Journal of the Less-Common Metals, 92 (1983) 185-197
OXYDATION
K. BOUZOUITA,
DU NITRURE DE TANTALE
P. LEFORT, J. DESMAISON
185
PAR L’OXYGtiNE
et M. BILLY
Laboratoire de Gramiques Nowelles, Laboratoire associe’ au CNRS 320, Universite’ de Limoges, 123 avenue Albert Thomas, 87060 Limoges Ce’der (France) (Rep
le 15 juillet 1982)
RbsumB L’oxydation du nitrure de tantale TaN dans l’oxygene, entre 590 et 770 “C, est caracterisee, quelle que soit la symetrie (plane ou pseudospherique), par des cinetiques d’allure sigmoi’de associees A la formation d’oxyde Ta,O,-P non protecteur. La reaction est regie par un processus interfacial externe (E = 226 kJ mol- ‘) localisi! au voisinage immediat de l’interface nitrure-oxyde. La vitesse est modulee par des facteurs morphologiques particulierement importants en raison de la fragmentation des Qchantillons et l’existence d’une fissuration centrale dans le cas de plaques. Pour la poudre, la variation de la loi de pression avec le degre d’avancement suggere que le regime interfacial est perturb6 par la fissuration importante des grains de nitrure au tours de la reaction. Summary The oxidation of tantalum nitride TaN in oxygen between 590 and 770 “C is characterized, whatever the symmetry (plane or pseudospherical), by sigmoidal kinetics associated with the formation of a non-protective P-Ta,O, oxide. The reaction is governed by an external interfacial process (E = 226 kJmol_‘) located at the nitride-oxide interface. The rate is modulated by morphological factors, particularly important due to the fragmentation of the samples and the existence of central cracking for platelets. For powders, the variation in the pressure law with the degree of conversion suggests that the interfacial regime is perturbed by the important cracking of the nitride grains during the reaction.
1. Introduction Les rares etudes consacrees jusqu’ici a l’oxydation du nitrure de tantale sont surtout d’ordre qualitatif; elles concernent essentiellement le comporte0022-5088/83/$3.00
OElsevier
Sequoia/Printed
in The Netherlands
186
ment dans l’air soit d’echantillons frittes [l], soit de couches minces du nitrure Ta,N [2,3], dans leurs applications en microelectronique [4], notamment dans le domaine des couches minces resistives [5]. Nous Qtudions ici l’oxydation dans l’oxygene du nitrure TaN (structure hexagonale compacte), en symetrie plane ou $ l’etat pulverulent.
2. Echantillons Le systeme Ta-N a 6th t&s Qtudie [6-B] et jusqu’a des dates recentes [9-131. Le diagramme de phases de la Fig. 1 [14] montre qu’il est possible d’obtenir a l’etat pur, par action directe de l’azote sur le tantale, deux phases de composition TaNI_,: la phase 6 de structure c.f.c. presente un assez large domaine d’homogeneite, tandis que la phase E (hexagonale compacte) n’existe qu’au
1600.
0.6
0.7
0.8 t’!b
0.9
4
Fig. 1. Diagramme de phases Ta-N d’aprhs Gatterer et al. [14]. TABLEAU
1
Principales
caractkristiques
Morphologie des khantillons
Tempkrature (“0
du nitrure TaN-e
Durbe de nitruration (jours)
Param&re de maille (A) Mesurb
Plaques
Poudre’
1450
1400
’ 50 Frn < diam&re < 63 pm.
30
9
Masse volumique (g cm-7 Calculbs
Mesurbe
Calcule’e
WI
(An)
(A)
14,l
14,30
14.2
14,32
a = 5,190
c = 2,911 a = 5,189 c = 2,910
a = 5,196 c = 2,911
voisinage immediat de la composition stoechiometrique. Nous nous limitons ici a l’etude de la phase E. Les conditions experimentales de la nitruration du metal dans l’azote sont analagues g celles rapport&s par ailleurs [15]. Les principales caracteristiques des deux lots p&pares (poudres et plaques) sont consignGes au Tableau 1. Le metal &ait fourni par la soci&i! Affa-Ventron, de purete QQ,Q& pour les plaques et 99,9”/, pour les poudres,
3. Rhdtats
expbrimentaux
3.1. Influence de la tempdrature L’oxydation a eti! suivie par thermogravimbtrie [15] a partir d’echantillons de masse initiale voisine de 40mg. Les reseaux d’isothermes, obtenus dans l’intervalle 587-719 “C SUFpoudre et 652-770 “C pour les plaques sous pression de 400 Torr d’oxygene, sont reproduits respectivement aux Figs. 2 et 3. D’allure g&&-ale sigmo‘ide, les courbes des deux Gseaux different par la position du point d’inflexion (a des degr& d’avancement CL~ = 0,35 pour la poudre et Cci= 060 pour les plaques) et par la linharite du debut des cinetiques sur plaques (0~< U,l), comme le montre la Fig. 4. Dans chacun des cas, les courbes sont superposables par affinite par rapport au temps [16] a des degres d’avancement compris entre c1= 0,05 et a = 0,95. Les energies d’activation obtenues en mettant a profit les coefficients d’affinite sont respectivement 243 f 12 kJ mol- ’ et 251 f 16 kJ rnol_- ’ (Fig. 5). 3.2. Influence de la pressian Les isobares representees aux Figs. 6 et 7 pour des pressions d’oxygitne entre 11 et 740 Torr, respectivement aux tempbratures de 690 “C et 750 “C pour la poudre et les plaques, ont une allure identique a cefle des isothermes. Le debut lineaire des courbes cinetiques pour les plaques est precise sur la Fig, 8. En ce qui concerne la poudre, les courbes ne sont pas affines entre elles; autrement dit la loi de pression evolue avec le degre d’avancement. En revanche, les isobares d’oxydation des plaques sont affines entre elles tout au long de la &action; il est done possible de pr&ziser dans ce cas la loi de pression [lS]. Le meilleur parametrage est obtenu par une fonction homographique de type Langmuir:
expression de la forme u - =
P
uf(a) - bu
La Fig. 9 verifie la lineariti! et le parallelisme des repr&sentations (u/P, v) d degre d’avancement constant. La pente des droites d&nit la valeur de b, soit 1,7 x 10e2 Torr-’ ; celle de a ne peut etre obtenue directement en l’absence de don&es surf(a)_
0
4
2
Fig. 2. Rdseau d’isothermes
0
tl
6
d’oxydation
du nitrure TaN pulkulent
(PO,= 400 Torr),
10
5
Fig. 3. RBseau d’isothermes d’oxydation du nitrure TaN en plaques (P,,, = 400Torr): 770”C;courbe2,750”C;courbe3,73O~C;courbe4,7lOnC;courbe5,6Q4~C;courbe6,67OoC;courbe7, 652 “C.
.0.6
0
1
Fig. 4. D&but des isothermes d’oxydation
2
du nitrure TaN en plaques (PO, = 400Torr).
courbe
1,
189
600
700
Tsmp*rat"rsoC]
Fig. 5. Influence de la temperature sur la cinetique d’oxydation du nitrure TaN en plaques (0, methode des affinites; 0, methode des transformees) et en poudre (m, methode des aflinites; 0, methode des transformees).
0.6
0.6
0.4
0.2
Tsmw
V. 0
2
4
6
[h]
8
Fig. 6. Reseau d’isobares d’oxydation du nitrure TaN pulverulent a 699°C: courbe 1, 743Torr; courbe 2,396 Torr; courbe 3,199 Torr; courbe 4,99 Torr; courbe 5.49 Torr; courbe 6,25 Torr; courbe 7, 11 Torr.
10
5
0
Fig. 7. Reseau d’isobares d’oxydation du nitrure TaN en plaques a 750 “C: courbe 1,735 Torr; courbe courbe 7, 2, 397Torr; courbe 3, 199Torr; courbe 4,lOOTorr; courbe 5, 49Torr; courbe 6,26Torr; 11 Torr.
_ 0.6
6
Fig. 8. Debut des isobares d’oxydation du nitrure TaN en plaques a 750 “C: courbe 1,735 Torr; courbe courbe 6, 26Torr; courbe 7, 2, 397Torr; courbe 3, 199Torr; courbe 4, 1OOTorr; courbe 5,49Torr; 11 Torr. r
0
0.1
0.2
0.3
Fig. 9. Recherche graphique de la loi de pression relative a l’oxydation
du nitrure TaN en plaques.
191
3.3. Produits de la redaction 11se forme uniquement la varieti! p de l’hemipentoxyde TazO, de structure orthorhombique (fiche ASTM 8-2554, quels que soient la symetrie, le degre d’avancement, la temperature ou la pression. La couche d’oxyde formee a partir de la poudre est constamment fissuree (Fig. 10(a)), l’intensite des fissures s’amplifiant avec le degre d’avancement (Fig. 10(b)); en fin de reaction l’oxyde est t&s finement divist! (Fig. 10(c)), l’augmentation de volume apparente depassant de beaucoup celle attribuable au coefficient d’expansion (A = 2,13). Sur plaque, la fissuration ne s’observe qu’aux degres d’avancement u > 0,l
(4
(b)
Fig. 10. Micrographics de grains de poudre TaN partiellement d’oxyghne: (a) a = 0,125; (b) 1 = 0,250; (c) (x = 0,751.
oxydk
A 690°C sous 400 Torr
192
(Fig. 11(a)) et prend un aspect a la fois transversal et central (Fig. 11(b)). Les interfaces ainsi creees doublent la surface reactive mais la couche d’oxyde se developpe moins rapidement au centre qu’a la peripherie (Fig. 11(c)), comme le montre egalement le graphe de la Fig. 12 oh sont correlees les epaisseurs de revetement formees aux interfaces externe et centrales et l’avancement de la reaction.
W
Fig. 11. Micrographics de plaquettes de nitrure TaN partiellement oxydbes a 750 “C sous 400 Torr d’oxygke B diffirents degrk d’avancement: (a) a = 0,06; (b) a = 0,125; (c) G(= 0,50.
193
a Fig. 12. Croissance de l’bpaisseur de la couche d’oxyde formke au tours de l’oxydation de plaques de nitrure TaN en fonction de l’avancement de la &action: A, A l’interface externe; 0, aux interfaces centrales.
4. Loi de vitesse 4.1.
Cas desplaques Compte tenu de l’affinite des isothermes et des isobares, la vitesse de la reaction peut s’exprimer [16] sous forme d’une equation a variables &pa&es, u = f(&V
(3)
)W)
qui conduit par integration
a l’expression
d’une transformee:
F(a) = K(T, P)t + constante La linearisation de cinetiques [X-18] par la transformee
(4) d’allure sigmo’ide est assuree de facon classique
F(cl) = log .-FY( 1 - a/2c?,>
0
10
(5)
20
Fig. 13. Transform&es des isothermes d’oxydation
du nitrure TaN en plaques.
194
qui correspond
A une fonction
f(a) =
1-e a (6) ( 1 lavaleur de .au point d’inflexion &ant ici a, = 0,60. Les transformees (F(a), t) des isothermes et isobares tracees respectivement sur les Figs. 13 et 14 presentent une allure sensiblement lineaire. La valeur de I’energie d’activation ainsi deduite (E = 226 + 12 kJ mol- ‘) est compatible avec celle determinee directement. D’autre part, on obtient une loi de pression de la forme
W) =
&
(7)
comme le montre la Fig. 15, les constantes a et b s’identifiant a 2,6 x lo-’ Torr-’ et 1,7 x lo-* Torr-’ respectivement. Ces valeurs sont en bon accord avec celles obtenues directement (b = 1,7x lo-*Torr-I), la valeur de a calculee en utilisant les relations (2) et (6) correspondant a 2,4 x lo-* Torr - ‘. La loi de vitesse resultante s’ecrit done u = B,,,a
exp( -F)
(8)
4.2. Cas des poudres Contrairement aux isothermes, les isobares ne constituent pas une famille de courbes affines. On en deduit que les variables u et P sont done Ii&es, tandis que a et T sont independantes: LJ= f@., l%(T)
(9)
Devant la difficult6 de determiner f(u., P) on se limite h l’exploitation du domaine, au-deli du point d’inflexion, la oh l’influence de la pression devient negligeable. L’expression (9) s’ecrit alors v = f(a)g(T
)
(10)
Les observations morphologiques donnent a penser que pour cette partie des cinetiques la decroissance de la vitesse doit prendre en compte l’achevement de l’oxydation des fragments les plus petits. C’est en fait la signification de la transformee F(U) = 1 - (1 - a)113= Kt
(11)
associee a la fonction f(a) = constante x (1- IX)*/~
(1.3
qui integre la diminution de la surface reactive du nitrure au tours de l’oxydation de grains supposes spheriques [19,20]. Les transformations des isobares de la Fig. 16 valident ce modele par leur linearite. Elles confirment d’autre part l’independance de la vitesse par rapport A la pression en raison de leur parallelisme. Les transformees des isothermes (Fig. 17) dont les pentes sont repartees sur le graphe de la Fig. 6 conduisent A une energie d’activation E = 251 k 12 kJ mol- ’ en accord avec celle determinee par la methode des affinites ou celles des vitesses instantanees. La loi de vitesse, au-
5
des isobares
d’oxydation
10
1, 735Torr;
0
i
!’
K[d]
Fig. 17. Transformees
F(a) = 1-(l-cc)
“3 des isothermes
d’oxydation
courbe 2397Torr;
200
.
/
./
courbe 3,199Torr;
400
du nitrure TaN en poudre (0,35 < a < 0,95).
(0,35 < cx< 0,95): courbe 1,743Torr;
du nitrure TaN en plaques.
courbe
*,I
_
du nitrure TaN en poudre Fig. 16. Transformees F(z) = 1 -(l -a) ‘I3 des isobares d’oxydation Torr; courbe 3,199 Torr ; courbe 4.99 Torr; courbe 5,49 Torr; courbe 6,25 Torr;courbe 7,11 Torr.
0.4.
Fig. 15. Influence de la pression a 750 “C sur la constante
TaN en plaques:
0.1
0,3
0.5
o,7
de vitesse d’oxydation
du nitrure
hPS[h]
Torr; courbe 5,49 Torr; courbe 6,26 Torr ; courbe 7,11 Torr.
Fig. 14. Transformees
0
/
60
courbe 2,396
0.6
courbe4,lOO
600
,..,,,+,,]
196
dell de u = 0,35, est done de la forme u = constante
x (1 - 01)“~ exp
(13)
5. Interprkkation et conclusion Les resultats obtenus sur les poudres et les plaquettes font apparaitre un ensemble de points coherents parmi lesquels on retiendra l’identiti! de nature et l’analogie de morphologie de l’oxyde forme, la similitude d’allure des cinetiques, la proximite des valeurs des energies d’activation et l’influence de la pression generalement observee; la principale difference provient de l’independance progressive de la pression avec l’avancement de la reaction dans le cas de l’oxydation des poudres. D’une facon g&r&ale, on peut done conclure a l’unicite du processus chimique regulateur mais sa perception serait masquee par des effets de fissuration et de fragmentation. Ceux-ci proviennent de la mauvaise accommodation des contraintes de croissance, en relation avec la valeur elevee du coefficient d’expansion (A = 2,13), le manque de plasticite de l’oxyde et du substrat aux temperatures d’oxydation, tres inferieures a la temperature de Tamman (environ 1200 “C pour Ta,O, et environ 2000 “C pour TaN), et la bonne adherence de l’oxyde qui interdit les decollements. Dans l’hypothese de l’identite du processus chimipue limitant, le debut de l’oxydation des plaques est particulierement important puisque c’est le seul cas oh les facteurs mecaniques n’interviennent pas. Les cinetiques sont alors lineaires et la loi de pression homographique ce qui correspond a un regime interfacial externe en raison de la semiconductivite de type p de Ta20, [16,18]. Au-dela d’un degre d’avancement de l’ordre de 0,142 apparaissent de nouvelles surfaces reactives centrales, puis laterales, responsables de l’accroissement de la vitesse globale de la reaction et justifiant l’acceleration des cinetiques, sans modifier pour autant la vitesse intrinseque et le processus regulateur. La croissance plus lente de la couche d’oxyde centrale s’explique en raison des difficult& de p&&ration de l’oxygene et de depart de l’azote au niveau des interfaces centrales, la pression d’oxygene &ant 11 certainement inferieure a celle de l’enceinte. Le ralentissement des cinetiques au-de& des valeurs de !I x 0,60 s’interprete enfin par la consommation progressive des nodules de nitrure. Dans le cas des poudres, l’allure sigmo’ide des cinetiques resulte de la variation de l’etendue du terrain reactionnel, en accord avec les observations morphologiques (augmentation de la surface reactive, due aux fissures de l’oxyde et aux fractures des grains, correlee a l’acceleration initiale, puis deceleration finale par consommation progressive des noyaux de nitrure). La variation de l’influence de la pression au tours de la reaction serait attribuable, dans ce cas, au plus grand emiettement de la poudre qui rend difficile l’evacuation d’azote et l’arrivee d’oxygene a travers le lit de poudre ainsi form&
197
Rbfbrences 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20
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