Méthodes d'entraînement chez le cheval: aspect physiologique

Méthodes d'entraînement chez le cheval: aspect physiologique

141 Science & Sports (1991) 6, 141-144 © Elsevier, Paris M~thodes d'entrainement chez le cheval: aspect physiologique P Villeneuve, AP Chassain Cent...

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Science & Sports (1991) 6, 141-144 © Elsevier, Paris

M~thodes d'entrainement chez le cheval: aspect physiologique P Villeneuve, AP Chassain Centre rOgional de mddecine du sport, CHUR de Limoges, 87042 Limoges Cedex, France

Introduction L'entraTnement dolt ~tre adapt6 aux performances envisag6es, et compte tenu des diff6rentes sp6cialit6s, on en revient, comme chez l ' h o m m e , / t essayer de d6velopper l'aptitude 6nerg6tique selon la puissance et la dur6e des 6preuves, dur6e qui conditionne la participation des trois formes d'6nergdtique musculaire: ana6robie alactique, anadrobie lactique, a6robie (Cerretelli et al, 1987; Wolter, 1986). L'aptitude 6nerg6tique sp6cifique du cheval d6pend avant tout de sa musculature : on distingue chez lui - comme chez l ' h o m m e - plusieurs types de fibres musculaires (Mouthon et al, 1983a, 1983b ; Snow, 1982) : - les fibres I ou ST (slow twitch) rouges, riches en myoglobine, qui se caract6risent par leur m6tabolisme a6robie et leur vitesse de contraction lente; leur puissance contractile est relativement faible mais elles sont peu fatigables et de toute fa~on toujours sollicit6es quel que soit le type d'exercice. Riches en inclusions glycogdniques mais aussi lipicliques, avec les enzymes du cycle de Krebs, ce sont les fibres de l'endurance; - les fibres II qui sont plut6t blanches; elles sont de type rapide, riches en glycogbne mais sans inclusion lipidique et particuli6rement riches en enzymes de la glycolyse ana6robie. Ce sont des fibres puissantes mais rapidement fatigables, g6ndratrices d'acide lactique et grandes consommatrices de glycog6ne. En rdgime ana6robie, elles s'6puisent 13 fois plus rapidement que les fibres a6robies qui, elles, conduisent la ddgradation de la mol6cule de glycog6ne jusqu'~ CO 2 + H20. Les fibres II se diff6rencient en fait en deux catdgories : IIa ou F T H (Fast Twitch High Oxydative) de type interm6diaire (a6ro-ana6robie) et IIb ou FT (Fast Twitch) de type ana6robie. Dans son ensemble, le muscle est constitu6 par

une mosaique de ces diff6rentes fibres, ce qui lui permet de repondre/t des mobilisations vari6es. La proportion et la taille des fibres peuvent varlet sous l'influence de la g6n6tique, de l'fige, de l'alimentation et des stimuli nerveux. L'entra~nement b, court terme semble avoir peu d'influence sur les proportions respectives de fibres I et II, par contre un entratnement intensif et prolong6 sur plusieurs ann6es favorise l'6volution des fibres IIb en IIa comme cela a 6t6 verifi6 chez le trotteur (Snow, 1982; Nolten, 1986). L'ber6dit6 est donc beaucoup plus importante chez le cheval que chez l ' h o m m e . La pr6disposition h u n type d'effort est chez lui determin6e d6s la naissance par sa lign6e.

Entrainement Compte tenu de l'importance des facteurs h6r6ditaires chez le cheval, l'entraTnement se fera de fa~on efficace dans le sens des pr6dispositions g6n6tiques de l'animal. L'entra~nement sera donc essentiellement sp6cifique en sachant que l'entra~nement en endurance, de type quantitatif <> la vitesse et qu'/~ l'inverse, l'entra~nement en vitesse de type qualitatif, se fait au d6pend de l'endurance (tableau I). Nous ne parlerons pas de l'entraTnement technique sp6cifique de chaque discipline qui est une affaire d'entra~neur et non de biologiste. En principe, l'entra~nement en vue d'une performance donn6e (sch6matiquement endurance ou 6preuve de vitesse) est guid6 par les observations faites au cours des 6preuves d'effort. Actuellement, ce sont essentiellement des 6preuves triangulaires avec suivi de la fr6quence cardiaque et de la lactat6mie qui sont utilis6es (Valette et al, 1987). Les protocoles diffbrent selon les auteurs, les paliers de 3 rain avec une pause de 1 rain pour

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P Villeneuve, A P Chassain

Tableau I. L'entra~nement en vitesse ou en endurance: techniques g6n6rales et effets biologiques.

Type d'entra?nement

Vitesse

Endurance

Exercices effectu6s

Sprints courts h vitesse maximale suivis de petits trots de r6cup6ration partielle

Interval-training : pointes de vitesse (V200) sur fond de course ~ vitesse d'endurance (V4)

Intensit6 des exercices

> 100% de VO z m a x

= 10007o et 50 ~t 60070 de XrO2 m a x

Fr6quences cardiaques correspondantes

220-240 b a t / m i n

= 200 et 130-140 b a t / m i n -l

Fibres musculaires sollicit6es

I e t surtout II A e t I I B

I e t surtout II A

Effets biologiques

A u g m e n t a t i o n de la tol6rance lactique

Am61ioration de VO 2 m a x et ((V4))

Effets sur les performances 6nerg6tiques

Ana6robies

A6robies

les pr616vements sanguins sont les plus fr6quemment utilis6s. Par analogie avec ce qui se passe chez l'homme, les grandeurs biologiques int6ressantes sont: - V2: vitesse induisant une lactat6mie de 2 mmol/1; V4: vitesse induisant une lactat6mie de 4 mmol/1; - FC2: fr6quence cardiaque correspondant ~t une lactat6mie de 2 mmol/1; - FC4: fr6quence cardiaque correspondant ~t une lactat6mie de 4 mmol/1; V200: vitesse induisant une fr6quence cardia.que de 200 bat/rain qui semble un bon t6moin de VO 2 max.

~zO

ml.min-l.kg-1 !

!

CHIEN

!

J

i



,,,,'" * '~

1 0 0

-

80 60

-

Entrafnement en endurance L'entra~nement en endurance devra &re conduit en vue d'am61iorer les performances a6robies. L'exp6rience et le bon sens montrent que les performances de longue dur6e sont corr616es avec VO 2 max (fig 1) (Saibene et al, 1980) et avec le niveau de d6pense 6nerg6tique le plus 61ev6 que l'organisme peut soutenir sans entrMner une participation ana6robie significative. En pratique, on identifie ce niveau de production 6nerg6tique au seuil dit (~ana6robie)) soit classiquement V4, la vitesse de course entra~nant une lactat6mie de 4 mmol-1-1 au cours d'une 6preuve d'effort triangulaire (fig 2) (Antonini et al, [~t para~tre]). Comme l'organisme est incapable de stocker l'oxyg6ne, il faudra donc am61iorer de fagon conjointe le syst6me d'approvisionnement ~t savoir l'ensemble cardiovasculaire et respiratoire, et le syst6me consommateur ~t savoir les muscles et particuli6rement ses composantes a6robies (fibres I surtout).

40 20 I

10 0 v kin.h-1

!

I

I

20

30

40

I

Fig 1. D'apr6s Saib6ne et Marconi, 1980. C o n s o m m a t i o n d'oxyg6ne (VO z ml.min 1.kg 1) chez l ' h o m m e , le chien et le cheval en fonction de la vitesse de course. L ' h o m m e est loin derri6re l'animal !... En particulier la course du cheval est bien plus 6conomique !...

L'entrMnement sera donc sch6matiquement un entra~nement de type Interval-Training avec des efforts ~t vitesse maximale a6robie (entrMnant une fr6quence cardiaque voisine de 200 b a t / m i n - l : V200) sur un fond de travail au voisinage de ((V 4)), les entra~neurs personnalisant 6videmment le sch6ma de base en fonction de l'objectif, de leur exp6rience et du temp6rament du cheval (Jones, 1989; Lindholm, 1974; Lindholm et al, 1974).

Mdthodes d'entrainement chez le cheval

L mmol.1-1

I

I VS2

r

o

s io 1'5

2'0

VS4

I

I

25

30

35

4'0

143

L ' 6 n e r g i e a n a 6 r o b i e a l a c t i q u e 6rant relay6e p a r l ' a n a 6 r o b i e lactique des les 4 e et 5 e secondes d ' e f f o r t , c'est essentiellement cette dernibre q u ' i l faut solliciter. En a c c o r d avec la litt6rature, et avec l'exp~rience des entra~neurs, l'entra~nement consistera d o n c p r i n c i p a l e m e n t / ~ d 6 v e l o p p e r la glycolyse a n a d r o b i e et la toldrance du cheval ~ l ' a c c u m u l a tion de l ' a c i d e lactique. La mise en c o n d i t i o n sera d o n c constitu6e ici de sprints courts (30 s) /~ vitesse m a x i m a l e suivis de t e m p s de petits trots s u f f i s a m m e n t longs (5 /~ 10 min) de fa~on a 61iminer la m a j o r i t 6 du lactate produit.

km.h-1 z~Lmmol.l'l 4

Conclusion

3

En plus du contr61e v6t6rinaire de r o u t i n e ( E C G de repos, 6tat des m e m b r e s et des t e n d o n s , di6t6tiq u e . . . ) , la surveillance de l ' e n t r a ? n e m e n t peut se faire grfice ~ des 6preuves d ' e f f o r t : l ' a m d l i o r a t i o n des qualit6s d ' e n d u r a n c e se traduit en particulier p a r un d 6 p l a c e m e n t 6ventuel vers la d r o i t e de la c o u r b e lactate-vitesse (Galloux et al, 1989). Les qualit6s de vitesse peuvent ~tre 6galement suivies p a r l ' o b s e r v a t i o n de la lactat6mie de fin de course mais ici, en p r a t i q u e , le c h r o n o m ~ t r e est le meilleur j u g e de l'efficacit6 de l'entra~nement. Une a u t r e t e c h n i q u e p e r m e t 6ventuellement une a p p r o c h e o b j e c t i v e du niveau d ' e n t r a ~ n e m e n t du cheval: l'enregistrement 61ectrocardiographique longue dur~e ( H o l t e r ) p e r m e t en effet le suivi de la fr6quence c a r d i a q u e en s i t u a t i o n de r e p o s / i l ' a b r i du stress et reflbte l ' a d a p t a t i o n c a r d i o v a s c u l a i r e . Son analyse devrait r e n d r e possible la d6tection du surentraTnement (Blanc et al, 1987). U n e d i m i n u tion de la fr6quence c a r d i a q u e b a s a l e est un b o n signe de l ' a d a p t a t i o n / l l ' e n d u r a n c e de m~me que la rapidit6 de la r6ponse en fr6quence est un b o n signe chez le sp6cialiste de vitesse. Enfin, c o n t r a i r e m e n t ~ l ' h o m m e s p o r t i f c a p a b l e de s ' i m p o s e r des exercices durs et a s t r e i g n a n t s en recherche de la p e r f o r m a n c e , l'entraTnement chez le cheval, isol6 presque toute la journ6e dans un box de 3 m sur 3 m, d e m a n d e aussi un <>: p r o m e n a d e en ext6rieur, mise au p a d d o c k , t r a v a i l facile, etc. En fait, l ' a v e n i r est /~ une c o l l a b o r a t i o n 6troite entre l ' h o m m e de t e r r a i n et le biologiste en r u e d ' u n e recherche de l ' o p t i m i s a t i o n de l'entra?nem e n t : vitesse, dur6e des s6ances de travail, intervalles de repos variables avec la sp6cialisation du cheval.

2 ! 0

o

10

20

30

40

km.h-1 Fig 2. D'apr6s Antonini et al. l~preuve d'effort <> chez cinq chevaux d'obstacle entra~nes en vue de concours hippique, a. L: lactatemie observ~e au repos (vitesse 0) et en fin de chaque palier ; Vs2: vitesse au <>; Vs4: vitesse au <>; b./XL : accroissement de la lactatemie entre les diff6rents paliers de vitesse: AL = 0 pour X = 14 km.h indique l'allure maximum pour laquelle il n'apparait pas encore d'accroissement de la lactatdmie. Protocole: trois paliers de vitesse de course de 2 min chacun/~ 20, 30 et 40 km ] s~pards par un intervalle de repos de 1 min pour prdlbvement sanguin.

Entrainement en vitcsse A u cours d ' u n e 6preuve de vitesse, le muscle sollicit6 au m a x i m u m doit r 6 p o n d r e le plus vite possible. Les fibres r a p i d e s de type II p o s s 6 d a n t leur mati6re p r e m i 6 r e 6nerg6tique sur place et ne n6cessitant pas d ' a p p o r t d ' o x y g b n e j o u e n t alors le r61e principal. Ici, le d 6 v e l o p p e m e n t c a r d i o v a s c u l a i r e et respir a t o i r e est secondaire p a r r a p p o r t ~ l ' a d a p t a t i o n de l'6nerg6tique musculaire.

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P Villeneuve, AP Chassain

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