Revue des Maladies Respiratoires (2014) 31, 237—247
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ARTICLE ORIGINAL
Motivations et freins à la greffe chez patients, aidants et médecins dans la mucoviscidose Perceptions of cystic fibrosis patients, patient relatives and physicians: Barriers or motivations to lung transplantation C. Marchand a,∗, L. Salhi a, A. Le Rhun b, S. Ravilly c, I. Danner-Boucher d, R. Gagnayre a, V. David d a
EA-3412, laboratoire de pédagogie de la santé, université Paris-13, Sorbonne Paris-Cité, 74, rue Marcel-Cachin, 93019 Bobigny cedex, France b Unité d’éducation thérapeutique du patient, CHU de Nantes, 44093 Nantes, France c Vaincre La Mucoviscidose, 75013 Paris, France d Centre de ressources et de compétences de la mucoviscidose, CHU de Nantes, 44093 Nantes, France Rec ¸u le 26 f´ evrier 2013 ; accepté le 11 juin 2013 Disponible sur Internet le 3 septembre 2013
MOTS CLÉS Transplantation pulmonaire ; Représentation ; Patient ; Aidant ; Médecin ; Mucoviscidose ; Carte conceptuelle
∗
Résumé Introduction. — Les objectifs de cette étude sont de décrire les représentations de trois acteurs impliqués dans la décision de transplantation pulmonaire dans la mucoviscidose et d’identifier celles qui représentent pour eux des motivations ou des freins à la transplantation. Méthode. — Des entretiens, avec élaboration d’une carte conceptuelle, ont été réalisés auprès de 30 patients, 26 aidants et 27 médecins. Le degré d’acceptation de la greffe au moment des interviews a été mesuré. Résultats. — Les motivations et les freins concernent la période pré-, péri- et posttransplantation. L’analyse révèle des similitudes concernant les risques et les bénéfices de la transplantation, mais aussi des différences témoignant de préoccupations spécifiques à chaque type d’acteurs. Les patients et les aidants expriment de nombreuses peurs dans leur carte et les médecins des difficultés. Conclusions. — L’étude montre l’intérêt de mieux connaître les représentations des différents acteurs afin de diminuer certains freins à la transplantation. Elle suggère de mettre en place des actions éducatives et de soutien auprès des patients et des aidants en amont de la
Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (C. Marchand).
0761-8425/$ — see front matter © 2013 SPLF. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. http://dx.doi.org/10.1016/j.rmr.2013.06.004
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C. Marchand et al. transplantation, ainsi que des actions de formation continue et de supervision auprès des médecins. © 2013 SPLF. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
KEYWORDS Lung transplantation; Perception; Patient; Patient relative; Physician; Cystic fibrosis; Concept map
Summary Introduction. — The aims of this study are to describe qualitatively the perceptions of three groups involved in the cystic fibrosis transplant decision, looking for similarities and differences between groups, and to identify those that act as motivations or barriers to transplantation. Methods. — Thirty patients, 26 patient relatives and 27 physicians were interviewed, and concept maps were constructed from those interviews. Their degree of transplant acceptance at the time of the interview was measured. Results. — There were motivations and barriers in the pre-, peri- and post-transplant period. Analysis revealed similar perceptions regarding the risks and benefits of transplantation, but also different perceptions in the specific concerns of each group. Patients and patient relatives expressed many questions and fears in their concept maps, and physicians expressed difficulties. Conclusions. — This study highlights the value of better understanding the perceptions of patients, relatives and physicians, in order to remove some of the barriers to transplantation. It also demonstrates the benefits of education and support activities for patients and patient relatives prior to transplantation, and continuing education and supervision for physicians. © 2013 SPLF. Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
Introduction La transplantation pulmonaire constitue une possibilité thérapeutique pour les patients atteints de mucoviscidose ayant développé une insuffisance respiratoire chronique grave. Elle peut permettre au patient, quand elle se déroule bien, une meilleure qualité de vie avec reprise d’une vie presque normale des points de vue familial, professionnel et socioculturel. La possibilité de bouger et de faire une activité sportive sans avoir la sensation d’un essoufflement constant est également largement relatée par les patients transplantés. En 2010, 440 patients atteints de mucoviscidose vivaient avec un organe greffé. La majorité a été greffée après 2004. Soixante-quinze patients ont été greffés en 2010 dans un des huit centres de transplantation pulmonaire spécialisés pour la mucoviscidose [1]. Bien qu’en constante augmentation, le nombre de transplantations pulmonaires par an dépend en partie de la disponibilité des greffons. Cependant, d’autres facteurs liés aux acteurs impliqués dans la transplantation peuvent aussi influencer la décision de transplantation. Le premier acteur est le médecin qui annonce au patient la nécessité d’une transplantation. Si d’un côté les médecins qualifient parfois la décision de transplantation comme facile compte tenu du mauvais état de santé du patient [2], les risques liés à l’intervention, l’incertitude quant aux chances de réussite, mais aussi le moment de décider du recours à la transplantation peuvent les freiner pour la proposer au patient. Une fois la proposition faite, c’est au patient de décider s’il accepte ou refuse ce projet de greffe. Dans cette perspective, une étude canadienne a exploré les besoins des patients concernant cette prise de décision. À partir des résultats de cette étude un outil d’aide à la décision a été élaboré [3]. En complément de l’éducation et des conseils qui sont déjà prodigués aux patients au Canada, cet outil améliore leurs connaissances ainsi que le réalisme de leurs attentes par rapport
aux bénéfices et aux risques liés à l’intervention et en postgreffe [4]. Enfin, l’aidant naturel ou la personne ressource qui accompagne au quotidien le patient dans les décisions en lien avec sa maladie peut influer sur sa décision [5]. Ces trois acteurs interagissent au cours du processus de décision en fonction des représentations qu’ils ont de la transplantation pulmonaire. Cet article vise à décrire parallèlement les représentations des différents acteurs impliqués dans la décision de transplantation (patients, aidants et médecin), au moment de l’annonce de la nécessité de recourir à la transplantation pulmonaire. Il s’agit ensuite d’identifier parmi ces représentations les éléments constituant pour chaque acteur des motivations ou des freins à la transplantation et d’établir un lien entre ces éléments et leur niveau d’acceptation de la transplantation. Cette étude n’explore pas directement l’influence de ces représentations sur la prise de décision des différents acteurs concernant la transplantation.
Méthode Il s’agit d’une étude descriptive qualitative menée dans les différents centres de prise en charge des patients atteints de mucoviscidose sur le territoire franc ¸ais. La recherche a été menée après avoir rec ¸u l’approbation du Comité consultatif sur le traitement de l’information en matière de recherche dans le domaine de la santé (CCTIRS) et du CHU de Nantes. Trente et un centres de prise en charge des patients atteints de mucoviscidose, dénommés centre de ressources et de compétences de la mucoviscidose (CRCM), ont été sollicités par courrier pour participer à l’étude. Les médecins acceptant d’y participer ont ensuite proposé l’étude à leurs patients. Les patients inclus devaient avoir eu une première consultation au cours de laquelle la transplantation leur était proposée qu’ils aient ou pas encore réalisé leur bilan pré-transplantation. Une fois l’étude acceptée par le
Transplantation pulmonaire et mucoviscidose patient, ce dernier devait identifier une personne ressource pour y participer également. Un formulaire de consentement était remis à chaque participant. L’outil de recueil des représentations est la carte conceptuelle, utilisée comme outil de recherche en éducation thérapeutique du patient depuis plusieurs années [6—8]. Construite à partir d’un concept central « greffe », la carte conceptuelle est une représentation graphique d’un ensemble de connaissances et représentations reliées entre elles par des liens explicités. Elle permet d’explorer en profondeur la nature et l’organisation des états mentaux qui composent la structure cognitive d’une personne à un moment donné. Élaborée avec l’interviewé au cours d’un entretien individuel, la carte conceptuelle permet à l’interviewé de visualiser ses propres connaissances et représentations ainsi que ses éventuelles lacunes. La technique d’entretien utilisée est non directive sur le contenu mais vise en permanence l’explicitation des propos de l’interviewé. Elle est basée sur l’écoute active et les capacités de reformulation de l’intervieweur. Neuf enquêteurs, compétents en éducation thérapeutique du patient, ont suivi une formation de 12 heures sur la technique d’entretien et l’élaboration d’une carte conceptuelle dans le cadre de cette étude. Afin d’harmoniser au mieux les recueils d’information, un guide leur a été remis. Les étapes suivantes ont été réalisées à chaque entretien : • recueil d’informations sur l’interviewé : âge, sexe, estimation des échanges au sujet de la transplantation entre les différents acteurs (patients et aidants), lien avec le patient (aidants), l’appartenance ou non à un centre transplanteur et le nombre de transplantations proposées (médecins) ; • positionnement de l’interviewé entre deux extrêmes sur une échelle type analogique de 0 à 10, pour estimer son niveau d’acceptation de la greffe en début d’entretien : se sentir « plutôt prêt » ou « pas du tout prêt » pour la greffe pour les patients et les aidants ; faire une proposition de greffe « plutôt volontiers » ou « avec retenue » pour les médecins ; • réalisation d’une carte conceptuelle à partir du concept central « greffe », seul concept inscrit dans une bulle au centre d’une feuille format A3. À la fin de cette étape, l’intervieweur a relu l’ensemble de la carte avec le patient pour s’assurer de sa conformité aux propos du patient et vérifier que celui-ci ne souhaitait plus rien ajouter ; • identification par l’interviewé des éléments de la carte conceptuelle constituant pour lui des freins (surligné en orange sur sa carte) ou des motivations (surligné en vert) à la greffe (Fig. 1). Les entretiens d’une durée moyenne de 40 minutes ont été enregistrés. Les cartes conceptuelles ont été retranscrites avec le logiciel Inspiration® en respectant l’organisation et le contenu des cartes réalisées en présence des interviewés. La qualité des informations a été vérifiée avec les enregistrements par un chercheur indépendant. Les cartes conceptuelles ont ensuite été analysées selon une approche d’analyse qualitative [9] : découpage des cartes conceptuelles en unité de sens (deux concepts reliés par un lien explicité), élaboration progressive d’une grille par l’identification de domaines et de catégories d’analyse
239 (Tableau 1). Quatre domaines ont émergé de l’analyse des cartes : la période pré-transplantation, l’intervention elle-même, la période post-transplantation, et un domaine « autre » comprenant différentes catégories d’informations. Toutes les cartes conceptuelles ont été analysées à l’aide de cette grille par deux chercheurs indépendants pour tester la fiabilité de la codification. Les discordances ont été discutées afin de rechercher un consensus. En l’absence d’accord sur l’analyse d’une unité de sens, et afin d’éviter les interprétations erronées, cette unité de sens était classée en résidus, non analysable. La grille a ensuite servi à analyser plus spécifiquement : les freins et les motivations identifiés par les différents acteurs sur leur carte conceptuelle, les peurs exprimées par les patients et les aidants, les difficultés évoquées par les médecins, les questionnements et les connaissances erronées retrouvés dans les cartes. Les extraits de verbatim de chaque acteur sont présentés dans les résultats par une lettre (P : patients, A : aidants ; M : médecins) suivie d’un numéro correspondant à chaque acteur.
Résultats Dix-neuf centres sur 31 se sont impliqués dans l’étude. La population était constituée de : 30 patients adultes d’âge moyen de 29 ans (18—48) dont 18 hommes et 12 femmes, 26 aidants de 47 ans d’âge moyen (19—64) dont 17 femmes et neuf hommes, 17 parents, sept conjoints, un frère et un ami, 27 médecins d’âge moyen 46 ans (33—63) dont 16 femmes, 11 hommes. Onze patients sur 20 avaient réalisé leur bilan pré-greffe au moment des entretiens (l’information n’a pas été recueillie chez 10 patients). Dix médecins travaillaient dans un centre mixte à la fois CRCM et centre transplanteur. Un tiers des médecins avait proposé moins de cinq greffes, un tiers entre cinq et 20 greffes et un tiers plus de 20. Un peu moins de la moitié des patients (14/30) estimaient les échanges avec leurs proches plutôt fréquents alors qu’ils étaient 18/26 (69 %) aidants à les estimer fréquents. En revanche les patients étaient plus nombreux (57 %) à estimer fréquents les échanges avec leur médecin contre seulement 15 % des aidants.
Description des représentations des patients, des aidants et des médecins Les trois types de public se sont exprimés dans les différents domaines (Tableau 2). Concernant la période pré-transplantation : les principaux thèmes abordés par plus des deux tiers des acteurs confondus concernent l’état de santé du patient, l’attente et le greffon. Les patients sont plus nombreux que les autres à s’exprimer sur le handicap (57 %) : « Les sorties, je ne peux pas y aller » (P1). « Je suis moins autonome, pour les tâches ménagères, je ne peux pas me faire à manger tout seul tous les jours. . . » (P8). Les aidants évoquent davantage les répercussions familiales de cette période (58 %) :
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C. Marchand et al.
Figure 1. Extrait d’une carte conceptuelle élaborée avec un patient. Pour des facilités de lecture un extrait d’une carte réalisée avec un patient est présenté. Les chiffres 1 à 4 indiquent les quatre premiers mots exprimés par le patient. Les cadres représentent les motivations (surligné en vert par le patient sur sa carte) et les cercles en gras les freins (surligné en orange par le patient sur sa carte) identifiés par le patient.
« J’aimerais avoir du temps pour m’occuper de lui, mais je dois travailler » (A2). « Ce sera loin, à chaque consultation trois heures de route pour 30 minutes de visite » (A23).
« Implique la logistique pour le temps de la greffe, savoir quelle structure va pouvoir nous accueillir » (A24). « Peur pour mon entourage, comment vont ils gérer ? » (P18).
En ce qui concerne les médecins, ils insistent plus particulièrement sur la décision qui leur revient (59 %) ainsi que sur la préparation du patient (59 %) :
Concernant la période post-transplantation : ce sont les projets de vie, les améliorations de la santé, mais aussi l’absence de guérison souvent associée à la présence d’une « autre maladie » qui sont évoquées majoritairement par les trois acteurs. Les répercussions familiales sont surtout exprimées par les aidants alors que quelques médecins non impliqués dans le suivi post-greffe identifient les conséquences que cette période peut avoir sur leur rôle :
« C’est une décision difficile pour le médecin qui pense que l’état du patient est suffisamment grave. . . » (M2). « La préparation la meilleure possible, très à l’avance (2 ans) pour avoir le temps de se préparer psychologiquement » (M10). Notons que les patients et les aidants n’envisagent pas, ou très peu, les répercussions que peut avoir cette période sur l’équipe soignante. Concernant l’intervention, les représentations des trois acteurs sont assez similaires. À noter qu’aucun médecin n’évoque les répercussions que pourrait avoir cette période sur la famille, thème évoqué par les aidants et les patients :
« Permettrait de se sentir mieux en famille » (A3), « Il y a après. . . ¸ ca va être (peut être) une grosse organisation » (A4), « C’est un soulagement pour l’équipe, comme travail accompli et un poids en moins. . . » (M3), « Après la greffe. . . nous devenons prestataire, nous ne sommes plus les médecins traitants pour le suivi de la greffe » (M7).
Transplantation pulmonaire et mucoviscidose Tableau 1
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Grille d’analyse des cartes conceptuelles.
Domaine
Catégories
Description
Période pré-transplantation
Attente/greffon
L’attente (liste) et ses risques, la notion de don d’organe, de corps étranger (mort d’un donneur, respect) Évocation du mauvais état de santé (risque de décès), ou encore de la nécessité d’être en bon état de santé pour la greffe Organisation familiale que nécessite la préparation à la greffe, le point de vue et l’état d’esprit des aidants Émotions liées à la greffe chez le patient, acceptation ou refus du patient Importance de la décision médicale et du partage avec le patient, difficulté de l’annonce Préparation psychologique et physique avant la greffe Les répercussions de la décision pour les soignants Le handicap ou les limites liés à l’état de santé actuel
État de santé
Répercussions familiales Décision patient Décision médicale Préparation patient Répercussions soignants Handicap Intervention
Indication Risques Réveil Répercussions patients Répercussions familiales
Période post-transplantation
Amélioration santé Autre maladie
Espérance de vie Projet de vie
Changements Répercussions familiales Répercussions soignants Domaine « autre »
Équipe/CRCM
Recherche Information/éducation Questionnements Communication
Explications sur l’intervention, les indications et les conditions Les risques liés à l’intervention : décès, complication, rejet, échec, inconnu Le réveil après l’intervention, la douleur, le postopératoire immédiat Conséquences de l’hospitalisation : professionnelles, familiales Organisation, faire face à la douleur, souffrance en général Notion de réussite, d’amélioration en générale et spécifiquement : état de santé, respiration, traitement Absence de guérison, existence d’une autre maladie avec des traitements et les effets secondaires, la nécessité d’un suivi Augmentation de l’espérance de vie Notion de renaissances, de nouvelle vie pour laquelle il est possible de faire des projets de fac ¸on plus autonome et d’avoir une meilleure qualité de vie : professionnels, sociaux, familiaux, de vacances ou voyage Les changements attendus ou questionnés : psychologiques, physiques, intellectuels, de comportements Les conséquences familiales en termes d’organisation, mais aussi psychologiques et dans la relation, financières La satisfaction ou le soulagement, mais aussi le changement de rôle La réputation, l’expérience du CRCM, la sécurité, la relation patient/soignant, la relation avec centre de transplantation L’état de la recherche, les autres traitements, les perspectives, l’espoir Les informations du patient ou de l’entourage, leurs sources, l’éducation, leurs expériences Les questions des acteurs dans différents domaines, les manques ou insuffisances, les besoins La présence ou l’absence de communication (tabou) autour de la greffe (entre les différents acteurs)
CRCM : centre de ressources et de compétences de la mucoviscidose.
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C. Marchand et al.
Tableau 2 Analyse des cartes conceptuelles par domaines et par catégorie selon les différents acteurs (en pourcentage d’acteurs). Patients (n = 30) Période pré-transplantation Nombre d’acteurs concernés Attente/greffon État de santé Répercussions familiales Décision patient Décision médicale Préparation du patient Répercussions soignants Handicap Intervention Nombre d’acteurs concernés Intervention/indication Risque Réveil/douleur Répercussions patients Répercussions familiales Période post-transplantation Nombre d’acteurs concernés Amélioration de la santé Autre maladie Espérance de vie Projet de vie Changements Répercussions familiales Répercussions soignants Domaine « autre » Nombre d’acteurs concernés CRCM/équipe Recherche Information/éducation Questionnements Absence de communication Présence de communication
Aidants (n = 26)
Médecins (n = 27)
29 (97 %)
26 (100 %)
27 (100 %)
16 22 3 17 5 6 1 17
17 22 15 10 1 3 0 10
22 22 6 17 16 16 10 9
(53 %) (73 %) (10 %) (57 %) (17 %) (20 %) (3 %) (57 %)
(65 %) (85 %) (58 %) (38 %) (4 %) (12 %) (0 %) (38 %)
(81 %) (81 %) (22 %) (63 %) (59 %) (59 %) (37 %) (33 %)
27 (90 %)
26 (100 %)
26 (96 %)
23 24 7 11 4
22 20 3 9 10
23 23 4 7 0
(77 %) (80 %) (23 %) (37 %) (13 %)
(85 %) (77 %) (12 %) (35 %) (38 %)
(85 %) (85 %) (15 %) (26 %) (0 %)
30 (100 %)
25 (96 %)
27 (100 %)
25 22 14 27 13 4 1
20 15 11 20 13 11 0
20 24 17 27 14 4 6
(83 %) (73 %) (47 %) (90 %) (43 %) (13 %) (3 %)
(77 %) (58 %) (42 %) (77 %) (50 %) (42 %) (0 %)
(74 %) (89 %) (63 %) (100 %) (52 %) (15 %) (22 %)
27 (90 %)
23 (88 %)
22 (85 %)
9 2 15 20 5 6
8 4 9 21 7 0
10 4 14 14 3 5
(30 %) (7 %) (50 %) (67 %) (17 %) (20 %)
(31 %) (15 %) (35 %) (81 %) (27 %) (0 %)
(37 %) (15 %) (52 %) (52 %) (11 %) (19 %)
CRCM : centre de ressources et de compétences de la mucoviscidose.
Dans le domaine « autre » on retrouve principalement les questionnements des différents acteurs mais aussi nombreux éléments en lien avec l’information sur la transplantation (les informations rec ¸ues par les acteurs et leurs sources) : « Elle a rencontré un patient muco-greffé pour qui l’opération et la récupération se sont bien passées, qui a repris une vie normale, qui fait ce qu’on ne peut pas faire » (A23). Enfin, les trois acteurs, même s’ils ne sont pas nombreux, soulignent spontanément dans leur carte conceptuelle le manque de communication autour de la greffe. Plus de la moitié des patients et des aidants ont exprimé des peurs dans leurs cartes conceptuelles (Tableau 3). Ces peurs sont retrouvées dans tous les domaines. Elles concernent majoritairement l’intervention chez les patients, la
période pré-greffe et l’intervention chez les aidants. Les médecins évoquent de leur côté des difficultés principalement sur la période pré-greffe : « Cela veut dire pour moi accepter et supporter le moment où il est vraiment mal, cela peut engendrer des difficultés sur le plan émotionnel » (M5), « C’est trop difficile pour moi de coordonner les greffons, car organisation pesante. . . stress émotionnel et physique, c’est l’astreinte de coordination de greffe, qui nous pollue, qui est source de gros stress » (M10), « Provoque des difficultés pour moi pour aborder le sujet de la greffe, c’est difficile pour moi » (M11). À noter que dans le domaine « autre », les peurs ou les difficultés sont liées à des questionnements chez deux patients, trois aidants et deux médecins. Enfin, très souvent les peurs
Transplantation pulmonaire et mucoviscidose Tableau 3
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Nombre de patients et aidants ayant exprimé des peurs et nombre de médecins ayant exprimé des difficultés.
Nombre total d’acteurs concernés Période pré-transplantation Intervention Période post-transplantation Domaine « autre »
Peurs des patients (n = 30)
Peurs des aidants (n = 26)
Difficultés des médecins (n = 27)
18 (60 %) 9 14 6 4
17 (65 %) 9 9 2 4
12 (44 %) 10 2 2 3
ou les difficultés exprimées constituent des freins pour les acteurs (surlignés en orange par les acteurs dans leurs cartes). C’est le cas chez 13/18 patients, dix sur 17 aidants et cinq sur 12 médecins : « La peur, exemple du rejet, de l’inconnu, comme la douleur » (P11). « C’est quand même une grosse opération à risque, ¸ ca fait peur, me retrouver seule, que ¸ ca se passe mal, qu’il souffre de douleur » (A18). « Provoque des questions, quand le dire, comme le moment de l’annone, ce qui est difficile c’est l’information sur l’échec post-greffe » (M9). On retrouve des questionnements dans les cartes de la majorité des acteurs. Ces questionnements concernent les différents domaines. Chez les patients et les aidants les questions portent principalement sur l’intervention et la période post-transplantation : « J’ai des questions sur les risques. . . si ¸ ca marche ou pas » (P5) « Inconnu par rapport à la douleur » (P3) « Comment ¸ ca se passe pour les traitements après. . . je ne connais pas les effets secondaires » (P9), « J’aimerais savoir comment l’opération se passe. . . la durée » (A5) « Savoir quelles structures peuvent nous accueillir pour l’hébergement » (A2), « Comment préparer le retour à la maison ? Je ne sais pas du tout comment ¸ ca se passe, comme les mesures à prendre » (A1). Chez les médecins les questions concernent un peu plus souvent la période pré-greffe, le bon moment pour la décision et la qualité de la préparation du patient : « Je ne sais pas si on les prépare bien, psychologiquement » (M1). « La question se pose, quel est le bon moment ? » (M21). Des connaissances erronées ont été relevées dans les cartes de 14 patients (47 %), 11 aidants (42 %) et quatre médecins (15 %). La plupart portent sur la période post-transplantation, en particulier sur les traitements (8 patients, 2 aidants) : « Il y a des médicaments anti-rejet, deux mois, des effets secondaires comme la poitrine gonflée » (P22).
« C’est une guérison, probablement moins de médicaments » (A3). « (la greffe) débouche sur l’arrêt des traitements contraignants comme kiné, aérosols » (M8).
Les motivations et les freins à la transplantation relevés par les différents acteurs Des motivations et des freins sont identifiés par les trois acteurs dans chaque domaine (Tableau 4). Les motivations les plus fréquentes sont liées aux améliorations attendues et aux perspectives de projet pour le patient en période post-greffe : « Permet l’autonomie médicale » (P18). « C’est la renaissance, la vie » (A1). « Entraîne une amélioration respiratoire » (M8). Plus de la moitié des aidants (62 %) identifient aussi des motivations liées à la période pré-greffe comparativement aux deux autres acteurs : « Il faut donner un greffon, on ferait de même avec nos enfants, ils ont la carte de donneurs » (A9). « En ce moment il dégringole » (A18). Les principaux freins concernent pour tous les acteurs les risques liés à l’opération. Les médecins sont plus nombreux (67 %) que les autres acteurs à souligner des freins en lien avec la période pré-greffe, ainsi qu’avec la période postgreffe (56 %) : « Pour moi l’échec c’est le décès sur liste » (M3). « C’est un traumatisme psychologique important » (M12). « Il y a les problèmes majeurs à distance. . . au niveau affectif, au niveau professionnel » (M21). « Entraîne des difficultés relationnelles » (M10).
Niveau d’acceptation de la transplantation L’analyse des scores obtenus sur les échelles analogiques (de 0 à 10) révèle que les différents acteurs se sentent plutôt en disposition pour la transplantation, de 7 à 10 sur l’échelle. Dix-sept patients (57 %) et 20 aidants (77 %), se disent plutôt prêts et 16 médecins (59 %) proposent la greffe « plutôt volontiers ». En lien avec ces résultats, les différents acteurs
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Tableau 4 Répartition par domaine des motivations et des freins soulignés par les différents acteurs et de leurs questionnements. Patients (n = 30)
Aidants (n = 26)
Médecins (n = 27)
100 % 17 % 33 % 100 % 17 %
(30) (5) (10) (30) (5)
96 % 62 % 15 % 88 % 42 %
(25) (16) (4) (23) (11)
96 % 33 % 41 % 93 % 11 %
(26) (9) (11) (25) (3)
Nombre d’acteurs concernés Freins Période pré-transplantation Intervention Période post-transplantation Domaine « autre »
80 % 40 % 67 % 30 % 30 %
(24) (12) (20) (9) (9)
85 % 42 % 62 % 19 % 27 %
(22) (11) (16) (5) (7)
89 % 67 % 59 % 56 % 30 %
(24) (18) (16) (15) (8)
QuestionnementsNombre d’acteurs concernés Période pré-transplantation Intervention Période post-transplantation Domaine « autre »
67 % 3% 40 % 43 % 7%
(20) (1) (12) (13) (2)
81 % 23 % 42 % 50 % 15 %
(21) (6) (11) (13) (4)
52 % 30 % 7% 19 % 7%
(14) (8) (2) (5) (2)
Motivation Nombre d’acteurs concernés Période pré-transplantation Intervention Période post-transplantation Domaine « autre »
identifient davantage de motivations que de freins dans leur carte conceptuelle. Quand les acteurs hésitent (de 4 à 6 sur l’échelle), il existe peu de différence entre les motivations et les freins soulignés, alors que davantage de freins sont relevés dès lors que patients et aidants ne se sentent pas prêts et que les médecins disent proposer la greffe « avec retenue ».
Discussion L’analyse simultanée des représentations des trois acteurs impliqués dans la décision de transplantation pulmonaire montre qu’un certain nombre de ces représentations sont partagées : en particulier les risques liés à l’intervention (décès, complications) et les bénéfices possibles pour les patients après l’intervention (amélioration de la santé, projets de vie). Ces résultats sont favorables au processus de décisions partagées selon l’étude de Makoul et Clayman [10]. Cependant, quelques représentations apparaissent plus fréquemment en fonction des acteurs révélant des préoccupations plus spécifiques. C’est le cas des répercussions familiales que l’on retrouve très fréquemment dans les cartes des aidants à chaque période de la transplantation alors qu’elles sont très peu ou pas soulignées par les patients et les médecins. Pourtant certaines de ces représentations sont imprégnées d’émotions telle que la peur et sont perc ¸ues comme des freins par les aidants. Ces résultats vont dans le même sens que certaines études qui ont mis en évidence les besoins des familles et leurs difficultés d’organisation tant en période de pré-transplantation qu’après la transplantation. Ces études révèlent les besoins des patients et de leurs aidants en termes de : soutien psychologique et de communication avec l’équipe soignante, informations sur le déroulement de la transplantation et sur la période posttransplantation, soutien et compréhension de leur vécu à la suite de la greffe [11—14]. De leur côté, les médecins ont aussi des représentations qui leurs sont spécifiques : quand et comment l’annoncer au patient, comment le préparer,
les répercussions prévisibles sur l’équipe soignante de cette décision mais aussi en ce qui concerne le suivi des patients et les répercussions pour le patient après la transplantation. Nous n’avons pas retrouvé d’étude portant sur les représentations des médecins vis-à-vis de la transplantation pulmonaire. Or, ces représentations, exprimées parfois sous la forme d’un questionnement constituent des difficultés pour les médecins et sont parfois perc ¸ues comme des freins à la proposition de greffe (les répercussions d’ordre psychologique pour le patient par exemple). Si les perspectives d’avenir en termes d’amélioration de la santé et de projet de vie constituent pour l’ensemble des acteurs des motivations pour la transplantation, les risques liés à l’intervention restent le frein majeur et la principale source de peur ou d’angoisse exprimée par les acteurs. Les patients et les aidants de notre étude semblent bien connaître les risques liés à l’intervention contrairement à ce qui a été montré dans une précédente étude [2]. En revanche, les connaissances et représentations des patients et des aidants concernant la période post-transplantation semblent plus fragiles (questions et connaissances erronées relevées dans leur carte conceptuelle). L’ensemble des constats précédents incite à envisager ou renforcer les actions de soutien et d’éducation avant la transplantation qui seront à poursuivre après la transplantation. En effet, il a déjà été signalé par les patients ayant subi une transplantation pulmonaire des manques d’informations ou des informations qualifiées de trop superficielles pour leur permettre d’appréhender plus sereinement la transplantation [4]. Il est cependant probable que des informations soient délivrées aux patients sans qu’elles soient retenues, intégrées par eux [15]. D’ailleurs, plus de la moitié des patients de notre étude estiment qu’ils peuvent fréquemment communiquer avec leur médecin. Plusieurs auteurs ont par ailleurs signalé l’importance de varier les modalités d’informations en utilisant différents supports et techniques d’information afin de répondre au mieux aux besoins spécifiques de chaque patient [5]. La préparation des patients et de leurs aidants reste complexe
Transplantation pulmonaire et mucoviscidose et devrait faire appel à différents types d’intervention dans une approche interdisciplinaire, participant ainsi au processus d’empowerment des acteurs [16,17]. On peut envisager : des actions d’information et d’apprentissage pour répondre aux questions que se posent les patients et leurs aidants, et pour renforcer leurs connaissances et compétences pour gérer l’avant, le pendant et l’après greffe ; un soutien psychosocial orienté sur l’expression des émotions afin de prendre en compte leur vécu et les émotions qui s’y rattachent ; développer le sentiment de compétence des patients pourrait aussi les aider dans leur processus décisionnel et diminuer ensuite le risque de rejet comme cela a été montré dans une étude auprès de jeunes adultes transplantés [16,18]. Enfin, mener des entretiens motivationnels permettrait de faire le point sur leurs motivations et d’évaluer s’ils sont prêts pour la transplantation. Depuis quelques années en France, des programmes d’éducation thérapeutique des patients atteints de mucoviscidose se mettent en place dans les centres de prise en charge (CRCM) [19]. Ces programmes visent l’apprentissage par les patients de connaissances et de savoir faire leur permettant de mettre en œuvre des compétences de gestion et d’adaptation à leur maladie au quotidien [20]. Ces programmes interdisciplinaires sont centrés sur les patients et consacrent un temps spécifique à l’exploration de leurs besoins. Des séances d’éducation thérapeutique individuelles ou en groupe sont proposées et utilisent des outils d’aide à l’apprentissage des patients. Les acquisitions des patients sont régulièrement évaluées [21]. L’éducation thérapeutique pré-transplantation dans le domaine de la mucoviscidose est encore peu formalisée en France, alors qu’elle permettrait de mieux préparer les patients et leurs aidants. Reste à définir à quel moment cette éducation pourrait être proposée aux patients et à leur entourage sachant que ces acteurs estiment parfois ne pas avoir eu les informations suffisamment tôt [13]. Des séances éducatives pourraient être l’occasion de formaliser et systématiser les rencontres des patients greffés avec ceux en perspective de greffe. Plusieurs patients et aidants évoquent dans leur carte conceptuelle l’intérêt de ces rencontres. Ces résultats confirment ceux mis en évidence dans d’autres études, ainsi que l’impact de ces rencontres sur le sentiment d’auto efficacité de patients devant subir la même intervention ou développer le même type de compétence [5,22]. Il apparaît donc essentiel de prendre le temps d’explorer ces représentations afin de les faire évoluer si besoin, au cours d’un programme d’éducation thérapeutique. Cette étude utilisant les cartes conceptuelles présente une manière d’explorer ces représentations. Elle montre entre autre que permettre aux patients et aux aidants de s’exprimer sur la transplantation, sans même intervenir sur leurs propos ou répondre à leurs questions, fait évoluer leurs dispositions vis-à-vis de la transplantation (amélioration pour 6 patients et 9 aidants). La carte conceptuelle constitue un support visuel proche de la réalité perc ¸ue de l’interviewé. Elle lui donne la possibilité de porter un regard réflexif sur ses propres représentations, de les questionner pour les faire évoluer dans un second temps [23]. La carte conceptuelle est de plus en plus souvent utilisée dans la pratique de l’éducation thérapeutique des patients atteints de maladie chronique en France [24].
245 Cette étude souligne aussi les difficultés rencontrées par les médecins. Elle incite à mettre en place des actions de formation continue et de supervision auprès des professionnels de santé afin d’améliorer leur pratique en lien avec la proposition de transplantation. Ces actions pourraient permettre aux soignants : d’identifier leurs possibles ambivalences en explorant systématiquement leurs représentations et leur impact sur leurs pratiques, de répondre à leurs questions et d’actualiser leurs connaissances sur la greffe (avant, pendant, après), de renforcer leurs compétences de communication et d’éducation thérapeutique. Par ailleurs, certaines difficultés d’ordre affectif ou relationnel constituent pour certains médecins des freins à la proposition de greffe. Ainsi aborder la transplantation avec un patient questionne le rapport du soignant à ses propres émotions et à ses compétences relationnelles. Une formation à l’accueil des émotions du patient et un accompagnement de proximité du soignant sont nécessaires pour développer spécifiquement cet axe [25]. L’intégration du psychologue dans l’équipe de prise en charge des patients atteints de mucoviscidose est essentielle. Il peut intervenir auprès des patients et de leurs aidants, mais aussi auprès de l’équipe soignante pour aider ses membres à développer leurs compétences psychosociales [16]. L’étude présente certaines qualités propres à la recherche qualitative. La crédibilité de l’étude est tout d’abord assurée par l’accord donné par le patient sur sa propre carte relue plusieurs fois en sa présence et en fin d’entretien. Ensuite, les analyses faites à partir des cartes ont été soumises à l’équipe de chercheurs (intervieweurs) qui en ont apprécié leur conformité aux entretiens menés [9]. Enfin, les analyses produites concordent avec celles retrouvées dans la littérature. La fiabilité est assurée par l’analyse des cartes par deux chercheurs indépendants. Certaines limites méritent d’être soulignées. Elles concernent le champ d’investigation de l’étude et la méthode utilisée. Cette étude visait à décrire « en miroir » les représentations de trois acteurs sur la transplantation, celles ci étant susceptibles d’influencer leur niveau d’acceptation de la greffe. Cependant, nous n’avons pas exploré spécifiquement les liens entre ces représentations et les décisions de transplantation. En effet, ce n’est pas parce que un acteur identifie certains freins dans sa carte conceptuelle qu’il ne va pas prendre la décision de la greffe. Les processus de prise de décision partagée sont multifactoriels et cette étude n’avait pas pour objet de les explorer spécifiquement [10]. Concernant les patients, l’étude n’a pas permis de différencier les patients ayant réalisé leur bilan pré-greffe des autres patients. Pourtant, il est probable que ces représentations évoluent à la suite de ce bilan [26]. De même, concernant les médecins, il n’a pas toujours été évident de déterminer dans leurs cartes conceptuelles si les représentations exprimées l’étaient d’une manière générale (consigne initiale donnée par les intervieweurs) ou si elles l’étaient au regard d’un patient spécifique, en particulier celui inclus dans l’étude par le médecin lui-même. Enfin, la technique d’entretien utilisée pour élaborer une carte conceptuelle respecte les propos des patients et évite les questions suggestives pouvant orienter le patient. Même si plusieurs relances à visée d’explicitation ont poussé l’interviewé à s’exprimer le plus largement possible, l’absence d’une catégorie d’analyse
246 dans la carte conceptuelle d’un participant ne signifie donc pas automatiquement qu’elle n’est pas prise en compte par ce dernier.
Conclusion Cette étude a permis d’explorer les représentations de trois acteurs impliqués dans la décision de transplantation pulmonaire, patients, aidants et médecins, et de mieux comprendre celles constituant des freins ou des motivations à la transplantation pour chacun de ces acteurs. Certaines de ces représentations sont partagées par les trois acteurs, d’autres sont spécifiques à chaque groupe. Les analyses montrent que de nombreuses questions sont posées par les acteurs, mais aussi que leurs représentations sont accompagnées de peurs ou de difficultés. Ces éléments ne semblent pas directement influencer le degré d’acceptation de la greffe qui est élevé pour deux tiers des acteurs. Afin d’améliorer la communication autour de la transplantation pulmonaire et de diminuer les pertes de chances liées à d’éventuels a priori négatifs vis-à-vis de la transplantation, différentes actions pourraient être formalisées : des actions de soutien et d’éducation thérapeutique pour les patients et les aidants, des actions de formation et d’analyse de pratiques pour les médecins. De nouvelles recherches devraient permettre de préciser les modalités d’implantation de ces activités au regard des pratiques mises en œuvre dans les CRCM et les centres de transplantation.
Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article. Soutiens : cette étude a été soutenue par l’association Vaincre la Mucoviscidose.
Remerciements Nous remercions particulièrement les neuf enquêteurs : • Béatrice Amory-Rébérot du pôle de prévention et d’éducation de Soissons ; • Colette Berville du CHU de Nantes ; • Catherine Greffier de l’UTET du CHU de Nantes ; • Marythé Kerbrat du CRCM de Roscoff ; • Pilar Leger du CHU de Nantes ; • Anne Le Rhun de l’UTET du CHU de Nantes ; • Amélie Odier du CHU de Nantes ; • Nathalie Proust du pôle de prévention et d’éducation de Soissons ; • Marie Van der Schueren Etévé de pôle de prévention et d’éducation de Soissons.
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