Annales Françaises d’Anesthésie et de Réanimation 25 (2006) 11–16 http://france.elsevier.com/direct/ANNFAR/
Article original
Prise en charge anesthésique de la femme enceinte pour cœliochirurgie gynécologique non obstétricale à la maternité de Clermont-Ferrand Pregnant woman anaesthetic management in gynaecologic laparoscopic surgery at the maternity hospital of Clermont-Ferrand S. Colomb a, M. Bonnin a,*, F. Bolandard a, Y. Lenglet b, P. Duband a, H. Roman b, M. Canis b, J.E. Bazin a a
Département d’anesthésie–réanimation, polyclinique, Hôtel-Dieu, CHU de Clermont-Ferrand, 63001 Clermont-Ferrand, France b Service de gynécologie–obstétrique, polyclinique, Hôtel-Dieu, CHU de Clermont-Ferrand, 63001 Clermont-Ferrand, France Reçu le 8 avril 2005 ; accepté le 23 août 2005 Disponible sur internet le 26 octobre 2005
Résumé Objectif. – Évaluer la prise en charge anesthésique de la femme enceinte pour cœliochirurgie gynécologique non obstétricale. Type de l’étude. – Enquête rétrospective, monocentrique. Patientes et méthodes. – Étude des dossiers anesthésiques et obstétricaux des 27 femmes enceintes opérées en cours de grossesse dans l’établissement de janvier 2001 à juillet 2004. Résultats. – Vingt-sept patientes ont été recensées. Le terme moyen lors de la pratique de la cœliochirurgie était de 15 SA avec un cas à 30 SA. La durée moyenne de la chirurgie était de 61 minutes avec une durée moyenne de pneumopéritoine de 28 minutes. Une anesthésie générale a été pratiquée dans 24 cas, et une anesthésie locorégionale dans 3 cas. Il n’y a pas eu de complications chirurgicales, anesthésiques, ni obstétricales en période péri-interventionnelle. Conclusion. – La réalisation d’une cœliochirurgie en cours de grossesse nécessite une prise en charge bidisciplinaire anesthésique et obstétricale. Le pneumopéritoine n’a pas plus de conséquences hémodynamiques et respiratoires que chez la femme non enceinte. La gestion anesthésique de la chirurgie laparoscopique chez la femme enceinte ne pose donc pas de problème spécifique et nécessite la même rigueur de prise en charge que pour toute chirurgie réalisée au cours de la grossesse en dehors de l’accouchement. © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Abstract Objective. – To evaluate the anaesthetic management intended for pregnant women in the field of non obstetric and gynaecologic laparoscopic surgery. Study design. – Retrospective and monocentric investigation. Patients and methods. – Analysis of the anaesthetic and obstetric files from 27 pregnant women operated on in the establishment, between January 2001 and July 2004. Results. – 27 female patients involved in the study. The mean pregnancy term was 15 weeks when laparoscopic surgery was performed, though a single patient was at 30 weeks. The average duration of the surgery was 61 minutes, of which 28 minutes were dedicated to pneumoperitoneum. Twenty-four patients underwent general anaesthesia, the three others underwent locoregional anaesthesia. During the perioperative period no surgical, anaesthetic or obstetric complications were observed. Conclusion. – Laparoscopic surgery during pregnancy requires double skilled management, both in anaesthesiology and obstetrics. On haemodynamics and breathing, pneumoperitoneum does not induce any additional effects when compared to operations without pregnancy.
* Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (M. Bonnin). 0750-7658/$ - see front matter © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.annfar.2005.08.021
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Except with delivery cases, anaesthetic support in laparoscopic surgery intended for pregnant women eventually does not generate any specific problems, but requires the same rigorous management as the one usually following surgery for pregnant patients. © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Cœliochirurgie ; Grossesse ; Prise en charge anesthésique ; Prise en charge obstétricale Keywords: Laparoscopic surgery; Pregnancy; Anaesthetic management; Obstetrical management
1. Introduction La grossesse a longtemps été considérée comme une contre-indication absolue à la cœlioscopie en raison des modifications hémodynamiques et respiratoires induites par le pneumopéritoine avec insufflation intrapéritonéale de dioxyde de carbone (CO2) possiblement néfastes pour la mère et le fœtus [1,2]. Certaines études ont cependant montré que le pneumopéritoine au CO2 n’avait pas plus de conséquences que chez la femme non enceinte, et que les éventuelles perturbations percœlioscopiques observées disparaissaient à l’exsufflation avec l’absence de conséquences maternelles et fœtales à long terme [3]. D’abord réalisée uniquement au premier trimestre, un nombre croissant de cas et séries de cas rapportent la pratique de la chirurgie laparoscopique chez la femme enceinte à des termes plus avancés [4,5]. Des travaux démontrent en effet que la cœlioscopie n’augmente pas la morbidité ni la mortalité maternofœtales [6,7]. L’anesthésie pour chirurgie cœlioscopique non obstétricale chez la femme enceinte doit prendre en compte à la fois les modifications physiologiques liées à la grossesse et les modifications induites par le pneumopéritoine. Elle nécessite une prise en charge bidisciplinaire entre anesthésistes et chirurgiens gynécologues obstétriciens pour la période peropératoire mais également postopératoire. L’objectif de notre étude a été d’évaluer la prise en charge anesthésique et obstétricale de ces patientes dans notre établissement, et ce afin d’établir un protocole anesthésique de gestion de la femme enceinte chez qui doit être pratiquée une chirurgie laparoscopique non obstétricale.
2. Patientes et méthodes Il s’agit d’une étude rétrospective menée en utilisant les données anesthésiques informatisées du service, durant la période de janvier 2001 à juillet 2004. Les femmes enceintes ayant bénéficié d’une cœlioscopie pour chirurgie gynécologique durant cette période ont été répertoriées. Les paramètres relevés ont été les caractéristiques biométriques, ainsi que les données anesthésiques et chirurgicales per- et postopératoires. Les données biométriques relevées ont été l’âge, le poids, l’indice de masse corporelle, la gestité, et la parité. Les éléments anesthésiques relevés ont été l’éventuelle prise de cimétidine (Tagamet®) avant l’induction, le type d’anesthésie pratiquée (anesthésie générale ou locorégionale), les agents anesthésiques utilisés et leurs posologies ; les autres
éléments peropératoires relevés ont été la pression artérielle minimale, la saturation artérielle du sang en oxygène minimale, les valeurs minimales et maximales de la capnographie observées pendant l’intervention sous ventilation assistée. Les paramètres chirurgicaux recueillis, outre l’indication opératoire, ont été la durée totale du pneumopéritoine avec la valeur moyenne de la pression intrapéritonéale peropératoire, la mise en position de Trendelenburg, la conversion de la voie d’abord cœlioscopique en laparotomie, et enfin la durée totale de l’intervention. Les paramètres anesthésiques postopératoires évalués concernaient l’analgésie et l’anticoagulation ; la mise en place d’une tocolyse postopératoire a été recherchée sur le plan obstétrical. La durée totale d’hospitalisation a également été relevée. Le terme de l’accouchement chez ces patientes, ainsi que le poids fœtal et le score d’Apgar ont également été consignés. Les données biométriques de la population étudiée sont présentées dans le Tableau 1 sous forme de moyennes (± écarttype), ou en médianes [extrêmes]. Les données descriptives Tableau 1 Données biométriques de la population ˆ ge (années) IMC (kg/m2) Cas A 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27
35 30 24 23 27 22 32 31 24 31 35 26 26 31 30 22 30 31 27 29 26 29 33 30 26 21 32
23 22 23 22 21 24 23 22 19 20 21 23 23 19 20 22 22 21 22 22 24 22 21 22 25 18 30
IMC : indice de masse corporelle.
Gestité 1 2 1 1 3 1 2 4 1 2 2 1 2 1 2 2 2 2 3 1 2 2 4 3 2 2 1
Parité 0 0 0 0 1 0 1 0 0 1 1 0 0 0 0 1 1 1 1 0 1 1 3 2 2 0 0
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Tableau 2 Données générales anesthésiques, chirurgicales, et obstétricales Cas
Terme (SA)
Anesthésie
Technique chirurgicale
Période postopératoire
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27
13 12 12 5 15 26 18 5 13 21 17 10 14 7 12 17 17 10 16 19 30 15 12 16 13 6 26
AG AG AG AG AG AG AG AG AG AG ALR ALR ALR AG AG AG AG AG AG AG AG AG AG AG AG AG AG
Cœlioscopie Cœlioscopie Cœlioscopie Cœlioscopie Cœlioscopie Cœlioscopie Laparotomie Cœlioscopie Laparotomie Cœlioscopie Cœlioscopie Cœlioscopie Cœlioscopie Cœlioscopie Cœlioscopie Cœlioscopie Cœlioscopie Mini laparotomie Cœlioscopie Cœlioscopie Cœlioscopie Cœlioscopie Laparotomie Cœlioscopie Cœlioscopie Cœlioscopie Cœlioscopie Cœlioscopie Cœlioscopie Cœlioscopie Cœlioscopie
– Tocolyse – – Tocolyse Tocolyse Tocolyse – Tocolyse Tocolyse Tocolyse – – Tocolyse Tocolyse Tocolyse Tocolyse – Tocolyse Tocolyse Tocolyse – – – – – –
Durée d’hospitalisation (jours) 4 4 3 2 4 9 8 2 6 3 3 3 3 4 4 4 3 2 7 4 2 2 1 1 2 1 3
Terme de l’accouchement (SA + jours) 41 39 + 3 39 37 40 38 36 + 5 39 39 + 4 39 + 3 40 + 1 39 40 39 + 5 39 41 + 1 40 + 6 39 + 2 37 40 + 3 38 + 4 26 39 40 + 2 40 40 + 2 40
SA : semaines d’aménorrhée. AG : anesthésie générale. ALR : anesthésie locorégionale type rachianesthésie avec péridurale combinée.
générales chirurgicales, anesthésiques, et obstétricales sont résumées dans le Tableau 2 3. Résultats Au total, 27 patientes ont été recensées (Tableau 1). L’âge moyen lors de la prise en charge chirurgicale était de 28 ans (± 4 ans). L’indice de masse corporel moyen était de 22 ± 2 kg/m2 avec un maximum de 24,5 kg/m2. La médiane de la gestité était de 2 [extrêmes : 1–4]. La médiane de la parité était de 0 [extrêmes : 0–3]. Dans 21 cas, l’indication opératoire était une résection de kyste ovarien et dans 6 cas une torsion d’annexe (Tableau 2). L’intervention a été réalisée au premier trimestre chez 14 patientes, au second trimestre chez 12, et au troisième à 30 SA dans un seul cas. Le terme moyen de la grossesse lors de la pratique de la chirurgie était de 15 SA [extrêmes : 5–30]. La durée moyenne de l’intervention était de 61 ± 31 minutes, avec une durée maximale de 120 minutes ; la durée moyenne du pneumopéritoine était de 28 ± 17 minutes pour les données collectées. Trois cœlioscopies ont secondairement été converties en laparotomie. Dans 2 cas la laparotomie a été pratiquée pour l’extraction d’un gros kyste et dans 1 cas pour l’extraction d’un endométriome avec adhérences multiples associées. À noter qu’une mini-laparotomie a été pratiquée
dans un autre cas pour l’extraction d’un kyste en sus-pubien. La position de Trendelenburg a été utilisée dans 17 cas. Une anesthésie générale a été pratiquée chez 24 des patientes, et une anesthésie locorégionale type rachianesthésie avec péridurale combinée a été pratiquée chez les 3 autres. La cimétidine a été administrée chez seulement 13 patientes. L’hypnotique d’induction utilisé dans les 24 cas d’anesthésie générale a été le propofol (Diprivan®) à une posologie moyenne de 196 ± 61 mg dans 10 cas, et le phénobarbital (Penthotal®) à une posologie moyenne de 248 ± 61 mg dans les 14 autres cas. Le curare d’induction utilisé était la succinylcholine (Célocurine®) dans seulement 4 cas, le dibésylate d’atracurium (Tracrium®) dans 13 cas, le bromure de vécuronium (Norcuron®) dans 2 cas, le chlorure de mivacurium (Mivacron®) dans 2 cas, et le bésylate de cisatracurium (Nimbex®) dans 2 autres cas. L’hypnotique d’entretien était un halogéné, à l’exception d’un cas pour lequel l’entretien a été effectué au propofol au pousse-seringue électrique. L’halogéné utilisé dans les autres cas était de l’isoflurane pour 10 d’entre eux, le desflurane pour 10 autres, et l’enflurane pour 2 autres. La pression artérielle moyenne minimale relevée a été de 63 ± 7 mmHg. Les valeurs de la capnographie peropératoire n’ont été notées que pour 17 des cas d’anesthésie générale ; la valeur maximale de la fraction expirée peropératoire de CO2 relevée était de 39 mmHg, la valeur minimale de 29 mmHg.
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En période postopératoire immédiate, 14 patientes ont dû être tocolysées sur une courte durée par indométacine (Indocid®) intrarectal, plus ou moins associé à un inhibiteur calcique par voie orale, type nifédipine (Adalate®) ou nicardipine (Loxen®) ; aucune des patientes n’a nécessité de tocolyse intraveineuse. La durée moyenne d’hospitalisation a été de 3 ± 2 jours. Il n’y a pas eu de complications per- ou postopératoires Le terme moyen de l’accouchement était de 39 SA et 3 jours. Une seule patiente a accouché prématurément à 26 SA, alors que la chirurgie avait été pratiquée à 15 SA. Il existait un tabagisme maternel important avec hypotrophie fœtale associée ; l’enfant allait bien après un séjour en réanimation néonatalogique. Le poids moyen des enfants était de 3200 ± 330 g. La médiane du score d’Apgar était de 9 à 0 et de 10 à 1 minutes.
4. Discussion La pathologie kystique annexielle apparaît être la cause la plus fréquente d’intervention chirurgicale au cours de la grossesse. En effet, la persistance échographique de kystes ovariens au-delà de 15 SA, ou encore la survenue de leurs complications doivent conduire à la chirurgie selon le Comité national des gynécologues et obstétriciens de France [8,9]. À noter que dans notre série, le kyste ovarien constituait la majorité des indications opératoires pendant la grossesse. La torsion d’annexe liée à un kyste ovarien, ou la rupture hémorragique de celui-ci imposerait une intervention chez une femme sur 2500 ; dans notre série, 6 des indications opératoires étaient constituées par une torsion d’annexe. En cas d’intervention chirurgicale, la laparoscopie et la laparotomie se discutent en fonction du rapport bénéfice/risque pour la mère et le fœtus [10,11]. Concernant la prise en charge anesthésique et chirurgicale, les résultats de la série que nous avons rapportés semblent encourageants puisqu’il n’y a eu aucune malformation, aucune perte fœtale, et seulement un accouchement prématuré à 26 SA. Ces résultats sont en accord avec ceux de la littérature. Une analyse rétrospective de 3 fichiers de recueil de naissances suédois sur 20 ans, comparant le devenir fœtal après cœlioscopie (n = 2181) ou laparotomie (n = 1522) pour chirurgie réglée et/ou complications, par rapport à 2 015 000 grossesses non opérées, retrouve un accroissement du risque d’accouchement prématuré en l’absence de différence significative entre laparotomie et laparoscopie en termes d’augmentation du risque d’anomalie congénitale par rapport à la population générale [12]. Une série de 5 cœlioscopies pour cholécystectomie pratiquée pendant la grossesse est confrontée à la littérature, totalisant ainsi 46 cas ; il n’est pas retrouvé d’accouchement prématuré ni de fausse couche spontanée, sachant qu’une tocolyse est nécessaire dans cinq cas [7]. En revanche, il est observé des résultats plus décevants pour la cœlioscopie en comparant 2 groupes de patientes : un groupe laparoscopie (n = 7) et un groupe laparotomie
(n = 5) ; le geste chirurgical est motivé par une appendicite aiguë dans 3 cas, une pancréatite biliaire dans 3 autres, et une cholécystite aiguë dans le dernier [13]. La laparotomie est effectuée pour résection de masses annexielles dans 4 cas et pour l’exploration d’un carcinome de l’ovaire dans un cas. Quatre pertes fœtales sont dénombrées dans le groupe cœlioscopie, sachant qu’il existe une hétérogénéité importante des pathologies et des facteurs de risque entre les 2 groupes [13]. Enfin, l’étude multicentrique récente conclue, sur 192 interventions sous laparoscopie vs 197 sous laparotomie, à une comparabilité des risques maternels et fœtaux per- et postopératoires [11]. Aucune de ces séries traitant de la cœliochirurgie pendant la grossesse n’évoque la prise en charge ni le protocole anesthésique utilisé, ni d’ailleurs la gestion anesthésique et obstétricale postopératoires [7,11–13] : c’était donc l’objectif de notre travail. Dans notre étude, 24 anesthésies générales ont été pratiquées. En effet, l’anesthésie générale apparaît être la technique de référence pour la bonne pratique de la laparoscopie ainsi que pour la tolérance des modifications physiopathologiques secondaires au pneumopéritoine ; l’intubation orotrachéale a été réalisée dans tous les cas selon les recommandations [14]. Il est important de rappeler l’importance de la préoxygénation lors de l’induction anesthésique chez la femme enceinte, ce qui a été effectué systématiquement dans les 24 cas [15]. Cependant, la cimétidine a été administrée avant l’induction anesthésique dans seulement 13 cas, alors que son administration est recommandée dès 20 SA [16]. Les risques liés à l’inhalation du contenu gastrique chez la femme enceinte imposent en effet une prophylaxie systématique, et ce dans le cadre d’une induction à séquence rapide [17]. Le thiopental est l’hypnotique actuellement recommandé pour l’induction [18], bien que de nombreux auteurs discutent l’emploi du propofol dans cette indication [19]. Il n’est pas démontré à ce jour de tératogénicité du propofol [20], et celui-ci ne modifie pas le débit sanguin utéroplacentaire, mais il ne permet cependant pas un délai d’intubation aussi court que le thiopental [21] ; ce médicament n’a pas l’AMM dans cette indication. La kétamine n’a jamais été utilisée dans notre étude, des travaux l’ont cependant comparée au thiopental dans l’induction à séquence rapide pour l’induction de l’anesthésie générale pour césarienne [22,23]. Malgré le bénéfice d’une meilleure analgésie postopératoire, la kétamine reste controversée notamment pour ses effets sur la tonicité utérine [23] ; il s’agit là encore d’un produit qui n’a pas l’AMM dans cette indication. Le chlorure de suxaméthonium est le curare recommandé dans l’induction à séquence rapide [24], or, il n’a été employé que 4 fois dans notre étude. La succinylcholine est en effet le seul curare qui offre un relâchement des cordes vocales rapide permettant une intubation rapide. À noter que le bromure de rocuronium (Esméron®) est également proposé dans cette indication en raison de son délai d’action [25], cependant sa durée d’action apparaît incompatible dans cette indication et ce d’autant plus que l’intubation peut s’avérer difficile voire impossible. L’entretien de l’anesthésie générale a été effectué dans 21 cas avec un halogéné ;
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les anesthésiques volatils ne présentent en effet pas de contreindication chez la femme enceinte, ils n’ont pas de tératogénicité démontrée, et leurs propriétés utérorelaxantes apparaissent favorables pour l’unité fœtoplacentaire [26]. Il faut cependant tenir compte de la sensibilité accrue de la femme enceinte aux halogénés et donc réduire la concentration alvéolaire minimale [27]. À noter que dans aucun cas la cœlioscopie n’a été interrompue ni convertie en laparotomie pour mauvaise tolérance maternelle : les seuls cas de conversion avaient des raisons chirurgicales pures. L’anesthésie locorégionale a été pratiquée dans 3 cas de notre étude et respectivement à 17, 10, et 14 SA. Il s’agissait dans tous les cas d’une rachianesthésie avec péridurale combinée. La pratique d’une anesthésie locorégionale périmédullaire pour laparoscopie impose un niveau anesthésique supérieur haut, au-dessus de T4, d’où un retentissement hémodynamique important du bloc sympathique et un risque respiratoire potentiel aggravé par le pneumopéritoine. Le système du « laparotenseur » utilisé par certaines équipes dont l’équipe clermontoise peut permettre la cœliochirurgie sous anesthésie locorégionale en l’absence de pneumopéritoine et donc une meilleure tolérance par le patient, mais cela au prix d’une moins bonne exposition chirurgicale [28]. Cependant, les modifications physiologiques et anatomiques de la grossesse rendent cette technique d’anesthésie difficile à un terme avancé de la grossesse, et ce même en l’absence de pneumopéritoine. L’analgésie postopératoire n’a pas nécessité de recours à la morphine au-delà du premier jour postopératoire ; le paracétamol a suffi pour obtenir une analgésie satisfaisante. Les anti-inflammatoires non stéroïdiens n’ont pas été utilisés dans notre série bien que leur utilisation avant 32 SA ne soit pas formellement déconseillée, puisqu’aucune tératogénicité n’a été démontrée à ce terme. La durée d’hospitalisation a été courte avec une médiane de 3 jours [1–9] ; les séries de la littérature rapportent des durées similaires [29]. Le lever a eu lieu dès le lendemain de l’intervention pour toutes les patientes de notre série. Toutes les patientes ont bénéficié d’une thrombophylaxie par une héparine de bas poids moléculaire (HBPM) pendant 7 à 10 jours, associée à une contention veineuse élastique ainsi qu’à une mobilisation précoce systématique. Les HBPM utilisées étaient de l’énoxaparine (Lovenox®) ou de la nadroparine (Fraxiparine®) à doses préventives. Aucune des patientes n’a présenté de thrombose postopératoire. La prescription d’une thromboprophylaxie postopératoire apparaît discutable en fonction des antécédents, du poids maternel, du terme de la grossesse lors de l’intervention, du geste pratiqué, et de la durée du pneumopéritoine. La cœliochirurgie constituerait un élément de la thromboprophylaxie pour certains auteurs par la mobilisation précoce qu’elle permet par limitation de la douleur postopératoire [30] ; cela reste cependant à confronter au risque thromboembolique propre du pneumopéritoine [31].
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5. Conclusion La cœliochirurgie est une technique largement développée à ce jour qui peut être utilisée chez la femme enceinte pour des actes chirurgicaux non obstétricaux et à des termes de plus en plus avancés. La gestion d’une telle intervention nécessite une prise en charge multidisciplinaire. Les gynécologues–obstétriciens et les anesthésistes doivent s’adapter aux modifications anatomiques et physiologiques liées à la grossesse et assurer une protection optimale de l’unité fœtoplacentaire, mais également envisager avec les pédiatres la prise en charge d’une prématurité éventuelle. Le pneumopéritoine ne semble pas avoir plus de conséquences que chez la femme non enceinte. La gestion anesthésique doit suivre les recommandations générales de l’anesthésie chez la femme enceinte. Avant 18 SA, les modifications liées à la grossesse sont faibles, et l’on peut donc considérer que les précautions anesthésiques à prendre sont l’utilisation de produits d’anesthésie non tératogènes et le maintien d’une stabilité hémodynamique et ventilatoire permettant d’assurer la vascularisation placentaire. Après 18 SA, l’anesthésie doit être différente. En effet, une induction à séquence rapide doit être systématiquement pratiquée en associant thiopental et succinylcholine à une manœuvre de Sellick ; l’entretien de l’anesthésie peut s’effectuer avec un halogéné ou du propofol, un morphinique et un curare adaptés sont à associer. La stabilité hémodynamique doit être assurée malgré les effets du pneumopéritoine et la position de Trendelenburg ; une adaptation des paramètres ventilatoires est à effectuer pour maintenir une normocapnie et une oxygénation adéquates. À un terme avancé, il s’agit d’une intervention à réaliser dans une maternité de niveau III devant un risque potentiel de prématurité.
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