71e Congrès de la Société nationale franc¸aise de médecine interne, Besanc¸on, 10–12 juin 2015 / La Revue de médecine interne 36S (2015) A19–A75 2
Médecine nucléaire, Centre Léon-Bérard, Lyon Médecine interne, Hôpital Édouard-Herriot, Lyon ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (F. De Charry) 3
Introduction L’association lymphome-sarcoïdose est à présent bien étudiée, dans ce cas la sarcoïdose précède le lymphome. Cependant, la présence d’un granulome chez des patients déjà porteurs d’une hémopathie ne doit pas faire conclure trop hâtivement à une sarcoïdose. La mise en évidence de lésions granulomateuses au cours du suivi de ces patients pose donc au clinicien plusieurs difficultés, entre crainte de passer à côté d’une rechute du lymphome et risque de conclure à tort à une sarcoïdose. Patients et méthodes Nous rapportons une étude rétrospective unicentrique, à propos de 13 cas pris en charge pour une hémopathie lymphoïde au centre Léon-Bérard (Lyon), chez qui étaient retrouvées au cours de la prise en charge des lésions granulomateuses. Les patients avec un antécédent avéré de sarcoïdose étaient exclus. Le type d’hémopathie, son traitement, le statut de la maladie au moment du granulome, le délai d’apparition du granulome par rapport à l’hémopathie, les symptômes associés, les anomalies biologiques, la fixation de l’hémopathie et du granulome au Pet scan (évaluée par le SUV), l’étiologie finalement retenue et l’évolution sont rapportés. Résultats Les différents sous-types de lymphomes rencontrés comprenaient 10 lymphomes non hodgkinien, dont 3 lymphomes T, et 3 lymphomes de Hodgkin. Le délai médian d’apparition du granulome était de 23 mois (4–128 mois). Les étiologies de ces granulomatoses étaient variées : 4 sarcoïdoses, 2 tuberculoses, 2 rechutes de l’hémopathie, 1 allergie médicamenteuse, 1 entéropathie inflammatoire, 1 granulome annulaire généralisé et 2 granulomes réactionnels isolés c’est-à-dire sans étiologie retrouvée. Lors de la découverte du granulome, 38,5 % des patients présentaient une altération de l’état général, et 46,1 % présentaient d’autres symptômes : arthralgies, dyspnée, uvéite antérieure, toux. Au niveau biologique il existait une élévation de l’enzyme de conversion de l’angiotensine dans 46 % des cas, une élévation de la CRP dans 46 %, et tous les patients avaient une calcémie normale. Le SUV moyen pour les hémopathies était de 20,65 (4,8–40,5), alors que le SUV moyen pour les granulomatose était de 8,1 (4,9–10,5). 7 patients ont bénéficié d’un traitement spécifique (corticothérapie, antibiothérapie). Au cours du suivi seuls 2 patients ont rechuté et un patient est décédé. Le délai médian de surveillance était de 33 mois (3–127 mois). Conclusion Au cours des lymphomes, des lésions granulomateuses peuvent être mises en évidence au cours du suivi d’un patient, posant alors le problème de l’étiologie de la granulomatose : il faut savoir traquer une récidive de l’hémopathie, ou rechercher une infection opportuniste favorisée par l’immunodépression cellulaire. La fixation au Pet scan pourrait aider à différencier un granulome d’une rechute de l’hémopathie : localisation différente, évolution dissociée avec apparition de nouvelles fixations et régression des anciennes fixations, fixation moins intense. Ainsi, le diagnostic d’une authentique sarcoïdose ou d’une réaction granulomateuse idiopathique ne doivent être que des diagnostics d’élimination, le praticien ne doit pas hésiter à re-biopsier tout patient qui semble rechuter. Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article. http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2015.03.284 CO054
Prescription et rentabilité diagnostique du bilan paraclinique au diagnostic de thrombopénie immunologique. Résultats du registre CARMEN
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G. Moulis 1,∗ , T. Comont 1 , N. Brun 2 , C. Dingremont 3 , B. Castel 4 , S. Arista 5 , S. Madaule 6 , P. Montané De La Roque 7 , L. Prudhomme 8 , M. Lapeyre-Mestre 9 , O. Beyne-rauzy 10 , D. Adoue 11 , Groupe des investigateurs de CARMEN 1 Service de Médecine Interne, CHU de Toulouse, Toulouse 2 Service de Médecine Interne, Centre hospitalier de Rodez, Rodez 3 Service de Médecine Interne, Centre hospitalier de Bigorre, Tarbes 4 Service de Médecine Interne, Centre hospitalier de Lourdes, Lourdes 5 Service de Médecine Interne, Centre hospitalier d’Auch, Auch 6 Service de Médecine Interne, Centre hospitalier d’Albi, Albi 7 Service de Médecine Interne, Centre hospitalier du Val-d’Ariège, Pamiers 8 Service de Médecine Interne, Centre hospitalier du pays d’Autan, Castres 9 Inserm UMR 1027, Faculté de Médecine, Toulouse 10 Service de médecine interne et immunopathologie clinique, Institut Universitaire du Cancer, avenue Irène-Joliot-Curie, Toulouse 11 Service de rhumatologie et immunologie clinique, place du Docteur-Baylac, Toulouse, France ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (G. Moulis) Introduction Le bilan paraclinique au diagnostic de thrombopénie immunologique (TI) n’est pas consensuel. En France, le protocole national de diagnostic et de soins (PNDS) sur la prise en charge de la TI, édité en 2009, recommande ou suggère en fonction du contexte clinique un certain nombre d’examens paracliniques. La réalisation de ces examens en pratique courante est inconnue. De même, leurs rentabilités diagnostiques sont largement méconnues. L’objectif de ce travail était de répondre à ces deux questions. Patients et méthodes La source de données est le registre Cytopénies Auto-immunes : Registre Midi-PyrénéEN (CARMEN) [1]. Ce registre recueille prospectivement la prise en charge « en vie réelle » des TI incidentes de l’adulte en Midi-Pyrénées depuis juin 2013. Il vise l’exhaustivité. Ainsi, 20 centres investigateurs participent, incluant le CHU de Toulouse, tous les centres hospitaliers généraux et locaux dotés d’internistes ou hématologues, ainsi que deux établissements privés répartis sur tout le territoire régional. Un investigateur dans chaque centre inclut prospectivement tous les patients avec un nouveau diagnostic de TI et qui sera suivi dans la région, que le diagnostic soit fait en consultation ou en hospitalisation. En l’absence de refus de participation, les données recueillies sont les caractéristiques démographiques, le terrain, la description clinique de la TI, les examens prescrits au diagnostic (liste du PNDS) et leurs résultats, les traitements rec¸us, les numérations plaquettaires, les évènements indésirables et médicalement significatifs. Chaque patient est suivi pendant 10 ans. Nous avons décrit la fréquence de prescription des examens paracliniques listés dans le PNDS et réalisés au diagnostic de TI chez les patients inclus entre le 1/6/2013 et le 31/12/2014. Leurs résultats ont été décrits à la lumière du contexte clinico-biologique afin d’évaluer leur rentabilité diagnostique. Résultats Cent vingt et un patients ont été inclus pendant la période d’étude. Huit patients ont été exclus : 7 pour refus de participation et 1 pour résidence semestrielle en Île-de-France. L’âge médian au diagnostic était de 65 ans (extrêmes : 17–95 ans). La moitié était des femmes, 33 (29,5 %) avaient un antécédent personnel ou familial de maladie auto-immune, 23 (20,3 %) ont eu un syndrome infectieux dans les 6 semaines avant les premiers signes, 24 (21,3 %) avaient une TI secondaire, 57 (50,9 %) avaient des signes hémorragiques. La numération plaquettaire médiane était de 17 G/L (extrêmes : 1–126), le score hémorragique médian de 5 (extrêmes : 0–35). Soixante-douze (63,7 %) ont eu un traitement de la TI dans le mois suivant le diagnostic. Un myélogramme fût réalisé chez 87 (78,4 %) patients, dont 53 (86,9 %) chez des patients de plus de 60 ans. Parmi eux, des signes de dysmyélopoïèse étaient notés chez 17 (32,1 %), deux cytopénies réfractaires avec dysplasie unilignée et deux cytopénies réfractaires avec dysplasie multilignée étaient retenues. Trois de ces
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4 patients avaient d’autres cytopénies. Les anticorps antinucléaires (ACAN) étaient réalisés chez 95 (88,0 %) patients. Ils étaient positifs (≥ 1/160) dans 37 cas (38,9 %) avec une spécificité dans 14 cas (SSA, n = 8 ; SS-B, n = 3 ; ADN, n = 3 ; centromère, n = 2 ; Mi2, n = 1). Ils étaient associés à des signes cliniques dans 4 cas : 2 avec syndrome de Sjögren connu, une découverte de lupus et une découverte de syndrome de Sjögren. La recherche d’anticorps antiphospholipides était réalisée chez 36 (31,8 %) patients, positive chez 1 (triple positivité) chez une patiente lupique. Le test de Coombs était réalisé chez 47 (42,7 %) patients. Il était positif dans 9 cas, dont 8 avaient une anémie ou des signes d’hémolyse. Les anticorps anti-plaquettes étaient réalisés dans deux centres (ELISA pour l’une, MAIPA pour l’autre). L’électrophorèse des protides était réalisée chez 91 (82,0 %) cas, montrant une hypogammaglobulinémie < 5 g/L dans 2 cas dont un avec lymphopénie. Les sérologies VIH, VHB et VHC étaient réalisées respectivement dans 86 (78,2 %), 97 (87,4 %) et 89 (80,9 %) cas, dont 4 avec cytolyse hépatique. Aucune infection non connue n’était dépistée. La recherche d’infection à Helicobacter pylori était faite chez 7 (6,2 %) patients, positive chez un. La TSH était dosée dans 56 (51,6 %) cas, pathologique dans 7 (12,5 %) cas, dont 3 n’avaient pas de cause connue. Une imagerie abdominale était réalisée dans 40 (36,4 %) cas, montrant une seule splénomégalie déjà perc¸ue cliniquement. Conclusion La plupart des examens proposés dans le PNDS étaient prescrits. Hormis pour les ACAN dont la positivité fait prescrire de l’hydroxychloroquine, la rentabilité diagnostique de ces examens paraît faible en dehors de tout contexte clinique. Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article. Référence [1] Moulis G, Sailler L, Adoue D, Lapeyre-Mestre M. Pharmacoepidemiology of immune thrombocytopenia: protocols of FAITH and CARMEN studies. Therapie 2014;69:437–48. http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2015.03.285 CO055
Le ration kappa/lambda des chaînes légères libres sériques est un biomarqueur prédictif de la rechute dans la thrombopénie auto-immune idiopathique Y. Guillermin 1 , A.S. Michallet 1 , C. Lombard 2 , C. Chapuis Cellier 2 , Q. Reynaud 3 , A. Chuilon 4 , G. Salles 5 , I. Durieu 6 , J.C. Lega 7,∗ 1 Hématologie, Centre Hospitalier Lyon-Sud, Pierre-Bénite 2 Biologie immunologie, Centre Hospitalier Lyon-Sud, Pierre-Bénite 3 Médecine interne, avenue Albert-Raimond, Saint-Étienne 4 Hématologie immunologie, The Binding Site, Saint-Égrève 5 Département d’hématologie, CHU Lyon-Sud, Hospices Civils de Lyon, Lyon 6 Médecine interne, Centre Hospitalier Lyon-Sud, Pierre-Bénite 7 Médecine interne et vasculaire, chemin du Grand-Revoyet, 69310 Pierre-Bénite ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (J.C. Lega) Introduction La thrombopénie auto-immune idiopathique (TAI) est une maladie d’évolution imprévisible, avec un passage à la chronicité dans plus de 80 % des cas. Il n’existe à ce jour aucun biomarqueur prédictif d’une rechute. Nous avons étudié les chaînes légères libres (CLL) sériques Kappa et Lambda comme facteur pronostique dans la TAI. Patients et méthodes Dans une étude rétrospective transversale, nous avons testé les sérums de patients recueillis en sérothèque entre 2006 et 2013 et conservés à −20 ◦ C. Les patients inclus dans l’étude avaient plus de 18 ans et une TAI idiopathique. Ont été exclus les patients insuffisants rénaux et les thrombopénies secondaires (hémopathies malignes, lupus, VIH, VHC ou VHB). Les CLL kappa (K), et lambda (L), ont été dosées par le test FREELITETM
(The Binding Site, Birmingham, Royaume-Uni). La somme (K + L) ainsi que le rapport K/L ont été calculés puis comparés aux valeurs obtenues dans une population européenne saine de 282 individus. La rechute de la TAI était définie par une concentration plaquettaire < 30 G/L. Le seuil pronostique optimal des CLL était déterminé par courbe ROC. Les comparaisons de moyenne ont été faites par les tests de Student ou de Mann-Whitney, les comparaisons de proportion avec le test exact de Fisher. Les analyses de survie ont été réalisées selon les modèles de Kaplan-Meier et de Cox. A été considéré comme statistiquement significative une valeur de p < 0,05. Résultats Parmi les 66 patients (âge 45,2 ± 19,9, 41 femmes) inclus, 55 patients avaient un dosage plaquettaire concomitant du dosage des CLL (moyenne 34 G/L ± 23 ; min 5–max 99 G/L). Les plaquettes étaient entre 30–100 G/L chez 26 (47 %) patients. Aucun n’avait un taux de plaquettes > 100 G/L. Quarante et un dosages de CLL (62 %) étaient réalisés au diagnostic, 15 patients avaient été traités précédemment (corticoïdes n = 15, splénectomie n = 5, rituximab = 3, azathioprine = 2). Cinquante-deux (83 %) patients ont été suivis (médiane 2,8 ans, min 0,1–max 13,1) parmi lesquels 40 (76 %)ont rec¸u un traitement (en monothérapie : corticoïdes n = 9, immunoglobulines n = 1, dapsone n = 1 ; en association avec les corticoïdes, immunoglobulines, n = 24, rituximab n = 4, ou splénectomie n = 1). La durée médiane de la maladie avant la réalisation du dosage des CLL était de 0 année (min 0,0, max 60,1). Par rapport aux témoins, les patients avaient une augmentation significative (p < 0,0001) des concentrations en CLL K (15,1 ± 7,35 versus 8,4 ± 4,5), et L (15,9 ± 5,7 versus 13,4 ± 5,2) et une augmentation significative de la somme (K + L) (31,1 ± 12,0 versus 21,8 ± 9,0), et du ratio K/L (0,95 ± 0,25 versus 0,63 ±0,23). Un ratio K/L > 1 a été retrouvé chez 42 % des patients et 6 % des témoins (p < 0,0001). Aucune corrélation n’a été retrouvée entre la concentration des gammaglobulines (moyenne 15,5 ± 0,8 g/L) et celle des CLL K (p = 0,41) et L (p = 0,64). De même, aucune corrélation n’a été observée entre les concentrations des CLL K (p = 0,88), L (p = 0,59), la somme K + L (p = 0,71), et le ratio K/L (p = 0,42) et la concentration des plaquettes lors du dosage initial. Un ratio K/L > 1 était associé à un sur-risque de rechute de la TAI (18 % versus 50 % de rechutes, délai de rechute moyen médian 85 versus 39 mois ; HR 4,1, IC 1,48–11,4, p = 0,02) pour l’ensemble des patients suivis. Dans un modèle multivarié, seuls l’âge des patients (HR 0,96, IC 0,92–0,99) et le ratio K/L > 1 (HR 4,93, IC 1,69–14,37) étaient prédictifs de la rechute pour l’ensemble de la cohorte. Le ratio K/L > 1 était associé à une rechute (13 % versus 55 % de rechutes ; délai de rechute médian 7 versus 4 mois ; HR 9,71, IC 1,84–51,26, p = 0,007) pour les 25 patients ayant une thrombopénie < 30 G/L lors du dosage et mis en rémission par les traitements. Ces résultats étaient indépendants de l’âge des patients, du délai entre le diagnostic de la maladie et le dosage des CLL, et de l’exposition aux immunosuppresseurs postérieure ou antérieure aux dosages. Les concentrations des CLL K (HR 0,97 IC 0,87–1,05), L (HR 0,93 IC 0,84–1,03), K + L (HR 0,97 IC 0,92–1,02) n’étaient pas corrélées à la rechute dans les deux populations. Conclusion Dans la TAI, l’augmentation des CLL et notamment des chaînes Kappa témoignent d’une activation lymphocytaire B, conduisant à un déséquilibre de la synthèse des CLL et du ratio K/L par rapport à une population témoin. Cette augmentation des CLL Kappa n’est pas associée à l’activité de la maladie au diagnostic et au suivi. Il apparaît que seul le déséquilibre du ratio constitue un facteur prédictif de rechute de la TAI. Chez les patients avec un ratio K/L > 1, un suivi renforcé est nécessaire. Ils constituent un sousgroupe particulièrement à risque de rechute qui pourrait bénéficier d’un traitement prolongé. Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article. http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2015.03.286