Microangiopathie thrombotique, thromboses artério-veineuses et cancer

Microangiopathie thrombotique, thromboses artério-veineuses et cancer

A206 75e Congrès franc¸ais de médecine interne – Brest, 14, 15 et 16 juin 2017 / La Revue de médecine interne 38S (2017) A110–A225 Introduction Le s...

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75e Congrès franc¸ais de médecine interne – Brest, 14, 15 et 16 juin 2017 / La Revue de médecine interne 38S (2017) A110–A225

Introduction Le syndrome d’activation macrophagique (SAM) ou lympho-histiocytose hémophagocytaire est une entité clinicobiologique rare pouvant compliquer plusieurs pathologies infectieuses, inflammatoires auto-immunes ou néoplasiques. Il s’agit d’une urgence aussi bien diagnostique que thérapeutique. Le traitement repose sur le traitement spécifique de l’agent causal et dans certaines indications, sur l’étoposide. Patients et méthodes Nous avons comparé de fac¸on rétrospective, les observations des patients suivis dans notre service de médecine interne, sur une période de 17 ans, chez qui le diagnostic de SAM a été posé selon les critères HLH 2009 et ce selon l’administration (E+) ou non (E–) d’étoposide. Résultats Vingt et un patients ont été colligés. Six patients étaient traités par étoposide. Sur le plan clinique, les deux groupes étaient comparables avec une fièvre notée chez tous les patients, un syndrome tumoral avec adénopathies (67 % dans E+ vs 63 % dans E–), hépatomégalie (67 % dans E+ vs 81 % dans E–) et splénomégalie (67 %dans E+ vs 73 % dans E–). Sur le plan biologique, on notait une hyperferritinémie (84 % dans E+ vs 86 % dans E–), une hypertriglycéridémie chez tous les patients, une cytopénie (100 % dans E+ et 94 % dans E–) et une élévation de la LDH dans 80 % des cas. La ponction sternale objectivait une image de phagocytose dans 80 % des cas dans les deux groupes. Le SAM était associé à une cause infectieuse dans 8 cas (2E+/6E–), à une cause néoplasique dans 4 cas (1E+/3E–) et une cause systémique dans 4 cas (2E+/2E–). Il était d’origine multifactorielle dans un cas (E–) et d’origine iatrogène dans un cas (E+). Le traitement était étiologique dans tous les cas. Une corticothérapie était administrée dans 40 % des cas dans le groupe E– et systématiquement associée à l’étoposide dans 100 % du groupe E+. L’évolution était favorable dans tous les cas traités par étoposide et était marquée par 2 récidive et 5 décès dans l’autre groupe. Conclusion L’utilisation d’étoposide, composé cytotoxique sélectif de la lignée monocytaire, semble être le facteur déterminant de succès du traitement, son administration doit être précoce. Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2017.03.303 CA186

Échec et MAT à la gemcitabine

S. Valayer ∗ , R. Mestiri , J.M. Cournac , C. Doutrelon , S. Lecoules , M. Aletti Médecine interne rhumatologie, hôpital d’instruction des armées Percy, Clamart, France ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (S. Valayer) Introduction La gemcitabine est un métabolite spécifique de la phase S du cycle cellulaire utilisé en traitement des carcinomes vésicaux, bronchiques et pancréatiques. Les effets indésirables de la gemcitabine sont bien décrits, d’incidence et de gravité variable. Nous rapportons ici le cas d’une patiente présentant une toxicité rare de la gemcitabine mais dont la gravité potentielle invite à une attention particulière. Observation Une patiente de 65 ans était atteinte d’un adénocarcinome pancréatique localement avancé. Après une duodénopancréatectomie céphalique, elle bénéficiait de six cycles de chimiothérapie adjuvante par gemcitabine 1000 mg/m2 , 3 semaines sur 4 avec une bonne tolérance initiale. Au 5e jour de la 6e cure, elle se présentait dans un tableau d’asthénie intense associée à une dyspnée d’effort inhabituelle et à une prise de poids de 8 kg. L’examen clinique objectivait une pression artérielle élevée à 215/100 mmHg, une saturation en air ambiant à 98 %, une apyrexie. L’examen du tégument retrouvait une pâleur cutanéomuqueuse prononcée, un purpura infiltré aux membres inférieurs et d’importants œdèmes prenant le godet aux chevilles. Le bilan biologique retrouvait : une anémie à 6,9 g/dL normochrome macrocytaire (VGM à 102) régénérative (réticulocytes à 13 5000)

de type hémolytique (haptoglobine effondrée, LDH à 4 N, bilirubine libre augmentée) non autoimmune (test de Coombs direct négatif) avec 2,5 % de schizocytes, une thrombopénie à 47 000/mm3 et une lymphopénie à 520/mm3 sans neutropénie (2210/mm3 ). Il existait une insuffisance rénale aiguë (créatinine à 140 ␮mol/l, DFG à 47 mL/min) avec hématurie >100 000/mL sans leucocyturie, sans protéinurie ni obstacle. Le diagnostic de microangiopathie thrombotique (MAT) de type syndrome hémolytique et urémique atypique était suspecté et confirmé par une ponction biopsie rénale. Celle-ci retrouvait des stigmates de MAT glomérulaire avec des lésions de mésangiolyse et des pseudocroissants. L’imputabilité de la gemcitabine était retenue sur des données extrinsèques (critères chronologiques) et intrinsèques après élimination des autres diagnostics (négativité de l’activité anti-ADAMTS 13, pas d’argument pour une évolutivité de la néoplasie pancréatique). Malgré l’arrêt de la gemcitabine et l’instauration rapide d’une pentathérapie antihypertensive, l’évolution était marquée par : (i) la persistance de stigmates d’hémolyse, (ii) la dégradation progressive de la fonction rénale (créatinine à 220 ␮mol/l, DFG à 30 mL/min) (iii) l’absence de normalisation de la pression artérielle. La patiente bénéficiait de 3 injections d’eculizumab 600 mg à 1 semaine d’intervalle. L’évolution était alors favorable avec une régression des stigmates d’hémolyse et un contrôle satisfaisant de la pression artérielle sous pentathérapie. Discussion La MAT induite par la gemcitabine est une pathologie rare avec une incidence estimée entre 0,015 % et 1,4 % [1,2], dont la gravité peut mettre en jeu le pronostic vital à court terme et atteindre jusqu’à 50 % de mortalité. Le mécanisme physiopathologique est mal connu, s’articulant autour de lésions vasculaires endothéliales ou à travers une médiation immunologique. Aucun facteur favorisant n’a encore été décrit. La durée moyenne sous gemcitabine était de 5,8 mois [3] soit une dose cumulative médiane de 20 000 mg/m2 ([2450 ; 48 000]). Aucune relation dose effet n’a été décrite. Le diagnostic de certitude de la MAT est porté par la ponction biopsie rénale qui retrouve des stigmates de microangiopathie glomérulaire. Bien qu’il n’existe pas de consensus, l’arrêt de la gemcitabine est impératif. La plasmaphérèse ou la corticothérapie à forte dose sont des traitements fréquemment utilisés en première intention. En cas d’échec, le rituximab ou l’éculizumab peuvent être envisagées. Conclusion Si la gemcitabine est une source classique de myélosuppression et de dysfonction rénale, l’apparition d’une anémie, d’une thrombopénie, d’une dégradation de la fonction rénale ou d’une hypertension artérielle doit faire rechercher une MAT. Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. Références [1] Fung MC, Storniolo AM, Nguyen B, Arning M, Brookfield W, Vigil J. A review of hemolytic uremic syndrome in patients treated with gemcitabine therapy. Cancer 1999;85:2023–32. [2] Muller S, Schutt P, Bojko P, Nowrousian MR, Hense J, Seeber S, et al. Hemolytic uremic syndrome following prolonged gemcitabine therapy: report of four cases from a single institution. Ann Hematol 2005;84:110–4. [3] Saif MW, McGee PJ. Hemolytic-uremic syndrome associated with gemcitabine: a case report and review of literature. JOP 2005;6:369–74. http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2017.03.304 CA187

Microangiopathie thrombotique, thromboses artério-veineuses et cancer

Q. Quelven ∗ , B. Henriot , E. Le Mouel , B. Cador , A. Perlat , P. Jego Médecine interne, CHU de Rennes, Rennes, France ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (Q. Quelven)

75e Congrès franc¸ais de médecine interne – Brest, 14, 15 et 16 juin 2017 / La Revue de médecine interne 38S (2017) A110–A225

Introduction L’association « cancer et thrombose » du fait d’un état inflammatoire et d’hypercoagulabilité systémique est bien connue. Par ailleurs, l’apparition d’une micro-angiopathie thrombotique (MAT) secondaire à une néoplasie est connue mais moins rapportée. Nous vous présentons deux cas conduisant à la découverte d’un cancer. Les suites vont se compliquer d’une microangiopathie thrombotique avec activité ADAMTS 13 conservée. L’évolution va être fatale dans les deux cas malgré l’instauration d’une thérapie antinéoplasique adaptée. Observation Un homme de 43 ans, admis pour une thrombose veineuse profonde des 2 membres inférieures associée à une embolie pulmonaire sous-segmentaire, présentera deux AVC ischémiques sous anticoagulation curative. Le diagnostic de cancer colique est suspecté au PET-scanner puis confirmé au coloscanner. Le patient va bénéficier d’une hémi-colectomie en urgence : le diagnostic d’adénocarcinome colique avec envahissement ganglionnaire est confirmé. Le patient va présenter une MAT en postopératoire. En attendant le dosage de l’ADAMTS13, le patient va bénéficier d’échange plasmatique avec une efficacité transitoire. Le patient décédera d’AVC ischémiques itératifs malgré deux cures de chimiothérapie et une anticoagulation curative. Une patiente de 53 ans présente plusieurs thromboses veineuses bilatérales en dépit d’une anticoagulation efficace successive par rivaroxaban, fondaparinux puis énoxaparine relayé par un traitement anti-vitamine K. L’évolution se complique d’une embolie pulmonaire puis d’une MAT avec une anémie hémolytique, présence de schizocytes et une thrombopénie périphérique. La recherche de thrombopénie induite par l’héparine a été exclue. La biopsie ostéo-médullaire met en évidence un adénocarcinome bronchique muté ALK multimétastatique. Elle décédera rapidement des suites de plusieurs AVC ischémique malgré une anticoagulation curative par héparine de bas poids moléculaire et une thérapie ciblée par crizotinib. Discussion Différentes hypothèses physiopathologiques ont été proposées. L’une d’elle suppose la présence de micro-emboles tumoraux responsable d’une obstruction de la microcirculation, secondairement responsable de l’activation plaquettaire et de la lyse érythrocytaire. Conclusion Il s’agit donc de deux patients ayant présenté une MAT dans un contexte d’évènements thombo-emboliques récidivants artériels et veineux sous traitement adapté. Le pronostic est particulièrement sombre dans ces 2 cas malgré une thérapie introduite rapidement après le diagnostic (thérapie ciblée pour l’adénocarcinome bronchique muté et chimiothérapie classique pour le cancer du côlon) et une anticoagulation. D’autres alternatives pourraient se discuter comme une corticothérapie associée. En revanche, les échanges plasmatiques ne sont pas recommandés et s’avèrent peu efficace. Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. Pour en savoir plus Lechner K, Obermeier HL. Cancer related microangiopathic hemolytic anemia: clinical and laboratory features in 168 reported cases. Medicine 2012;91:195–205. Oberic L, Buffet M, Schwarzinger M. Cancer awareness in atypical thrombotic microangiopathies. Oncologist 2009; 14:769–79. Shao B, Wahrenbrock MG, Yao L. Carcinoma mucins trigger reciprocal activation of platelets and neutrophils in a murine model of Trousseau syndrome. Blood 2011;118:4015–23. http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2017.03.305 CA188

Des orteils pourpres révélant un POEMS syndrome P. Decker 1 , J. Galland 1,∗ , S. Mohamed 1 , J. Risse 2 , D. Wahl 2 1 Médecine interne, CHRU de Nancy, Nancy, France 2 Médecine vasculaire, CHRU de Nancy, Nancy, France ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (J. Galland)

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Introduction Le POEMS syndrome est une maladie systémique rare, caractérisée par une polyneuropathie sensitivomotrice, une gammapathie monoclonale, des lésions osseuses ostéocondensantes, une organomégalie, des signes cutanés et des troubles endocriniens. Les thromboses artérielles et veineuses sont rarement décrites dans cette pathologie (20 % des cas) et atteignent préférentiellement la macrocirculation. Nous rapportons le cas atypique d’un patient atteint de POEMS syndrome révélé par une atteinte microcirculatoire de type « orteil bleu ». Observation Un homme de 67 ans consultait en février 2015 pour l’apparition de deux orteils bleus (1er et 3e orteils du pied gauche), sans notion de facteur déclenchant. Il n’avait pas d’antécédent particulier hormis un accident ischémique transitoire en 2014 et une gynécomastie. Le patient ne présentait pas de facteurs de risque cardiovasculaires. L’interrogatoire retrouvait la présence de paresthésies distales du pied gauche depuis deux ans, une douleur osseuse pré tibiale gauche et un acrosyndrome paroxystique au froid. Il existait des adénopathies cervicales infracentimétriques bilatérales, une mélanodermie et des télangiectasies du visage. L’écho Doppler artériel des membres inférieurs et de l’aorte ne montrait pas de plaque athéromateuse. Le bilan cardiologique ne retrouvait pas de cardiopathie emboligène (ECG, ETT, IRM cardiaque). L’exploration des anomalies lipidiques et la glycémie à jeun étaient normales. Il n’existait pas de syndrome inflammatoire biologique (CRP 1,8 mg/L). Le fond d’oeil retrouvait un oedème papillaire bilatéral sans cristaux évocateurs d’embols de cholestérol. L’hémogramme était sans particularité. L’électrophorèse des protéines sériques montrait une discrète gammapathie monoclonale à IgA (type alpha 2 lambda 2) avec conservation des immunoglobulines physiologiques. Le dosage des chaines légères sériques retrouvait une légère élévation des chaînes légères lambda à 31,3 mg/L et kappa à 29,7 mg/L avec un rapport à 0,95. Le bilan immunologique avec ANCA, anticorps antiphospholipides et recherche de cryoglobulinémie revenait négatif. L’homocystéinémie était normale à 14,2 ␮ mol/L. Un scanner thoraco-abdominopelvien objectivait des lésions ostéocondensantes bilatérales des ailes iliaques et de la 6e côte droite avec composante lytique, ainsi que des lésions ostéocondensantes des corps vertébraux L3 et L5. Le Pet-scanner confirmait la présence de lésions osseuses hypermétaboliques iliaques, vertébrales et costale et d’adénopathies modérément hypermétaboliques. Le myélogramme sternal montrait une plasmocytose modérée à 2 %. Une PBO réalisée sur la lésion hypermétabolique iliaque retrouvait une infiltration osseuse plasmocytaire monotypique lambda en faveur d’un plasmocytome. Le dosage du vascular endothelial growth factor (VEGF) sérique revenait élevé à 2900 pg/mL et permettait d’étayer le diagnostic de POEMS. Les douleurs du pied gauche et la présence de troubles évoquant un syndrome dysautonomique (troubles mictionnels, ralentissement du transit et hypotension orthostatique) étaient rattachés à une neuropathie périphérique, sans confirmation électrique. Un traitement antiagrégant plaquettaire était mis en place. Un traitement par melphalan et dexamethasone était initié (12 cycles) permettant l’obtention d’une réponse complète avec diminution du VEGF sérique à 750 pg/mL après 4 cycles et normalisation après 7 cycles (470 pg/mL). Discussion L’atteinte thrombotique microcirculatoire dans le POEMS n’est pas décrite dans la littérature. L’atteinte thrombotique habituelle se fait au niveau de plus gros vaisseaux (AVC, ischémie myocardique). Dans ce dossier, nous avons éliminé toute thrombose des gros vaisseaux et une origine emboligène. La physiopathologie des thromboses dans le POEMS est complexe et probablement mixte. Elle peut survenir sur une thrombocytose et/ou une polyglobulie associée, ce qui n’était pas le cas chez notre patient. Le VEGF, dont la sécrétion est stimulée par les chaines légères lambda monoclonales, a une action pro-coagulante. Dans notre observation, le taux de VEGF est élevé, à l’origine du statut prothrombotique. Il serait intéressant de corréler le taux de VEGF et la localisation de l’atteinte thrombotique (microcirculatoire versus macrocirculatoire).