Optimisation hémodynamique et conséquences postopératoires

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ARTICLE IN PRESS

Journal de Chirurgie Viscérale (2016) xxx, xxx—xxx

Disponible en ligne sur

ScienceDirect www.sciencedirect.com

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Optimisation hémodynamique et conséquences postopératoires夽 Postoperative consequences of hemodynamic optimization A. Lazkani a, G. Lebuffe b,∗ a

Pôle d’anesthésie réanimation, université Lille, CHU de Lille, 59000 Lille, France EA7365—GRITA, groupe de recherche sur les formes injectables et technologies associées, pôle d’anesthésie réanimation, université Lille, CHU de Lille, rue Michel-Polonovski, 59037 Lille cedex, France

b

MOTS CLÉS Périopératoire ; Hémodynamique ; Optimisation ; Morbidité

KEYWORDS Perioperative hemodynamic optimization;

Résumé L’optimisation hémodynamique s’inscrit dans une démarche médicale visant à identifier les patients les plus à risque. Cette stratification est nécessaire pour personnaliser la prise en charge hémodynamique qui s’adaptera au niveau de risque en utilisant du matériel plus ou moins invasif. L’approche hémodynamique macrocirculatoire vise à maintenir l’adéquation entre l’apport (DO2 ) et les besoins en oxygène (VO2 ). Le remplissage a un rôle essentiel reposant sur le principe de la titration à partir de la mesure du volume d’éjection systolique ou d’indices de précharge-dépendance. L’opérationnalité du réseau microcirculatoire est le meilleur garant pour atteindre cet objectif. Une évaluation de la balance DO2 /VO2 s’impose alors dans les situations critiques où une insuffisance respiratoire tissulaire en O2 peut survenir. Globalement, l’ensemble des stratégies se fondant sur des objectifs pour guider le remplissage et/ou l’oxygénation tissulaire améliorent le devenir postopératoire du patient en diminuant la morbidité et la durée de séjour hospitalier. © 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits r´ eserv´ es.

Summary Hemodynamic optimization begins with a medical assessment to identify the highrisk patients. This stratification is needed to customize the choice of hemodynamic support that is best adapted to the patient’s level of risk, integrating the use of the least invasive procedures. The macro-circulatory hemodynamic approach aims to maintain a balance between

DOI de l’article original : http://dx.doi.org/10.1016/j.jviscsurg.2016.09.006. Ne pas utiliser, pour citation, la référence franc ¸aise de cet article, mais celle de l’article original paru dans Journal of Visceral Surgery, en utilisant le DOI ci-dessus. ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (G. Lebuffe). 夽

http://dx.doi.org/10.1016/j.jchirv.2016.09.005 1878-786X/© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits r´ eserv´ es.

JCHIRV-701; No. of Pages 6

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A. Lazkani, G. Lebuffe

Goal-directed fluid therapy; Morbidity

oxygen supply (DO2 ) and oxygen demand (VO2 ). Volume replacement plays a crucial role based on the titration of fluid boluses according to their effect on measured stroke volume or indices of preload dependency. Good function of the microcirculatory system is the best guarantee to achieve this goal. An assessment of the DO2 /VO2 ratio is needed for guidance in critical situations where tissue hypoxia may occur. Overall, all of these strategies are based on objective criteria to guide vascular replacement and/or tissue oxygenation in order to improve the patient’s postoperative course by decreasing morbidity and hospital stay. © 2016 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Les interventions chirurgicales représentent plus de 312 millions de procédures à travers le monde [1]. La mortalité est estimée entre 1 et 4 % [2]. Les complications postopératoires et les décès concernent principalement les patients à haut risque qui sont plus âgés, porteurs de comorbidités et opérés d’une chirurgie majeure. Le volume du remplissage et le recours aux agents vasopresseurs conditionnent le devenir des patients après chirurgie gastro-intestinales lourdes. Leur prescription est le plus souvent basée sur des critères subjectifs amenant à une grande disparité des pratiques cliniques selon les centres. Aussi, pour une procédure chirurgicale donnée, les quantités de soluté administrées en périopératoire sont très variables d’un praticien à un autre [3]. Le remplissage guidé sur des objectifs ou goal-directed fluid therapy (GDFT) des Anglo-Saxons vise à déterminer les besoins en remplissage du patient au cours et/ou au décours d’une intervention chirurgicale en se basant sur des critères objectifs comme le volume d’éjection, le débit cardiaque, les indices d’oxygénation tissulaire. Une métaanalyse récente regroupant 38 études randomisées a révélé que l’utilisation du GDFT réduisait de 17 à 29 % le nombre de patients qui développait une ou plusieurs complications après leur procédure chirurgicale [4]. L’ensemble des ces données a conduit à intégrer cette stratégie de prise en charge des patients dans des consensus et des recommandations formalisées d’expert comme celle de la Société franc ¸aise d’anesthésie réanimation en 2013 [5]. Cette revue a pour objectif d’identifier les patients à risque chirurgical, les principaux indices qui peuvent être intégrés dans une stratégie GDFT et leur impact sur le pronostic des patients.

Patient à haut risque chirurgical Quinze pour cent des actes chirurgicaux sont réalisés chez des patients à haut risque chirurgical. Cette population concerne 80 % des décès périopératoires [6—8]. L’amélioration de la morbidité périopératoire chez ces patients apparaît comme un déterminant essentiel de la récupération fonctionnelle à long terme et de la survie [9]. Shoemaker et al. [10] ont définit des critères permettant d’identifier et de sélectionner les patients à haut risque (Tableau 1). Il s’agit de patients âgés de plus de 70 ans et/ou ceux qui ont une limitation physiologique importante d’au moins un organe vital, porteurs d’une cardiopathie ou d’une maladie respiratoire, avec une pathologie vasculaire sévère évoluée comme l’anévrysme de l’aorte abdominale, polytraumatisés et/ou en défaillance d’organe et/ou opérés d’une chirurgie urgente ou carcinologique étendue

Tableau 1 1

2 3 4 5 6 7 8 9 10 11

Critères de Shoemaker.

Pathologie cardiopulmonaire grave avec dysfonction (IDM, cardiomyopathie dilatée, FE < 40 %) Patient de plus de 70 ans avec des capacités physiologiques limitées d’au moins 1 organe vital Sepsis (instabilité hémodynamique, cardiomyopathie septique) Détresse respiratoire (PaO2 /FIO2 < 300 ; PaCO2 > 45 mmHg ; VEMS < 60 % valeur prédite) Cirrhose (Child B ou C) Insuffisance rénale (urée > 0,45 mg/L ; créatinine > 30 mg/L) Chirurgie carcinologique étendue (œsophage, gastrectomie, chirurgie > 8 h) Urgence abdominale (pancréatite, ischémie mésentérique, péritonite) Chirurgie vasculaire majeure (chirurgie aortique) Polytraumatisé Hémorragie (> 2,5 L, Hte < 20 %)

La présence d’un critère caractérise un patient à haut risque chirurgical.

et/ou hémorragique. La présence d’un seul des critères précédents caractérise le patient à haut risque chirurgical. En Grande Bretagne, l’analyse des décès à partir d’une base de données nationale a révélé une population à haut risque avec un taux de décès de 12,3 % comparé à 0,4 % dans la population standard [8]. Ces patients totalisaient 83,8 % des décès de la population étudiée pour seulement 12,5 % des procédures chirurgicales réalisées. Ils apparaissaient plus âgés, porteurs de comorbidités médicales et opérés en urgence et/ou d’une chirurgie majeure ou compliquée. Le patient à haut risque chirurgical tolère mal les variations hémodynamiques périopératoires. Elles sont multifactorielles secondaires aux conséquences de la réponse physiologique au stress chirurgical (modification de la perméabilité vasculaire, rétention hydrosodée et activation du tonus sympathique pour redistribuer les flux sanguins), aux pertes sanguines et hydrosodées périopératoires (jeûne, pertes digestives, saignement périopératoire, réduction des apports hydriques postopératoires) et aux effets hémodynamiques de l’anesthésie quelle soit neuroaxiale ou générale par les effets vasodilatateurs et dépresseurs myocardiques de certains agents anesthésiques. Certaines situations chirurgicales favorisent également la

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Optimisation hémodynamique et conséquences postopératoires Tableau 2

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Techniques de mesure du debit cardiaque.

Swan Ganz PiCCOplus/EV1000/LiDCO plus system Flotrac (Vigileo)/PulsioFlex/LiDCO rapid NICOM/ECOM LiDCO system/ClearSight device/Cnap NICO system/DDG-30

Masimo CardioQ/CardioQ-ODM

Technique

Invasif

Monitorage continu

VES/IC

VVE/PVI

VPP

Thermodilution Calibration par thermodilution/ligne artérielle Ligne artérielle sans calibration

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+ +

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+

+

+

+

Bioréactance/Bioimpédance PA digitale

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+ +

+ +/−

+ +/−

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Principe de Fick/Dilution transpulmonaire du vert indocyanine Plethysmographie Doppler



+





+

− +/−

+ +

− +

+ −

− −

labilité hémodynamique comme le pneumopéritoine, le proclive et le clampage vasculaire de la veine cave ou de l’aorte [11]. Dans ce contexte, l’individualisation de la prise en charge hémodynamique du patient à haut risque est une nécessité. Il s’appuie sur un monitorage adapté au mieux continu de la pression artérielle, du volume d’éjection ou du débit cardiaque, voire dans certaines situations sur des indices d’oxygénation tissulaire [12].

Objectifs de l’optimisation hémodynamique L’objectif de l’optimisation hémodynamique périopératoire est de maintenir un apport en oxygène adapté aux besoins. Au cours d’une intervention sous anesthésie générale alors que les besoins en oxygène (VO2 ) sont faibles, les variations de charge du cœur peuvent être importantes conduisant alors à une altération de la délivrance en oxygène (DO2 ). Le patient est alors en situation de précharge-dépendance ou de précharge-indépendance dont le risque est le remplissage excessif avec dans les deux cas un risque de défaillance d’organe. Le remplissage a un rôle essentiel pour le maintien de la stabilité hémodynamique en partant du postulat que le recours aux solutés vise à normaliser DO2 en augmentant le volume d’éjection et donc le débit cardiaque. Aussi, plusieurs études ont montré que l’optimisation hémodynamique périopératoire améliorait le pronostic des patients, raccourcissait la durée de séjour et baissait significativement la mortalité chez les patients à haut risque [13—15]. La gestion individualisée du remplissage s’intègre également dans les procédures de réhabilitation rapide des patients en réduisant les nausées et vomissements, la durée de l’iléus et en favorisant la reprise alimentaire [16].

Stratégie de monitorage du volume d’éjection et de ses dérivés L’évaluation des pratiques des anesthésistes réanimateurs sur le monitorage hémodynamique au bloc opératoire laisse apparaître que seulement un patient sur dix opéré d’une chirurgie majeure bénéficie d’un monitorage du volume d’éjection. La majorité d’entre eux utilise une surveillance

classique de la fréquence cardiaque, de la pression artérielle moyenne et de la pression veineuse centrale pour évaluer le statut hémodynamique. Ces éléments sont toutefois insuffisants pouvant conduire à une prises en charge hémodynamique inadaptée voire même délétère pour les patients. Cette approche conventionnelle est privilégiée par les équipes car elle est peu invasive et reste dans l’ensemble adaptée pour la majorité des patients bénéficiant d’une procédure chirurgicale. En revanche, elle s’avère totalement insuffisante chez les patients à haut risque de complications, voir de décès qui nécessitent un monitorage hémodynamique permettant de guider la prise en charge. Chez les patients à haut risque, l’optimisation hémodynamique repose sur l’évaluation du débit cardiaque ou de ses dérivés comme le volume d’éjection. Les moniteurs sont nombreux utilisant des techniques variées de mesure du débit cardiaque avec des systèmes invasifs ou non (Tableau 2). Le choix de la technique variera selon le degré d’instabilité hémodynamique attendu en périopératoire où pour ces situations précaires, les outils avec calibration et donc invasifs seront préférés. En revanche, pour les prises en charge chirurgicale réglées chez des patients avec comorbidités, les techniques moins invasives peuvent être préférées. Le principe du remplissage vasculaire repose alors sur la titration en se guidant sur la mesure du volume d’éjection systolique dans le but de réduire la morbidité postopératoire, la durée de séjour hospitalier et le délai de reprise d’une alimentation orale des patients de chirurgie digestive [5]. Les apports liquidiens sont alors fractionnés par volumes de 200 à 250 mL de colloïdes et/ou de cristalloïdes sur 10 minutes. Une augmentation de 10 % du volume d’éjection systolique amènera à renouveler le bolus jusqu’à obtenir une variation de moins de 10 % conduisant à l’arrêt du remplissage (Fig. 1). Un essai multicentrique récent a comparé sur un indice composite de morbidité et la mortalité à 30 jours un algorithme de prise en charge hémodynamique basé sur la mesure du volume d’éjection systolique à partir d’une analyse du contour de la pression artérielle. Chez les 734 patients randomisés, la morbidité n’était pas différente, la mortalité à 30 jours tendait à être moins importante alors qu’elle était significativement réduite à 3 mois dans le groupe GDFT [4]. Les auteurs intégraient leur travail dans une méta-analyse regroupant 22 essais randomisés

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A. Lazkani, G. Lebuffe

Figure 1. Titration du remplissage selon le volume d’éjection systolique (VES) [13]. De Vallet et al. Ann Fr Anesth Reanim 2013;32:e151—8 [5].

confirmant les effets bénéfiques du GDFT avec une réduction de 23 % du risque de survenu de complications postopératoires [4]. D’autres indices dérivés du volume d’éjection systolique comme les indicateurs dynamiques de préchargedépendance ont été utilisés pour titrer le remplissage. Que ce soit la variation de la pression pulsée (VPP) ou la variation respiratoire du VES (VVE), ils ont été intégrés dans des protocoles d’optimisation hémodynamique. Une métaanalyse récente a repris les 14 études ayant utilisé ces deux paramètres sur un total de 961 patients concluant à la diminution des complications chirurgicales, abdominales, cardio-circulatoires, infectieuses et de la durée du séjour chez les patients optimisés [17]. Ces deux indices ont toutefois une utilisation limitée aux patients en rythme sinusal, intubés et ventilés sans aucune activité respiratoire spontanée [18]. L’évolution technologique a permis d’évoluer vers une approche hémodynamique non invasive de l’analyse de l’onde de pouls autorisant le calcul du débit cardiaque et d’autres variables avec des limites d’agréments acceptables par rapport aux techniques de référence par thermodilution de la mesure du débit cardiaque [19—22]. D’autres techniques non invasives ont investi le marché dont la fiabilité d’estimation du débit cardiaque apparaît acceptable ou nécessite encore d’être confirmée (Tableau 2). Comme pour les outils plus invasifs, l’étude POEMAS a montré que la surveillance non invasive de la pression artérielle moyenne, de l’index cardiaque et de la variation du volume d’éjection systolique permettait de réduire le taux de reprise chirurgicale sans pour autant modifier l’incidence des autres complications postopératoires ni la durée de séjour [23]. Très récemment, un protocole GDFT conduit avec un système non invasif a permis de réduire les complications infectieuses et le recours à la transfusion chez des patients opérés d’une chirurgie prothétique du genou ou de la hanche [24].

Intégration de paramètres d’oxygénation tissulaire dans la stratégie d’optimisation hémodynamique L’approche hémodynamique macrocirculatoire vise à maintenir l’adéquation entre l’apport (DO2 ) et les besoins en oxygène (VO2 ). L’opérationnalité du réseau microcirculatoire est le meilleur garant pour atteindre cet objectif.

Dès lors, l’évaluation de cette balance DO2 /VO2 s’impose dans les situations où l’insuffisance respiratoire tissulaire en O2 peut survenir (insuffisance circulatoire, saignement, sepsis, défaillance cardiaque. . .). La saturation veineuse en oxygène de l’artère pulmonaire (SvO2 ) ou celle mesurée au niveau du réseau cave supérieure (saturation veineuse centrale en oxygène [SvcO2 ]) reflète l’adéquation entre les apports et les besoins en O2 . La mesure de la ScvO2 est plus aisée puisqu’elle peut être réalisée à partir d’un prélèvement sanguin d’une voie veineuse centrale ou de manière continue avec l’insertion d’une fibre optique dans le territoire cave supérieure [25]. La ScvO2 est la résultante des interactions complexes entre ses quatre déterminants (Hb, SaO2 , débit cardiaque, VO2 ) qui peuvent tous être potentiellement altérés à des degrés divers par la pathologie sous-jacente ainsi que par les thérapeutiques mises en route. Aussi, une chute de la SvcO2 après chirurgie lourde est associée à une augmentation des complications postopératoires [26,27]. En chirurgie cardiaque, un protocole visant à maintenir une SvcO2 pour atteindre des valeurs supérieur à 70 % s’accompagnait d’une diminution des complications postopératoires et de la durée du séjour [28]. La SvcO2 estimant l’extraction en oxygène (SvO2 ≈ 1 − ERO2 ), le maintien d’une ERO2 inférieure à 27 % était associée à une réduction de la durée du séjour chez les patients opérés d’une chirurgie abdominale lourde [29]. De manière générale, en dehors d’une anémie et d’une hypoxémie, la baisse de la SvcO2 en périopératoire est le reflet d’un débit cardiaque inadapté aux besoins. Son mécanisme est volontiers une baisse de la volémie ou parfois de l’inotropisme conduisant à une altération du volume d’éjection systolique. Dans certaines situations avec une réaction inflammatoire systémique majeure comme observée dans le sepsis, l’interprétation de la SvcO2 est rendue difficile par les altérations de la perfusion microcirculatoire conduisant à un défaut d’extraction en O2 amenant à des valeurs anormalement élevées de SvcO2 et à un pronostic périopératoire très péjoratif [30]. Dans les cas de crise énergétique majeure où la SvCO2 peut être mise en défaut, la lactatémie informe sur le niveau de gravité de la souffrance cellulaire et apparaît comme un indice pronostique quel que soit le type de choc [31]. La diminution précoce du taux de lactate traduit l’amélioration de l’hypoxie tissulaire et est associée à une diminution de la mortalité. Des stratégies de prise en charge du patient réanimatoire ayant pour objectif de baisser la lactatémie de plus de 20 % au cours des 8 premières heures ont permis de réduire la mortalité [32]. En pratique

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Optimisation hémodynamique et conséquences postopératoires clinique, il est désormais recommandé chez le patient choqué de répéter la mesure du lactate (toutes les 2 heures au cours des 8 premières heures puis toutes les 8 à 12 heures) pour évaluer le pronostic et guider la prise en charge thérapeutique [33]. La différence entre la pression artérielle et la pression veineuse centrale en CO2 (P(cv-a) CO2 ) calculée à partir d’un prélèvement sanguin sur le cathéter veineux central et sur le cathéter artériel peut compléter la lactatémie et la ScvO2 pour évaluer la qualité du débit cardiaque et/ou de la perfusion microcirculatoire. En présence d’une baisse du flux sanguin par altération du débit cardiaque et/ou de la perfusion locale, l’élimination du CO2 produit par les tissus est ralentie à l’origine d’une stagnation du CO2 et de l’élévation de P(cv-a)CO2 . En présence d’une ScvO2 > 70 %, une valeur supérieure à 6 mmHg suggère une hypoperfusion tissulaire [34]. Un gradient élevé à l’admission des patients en unité de soins intensifs apparaît également comme un indice pronostique de survenue de complications après chirurgie cardiaque [35].

Stratégie d’optimisation hémodynamique La première étape consiste à stratifier le risque lié au patient et/ou à la chirurgie dont les critères de Shoemaker permettent d’identifier les patients à haut risque de morbimortalité périopératoire. La stratégie hémodynamique qui en découle pourrait conduire à adopter des techniques non invasives, voire peu invasives pour les risques faibles à intermédiaires, et a contrario des techniques invasives à partir du risque intermédiaire couplées aux données microcirculatoires pour le risque très élevé. Ceci impose à l’anesthésiste réanimateur de maîtriser un panel de moyen de monitorage tant sur les données recueillies que sur leurs limites. Une personnalisation de la prise en charge hémodynamique apparaît essentielle comme le suggère un essai randomisé très récent. En effet, une stratégie individualisée visant à maintenir la DO2 postopératoire sur les valeurs mesurées en préopératoire permettait de réduire la morbidité et les complications infectieuses chez des patients opérés d’une chirurgie à haut risque [33].

Conclusion L’optimisation hémodynamique s’inscrit dans une démarche médicale visant à identifier les patients les plus à risque. Cette stratification est nécessaire pour personnaliser la prise en charge hémodynamique qui s’adaptera au niveau de risque en utilisant du matériel plus ou moins invasif et des indices d’optimisation du volume d’éjection associés à une évaluation de perfusion tissulaire pour les situations instables. Globalement, l’ensemble des stratégies se fondant sur des objectifs pour guider le remplissage et/ou l’oxygénation tissulaire améliorent le devenir postopératoire du patient en diminuant la morbidité et la durée de séjour hospitalier.

Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

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