Prise en charge des patients trachéotomisés dans l’environnement hospitalier

Prise en charge des patients trachéotomisés dans l’environnement hospitalier

Le Praticien en anesthésie réanimation (2017) 21, 268—277 Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedirect.com RUBRIQUE PRATIQUE Prise en c...

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Le Praticien en anesthésie réanimation (2017) 21, 268—277

Disponible en ligne sur

ScienceDirect www.sciencedirect.com

RUBRIQUE PRATIQUE

Prise en charge des patients trachéotomisés dans l’environnement hospitalier Management of tracheostomised patients in a hospital environment Romain Deransy a,∗, Hélène Brisson a, Charlotte Arbelot a, Antoine Monsel a,b, Olivier Langeron a,b a

Romain Deransy

Département d’anesthésie-réanimation, service de réanimation chirurgicale polyvalente, groupe hospitalier universitaire Pitié-Salpêtrière, Assistance publique—Hôpitaux de Paris, 47-83, boulevard de l’Hôpital, 75651 Paris cedex 13, France b Université Pierre-et-Marie-Curie, Paris VI, 91-105, boulevard de l’Hôpital, 75013 Paris, France Disponible sur Internet le 6 octobre 2017

MOTS CLÉS Trachéotomie ; Dilatation percutanée ; Canule de trachéotomie ; Sevrage ventilatoire



Résumé Environ 10 % des patients sont trachéotomisés dans un service de réanimation. Il reste difficile de définir un délai de réalisation de la trachéotomie mais il ne semble pas raisonnable de l’envisager avant le 4e jour de ventilation mécanique (en dehors des patients brûlés et traumatisés au niveau cervicofacial). Il faut privilégier la trachéotomie percutanée chez les patients de réanimation selon une procédure préalablement écrite et comprise par tous. Le choix d’une canule de trachéotomie dépend des objectifs qui peuvent varier dans le temps selon que le patient est en phase de ventilation mécanique permanente ou de sevrage. La décanulation est une étape à risque. La décision est prise sur l’avis conjoint de l’ensemble des intervenants (réanimateurs, ORL, kinésithérapeute, etc.). Lorsque la décanulation n’est pas possible, il conviendra d’orienter les patients vers des structures adaptées en s’aidant du système de gestion informatisé mis en place par la coopération des 21 Agences régionales de santé sur l’ensemble du territoire national. © 2017 Elsevier Masson SAS. Tous droits r´ eserv´ es.

Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (R. Deransy).

http://dx.doi.org/10.1016/j.pratan.2017.09.004 1279-7960/© 2017 Elsevier Masson SAS. Tous droits r´ eserv´ es.

Prise en charge des patients trachéotomisés dans l’environnement hospitalier

KEYWORDS Tracheostomy; Percutaneous dilation; Tracheostomy cannula; Ventilator weaning

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Summary Prevalence rate of tracheostomised patients reaches around 10% in intensive care unit. Although the best timing to perform tracheostomy is difficult to define, it is never considered before the 4th day of mechanical ventilation (except in the case of burned and cervicofacial traumatised patients). In intensive care unit patients, bedside percutaneous dilational tracheostomy is to be preferred. The procedure should exclusively be performed by experienced staffs following a predetermined protocol. Choosing the proper size of tracheostomy cannula is critical and relies on the targeted objectives of the tracheotomy. These objectives may vary over time depending on whether patients need a continuous mechanical support or whether they are in the weaning period. Final removal of the tracheostomy tube (tracheostomy decannulation) is a crucial step that remains at risk of complications. The decision of decannulation results from a tight collaboration between medical and paramedical teams (ENT, physiotherapist, intensivist, etc.). When tracheostomy decannulation remains compromised, patients should be referred to long-term ventiliation weaning centers. © 2017 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Introduction

Trachéotomie précoce ou tardive ?

La trachéotomie concerne environ 10 % des patients de réanimation [1]. En 2015, Mehta et al. ont publié une étude rétrospective épidémiologique descriptive sur les pratiques de la trachéotomie entre 1993 et 2012 aux États-Unis [2]. Durant cette période, le nombre de patients trachéotomisés n’a cessé de croître pour atteindre un pic de prévalence de 9,8 % en 2008. Cette augmentation est encore plus importante dans la catégorie des patients « chirurgicaux » par rapport aux patients « médicaux » (15 % vs 9,5 %). Une enquête Franc ¸aise, réalisée dans 148 services de réanimation et publiée en 2014, relève un taux de trachéotomie de 10 à 13 % [3]. Celui-ci est encore plus important dans les services de réanimation neurologique (20—22 %). Le parcours des patients trachéotomisés en milieu hospitalier peut s’avérer complexe. Pour certains, la trachéotomie est effectuée durant l’hospitalisation en réanimation afin de faciliter le sevrage ventilatoire et d’améliorer le confort du patient. Pour d’autres, la trachéotomie est présente dès leur arrivée dans le service, soit parce qu’il s’agit d’une trachéotomie « au long cours » souvent liée à la maladie sous-jacente, soit parce qu’elle intervient dans la prise en charge per- et postopératoire des voies aériennes supérieures (chirurgie ORL ou maxillofaciale). Nous verrons que les différences de pratiques sont nombreuses quant au délai de réalisation et à la procédure choisie pour effectuer la trachéotomie [4]. Enfin, les données concernant la prise en charge des patients trachéotomisés sont rares [5]. C’est pourquoi nous retracerons le parcours du patient trachéotomisé, allant du délai de réalisation, au choix de la technique de pose en passant par la gestion de la canule de trachéotomie, mais aussi des complications éventuelles et du processus de sevrage conduisant à la décanulation. La SFAR et la SRLF (en collaboration avec la SFMU et la SFORL) ont édités des recommandations formalisées d’experts sur le sujet de la « trachéotomie en réanimation » [6].

Nous ne ferons pas état, dans cette revue, du débat sur le bénéfice d’une trachéotomie précoce vs tardive, tant la littérature, pourtant très abondante sur le sujet, n’a pu clore le débat. Cependant, il est nécessaire de faire un bref état des lieux des données les plus récentes. En 2013, un essai prospectif, randomisé et multicentrique, dénommé « TracMan » et publié par une équipe anglaise ne montrait pas de différence de mortalité à 30 jours entre les patients ayant bénéficié d’une trachéotomie précoce (4 premiers jours, 455 patients) ou tardive (après 10 jours, 454 patients) [7]. En 2015, une méta-analyse regroupant 13 essais (2434 patients) comparant trachéotomie précoce (durant la première semaine) et tardive, mettait en évidence un bénéfice « potentiel » en termes de pneumopathie acquise sous ventilation mécanique (PAVM) sans gain de mortalité à 30 jours [8]. Cette conclusion vient après que la publication de cette méta-analyse ait fait l’objet d’une rétractation des auteurs sur demande du comité éditorial du Lancet pour niveau de preuve insuffisant du bénéfice de trachéotomie précoce sur la mortalité et l’incidence de PAVM. La mise à jour d’une méta-analyse de 2012 de la Cochrane Database (incluant 8 essais, 1977 patients) mettait en évidence un bénéfice en termes de mortalité en faveur de la trachéotomie précoce (dans les 10 premiers jours) sans bénéfice sur le risque de PAVM ni sur la durée de séjour [9]. Les auteurs pondèrent ces résultats en raison du risque important de biais (biais de publication, hétérogénéité méthodologique des études). Hosokawa et al., dans une autre méta-analyse publiée en 2015 incluant 142 études avec un total de 2689 patients, montraient qu’une trachéotomie précoce vs tardive (dont les définitions sont variables selon les études) diminuait la durée de ventilation mécanique, la dose totale de sédation, la durée de séjour en réanimation et la mortalité à long terme [10]. Il reste donc difficile de définir un délai d’initiation de la trachéotomie mais il ne semble pas raisonnable de l’envisager avant le

270 4e jour de ventilation mécanique, en dehors des patients brûlés et traumatisés au niveau cervicofacial [6].

Les objectifs de la trachéotomie Les objectifs de la trachéotomie sont intimement liés à la situation médicochirurgicale des patients.

R. Deransy et al. permet de diminuer les doses des agents sédatifs permettant de recouvrer une autonomie plus rapide [15]. La trachéotomie améliore le confort lors de la réalisation des soins buccaux, la perception de l’image corporelle du patient ainsi que son sentiment de sécurité [16]. Cette amélioration objective du confort pourrait justifier, à elle seule et dans la mesure ou l’analyse bénéfice-risque du geste est prise en compte, l’indication d’une trachéotomie.

Assurer l’accès aux voies aériennes Il s’agit la plupart du temps de patients relevant d’un acte de chirurgie ORL ou maxillofaciale (programmé ou urgent) et nécessitant la pose d’une trachéotomie première pour permettre la réalisation du geste chirurgical dans de bonnes conditions et, d’autre part, assurer l’accès et la perméabilité des voies aériennes. Parfois, la trachéotomie est effectuée secondairement, en réanimation, en cas d’extubation difficile prévue. Elle est le plus souvent transitoire et sa durée dépend de l’apparition ou non de complications médicochirurgicales. La décanulation peut être envisagée lorsque tout risque d’obstruction des voies aériennes est levé.

Dépendance à la ventilation mécanique invasive à long terme Il s’agit le plus souvent de patients admis en réanimation pour une atteinte médullaire haute ou cérébrale, d’étiologie médicale ou traumatique, dont la commande respiratoire est fortement perturbée, voire abolie. Dans cette situation, la dépendance à la ventilation mécanique et in fine à la canule de trachéotomie est fonction de la gravité, de la nature de la lésion (médullaire et/ou cérébrale) et de son évolution. De même, une pathologie respiratoire très évoluée, avec des troubles de la commande ventilatoire, peut conduire à une dépendance au long cours de la ventilation mécanique. Enfin, ces patients porteurs de trachéotomie au long cours ou définitive sont susceptibles d’être admis dans une unité de réanimation pour une détresse d’origine respiratoire ou autre. La trachéotomie leur assure une ventilation mécanique totale pour certains, partielle pour d’autres, tout en prévenant d’éventuelles complications liées à l’inhalation et à l’encombrement [11].

Échec de sevrage de la ventilation mécanique Dès lors qu’il existe des difficultés de sevrage respiratoire une trachéotomie peut être envisagée. Elle a pour but d’améliorer le sevrage en facilitant le travail respiratoire lié à la diminution des résistances et de l’espace mort instrumental [12,13]. Une étude récente, publiée en 2015 par Lim et al., a comparé plusieurs paramètres respiratoires mécaniques avant et après réalisation d’une trachéotomie chez des patients en échec de sevrage et mis en évidence une diminution des résistances, de la fréquence respiratoire et du volume courant au décours de la trachéotomie [14].

Confort des patients La réalisation d’une trachéotomie améliore le confort des patients nécessitant un support ventilatoire prolongé et

Les différentes techniques de trachéotomie Dès l’indication de la trachéotomie posée, le praticien devra faire le choix entre une technique dite percutanée, réalisable par lui-même au lit du patient ou chirurgicale au bloc opératoire.

Trachéotomie percutanée (TPC) Décrite pour la première fois en 1985 [17], la technique percutanée est maintenant celle qui est retenue par la majorité des praticiens dans les services de réanimation. Une enquête européenne, publiée en 2015, révèle que 75 % des trachéotomies en réanimation sont réalisées par voie percutanée [4]. Cette technique permet d’assurer une canulation dans de parfaites conditions de sécurité. Elle nécessite 2 opérateurs expérimentés, l’un réalisant la trachéotomie dans des conditions d’asepsie strictes pendant que l’autre contrôle l’accès aux voies aériennes supérieures sous contrôle endoscopique. La surveillance doit être optimale avec un monitorage exhaustif (SpO2 , fréquence cardiaque, tension artérielle, EtCO2 ). La sédation et la curarisation sont indispensables. L’installation du patient est, entre autres, un des points clés de la réussite du geste. Le suivi rigoureux d’une « checklist » lors de la réalisation d’une trachéotomie percutanée pourrait diminuer la morbi-mortalité liée à cette technique [18,19]. Le Tableau 1 présente une proposition de « Checklist » d’après les RFE de 2016 [6]. Le patient est positionné en décubitus dorsal strict, un billot étant placé sous les épaules afin d’assurer une hyperextension de la tête permettant d’optimiser la palpation de la trachée et de ses anneaux. La possibilité d’une hyperextension du rachis cervical doit être discutée en amont avec l’équipe chirurgicale en cas de traumatisme et/ou d’intervention chirurgicale cervicale préalable. Les bras sont positionnés le long du corps et les épaules sont abaissées afin de dégager au mieux la trachée. La ventilation mécanique est adaptée aux conditions endoscopiques afin d’éviter l’absence de ventilation liée aux coupures de débit lorsque la limite supérieure des pressions de crête est atteinte, les désaturations (ventilation en FiO2 100 %) et l’hyperinflation dynamique (baisse de la PEP et de la fréquence respiratoire). Le repérage de l’espace entre le 2e et 3e ou le 3e et 4e anneau trachéal est effectué par palpation. La transillumination est une aide permettant de confirmer la localisation de la zone de ponction. L’absence de transillumination doit remettre en question la réalisation de la trachéotomie par voie percutanée car elle peut être le signe d’une trachée trop profonde ou de l’interposition d’éléments anatomiques entre le plan cutanée et la trachée pouvant compromettre la réalisation et la sécurité du

Prise en charge des patients trachéotomisés dans l’environnement hospitalier Tableau 1 Protocole de soins lors de la réalisation d’une trachéotomie percutanée [6]. Matériel nécessaire Fibroscope bronchique (avec vidéo si possible) Kit de trachéotomie percutanée Matériel de réintubation Échographe (pour les services en ayant l’expertise) Monitorage (hémodynamique et ventilatoire) Hémostase vérifiée (et corrigée en cas d’anomalie) Personnels nécessaires Deux médecins (1 opérateur + 1 pour la fibroscopie) Au moins 1 personnel paramédical pour aider à la réalisation du geste Préparation Patient intubé et ventilé sur un mode volumétrique contrôlé sous FiO2 = 1 Anesthésie générale avec curarisation Extrémité céphalique en hyperextension avec un billot sous les omoplates pour dégager au maximum la région cervicale antérieure Préparation cutanée du champ opératoire Conditions de réalisation (points clés) Repérage du point de ponction présumé par palpation et transillumination (l’échographie peut constituer une aide supplémentaire pour les services en ayant l’expertise). Le point de ponction doit être idéalement situé entre 1er et 2e anneaux Retrait de la sonde d’intubation sous contrôle de la vue et immobilisation de celle-ci en position sous glottique, ballonnet gonflé Compenser la fuite ventilatoire le cas échéant et tout au long de la procédure si nécessaire Ponction trachéale sous contrôle de la vue Poursuite de la procédure selon la technique choisie et sous contrôle de la vue Mise en place de la canule sous contrôle de la vue Après canulation Connexion de la canule au ventilateur et ajustement de la ventilation Maintien et sécurisation de la canule par un dispositif adapté à l’état cutané du patient Vérification de la bonne position de la canule par fibroscopie. Toilette bronchique le cas échéant Rédaction d’un compte rendu de trachéotomie

geste (élément vasculaire artériel ou veineux, goitre. . .). L’échographie cervicale, avant réalisation de la TPC, est très utile pour repérer différents éléments anatomiques comme les vaisseaux, en particulier la veine jugulaire antérieure, l’isthme thyroïdien et d’éventuels vaisseaux (grande variabilité anatomique) et les cartilages trachéaux. La sonde d’intubation est progressivement mobilisée sous contrôle endoscopique tout en maintenant le ballonnet en position sous-glottique (le matériel de réintubation doit toujours être disponible à proximité). Certaines équipes utilisent un masque laryngé afin de libérer totalement l’espace sousglottique mais cette technique n’est pas dénuée de risques et une méta-analyse récente ne permet pas d’en recommander l’usage dans ce contexte [20]. Le fibroscope introduit dans la sonde permet de voir la lumière trachéale, pour

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vérifier le site de la ponction ainsi que l’absence d’un faux trajet qui peut survenir à toutes les étapes de la réalisation de la trachéotomie. La ponction est réalisée selon la technique de « Seldinger » en veillant à ne pas perforer la paroi trachéale postérieure ni à « cathéteriser » la partie sous-muqueuse de la trachée. Afin de diminuer ce risque, l’aspiration gazeuse doit être franche lors de la ponction et celle-ci doit être répétée une seconde fois directement sur le cathéter (car celui-ci peut se mobiliser au retrait de l’aiguille). L’absence de « retour gazeux » doit contre-indiquer la poursuite de la procédure et imposer le replacement du cathéter dans la lumière intratrachéale (Fig. 1). Le guide métallique est introduit délicatement jusqu’à une sensation de butée. Une incision franche de quelques millimètres de part et d’autre du guide métallique est indispensable. À ce stade, une dilatation est effectuée soit à l’aide de plusieurs bougies de calibre croissant (Ciaglia ® — Cook ) soit à l’aide d’une unique bougie dont le calibre ® augmente progressivement (Blue Rhino — Cook /Tracoé — ® ® Pouret Medical ). La dilatation à la pince (Criggs — Portex ) est de moins en moins utilisée. La dilatation « en pas de ® vis » (Percu-Twist — Téléflex ) ou à l’aide d’un ballon en ® surpression (Ciaglia-Dolphin — Cook ) sont grevées de nombreuses complications mécaniques [21,22] et leur utilisation ne peut être recommandée. La position intratrachéale et non sélective de la canule est immédiatement contrôlée par endoscopie et à l’aide des critères habituels (soulèvement thoracique, capnographie, etc.). Une toilette bronchique est réalisée au décours de la procédure. Même si elle ne semble pas présenter plus de complications que la technique chirurgicale [23], il faut garder à l’esprit que la technique de TPC n’est pour autant pas dénuée de risque (hémorragie, trajet sous-muqueux, perforation du mur postérieur, extubation, inhalation. . .) et il convient de respecter chacune des étapes du processus afin de les minimiser. L’échoguidage pourrait permettre d’améliorer un peu plus la sécurité de la procédure [24], notamment chez les patients obèses [25]. Une récente revue de la littérature met en avant l’intérêt de l’échoguidage durant la procédure de trachéotomie percutanée [26]. Des études de plus forte puissance seront nécessaires afin de généraliser son utilisation dans cette indication.

Trachéotomie chirurgicale (TC) La technique chirurgicale, quant à elle, est réalisée au bloc opératoire avec un abord plan par plan des différentes structures anatomiques. Elle est indiquée le plus souvent lorsqu’il existe une ou des contre-indications à la réalisation d’une TPC. En effet, certaines difficultés prévisibles comme une absence de repères anatomiques palpables (obésité, cou court, trachée profonde), la présence d’une structure anatomique à risque (goitre, vaisseau, tissu suspect d’infection) ou la difficulté d’un positionnement optimal (contre-indication à l’hyperextension du rachis cervical), motivent la réalisation d’une TC.

Quelles canules, pour quels patients ? Le choix de la canule de trachéotomie est une étape dont il ne faut pas sous-estimer l’impact. Ce choix raisonné passe

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Figure 1. Positionnement correct du cathéter avant la mise en place du guide (A). Positionnement sous-muqueux du cathéter, l’absence de retour gazeux contre-indique la mise en place du guide et la poursuite du geste (B). 1 : muqueuse trachéale ; 2 : anneau trachéal ; 3 : lumière trachéale ; 4 : paroi postérieur de la trachée.

indéniablement par la connaissance précise des différents éléments qui la compose.

Ballonnet Dès lors que le patient nécessite une ventilation mécanique, et en dehors de rares exceptions dont nous ne parlerons pas ici (ventilation à fuite permettant la phonation), l’utilisation d’une canule pourvue d’un ballonnet est nécessaire. La plupart du temps, en réanimation, le ballonnet est dit à « basse pression et haut volume » car sa forme et son matériau (PVC) lui assure une compliance permettant d’associer une bonne étanchéité tout en minimisant les risques de lésions ischémiques de la muqueuse trachéale (Fig. 2). Comme pour les sondes d’intubation, le monitorage de la pression du ballonnet permet d’assurer une pression constante entre 25 et 30 cmH2 O. Ce monitorage peut être répété plusieurs fois par jour à l’aide d’un manomètre ou assuré de fac ¸on continue par un dispositif de contrôle de la pression du ballonnet. Certaines canules, équipées d’un ballonnet à « haute pression et bas volume » sont utilisées pour améliorer le confort et la phonation lors des phases de dégonflage. En effet, le silicone, matériau plus résistant, se plaque sur la canule de fac ¸on uniforme évitant ainsi les replis qui pourraient gêner le passage de l’air et perturber le confort (Fig. 3). Ces ballonnets nécessitent d’être gonflés à l’eau. Le monitorage de la pression des ballonnets gonflés à l’eau n’est pas possible. Les canules sans ballonnet sont utilisées lors de la phase de sevrage car elles sont plus confortables en raison d’un diamètre externe plus réduit. Elles permettent de réaliser des aspirations trachéales, d’administrer de l’oxygène (Fig. 4). De plus, en cas d’obstruction de la canule, la ventilation peut se faire au pourtour de la canule.

Phonation Certaines canules, avec ou sans ballonnet, sont munies d’un dispositif optionnel permettant de favoriser la phonation (valve phonatoire). Cette valve phonatoire permet à l’air de passer à travers la canule lors de la phase inspiratoire et

Figure 2. Canule avec ballonnet « basse pression » en PVC (A), une chemise interne fenêtrée (B) et une chemise interne non fenêtrée (C).

un système de « clapet » empêche l’air expiré de repasser à travers la canule imposant de fait, son passage au travers de la glotte (faisant vibrer les cordes vocales). Il est nécessaire et important de rappeler que l’utilisation d’une valve phonatoire ne se conc ¸oit que si l’air a la possibilité de passer à travers les cordes vocales. Il faut donc s’assurer que le ballonnet, si la canule en est pourvue, soit totalement dégonflé et que le diamètre externe de la canule ne soit pas trop important par rapport au diamètre interne de la trachée (Fig. 5). En effet, la canule phonatoire avec clapet fermé en expiration et ballonnet gonflé entraînent l’obstruction complète de la trachée pouvant mener à un arrêt cardiaque.

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Figure 3. Canule avec ballonnet « haute pression » en silicone. Le ballonnet est dit « plaqué » car il ne présente aucun repli lorsqu’il n’est pas gonflé. Ce type de ballonnet nécessite d’être gonflé avec de l’eau.

Il faut garder à l’esprit que même totalement dégonflé, un ballonnet à haut volume et basse pression présente de nombreux replis qui peuvent en partie obstruer la lumière entre la canule et la trachée. Enfin, il existe des canules fenêtrées dont l’objectif est de laisser passer l’air expiré à travers la canule et en direction des cordes vocales afin de permettre la phonation. Ces canules doivent être manipulées avec précaution car un mauvais positionnement de la canule peut entraîner un conflit et des microtraumatismes répétés entre la partie fenêtrée et la muqueuse trachéale responsables de granulome. Afin de minimiser ce risque de conflit trachéoprothétique lié au fenêtrage, certaines canules ont un fenêtrage multiple en « tamis » situé au niveau de la courbure principale.

Chemise interne L’utilisation d’une canule avec une chemise interne est préférable car elle permet de limiter les risques obstructifs et infectieux puisqu’elle peut et doit être retirée et nettoyée (sérum physiologique) plusieurs fois par jour. Ainsi, le risque de recanulation difficile est diminué puisqu’il n’est plus nécessaire d’effectuer une décanulation pour nettoyer la lumière interne de la canule. Si la canule de trachéotomie est fenêtrée, le praticien veillera à adapter la bonne chemise interne selon la situation afin d’éviter le risque obstructif.

Longueur — Courbure — Diamètre Le diamètre des canules de trachéotomie (annoncé par chaque fabricant) correspond la plupart du temps au diamètre interne (en mm). Celui-ci doit être pris en compte mais il est important de connaître aussi le diamètre externe car c’est celui-ci qui déterminera en grande partie le degré de résistance à l’écoulement des gaz expiratoires lors de la phase de sevrage (ballonnet dégonflé et valve phonatoire). Certaines canules, sans ballonnet, ont un diamètre externe très proche du diamètre interne et assure un confort optimal lors de la phase de sevrage (Fig. 4). La longueur de la canule est à adapter à la morphologie de chaque patient.

Figure 4.

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Canule sans ballonnet (A) et sa valve de phonation (B).

La courbure peut avoir son importance notamment lorsque le patient présente une morphologie atypique (goitre, cou court, obésité). Dans ces conditions particulières, on pourra préférer des canules avec matériau plus flexible (silicone). Certaines canules, dites « à collerette réglable » permettent d’adapter la longueur de la partie intratrachéale de la canule. Il conviendra de disposer d’une gamme de matériel suffisamment large et adaptée à la morphologie des patients. De rares situations nécessitent la fabrication de canule de trachéotomie sur mesure. Enfin, certaines canules sont équipées d’un canal d’aspiration sous-glottique qui pourrait permettre de diminuer le risque de pneumopathie acquise sous ventilation mécanique [27].

Soins de trachéotomie et changement de canule La présence d’une canule de trachéotomie nécessite des soins pluriquotidiens adaptés. L’équipe soignante doit posséder l’expertise nécessaire à la réalisation de ces soins. La qualité de l’entretien de la trachéotomie conditionne en partie le risque de complications.

Soins quotidiens Le changement et le nettoyage fréquent de la chemise interne permet de diminuer le risque de formation du biofilm qui fait lui-même le lit de la pneumopathie [28]. Les soins de trachéotomie doivent être réalisés entre 3 et 4 fois par jour. Après une inspection soigneuse de l’orifice de trachéotomie à la recherche de signes d’infection ou d’ulcérations et après vérification de l’intégrité de la canule de trachéotomie, la chemise interne est retirée, puis nettoyée (partie interne et externe) à l’aide de sérum physiologique. La chemise interne est ensuite repositionnée. Les soins péri-orificiels sont réalisés à l’aide de sérum physiologique et de compresses stériles. L’orifice d’entrée de la trachéotomie doit finalement être séché afin de diminuer le risque infectieux. Il est possible d’interposer un disposi® tif type Métalline entre la canule externe et la peau afin de minimiser le risque infectieux et de favoriser la cicatri-

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Figure 5. Mise en place d’une valve phonatoire lorsque le ballonnet de la canule est dégonflé, l’expiration est possible (A). Mise en place d’une valve phonatoire lorsque le ballonnet est gonflé, l’expiration est impossible (B). 1 : valve phonatoire ; flèche bleue : sens de l’inspiration ; flèche orange : sens de l’expiration.

sation. Le système de fixation doit être changé au moindre doute.

Changement de canule programmé : pourquoi, quand et comment ? En réanimation, certaines équipes réalisent un changement de canule de fac ¸on systématique mais il n’existe pas, à ce jour, de recommandations ni sur le bénéfice ni sur la fréquence de ces changements. Différents motifs peuvent amener le praticien à envisager un changement de canule de trachéotomie. Il peut s’agir d’un défaut d’étanchéité du ballonnet, d’une taille de canule non adaptée à la morphologie du patient (obésité, conflit trachéoprothétique. . .), ou la nécessité d’utiliser une canule permettant la phonation (canule fenêtrée). Lorsqu’il est nécessaire, le changement d’une canule de trachéotomie doit se faire dans des conditions de sécurité optimales. La première de ces conditions consiste à évaluer le risque de trajet cutanéotrachéal incomplet. Si ce trajet n’est pas suffisamment constitué, il existe un risque élevé de recanulation difficile et de faux trajets. Afin de mesurer ce risque, il convient de connaître le délai entre la réalisation de la trachéotomie et la date du changement de canule [29]. Pour les TPC, si ce délai est supérieur ou égal à 10 jours, le risque de recanulation difficile est faible (mais jamais nul). La recanulation se fera alors en positionnant le patient à plat avec la tête en hyperextension et en disposant un billot sous les épaules. Une phase de préoxygénation avec une FiO2 à 100 % est indispensable afin de minimiser le risque de désaturation en cas de complications. La nouvelle canule est montée sur son introducteur afin d’améliorer la congruence lors du passage à travers le trajet cutanéotrachéal. Le guide métallique est introduit à travers l’ancienne canule. Celle-ci est retirée et la nouvelle canule, montée sur son introducteur, est positionnée dans la trachée. Pour des raisons évidentes de sécurité, si des facteurs de risques sont retrouvés (obésité, cou court, rachis cervical « rigide », goitre, trachée profonde), et même si la TPC date de plus de 10 jours, il est préférable de positionner une

sonde d’intubation, par laryngoscopie, entre la glotte et la canule de trachéotomie. Si le délai est inférieur à 10 jours, le trajet cutanéotrachéal n’est pas encore complètement constitué et le risque de recanulation difficile est maximal. Dans ce cas, il convient de reporter, si possible, le changement de canule à une date ultérieure. Cependant, ce changement précoce (< 10 jours) peut être imposé par la situation clinique. La méthode de recanulation sera la même que celle décrite précédemment mais une intubation orotrachéale sera effectuée et une canule de taille identique ou plus petite sera utilisée. Une canule de taille plus importante ne sera envisagée que lorsque qu’il existe des fuites malgré un ballonnet non percé ce qui est possible en cas de trachéomalacie ou de trachée volumineuse. Lorsqu’il s’agit d’une TC, la création du trajet cutanéotrachéal est plus rapide et un changement de canule peut être envisagé entre le 3e et 7e jour [30]. Que la trachéotomie soit chirurgicale ou percutanée, que le changement de canule soit précoce ou plus tardif, et en dehors de l’urgence, il conviendra de respecter quelques règles de sécurité résumées dans le Tableau 2.

Trachéotomie et déglutition La déglutition nécessite une parfaite coordination des muscles laryngés. La présence d’une canule de trachéotomie est un facteur de risque de trouble de la déglutition [30], car elle retarde le déclenchement du réflexe de déglutition et perturbe l’ascension du larynx. Ces troubles sont très probablement liés à un certain niveau de « désafférentation » du larynx modifiant la proprioception ainsi qu’à une perte de la pressurisation sous-glottique lors de la ventilation avec ballonnet gonflé [31]. La présence de la canule elle-même et la surpression du ballonnet altèrent considérablement le réflexe de déglutition [32]. La prévention joue un rôle majeur dans la survenue de ces troubles. Elle nécessite d’utiliser des canules adaptées à la morphologie de chaque patient, de mesurer la pression du ballonnet le cas échéant, de dégonfler le ballonnet et de favoriser au maximum le

Prise en charge des patients trachéotomisés dans l’environnement hospitalier Tableau 2 Proposition d’une « check-list de sécurité » en cas de changement de canule de trachéotomie. Pas de changement la nuit Le changement ne se fait que si les paramètres vitaux du patient sont stables Il s’agit d’un geste « séniorisé » Le matériel d’urgence, le matériel d’intubation difficile et d’oxygénation doivent être disponible immédiatement Un fibroscope fonctionnel doit être disponible La pré-oxygénation (FiO2 100 %) est indispensable avant la procédure Le patient doit être positionné comme pour une trachéotomie première (hyperextension de la tête, billot sous les épaules, épaules basses et bras le long du corps) Un chirurgien ORL ou maxillofacial doit pouvoir être appelé sans délai et se rendre disponible immédiatement en cas de complications (doit être joignable et disponible) Une pince à 3 branches (ou pince de Laborde) doit être disponible. Elle permet, si besoin, d’écarter l’orifice trachéal jusqu’à la trachée afin de faciliter le passage de la canule

passage d’air à travers les voies physiologiques (canule fenêtrée, canule de petit diamètre avec valve phonatoire, etc.) [33].

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travail diaphragmatique est moindre lorsque ce ballonnet est dégonflé [35]. Une fois ces étapes franchies, il est possible d’utiliser une valve phonatoire afin d’évaluer la liberté des voies aériennes supérieures et les capacités de phonations. Cette valve phonatoire positionnée sur une canule de diamètre externe important est susceptible d’augmenter le travail respiratoire et l’inconfort du patient. À ce stade, il est préférable d’utiliser une canule sans ballonnet dont le diamètre externe est réduit (canule sur laquelle il est possible d’administrer de l’oxygène et de positionner une valve phonatoire). Cette réduction du diamètre améliore considérablement le confort des patients et augmente les chances de succès de cette phase de sevrage [36]. Les capacités d’expectoration du patient sont à prendre en compte dans la décision de décanulation afin de diminuer les risques d’encombrement qui pourraient conduire à une situation de détresse respiratoire. Il s’agit d’une évaluation multidisciplinaire dont le rôle central est joué par l’équipe de kinésithérapie. La déglutition doit être évaluée avant toute décanulation. En dehors des situations évidentes de « fausse-route », l’évaluation clinique peut être difficile et une évaluation spécialisée par un ORL à l’aide d’une nasofibroscopie pourrait augmenter les chances de succès de la décanulation, notamment chez les patients « neurologiques » ayant des troubles du langage [37]. L’utilisation d’un protocole de décanulation adapté à chaque service permet d’augmenter la probabilité de succès de cette étape primordiale dans le parcours des patients trachéotomisés [38].

Décanulation accidentelle

Décanulation Décanulation programmée La décanulation, lorsqu’elle est envisagée, est le résultat d’une réflexion en amont sur la capacité du patient à assurer ses différentes fonctions physiologiques en l’absence de prothèse trachéale. Ainsi, quelques prérequis sont indispensables avant d’entreprendre la décanulation d’un patient. À l’évidence, cette décanulation ne se conc ¸oit que chez un patient préalablement sevré de la ventilation mécanique. Le sevrage de la ventilation mécanique est le plus souvent progressif passant d’un mode ventilatoire contrôlé à un mode spontané dont le niveau d’aide inspiratoire est progressivement diminué. Le patient est ensuite « déconnecté » de la ventilation artificielle afin de réaliser une véritable « épreuve de ventilation spontanée ». Le bénéfice de cette épreuve de ventilation spontanée par rapport à la mise en place d’une aide inspiratoire a été étudié par Jubran et al. en 2013 [34]. Dans ce travail randomisé incluant 316 patients trachéotomisés depuis plus de 21 jours, la durée médiane de sevrage était plus faible dans le groupe de patients ayant bénéficié d’une épreuve de ventilation spontanée (15 vs 19 jours, p = 0,04). Lors de cette épreuve, il est préférable de dégonfler le ballonnet de la canule de trachéotomie. Il s’agit d’abord d’un élément de sécurité dans la mesure où, en cas d’obstruction de la canule de trachéotomie (bouchon muqueux. . .), la ventilation restera assurée au pourtour de cette canule. Ensuite, il s’agit d’un argument d’ordre physiologique puisque le

La décanulation accidentelle est définie par le retrait inattendu de la canule de trachéotomie, soit lors des soins, soit par le patient lui-même. Il s’agit d’un événement rare mais qui peut mettre en jeu le pronostic vital. Il existe peu de données dans la littérature sur son incidence et sur les facteurs de risques qui y sont associés. On peut cependant citer le travail de White et al. qui comparent, sur deux périodes consécutives de 7 mois, l’effet d’une formation intensive et le suivi d’un protocole ciblé sur la prévention du risque de décanulation accidentelle [39]. Ce travail met en évidence une réduction significative du taux de décanulation accidentelle passant de 4,2 (60 patients) à 2,7 (33 patients) pour 1000 jours de trachéotomie. Parmi les nombreux facteurs de risques liés au patient on note l’apparition d’une agitation/confusion, l’augmentation des sécrétions trachéales ainsi qu’un changement récent de trachéotomie. En cas de décanulation accidentelle, la recanulation peut s’avérer difficile notamment chez les sujets obèses. Le cas échéant, il faut garder à l’esprit qu’il est préférable de réaliser une intubation orotrachéale et limiter les tentatives infructueuses de recanulation afin de sécuriser l’accès aux voies aériennes pour ensuite envisager une recanulation (chirurgicale ou non selon le contexte) dans de parfaites conditions de sécurité.

Devenir des patients trachéotomisés Les conditions permettant la décanulation ne sont pas toujours réunies lors du séjour en réanimation. Pourtant, la

276 majorité de ces patients ne présente plus d’indication à occuper un lit de réanimation. La gestion de l’hospitalisation d’aval d’un patient trachéotomisé peut alors s’avérer difficile. Les capacités d’aval sont très variables selon la localisation géographique et selon la charge en soins nécessaire. Le transfert vers une unité de sevrage et de réadaptation post-réanimation (SRPR) permet d’accélérer le processus de sevrage [40]. Malheureusement, ces unités de sevrage sont encore trop peu nombreuses et, quand elles existent, ne sont pas toujours connues des praticiens. Afin de faciliter le transfert d’aval de ces patients, une coopération des 21 Agence régionale de santé (ARS) a mis en place un système de gestion informatisé permettant d’optimiser la gestion de l’aval sur l’ensemble du territoire national (https://viatrajectoire.sante-ra.fr/Trajectoire/).

Conclusion L’augmentation progressive du nombre de patients trachéotomisés rappelle la nécessité, pour les équipes soignantes, d’en maîtriser toutes les composantes. La trachéotomie améliore le confort, la sensation de « sécurité » des patients et le sevrage respiratoire. La réalisation d’une trachéotomie percutanée est une technique sûre et efficace dès lors qu’elle est réalisée par une équipe entraînée et respectant les différentes règles de sécurité. Le délai de réalisation de cette trachéotomie reste sujet à débat. Les canules de trachéotomies diffèrent entre autres par leurs tailles, leurs formes, leurs matériaux et la présence ou non d’un ballonnet. L’utilisation de canule avec « chemise interne » permet de réaliser des soins pluriquotidiens en s’affranchissant du risque de décanulation/recanulation. Lors de la phase de sevrage, il est préférable d’utiliser des canules de faible diamètre externe sans ballonnet (ou avec un ballonnet « plaqué ») afin de favoriser le passage de l’air par les voies naturelles. La décanulation, bien qu’elle soit un objectif essentiel, n’est pas toujours possible avant la sortie de réanimation et il conviendra d’orienter sans attendre les patients vers un centre adapté à la prise en charge de ces patients trachéotomisés.

Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

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