la grossesse [10,11]. L’absence de prise en compte du potentiel de croissance spécifique à chaque fœtus pourrait limiter la sensibilité des courbes en population et expliquer au moins en partie leur faible performance. Dans cette hypothèse, a été proposée depuis plusieurs années l’utilisation de courbes personnalisées qui ont fait l’objet d’une recommandation par le Collège national des gynécologues obstétriciens franc ¸ais (CNGOF) en 2014 [12,13]. L’étude INTERGROWTH de Papageorghiou et al. avait pour objectif d’établir des courbes de croissance fœtale personnalisées applicables à la population mondiale de 14 SA jusqu’à leurs 2 ans, afin de compléter les courbes de croissance postnatales proposées par l’OMS. Le but du projet était également d’établir une nouvelle classification du RCIU et des causes de naissances prématurées [14].
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A. Lerebours et al.
L’intérêt réel de cette approche en pratique clinique reste discuté [15—17]. Dans une étude récente au sein de notre centre portant sur 3415 enfants nés en 2013, le taux de prématurité défini par une naissance avant 37 SA était de 14,1 % (480/3415). Le taux de prématurés dans notre population était élevé par rapport à celui de la population générale franc ¸aise : 14,1 % versus 5,5 % en 2006 et 6,6 % en 2010 d’après les données Audipog. Ces pourcentages plus élevés que ceux de l’enquête nationale sont dus à l’effet centre de notre maternité de type III qui accueille tous les extrêmes et grands prématurés de la région. Parmi ces nouveau-nés prématurés 22,4 % étaient reclassés PPAG à la naissance par l’utilisation de courbes personnalisées postnatales. Dans ce groupe, la morbidité néonatale était significativement augmentée comparativement à celle de nouveau-nés prématurés non PPAG selon Gardosi. Les nouveau-nés prématurés reclassés en postnatal à l’aide de courbes personnalisées semblent être une population à haut-risque de morbidité néonatale [18]. L’objectif principal de ce travail était d’évaluer les performances des courbes de poids personnalisées dans le dépistage échographique anténatal des fœtus nés prématurés (< 37 SA) et reclassés PPAG par des courbes personnalisées en postnatal, sous-population à haut-risque de morbidité néonatale.
[23]. Les coefficients des variables d’intérêt du modèle de poids de Ego et al. ont été déterminés à l’aide de l’échantillon de l’Enquête nationale périnatale franc ¸aise [24] par l’application d’un modèle de régression linéaire. Ces coefficients ont été utilisés pour calculer le poids fœtal idéal théorique à 40 SA pour chaque enfant. La formule était : poids à la naissance à 40 SA (50e percentile) = 3343,8 + 16,1AG − 0,24AG2 + 0,002AG3 + 155,5 sexe (1 pour garc ¸on) + 5,7 taille + 8,6 poids − 0,13 poids2 + 0,0007 poids3 + 110,3 parité (si parité = 2) + 124,0 parité (si parité = 3) + 149,2 parité (si parité = 4) + 160,6 parité (si parité ≥ 5). Les Z-scores ont été calculés et chaque fœtus a été classé PPAG (PPAG < 10e percentile soit z score < −1,282) ou non PPAG selon la courbe de croissance en population (CFEF) et la courbe personnalisée (Ego et al.). L’analyse descriptive a été réalisée par l’estimation des moyennes et écarts-types pour les variables quantitatives et en pourcentage pour les variables qualitatives. La comparaison des variables qualitatives a été réalisée par le test du Chi2 ou le test exact de Fisher lorsque les effectifs étaient inférieurs à 5. Les différences étaient considérées comme significatives si p < 0,05. Les analyses statistiques ont été faites avec le logiciel SAS 9,2 (Carry, NC, USA). En accord avec la loi franc ¸aise, cette étude rétrospective n’a pas fait l’objet d’une demande auprès du Comité de protection des personnes ou d’un comité d’éthique.
2. Méthodes Tous les nouveau-nés prématurés, nés vivants entre le 1er janvier 2013 et le 31 décembre 2013 à la maternité régionale universitaire du CHRU de Nancy ainsi que les nouveau-nés outborn, hospitalisés dans le premier mois de vie sur la même période et classés PPAG selon les courbes personnalisées de Gardosi et al. en postnatal ont été inclus dans une étude rétrospective observationnelle unicentrique. Les nouveau-nés présentant une malformation congénitale découverte en pré- ou postnatal ont été exclus. Pour chaque nouveau-né les données suivantes ont été obtenues à partir des dossiers cliniques : âge de la mère, parité, taille, poids avant la conception, antécédents obstétricaux de la mère, éventuelles pathologies obstétricales pendant la grossesse, ainsi que des données néonatales : âge gestationnel et mesures anthropométriques (poids de naissance, périmètre céphalique [PC], taille). Pour tous les sujets, une estimation du poids fœtal (EPF) a été effectuée à partir des paramètres biométriques mesurés lors de l’échographie la plus proche de la naissance. L’EPF a été calculée selon la formule de Hadlock à 3 paramètres (diamètre bipariétal [BIP], périmètre abdominal [PA] et longueur fémorale [LF]) [19—21] : EPF = 1, 3596 à
0, 00386 × PA × LF + 0, 0064 × PC
+ 0, 00061 × BIP × PA + 0, 0424 × PA + 0, 174 × LF Chaque fœtus a été classé selon le percentile du poids estimé à l’échographie du troisième trimestre et à la naissance en utilisant à la fois une courbe en population (celle du Collège franc ¸ais d’échographie fœtale [CFEF] [22]) et une courbe de croissance personnalisée, celle développée par Gardosi et al. et adaptée par Ego et al. pour la France
3. Résultats Parmi les 480 prématurés nés ou hospitalisés durant leur premier mois de vie à la maternité régionale universitaire de Nancy (MRUN) en 2013, 110 étaient classés PPAG selon les courbes personnalisées de Gardosi et al. en postnatal [23]. Quarante-trois sujets ont été exclus, du fait de données manquantes dans 40 cas (échographies manquantes ou incomplètes [n = 37], poids maternel non renseigné [n = 3]) et en raison de données aberrantes dans 3 cas. Au total l’analyse a porté sur 67 dossiers (Fig. 1). Parmi ces 67 nouveau-nés prématurés inclus, 51 avaient été reclassés à la naissance PPAG selon Gardosi et al. alors qu’ils étaient classés eutrophes sur une courbe en population (76,1 % 51/67) et 16 étaient PPAG à la naissance selon à la fois la courbe personnalisée et celle en population (23,9 % 16/67). Les caractéristiques générales de la population de l’étude sont résumées dans le Tableau 1. L’âge gestationnel moyen lors du dernier examen échographique était de 30 ± 3,3 SA avec une EPF moyenne de 1736 ± 594 g. Le terme moyen à l’accouchement était de 33 ± 3,1 SA et le poids de naissance moyen était de 1867 ± 715 g. Le délai moyen entre l’échographie et la naissance était de 2,2 ± 2,5 semaines. Les performances respectives de la courbe en population du CFEF et de la courbe personnalisée pour la prédiction anténatale des 67 PPAG à la naissance sont rapportées dans le Tableau 2. Au seuil du dixième percentile la sensibilité pour la prédiction anténatale des PPAG était respectivement de 29,9 % (20/67) avec la courbe personnalisée versus 41,8 % (28/67) avec la courbe en population. Les performances de l’utilisation d’une courbe personnalisée lors de l’EPF sur la dernière échographie pour la
Utilisation des courbes de poids personnalisées et risque de morbidité néonatale
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Tableau 1 Caractéristiques maternelles et fœtales de la population d’étude. Variables
Résultats
Âge maternel (années) moy ± ET Sexe, n (%) Fille Garc ¸on Taille maternelle (cm) moy ± ET Poids maternel (kg) moy ± ET IMC maternel moy ± ET HTA, n (%) RPM, n (%) Parité, n (%) 0 1 ≥2 Terme à l’échographie (sem) moy ± ET Estimation du poids fœtal (g) moy ± ET Délai échographie/naissance (sem) moy ± ET Terme à la naissance (sem) moy ± ET Poids de naissance (g) moy ± ET
30,4 ± 5,9
18—42
29 (56,7) 38 (43,3) 164,1 ± 7,6
141—190
Extrêmes
65,2 ± 14,6 24,2 ± 5,3 3 (4,5) 8 (12,1)
42—102 16,7—37,1
36 (54) 21 (31) 10 (15) 30,25 ± 3,3
22—36
1736 ± 594
715—2800
2,2 ± 2,5
0—12
32,5 ± 3,1
25—36
1867 ± 715
715—3230
IMC : indice de masse corporelle ; HTA : hypertension artérielle ; RPM : rupture prématurée des membranes.
Tableau 2 Performances de la courbe en population et de la courbe personnalisée pour la prédiction des PPAG à la naissance à partir de l’estimation du poids fœtal lors de la dernière échographie anténatale.
EPF < 10e p EPF > 10e p Sensibilité
Courbe personnalisée
Courbe en population
20 47 29,9 %
28 39 41,8 %
EPF : estimation du poids fœtal.
Fig. 1. Diagramme de flux résumant la sélection de la population d’étude pour l’âge gestationnel à la naissance selon Gardosi.
prédiction des 16 sujets définis PPAG par la courbe en population d’audipog à la naissance sont indiquées dans le Tableau 3. Au seuil du dixième percentile la sensibilité (Se) était de 81,25 % (13/16) et la spécificité (Sp) de 86,27 % (44/51), les valeurs prédictive (VPP) et négative (VPN) étaient respectivement de 65 % (13/20) et 93,62 % (44/47) pour cette population spécifique.
Tableau 3 Performances des courbes personnalisées pour la prédiction anténatale des PPAG définis sur une courbe en population à la naissance.
EPF < 10e p EPF > 10e p Effectifs
PPAG
Eutrophes
Effectifs
13 3 16 Se = 81,2
7 44 51 Sp = 86,3
20 47 67
VPP = 65 VPN = 93,6
PPAG : petits poids pour l’âge gestationnel ; EPF : estimation du poids fœtal ; VPP : valeur prédictive positive ; VPN : valeur prédictive négative ; Se : sensibilité ; Sp : spécificité.
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4. Discussion Notre étude n’a pas montré de supériorité des courbes personnalisées de poids fœtal par rapport aux courbes en population pour la prédiction en anténatal des prématurés classés PPAG en postnatal sur la base des courbes personnalisées, sous-population à haut-risque de morbidité néonatale. Une différence méthodologique majeure entre notre étude et les travaux déjà publiés doit être prise en compte pour interpréter l’absence de supériorité des courbes personnalisées. En effet dans l’immense majorité des travaux de la littérature les courbes personnalisées ont été utilisées non pas au cours de la grossesse, comme dans notre étude, mais après la naissance pour reclasser des nouveau-nés. Ce reclassement après la naissance, s’il permet d’adapter la prise en charge des nouveau-nés, ne répond pas à la nécessité de disposer d’un outil permettant de prédire efficacement en anténatal les PPAG. Plusieurs études ont suggéré que les courbes personnalisées étaient supérieures aux courbes de population en anténatal [23,25—28]. Ego et al. dans une étude multicentrique incluant 56 606 naissances survenues dans cinq maternités de type 3 en France entre 1997 et 2002, ont montré que l’usage des courbes personnalisées permettait une meilleure détection à la naissance des nouveau-nés à risque de MFIU et de morbimortalité périnatale, en comparaison avec les courbes en population [23]. Cette population est celle pour laquelle une meilleure détection des PAGG présente le plus de bénéfices. Plusieurs autres études [26—28] ont montré que, dans des populations à risque élevé de RCIU, l’utilisation des courbes personnalisées à la naissance permettait de reclasser rétrospectivement un nombre significatif de nouveau-nés et de détecter des PPAG ignorés par les courbes de population et permettrait ainsi d’adapter la prise en charge de manière optimale. En revanche, notre étude évaluait le dépistage anténatal de cette population à haut-risque constituée de prématurés diagnostiqués à la naissance petits pour l’âge gestationnel sur une courbe personnalisée dont la morbidité était significativement augmentée par rapport à aux prématurés eutrophes selon une courbe personnalisée [18]. L’évaluation des courbes de poids fœtal personnalisées demeure largement moins étudiée. Dans une étude de de Jong et al. incluant 215 patientes à risque d’insuffisance utéro-placentaire, une mesure du poids fœtal inférieure au 10e percentile sur une courbe de poids personnalisée était significativement associée à un nouveau-né petit pour l’âge gestationnel à la naissance, à une extraction instrumentale pour ARCF et à une admission en soins intensifs, en comparaison aux fœtus classés au-dessus du 10e percentile [27]. De même dans une étude de Kase et al. regroupant 782 patientes, l’utilisation de courbes personnalisées en anténatal permettait d’augmenter la performance de détection des fœtus PPAG. La sensibilité était de 15,1 % avec une courbe personnalisée, supérieure à celle observée avec une courbe en population (3,8 %) (p < 0,001) [29]. Ces dernières études suggèrent que les femmes présentant une grossesse à risque élevé de RCIU représentent la sous-population dans laquelle les courbes personnalisées auraient la valeur prédictive la plus forte en anténatal. Inversement dans une population non sélectionnée,
A. Lerebours et al. l’utilisation des courbes personnalisées en anténatal ne semble pas permettre une meilleure détection des fœtus PPAG comme l’ont montré Callec et al. dans une cohorte de 2002 grossesses à faible risque, représentative de la population générale. Dans cette étude, un délai moyen élevé entre l’échographie et la naissance (50 jours) pourrait expliquer en partie les résultats décevants des courbes personnalisées [30]. Dans notre étude, le délai moyen de 2,2 ± 2,5 semaines entre la dernière échographie et la naissance, plus court que celui observé dans la littérature [29—33], aurait dû théoriquement favoriser la concordance entre le classement anténatal et postnatal en limitant la variabilité interindividuelle de croissance au cours du troisième trimestre. Deux limites de notre étude sont à prendre en compte pour interpréter notre résultat négatif. Premièrement, le caractère rétrospectif de l’étude a pu entraîner un biais de sélection, deuxièmement la faible taille de l’échantillon (n = 67) génère un manque de puissance limitant l’analyse de la performance des courbes personnalisées. D’autres axes de recherche ont été explorés pour améliorer le taux de détection des fœtus PAG. Lesmes et al. ont montré que l’adaptation du terme de l’échographie du troisième trimestre à 32 ou 36 SA en fonction de l’utilisation d’un score composite, entre 19 et 24 SA, basé sur les caractéristiques anthropométriques de la mère, les biométries fœtales et des marqueurs sériques, permettait d’améliorer la détection des PAG de 44 % pour l’échographie du deuxième trimestre seul vs 61 % à 32 SA et 76 % à 36 SA pour les naissances à terme [34]. Dans la POP study, parue dans le Lancet en 2015, Sovio et al. Démontre également l’intérêt de l’échographie de dépistage systématique au troisième trimestre celle ci triplant pratiquement le taux de détection des PAG. De plus la réalisation systématique d’un doppler des artères utérines et d’un doppler utéro-placentaire associés à l’échographie du troisième trimestre permet d’identifier un sous-groupe de fœtus dont le risque de morbidité néonatale est augmenté [35].
5. Conclusion La mise au point d’un outil de détection anténatal des retards de croissance à la fois précoce, fiable, non invasif et reproductible, reste un enjeu majeur pour diminuer la morbi-mortalité néonatale. Dans notre étude, les courbes personnalisées ne sont pas plus performantes que des courbes en population pour dépister un sous-groupe de prématurés à risque majoré de morbidité néonatale, ceux reclassés PPAG par des courbes personnalisées en postnatal. D’autres études sont nécessaires pour confirmer ces données préliminaires et préciser l’intérêt éventuel d’autres approches méthodologiques.
Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs n’ont pas précisé leurs éventuels liens d’intérêts.
Utilisation des courbes de poids personnalisées et risque de morbidité néonatale
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