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Pollution de l’eau par du dinoterbe
Disponible en ligne sur
ScienceDirect www.sciencedirect.com
Pollution de l’eau par du dinoterbe§
Courrier des lecteurs
limite de qualite´ du Code de la sante´ publique de 0,1 mg/L reste un repe`re pour orienter les actions de gestion. Mme DV (Val-de-Marne)
Water contamination due to dinoterb R. Garnier Consultation de pathologie professionnelle, hoˆpital Fernand-Widal, 200, rue du Faubourg-Saint-Denis, 75475 Paris cedex, France
Question Une unite´ de distribution d’eau potable (UDI) a e´te´ contamine´e par du dinoterbe (de´sherbant – no CAS 1420-07-1). La recherche du dinoterbe fait l’objet d’une campagne d’analyses annuelles. Les pre´le`vements effectue´s les anne´es pre´ce´dentes ont tous e´te´ infe´rieurs a` la valeur de de´tection de 0,05 mg/L. Des analyses re´centes de la qualite´ de l’eau de l’UDI re´ve`lent la pre´sence de dinoterbe a` respectivement 0,31 et 7 mg/L vs 0,1 mg/L (valeur de re´fe´rence). Malgre´ nos recherches (Furetox), nous n’avons pas d’information sur des valeurs toxicologiques de re´fe´rence (VTR), des valeurs limites d’exposition (VLE) ou des valeurs guides (VG). Cependant, on apprend que cette mole´cule peut provoquer des intoxications graves par ingestion et des irritations cutane´es importantes (surtout quand la peau est humide). Nous nous interrogeons sur l’impact sanitaire de cette mole´cule dans cette UDI qui distribue de l’eau potable a` 1300 personnes et ne peut eˆtre de´rive´e. Avez-vous des e´le´ments d’information sur des valeurs toxicologiques de cette mole´cule dans l’eau potable (boisson, douche. . .) ? Sinon, peut-on conside´rer que cette mole´cule est suffisamment ressemblante en termes de toxicite´ et de comportement dans l’environnement a` celle du dinose`be et auquel cas utiliser sa DJT ? De notre point de vue, en l’absence de valeurs de re´fe´rence sur le dinoterbe et de donne´es plus pre´cises, la §
Toute question doit eˆtre transmise par mail avec vos coordonne´es pre´cises au docteur Dominique Lafon ([email protected]).
Re´ponse Je suis d’accord pour assimiler le dinoterbe aux autres de´rive´s du 2,4-dinitrophe´nol et en particulier, au dinose`be, les deux mole´cules ne diffe´rant que par leur chaıˆne late´rale en position 6 (tert-butyle pour le dinoterbe et isopentyle pour le dinose`be). En cas d’exposition unique ou re´pe´te´e, tous ces de´rive´s se comportent de la meˆme fac¸on, car ils ont le meˆme me´canisme d’action : ce sont des de´coupleurs de la phosphorylation oxydative. Ils bloquent la production d’ATP et provoquent une crise e´nerge´tique dans toutes les cellules ; les tissus qui souffrent le plus sont ceux qui consomment le plus d’e´nergie ; par ailleurs, le blocage de la chaıˆne respiratoire mitochondriale produit de la chaleur, donc des sueurs et une hyperpne´e pour maintenir la tempe´rature corporelle, puis quand ces me´canismes de de´fense sont de´passe´s, une hyperthermie. Il n’y a pas de VTR pour le dinoterbe, mais on peut utiliser celle propose´e par l’US-EPA pour le dinose`be : 1 mg/kg/j qui est issue d’un dose minimale ayant produit un effet toxique (LOAEL) de 1 mg/kg/j (effet critique : diminution de la prise de poids) dans une e´tude sur 3 ge´ne´rations chez le rat, en appliquant un facteur d’incertitude de 1000. Le dinoterbe est bien absorbe´ par voie digestive ; l’absorption cutane´e n’est pas chiffre´e, mais elle est probablement assez bonne, a` condition que le contact soit suffisamment prolonge´ (plusieurs heures). En pratique, a` la concentration maximale observe´e (7 mg/L), on peut conside´rer qu’un adulte ou un grand enfant absorberait 14 mg/j de dinoterbe du fait de l’eau de boisson (2 litres par j), un nourrisson de 5 kg au maximum 5,3 mg/j (0,75 litre par jour). Dans un sce´nario (tre`s) pessimiste, on pourrait conside´rer que l’absorption transcutane´e est au, maximum, de la moitie´ de cette dose, ce qui donnerait une absorption de 21 mg/j chez l’adulte et le grand enfant et de 8 mg/j chez le nourrisson : autrement dit, pas de proble`me chez les enfants d’au moins 21 kg, mais au-dessous, la VTR est de´passe´e. Cela
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R. Garnier
Archives des Maladies Professionnelles et de l’Environnement 2014;75:333-334
ne signifie pas qu’il y ait un risque grave pour la sante´, puisque le seul effet observe´ a` 1 mg/kg (soit une dose 500 a` 1000 fois plus e´leve´e) est une diminution de la prise de poids. En pratique, il faut rassurer la population, mais e´videmment, il faut e´galement respecter les recommandations re`glementaires. Pour ces dernie`res, l’eau ne doit pas eˆtre bue ou utilise´e pour faire la cuisine, tant que la concentration de dinoterbe y de´passe le seuil de 0,1 mg/L. Il me semble qu’on peut probablement continuer a` l’utiliser pour se laver, en recommandant de prendre des douches plutoˆt que des bains et en re`gle
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ge´ne´rale, pas plus d’une par jour, en se se´chant vite et bien apre`s le rinc¸age et en changent quotidiennement de serviette de bain.
e-mail : [email protected] Rec¸u le : 30 mars 2014. Accepte´ le : 30 mars 2014. 10.1016/j.admp.2014.03.217 Archives des Maladies Professionnelles et de l’Environnement 2014;75:333-334 1775-8785X/ß 2014 Publie´ par Elsevier Masson SAS.
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Pollution de l’eau par du dinoterbe§
Courrier des lecteurs
limite de qualite´ du Code de la sante´ publique de 0,1 mg/L reste un repe`re pour orienter les actions de gestion. Mme DV (Val-de-Marne)
Water contamination due to dinoterb R. Garnier Consultation de pathologie professionnelle, hoˆpital Fernand-Widal, 200, rue du Faubourg-Saint-Denis, 75475 Paris cedex, France
Question Une unite´ de distribution d’eau potable (UDI) a e´te´ contamine´e par du dinoterbe (de´sherbant – no CAS 1420-07-1). La recherche du dinoterbe fait l’objet d’une campagne d’analyses annuelles. Les pre´le`vements effectue´s les anne´es pre´ce´dentes ont tous e´te´ infe´rieurs a` la valeur de de´tection de 0,05 mg/L. Des analyses re´centes de la qualite´ de l’eau de l’UDI re´ve`lent la pre´sence de dinoterbe a` respectivement 0,31 et 7 mg/L vs 0,1 mg/L (valeur de re´fe´rence). Malgre´ nos recherches (Furetox), nous n’avons pas d’information sur des valeurs toxicologiques de re´fe´rence (VTR), des valeurs limites d’exposition (VLE) ou des valeurs guides (VG). Cependant, on apprend que cette mole´cule peut provoquer des intoxications graves par ingestion et des irritations cutane´es importantes (surtout quand la peau est humide). Nous nous interrogeons sur l’impact sanitaire de cette mole´cule dans cette UDI qui distribue de l’eau potable a` 1300 personnes et ne peut eˆtre de´rive´e. Avez-vous des e´le´ments d’information sur des valeurs toxicologiques de cette mole´cule dans l’eau potable (boisson, douche. . .) ? Sinon, peut-on conside´rer que cette mole´cule est suffisamment ressemblante en termes de toxicite´ et de comportement dans l’environnement a` celle du dinose`be et auquel cas utiliser sa DJT ? De notre point de vue, en l’absence de valeurs de re´fe´rence sur le dinoterbe et de donne´es plus pre´cises, la §
Toute question doit eˆtre transmise par mail avec vos coordonne´es pre´cises au docteur Dominique Lafon ([email protected]).
Re´ponse Je suis d’accord pour assimiler le dinoterbe aux autres de´rive´s du 2,4-dinitrophe´nol et en particulier, au dinose`be, les deux mole´cules ne diffe´rant que par leur chaıˆne late´rale en position 6 (tert-butyle pour le dinoterbe et isopentyle pour le dinose`be). En cas d’exposition unique ou re´pe´te´e, tous ces de´rive´s se comportent de la meˆme fac¸on, car ils ont le meˆme me´canisme d’action : ce sont des de´coupleurs de la phosphorylation oxydative. Ils bloquent la production d’ATP et provoquent une crise e´nerge´tique dans toutes les cellules ; les tissus qui souffrent le plus sont ceux qui consomment le plus d’e´nergie ; par ailleurs, le blocage de la chaıˆne respiratoire mitochondriale produit de la chaleur, donc des sueurs et une hyperpne´e pour maintenir la tempe´rature corporelle, puis quand ces me´canismes de de´fense sont de´passe´s, une hyperthermie. Il n’y a pas de VTR pour le dinoterbe, mais on peut utiliser celle propose´e par l’US-EPA pour le dinose`be : 1 mg/kg/j qui est issue d’un dose minimale ayant produit un effet toxique (LOAEL) de 1 mg/kg/j (effet critique : diminution de la prise de poids) dans une e´tude sur 3 ge´ne´rations chez le rat, en appliquant un facteur d’incertitude de 1000. Le dinoterbe est bien absorbe´ par voie digestive ; l’absorption cutane´e n’est pas chiffre´e, mais elle est probablement assez bonne, a` condition que le contact soit suffisamment prolonge´ (plusieurs heures). En pratique, a` la concentration maximale observe´e (7 mg/L), on peut conside´rer qu’un adulte ou un grand enfant absorberait 14 mg/j de dinoterbe du fait de l’eau de boisson (2 litres par j), un nourrisson de 5 kg au maximum 5,3 mg/j (0,75 litre par jour). Dans un sce´nario (tre`s) pessimiste, on pourrait conside´rer que l’absorption transcutane´e est au, maximum, de la moitie´ de cette dose, ce qui donnerait une absorption de 21 mg/j chez l’adulte et le grand enfant et de 8 mg/j chez le nourrisson : autrement dit, pas de proble`me chez les enfants d’au moins 21 kg, mais au-dessous, la VTR est de´passe´e. Cela
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R. Garnier
Archives des Maladies Professionnelles et de l’Environnement 2014;75:333-334
ne signifie pas qu’il y ait un risque grave pour la sante´, puisque le seul effet observe´ a` 1 mg/kg (soit une dose 500 a` 1000 fois plus e´leve´e) est une diminution de la prise de poids. En pratique, il faut rassurer la population, mais e´videmment, il faut e´galement respecter les recommandations re`glementaires. Pour ces dernie`res, l’eau ne doit pas eˆtre bue ou utilise´e pour faire la cuisine, tant que la concentration de dinoterbe y de´passe le seuil de 0,1 mg/L. Il me semble qu’on peut probablement continuer a` l’utiliser pour se laver, en recommandant de prendre des douches plutoˆt que des bains et en re`gle
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ge´ne´rale, pas plus d’une par jour, en se se´chant vite et bien apre`s le rinc¸age et en changent quotidiennement de serviette de bain.
e-mail : [email protected] Rec¸u le : 30 mars 2014. Accepte´ le : 30 mars 2014. 10.1016/j.admp.2014.03.217 Archives des Maladies Professionnelles et de l’Environnement 2014;75:333-334 1775-8785X/ß 2014 Publie´ par Elsevier Masson SAS.