Prescrire une cure thermale en ORL en complément d’un traitement homéopathique de terrain

Prescrire une cure thermale en ORL en complément d’un traitement homéopathique de terrain

La Revue d'Homéopathie 2012;3:63–66 Pratiques Prescrire une cure thermale en ORL en complément d'un traitement homéopathique de terrain Prescribing ...

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La Revue d'Homéopathie 2012;3:63–66

Pratiques

Prescrire une cure thermale en ORL en complément d'un traitement homéopathique de terrain Prescribing thermal spa treatment in ORL as a complement to a basic homepathic remedy Otorhinolaryngologiste à orientation homéopathique, professeur agrégé du Val de Grâce, Hôpital Saint Jacques, 37, rue des Volontaires, 75015 Paris, France

RÉSUMÉ La crénothérapie est reconnue pour son apport incontestable dans le traitement des affections ORL chroniques. Tout comme l'homéopathie, elle cherche à modifier le terrain par l'action des eaux thermales, tant localement sur les muqueuses des voies aérodigestives supérieures que de façon plus générale sur le patient. Fondé sur l'expérience, l'article propose de faire coïncider les caractéristiques des eaux thermales les plus utilisées en ORL avec le terrain homéopathique.

Jean-François Gouteyron

Mots clés Cures thermales Otorhinolaryngologie Homéopathie Terrain homéopathique

© 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Keywords SUMMARY Crenotherapy is recognised for its undisputed contribution to the treatment of chronic ENT disorders. Like homeopathy, it seeks to modify the terrain through the action of thermal waters, both locally on the mucous membranes of the upper respiratory-digestive routes as well as more generally on the patient. Based on experience, the article aims to equate the characteristics of the most frequently used thermal waters in ORL with the homeopathic terrain.

Crenotherapy Homeopathic terrain Homeopathy Otorhinolaryngology

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e thermalisme est une thérapeutique naturelle très utile dans le traitement des affections ORL chroniques. Il est intéressant d'en conjuguer les bienfaits avec ceux des traitements homéopathiques en fonction du terrain du patient et des caractéristiques des eaux thermales choisies.

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LA CRÉNOTHÉRAPIE EN ORL La crénothérapie possède une action reconnue depuis plusieurs millénaires, qui ne se dément pas, puisqu'en 2010, environ 500 000 curistes sont venus © 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. http://dx.doi.org/10.1016/j.revhom.2012.04.001

passer en moyenne 21 jours de soins dans près de 150 stations. Dans leur grande majorité, ces cures, prescrites par un praticien, sont prises en charge par la Sécurité sociale. Selon le Conseil national des exploitants thermaux (CNETh), les prescriptions de cures thermales ne représentent que 0,28 % des dépenses de santé. En 2008, à l'initiative du CNETh, un Livre blanc intitulé Thermalisme et santé publique : vers de nouvelles convergences a réuni les synthèses de six tables rondes auxquelles ont participé plus d'une centaine d'experts scientifiques et médicaux autour de la question de l'utilisation de la médecine thermale au

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Pratiques service de la Santé publique, notamment au regard des nouveaux défis qui lui sont posés : prévention, vieillissement, maîtrise des dépenses. . . Ce document a été remis en mars 2008 à Mme Roselyne Bachelot, ministre de la Santé. Il est intéressant de noter que l'homéopathie partage ces mêmes challenges. L'otorhinolaryngologie fait partie de l'orientation thérapeutique « voies respiratoires », ce qui est tout à fait logique puisque la muqueuse qui tapisse les voies aériennes supérieures n'est que le prolongement de celle qui recouvre la trachée et les bronches ; même constitution histologique, même réactivité physiopathologique. Il n'est donc pas étonnant que pathologies ORL et respiratoires soient aussi intriquées. Toutes deux participent à la réactivité propre de l'individu confronté à son environnement tant physique que psychique, toutes deux sont le siège d'une réponse individualisée, spécifique, selon le terrain du patient. Crénothérapie et homéopathie se rejoignent donc sur cette notion fondamentale du traitement du terrain sans lequel il est impossible de contrôler ou d'obtenir la guérison des poussées inflammatoires chroniques et récurrentes des pathologies ORL. La crénothérapie ne se limite pas en l'utilisation thérapeutique des eaux thermales. Elle allie plusieurs bénéfices : celui d'un rôle préventif de par les conseils d'hygiène de vie avec souvent des conseils diététiques et un exercice physique adapté, alternant avec des périodes de repos afin de procurer une bonne détente psychologique. La cure thermale est ainsi le moment privilégié d'une véritable éducation à la santé. Le choix de la période de cure est également important afin de bénéficier de conditions climatiques optimales selon la localisation de la station. Les eaux thermales ont des caractéristiques physiques et chimiques qui font l'objet de contrôles très stricts et qui donnent lieu à des certifications. Leurs indications thérapeutiques sont soumises à des agréments délivrés par le ministère de la Santé.

Les eaux thermales utilisées en ORL Les eaux thermales utilisées en ORL sont les eaux sulfurées et chlorobicarbonatées.

Les eaux sulfurées Les eaux sulfurées sont caractérisées par la présence d'hydrogène sulfuré (H2S), de sulfures, associés à des oligoéléments, des gaz dissous, des matières organiques. On distingue :  les eaux sulfurées sodiques (H2S + Na) d'origine géologique profonde, volcanique. Leur pH est alcalin (8-10) et ce sont des eaux chaudes (30 à 70 8C). Elles contiennent de la silice. Elles se rencontrent préférentiellement dans la chaîne axiale des Pyrénées. Les stations les plus fréquentes sont Luchon (630 m d'altitude), Cauterets (930 m), Amélie-les-Bains (230 m), Cambo (50 m) ;

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 les eaux sulfurées calciques (H2S + Ca) ont une

origine plus superficielle, un pH souvent neutre et une température de 10 à 30 8C. On les trouve dans les Alpes à Aix-Marlioz (250 m), Digne (650 m), Gréoux (400 m), Uriage (416 m) ;  les eaux sulfurées chlorurées sodiques et arsenicales (H2S + Na + As) sont rencontrées dans le Morvan à Saint-Honoré-les-Bains (300 m). Leur pH est neutre et leur température d'émergence de 24 à 30 8C. Ces eaux sont les plus douces des eaux sulfurées, elles occupent une place intermédiaire entre les eaux à forte sulfuration et les eaux bicarbonatées.

Les eaux chlorobicarbonatées Parmi les eaux chlorobicarbonatées, on distingue :  les eaux chlorurées sodiques et arsenicales (Na + Cl + As), d'origine volcanique profonde, ont un pH  7 et une température chaude (40 à 56 8C). Elles sont riches en gaz carbonique et en bicarbonates. On les trouve dans le Massif central à La Bourboule (850 m), au Mont-Dore (1 050 m). Ces eaux contiennent des arséniates, de la silice, du calcium et des gaz (carbonique et rares) qui sont captés à l'émergence des sources et utilisés dans les inhalations et aérosols. Ces stations sont en moyenne altitude à un niveau pauvre en pneumallergènes.  les eaux chlorurées sodiques, calciques et magnésiennes (Na + Cl + Ca + Mg), ce sont les eaux très chaudes (66 8C) de Bourbonne (270 m), en Champagne, issues des failles entre le plateau de Langres et les premiers contreforts des Vosges, riches en oligoéléments métalliques et qui sont isotoniques au sérum. Elles ont des vertus sédatives sur les muqueuses ORL.

LES CONTRE-INDICATIONS À LA CRÉNOTHÉRAPIE Avant d'envisager l'influence des eaux thermales sur le terrain homéopathique, rappelons les contre-indications à la crénothérapie :  les altérations importantes de l'état général ;  les cancers évolutifs ;  les états infectieux aigus qui doivent être traités et stabilisés avant la cure ;  l'immunodépression en phase active, évolutive ;  les accidents vasculaires cérébraux récents ;  l'insuffisance cardiaque sévère ;  l'hypertension artérielle évolutive.

DIATHÈSES HOMÉOPATHIQUES ET CURES THERMALES Psore Les psoriques font souvent l'objet d'infections ORL chroniques, facilitées par leur mauvaise élimination due

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à des surcharges métaboliques. Ils supportent assez bien le soufre à condition de ne pas être complètement bloqués au niveau de leurs émonctoires. Le soufre thermal pénètre dans l'organisme par les voies aériennes, cutanées et digestives. Il est actif sur les glandes à mucus du tractus respiratoire et possède des actions trophiques et cicatrisantes, antiseptiques, mucolytiques. Les eaux sulfurées leur conviendront à condition de bien les préparer en facilitant le drainage avant et pendant la cure thermale. On évitera ainsi la traditionnelle « réaction thermale » susceptible d'apparaître dans les 10 premiers jours et qui se manifeste par une vasodilatation et congestion des muqueuses nasales et pharyngées avec hypersécrétion. Parfois, il y a même réactivation des foyers infectieux latents ou des phénomènes allergiques, responsables de fièvre et de fatigue.  Chez les psoriques très réactifs, les stations pyrénéennes sulfurées sodiques peuvent être conseillées. Le drainage homéopathique sera quotidien avec des dilutions basses de Nux vomica et de Sulfur associées à des draineurs hépatorénaux (Carduus marianus, Chelidonium, Solidago, Berberis. . .).  Chez les psoriques moins réactifs, on peut proposer les stations thermales des Alpes aux eaux sulfurées calciques, voire celles plus douces de SaintHonoré-les-Bains dans le Morvan. Ainsi seront traitées principalement :  les rhinorrhées mucopurulentes chroniques avec écoulement postérieur ;  les sinusites chroniques, purulentes ou hypertrophiques avec images maxillaires « en cadre » et avec souvent une participation ethmoïdale au scanner ;  les rhinites hypertrophiques et croûteuses de type ozène (rares), mais surtout beaucoup plus fréquentes d'origine iatrogène (séquelles de multiples chirurgies nasales endoscopiques qui ont bouleversé la physiologie nasale) ;  les angines à répétition chez l'enfant lorsque l'amygdalectomie est contre-indiquée ;  les amygdalites chroniques cryptocaséeuses de l'adulte ;  les pharyngites granuleuses ou atrophiques ;  les otites chroniques non cholestéatomateuses ou les otites séromuqueuses (à condition que nous soyons dans la psore). Notons également l'excellent apport des eaux thermales sulfurées en qualité de soins de suite après une chirurgie ORL pour le traitement d'un foyer infectieux chronique (chirurgie endoscopique nasosinusienne).

Tuberculinisme Les patients qui ont un terrain phospho-tuberculinique ont une grande réactivité de leurs muqueuses respiratoires avec des manifestations inflammatoires exagérées et une extrême sensibilité météorologique. Chez

Pratiques eux, il vaut mieux éviter les eaux sulfurées souvent irritantes et choisir des eaux chloro-bicarbonatées sodiques et arsenicales, plus apaisantes pour l'hyperréactivité des muqueuses ORL. Sont principalement concernés :  l'allergie nasosinusienne et le terrain atopique bénéficieront des traitements thermaux dans les stations de moyenne altitude, pauvres en pneumallergènes (La Bourboule, Le Mont-Dore) ;  les rhinites vasomotrices hypertrophiques dont l'évolution est désespérante devant l'échec des traitements allopathiques. La crénothérapie vient souvent renforcer le traitement homéopathique de terrain (Pulsatilla, Natrum muriaticum, Phosphorus). Il peut être utile de prescrire le traitement homéopathique en basse dilution pour favoriser le drainage, associé à Hydrastis, Sanguinaria, Sepia. . .  les laryngites et trachéites spasmodiques, équivalents asthmatiformes et bien sûr l'asthme ;  les soins de suite, après une chirurgie de la polypose nasosinusienne, lorsque l'on est dans la diathèse, on obtient souvent au retour d'une cure thermale une excellente cicatrisation des néocavités sinusiennes recouvertes d'une muqueuse non exubérante et sans cloisonnement ;  les soins de soutien après une chirurgie fonctionnelle des cordes vocales. Pendant la cure, la rééducation vocale est souvent continuée ;  sans oublier les séquelles tympaniques atélectasiques des otites chroniques muqueuses chez l'enfant, pour lequel la cure thermale va retarder et souvent éviter la pose répétitive d'aérateur, voire la chirurgie des séquelles tympaniques (poches de rétraction). . .

Terrain lutéique Enfin, nous utiliserons les eaux chlorurées sodiques riches en calcium et magnésium de Bourbonne pour les patients agités et anxieux sur un terrain luétique.

TENIR COMPTE DE LA RÉACTIVITÉ DE CHAQUE PATIENT Le but de cette communication est de donner des repères pour mieux prescrire un traitement thermal complémentaire des soins effectués. La catégorisation des eaux thermales ne s'applique pas toujours de façon parfaite aux terrains diathésiques homéopathiques, car ceux-ci sont souvent intriqués. Il faudra tenir compte de la réactivité aux traitements déjà prescrits pour chaque patient. Dans notre expérience hospitalière, la prescription d'une cure thermale en ORL s'est toujours révélée d'un apport très positif pour le traitement des pathologies chroniques. Celles-ci sont trop souvent désarmantes pour le praticien confronté aux difficultés du décryptage de la physiopathologie du terrain du patient. 65

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Cure thermale, mode d'emploi Depuis la convention de mars 1997, pour prescrire une cure thermale, le médecin traitant ou le spécialiste doit remplir un formulaire « cure thermale » et le confier à l'assuré en vue d'un accord préalable à demander à sa caisse d'Assurance maladie. Cette procédure facilite le tiers payant et la connaissance du montant des prestations supplémentaires (voyage, hébergement). Le malade complète ce document et fournit des justificatifs s'il prétend à des prestations complémentaires (frais de voyage et de séjour) en plus du forfait des soins. Il l'adresse à son centre de Sécurité sociale. L'Assurance maladie ne prend en charge que :  les frais de soins thermaux à hauteur de 65 % ;  les honoraires de surveillance médicale à hauteur de 70 %. L'accord préalable pour une durée renouvelable reste obligatoire en cas d'accident du travail, de maladie professionnelle (AT-MP), ou de cure avec hospitalisation ou à l'étranger. Pour cette minorité des curistes (affection longue durée, maladie professionnelle, accident du travail, patients économiquement défavorisés), l'Assurance maladie peut prendre en charge une indemnité forfaitaire pour frais d'hébergement et de transport (qui reste largement inférieure aux dépenses réelles du patient). La plupart du temps, les trois quarts des coûts de la cure restent à la charge du patient, tout particulièrement ceux liés aux frais d'hébergement. Durant la cure, la prescription et le suivi sont assurés par un médecin exerçant dans la station, choisi par le patient. En cas d'efficacité, on peut prescrire au moins trois cures successives ; des pauses thérapeutiques sont conseillées. Après la prescription d'une cure thermale par le médecin traitant, le curiste devra donc se préoccuper du transport dans la station choisie, du logement pendant la cure, du contact avec le médecin qui surveillera le traitement thermal lors de la cure et de la réservation auprès de l'établissement. Alain Sarembaud

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Lorsqu'au retour d'une cure thermale, un enfant revient avec des tympans normaux, ou que l'on a évité chez un adulte des épisodes aigus sinusiens au cours de l'hiver suivant, force est de constater que la crénothérapie a bien atteint son but dans une démarche de Santé publique. Déclaration d'intérêts L'auteur déclare ne pas avoir de conflit d'intérêt en relation avec cet article.

POUR EN SAVOIR PLUS Guermonprez M, Pinkas M, Torck M. Matière médicale homéopathique. Boiron; 1997. Maduro R, Marchand J. La crénothérapie en oto-rhino-laryngologie. Arnette; 1967. Pieraggi J. Cures thermales en pathologie respiratoire chez l'enfant. Cahiers de Biothérapie 1986;(91):supp 53-59. Thermalisme et santé publique : vers de nouvelles convergences. Livre blanc. Conseil national des exploitants thermaux. Février 2008. Consultable à l'URL : www.afreth.org/LBlanc.pdf.