Thin Solid Films, 47(1977)307-312 © Elsevier Sequoia S.A., Lausanne--Printed in the Netherlands
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PHOTOCONDUCTIVITI~ DE C O U C H E S MINCES DE Ag20 S. MITARAY, A. DONNADIEU ET S. ROBIN-KANDARE Laboratoire de Spectroscopie, Equipe de Recherche Associ~e au C.N.R.S., Universitd des Sciences et Techniques du Languedoc, 34060 Montpellier (France) (Requ le 15 juillet 1977; accept6 le 8 aoflt 1977)
Les propri&6s photoconductrices de couches minces d'oxyde d'argent Ag20 sont diff6rentes suivant qu'elles sont &udi6es immbdiatement apr6s la formation de la couche, apr6s un recuit de celle-ci ou sur une couche vieille de plusieurs jours. Le recuit et le temps am61iorent l'6tat de cristallisation de la couche et font probablement diminuer le nombre de centres de recombinaison dfis aux d6fauts, ce qui a comme cons6quence la disparition du maximum du courant de photoconduction observ6 it l'illumination avec les couches fralchement prbpar6es.
Summary We have studied the photoconductivity of Ag20 silver oxide thin films. The results are different when the films are freshly prepared, annealed or several days old. Annealing and time improve the crystalline state of the thin films and probably reduce the number of recombination centres. As a consequence of this improvement the photocurrent maximum observed for freshly prepared Ag20 thin films during •illumination vanishes.
1. INTRODUCTION Dans un article precedent 1 nous avons expos~ une m6thode de pr6paration de couches minces de AgO par oxydation d'une masse connue d'argent dans une d6charge d'oxyg~ne, puis celle de couches minces de Ag20 r6sultant d'une r6action chimique entre AgO et une deuxi~me couche d'argent de masse sensiblement 6gale la premiere. La formation des couches de AgO et Ag20 est suivie et contr616e l'aide d'une microbalance h quartz. La premi6re couche d'argent est 6vapor6e sur un support de Pyrex portant deux 61ectrodes d'or permettant ainsi une 6tude des propri~t~s 61ectriques des couches d'oxyde. Les r6sultats de notre &ude de la variation de la r~sistance 61ectrique des couches minces de Ag20 sous l'action de diff6rents gaz 2 (02, Hz, Ar) ont montr6 un comportement des couches assez semblable pour chaque gaz mais diff6rent suivant que l'exp6rience 6tait faite imm6diatement api'6s la formation des couches ou une dizaine de jours plus tard. Parall61ement ~ la variation de r~sistance, une &ude de la photoconductivit6 a 6t6 faite e t a montr~ un comportement analogue ~ celui mentionn6 pr6c6demment, diff6rent suivant l'fige des couches ou le traitement thermique subi par celles-ci.
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S. MITARAY, A. D O N N A D I E U , S. R O B I N - K A N D A R E
RI~SULTATS EXPI~RIMENTAUX
2.1. Variation du photocourant avec le temps N o u s avons 6tudi6 la variation du p h o t o c o u r a n t donn6 par les couches de A g 2 0 sous l'effet de deux radiations m o n o c h r o m a t i q u e s : raie jaune du sodium (2 = 5893/I 0 et lumi6re d ' u n laser H e - N e (2 = 6328/~). (II faut noter au passage que le r a y o n n e m e n t laser 6tait b e a u c o u p plus intense que celui de la lampe au sodium.) Les mesures se faisaient dans l'air, p o u r des diff&ences de potentiel entre les 61ectrodes variant de 240 ~i 400 V; la r6sistance des couches &aient de l'ordre de 105 Mf~.
2.1.1. Cas des couches frafchement prOpardes P o u r toutes les couches 6tudi6es et p o u r chaque radiation utilis6e, la variation du p h o t o c o u r a n t avec le temps pr+sente l'aspect indiqu6 par les Figs. l(a), 2(a) et (~-12 A) [,
(10-12AJ
6O
quasi- permanent 30 illumination
Extinction
25
-0
.
(a)
.
.
.
.
. 0.
.
.
10 t (min~-
0
0
I()
20
p
t (rain)
(a)
[ ~ ( IO-Z2A )
25
0
I ~ (10"t2A)
,
,
~
,
10 i 0
(b)
,
,
,
,
i ~ I0 t [ m i n l
ol o
'p
20 i 0
10
~0
-t(minJ
p
(b)
Fig. 1. Croissance et d6croissanc¢ du courant de photoconduction en fonction du temps (2 = 6328 A): (a) couche fraichement pr6par6e; (b) couche vieille de 17jours. Fig. 2. Croissance et d6croissance du courant de photoconduction en fonction du temps (2 = 5893 A): (a) couche fratchement pr6par6e; (b) couche recuite ~i 120 °C pendant 4 h.
3(a). Sous illumination nous observons une croissance extr6mement rapide, suivie d ' u n e d6croissance ~t caract6re exponentiel. Lorsque le c o u r a n t semble stabilis& l'extinction de la source lumineuse p r o v o q u e au d6but une d6croissance tr6s rapide du p h o t o c o u r a n t qui tend ensuite exponentiellement vers z6ro. U n tel ph6nom6ne a 6t6 signal6 par Ryvkin 3 p o u r CdS et Ge dop6 au cuivre. Le pic est d ' a u t a n t plus prononcb que le potentiel est plus 61ev6 et que l'intensit6 lumineuse est plus importante (laser plus intense que sodium).
PHOTOCONDUCTIVITI~
I I
DE
COUCHES
MINCES
Ag20
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(10-12A) 1
/ I00
0
DE
~(I0-12A1
10
0 i
L_ i
,
,
i
10 t
0
,
i
,
,
i
I0 t (mini
I 0
i
,
,
i 10
t (mini
(a) (b) Fig. 3. Croissanceet d6croissance du courant.de photoconduction en fonction du temps (2 = 6328 A): (a) couche fraichementpr6par6e; (b) couche recuite ~ 120 °C pendant 4 h. 2.1.2. Cas des couches recuites Pour les couches recuites pendant 4 h environ ~ 120°C, l'aspect du photocourant est diff6rent suivant la radiation utilis6e. Le pic a compl6tement disparu lorsque la source est la lampe au sodium (Fig. 2(b)); par contre, un 16ger pic subsiste quelquefois sous 6clairement laser (Fig. 3(b)). 2.1.3. Cas des couches vieilles Pour toutes les couches 6tudi6es plusieurs jours apr6s leur formation, la variation du photocourant avec le temps pr6sente l'aspect donn6 par la Fig. l(b). Sous illumination nous n'observons plus qu'une croissance monotone de forme exponentieUe. A l'extinction, la d6croissance du photocourant pr6sente un aspect inverse. Si on porte la valeur de l'intensit6 du courant de saturation en fonction de la tension appliqu6e,on obtient une droite, repr6sent6e par la Fig. 4, conform6ment ~i la th6orie 4. La comparaison des valeurs num6riques de l'intensit6 du courant de photoconduction montre que dans le cas des couches recuites cette intensit6 est r6duite d'un facteur l0 (Figs. 2 et 3) par rapport ~ sa valeur avant le recuit, alors que pour les couches vieilles elle ne varie pratiquement pas (Fig. 1). 2.2. Variation du courant de saturation avec l'intensitd lum&euse On a d&ermin6 la variation de l'intensit6 du courant de saturation avec l'intensit6 lumineuse en intercalant entre la source et la couche une succession de filtres neutres d'extinction connue. La variation de l'intensit6 du courant en fonction de l'extinction (log Jo/J) du filtre pr6sente l'aspect de la Fig. 5. 2.3. Ddtermination des constantes de temps L'ensemble des courbes de d6croissance du photocourant en fonction du temps ainsi que les courbes de croissance de ce courant pour les Couches recuites ou vieilles pr6sente un aspect exponentiel. La repr6sentation de chaque courbe sur papier semilogarithmique fait apparaitre une superposition de deux exponentielles a partir desquelles on peut d6terminer les constantes de temps correspondantes. Ces deux parties de courbe sont relatives ~ deux sortes de porteurs de charge ou ~ides porteurs de char~,e identiques mais provenant de deux niveaux diff6rents dans le diagramme
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s. M I T A R A Y , A. D O N N A D I E U , q. R O B I N - K A N D A R E
[A]
IS
lC~~1A 15
104~
X:6328
A
10 I 0~
0 0
0
Fig. 4. V a r i a t i o n d u c o u r a n t de s a t u r a t i o n en f o n c t i o n de la diff6rence de potentiel appliqu6e. Fig. 5. V a r i a t i o n du c o u r a n t de s a t u r a t i o n en f o n c t i o n de I'intensit6 lumineuse.
.de bandes. Les r6sultats obtenus n'ont pas permis de trouver une relation entre la variation des constantes de temps et le potentiel appliqub. Nous donnons dans le Tableau I quelques valeurs des constantes de temps TABLEAU I
No. des couches
2 = 5893 A Croissance '~1 (S) T 2 (S)
H, fralchement prdparde II, recuite VI, fraichement prdparde VI, vieille (17jours)
2 = 6328 A Ddcroissance "C/1 (S) "C'2 (S)
Croissance "~1 (S) "~2 (S)
Ddcroissance 'C' 1 (S) '~'2 (S)
--
21
390
--
--
20
430
21
260
40
450
--
--
37
470
--
--
27
420
--
--
28
320
22
240
40
530
30
235
35
450
-
-
trouv6es sous illumination et g l'extinction. A la lecture de ce tableau on peut tirer les conclusions suivantes. - - L e recuit et le vieillissement des couches augmentent la valeur des constantes de temps ~ la d6croissance du photocourant. - - L o r s q u ' i l y a possibilitb de comparer les constantes de temps sous illumination et ~il'extinction, on s'apergoit que la croissance de la photoconductivit6 est plus rapide que la d6croissance. 3.
I N T E R P R I ~ T A T I O N DES PHI~NOMI~NES
La photoconductivit6 a 6t6 mesur6e fi des 6nergies sup6rieures au gap optique
PHOTOCONDUCTIVITI~ DE COUCHES MINCES DE Ag20
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dont la valeur se situe d'apr6s Farhat s au voisinage de 1,85 eV. Les ph6nom6nes observ6s r6sultent donc de la superposition des photoconductivit6s intrins6que et extrins6que. Etant donn6e la structure imparfaite des couches, la photoconductivitb extrins6que est fortement pr6dominante. Pour expliquer les propri6t6s photoconductrices de films polycristallins, plusieurs interpr6tations ont 6t6 avanc6es. On peut citer entre autre celle donn6e par Bube 6 qui consid6re que la photoconductivit6 dans les couches minces est domin6e par les barri6res intergrains. Une autre explication peut 6tre faite d'apr6s l'6tude de la cin6tique de la photoconductivit6 d'impuret6 de Ryvkin e t al. 7 Les d6fauts de cristallisation, les joints de grains etc. peuvent 6tre consid6r6s comme des impuret6s qui cr6ent des niveaux situ6s dans la bande interdite du semiconducteur. Consid6rons un semiconducteur poss6dant dans la moiti6 sup6rieure de la bande interdite une densit6 de niveaux N sur lesquels se trouve un seul type de porteurs de charge. Supposons ces niveaux partiellement remplis et poss6dant une concentration d'6lectrons n I dans l'obscurit6. En tenant compte de la g6n6ration de porteurs libres excit6s thermiquement et par le rayonnement d'intensit6 J depuis les niveatix N vers la bande de conduction, des transitions de recombinaison et de la relation de neutralit6, l'~quation de la cin6tique de la photoconductivit6 d'impuret6 peut s'bcrire dAn dt
An -
nlqJ----
Tmom
off An est le changement de concentration d'61ectrons dans la bande de conduction, q la section efficace de capture des photons par un 61ectron du niveau N e t Zmom est le temps de relaxation momentan6. La r6solution de cette 6quation a un aspect exponentiel. Dans le cas de l'existence de plusieurs niveaux, ind6pendants les uns des autres, le changement temporaire de la concentration des 61ectrons dans la bande de conduction peut 6tre repr6sent6 par une somme d'exponentielles, chacune d'elles correspondant h u n niveau donn6 et 6tant caract6ris6e par un temps de relaxation propre. Ryvkin montre par ses calculs que la pl~otoconductivit6 extrins6que prend place plus rapidement qu'elle ne disparait, les temps de relaxation sous illumination sont plus courts que ceux ~tl'extinction, ce qui est bien confirm6 par nos r6sultats. Il d6montre aussi qu'~t l'6tat permanent l'intensit6 du photocourant est proportionnelle ~ l'intensit6 lumineuse lorsque celle-ci n'est pas trop importante; nos r6sultats (Fig. 5) sont en accord avec cette th6orie. Pour expliquer le maximum du courant de photoconduction, observ6 sur les couches fraichement pr6par6es, et compte tenu des r6sultats exp6rimentaux (deux constantes de temps nettement diff6rentes), nous devons admettre l'existence dans la bande interdite de plusieurs niveaux N distincts partiellement remplis ~il'6quilibre thermique et de centres de recombinaison S off sont pi6g6s les trous de la bande de valence. Sous l'effet d'une radiation monochromatique d'6nergie suffisante, les 61ectrons des niveaux N sont excit6s vers la bande de conduction e't peuvent alors ou
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s. MITARAY, A. DONNADIEU, S. ROBIN-KANDARE
bien subir une recombinaison (capture p~tr les niveaux S), ou bien revenir vers les niveaux N, les probabilitbs de ces deux processus 6tant diff~rentes. Croissant trbs rapidement au dbbut, le courant de photoconductivitb commence fi d6croitre en mbme temps que la population des niveaux N diminue par suite de recombinaison. Si toutefois l'intensitb de recombinaison dbcroit avec le temps (intensit6 due ~tla dbcroissance de la concentration des trous par rapport aux centres de recombinaison), le pibgeage sur les niveaux N commence ~ prbvaloir sur la recombinaison et une photoconduction peut persister pendant longtemps, avec des transitions blectroniques ne s'effectuant pratiquement qu'entre les niveaux N e t la bande de conduction (rbgime quasi-permanent, voir Fig. 1(a)). Nous avons montrb 2 que le recuit et le vieillissement des couches avaient pour effet l'am6lioration de l'btat cristallin de celles-ci. L'affaiblissement et la disparition du maximum du courant de photoconduction, observbs sur les couches recuites ou vieilles, peuvent 6tre associbs fi cette amblioration de l'btat cristallin. Le recuit et surtout le vieillissement provoquent probablement la disparition des centres S, ce qui a pour effet la disparition du m a x i m u m de photoconduction. La croissance du photocourant pendant l'illumination retrouve alors une allure monotone. En ce qui concerne la diminution du photocourant dans les couches recuites, nous pouvons l'attribuer fi une baisse de la concentration des dbfauts dans celles-ci. Par contre, l'importance du photocourant dans les couches vieilles peut 6tre libe fi l'apparition des traces d'argent dans Ag20, comme l'a rbvblb l'analyse aux rayons X; ces traces d'argent peuvent jouer le r61e d'impuretbs et compenser la diminution de dbfauts due fi l'amblioration de l'btat cristallin. 4. CONCLUSION Notre travail porte sur l'&ude de certaines propribtbs photoconductrices de couches minces de Ag20. Si ces couches sont soumises & une diffbrence de potentiel comprise entre 240 et 400 V ou exposbes fi une intensit6 lumineuse variable, le courant de saturation croit linbairement, conformbment ~ la thborie. Pour des couches fraichement prbparbes, nous avons observb sous illumination une croissance trbs rapide du photocourant qui passe par un maximum puis dbcroit exponentiellement pour tendre vers une valeur limite. Ce maximum s'affaiblit ou dispara~t lorsque les couches sont recuites ou vieilles. Nous avons lib ia prbsence du m a x i m u m du photocourant fi l'existence de centres de recombinaison qui disparaissent lors du recuit ou du vieillissement en mbme temps que s'ambliore l'&at cristallin des couches. RI~FERENCES 1 2 3 4 5 6 7
E. Farhat et S. Robin-Kandare, C.R. Acad. Sci., S~r. B, 276 (1973) 127. S. Mitaray, A. Divrechy et A. Donnadieu, Thin Solid Films, 46 (1977) 201. S.M. Ryvkin, J. Phys. Chem. Solids, 22(1961)5. A. Rose, Photoconduction ModMes et Probl~mes Annexes, Monographie, Dunod, Paris, 1966. E. Farhat, Th~se, Montpellier, 1975. R.H. Bube, J. Electron. Mater., 4 (5) (1975) 991. S.M. Ryvkin, L. G. Paritsky, R. Y. Mansevarov et I. D. Yaroshetsky, Solid State Phys., 3 (1961) 252.