Revue des Maladies Respiratoires Actualités (2019), 11, 306-314
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Prise en charge diagnostique et thérapeutique du mésothéliome pleural malin en 2019 Diagnostic and therapeutic management of malignant pleural mesothelioma in 2019 A. Scherpereel1‑4,*, C. Gauvain1, S. Baldacci1,2, D. Nunes1, X. Dhalluin1,3, E. Surmei4,5, M.-C. Copin2,6, S. Brosseau7‑9, G. Zalcman7‑9 1Service de Pneumologie et Oncologie Thoracique, CHU de Lille, 2 avenue Oscar Lambret, 59000 Lille, France 2Faculté de Médecine Henri Warembourg, Université de Lille, F-59045 Lille cedex, France 3MESOCLIN – Réseau national des centres cliniques experts pour la prise en charge des mésothéliomes pleuraux malins ; domiciliation du centre coordinateur national : CHU de Lille, F59000 Lille, France 4U1189 – ONCO-THAI – Image Assisted Laser Therapy for Oncology, F59000 Lille, France 5Service de Chirurgie Thoracique, CHU de Lille, 2 avenue Oscar Lambret, 59000 Lille, France 6Département d’Anatomie-Pathologique, CHU de Lille, 2 avenue Oscar Lambret, 59000 Lille, France 7Service d’oncologie thoracique-CIC1425, Hôpital Bichat-Claude Bernard, 46 rue Henri Huchard, 75877 Paris, France 8Université Paris-Diderot, 5 rue Thomas Mann, 75013 Paris, France 9U830 INSERM « Cancer, Hétérogénéité et Plasticité », Centre de Recherche de l’Institut Curie, 26 rue d’Ulm, 75248 Paris cedex 05, France
MOTS-CLÉS
Mésothéliome pleural malin ; Amiante, thoracoscopie ; Chimiothérapie ; Bevacizumab ; Immunothérapie
Résumé Le mésothéliome pleural malin (MPM) est un cancer rare, classiquement secondaire à une exposition antérieure à l’amiante. Son pronostic global est sombre, sans traitement curatif validé à ce jour. La thoracoscopie avec biopsies pleurales (± symphyse pleurale) est l’examen diagnostique clé. La chirurgie, intégrée à un traitement multimodal, est d’indication restreinte à des patients très sélectionnés. La radiothérapie a également une place réduite dans le MPM. La chimiothérapie standard de première ligne est d’effi cacité limitée, améliorée par l’association du bevacizumab. Aucun traitement n’est validé en deuxième ligne ou plus même si les anticorps anti-PD-1/PD-L1 ± anti-CTLA-4
*Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (A. Scherpereel).
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ont montré des résultats prometteurs en essais de phase II (MAPS-2…). La recherche de nouveaux traitements, stratégies et biomarqueurs est donc cruciale et l’inclusion des patients en essai clinique fortement encouragée. D’autres immunothérapies seules ou en combinaison avec des traitements standards et/ou thérapies ciblées, des stratégies multimodales avec thérapie intrapleurale sont actuellement évaluées. En France, le réseau national clinique des centres experts du MPM, « MESOCLIN », vise à proposer un traitement optimal à tout patient systématiquement discuté en RCP régionale (±nationale) dédiée, et à stimuler la recherche clinique et translationnelle en collaboration étroite avec ses partenaires : Mesopath, Mesobank, IFCT… et les associations de patients. © 2019 SPLF. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
KEYWORDS
Malignant pleural Mesothelioma; Thoracoscopy; Chemotherapy; Bevacizumab; Immunotherapy
Abstract Malignant pleural mesothelioma (MPM) is a rare tumor, usually due to previous asbestos exposure. Its glob prognosis is poor, without validated curative treatment to date. Diag nosis relies ideally on thoracoscopy with pleural biopsies, ± combined with talc pleurodesis. Surgery with curative intent, included with multimodal treatment, is restrained to highly selected patients. Radiotherapy is also of limited indication in MPM. Standard first line chemotherapy does quite poorly, improved by addition of bevacizumab. No treatment is validated as second line or further even if anti-PD-1/PD-L1 ± anti-CTLA-4 antibodies exhibited promising results in phase II trials (MAPS-2…). Thus the search of new treatments, strategies and biomarkers is a crucial goal, and recruitment of patients in clinical trials is strongly encouraged. Other immunotherapies alone or combined with standard treatments and/or targeted therapies, multimodal strategies including intrapleural therapy are currently assessed. In France, the national network of clinical expert centers for MPM, “MESOCLIN”, aims at proposing an optimal treatment to all patients systematically discussed in regional (±national) MTB dedicated to MPM, and at stimulating clinical and translational research in close collaboration with its partners: Mesopath, Mesobank, IFCT… and patients associations. © 2019 SPLF. Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
Introduction De nouvelles pistes thérapeutiques et l’amélioration globale de la survie des patients atteints d’un mésothéliome pleural malin (MPM) expliquent le regain d’intérêt pour cette maladie, naguère considérée comme orpheline de tout traitement efficace. Alors même que les patients, pour la plupart exposés professionnellement à l’amiante, payent encore un lourd tribut aux erreurs passées des industriels et des autorités sanitaires, des lueurs d’espoir apparaissent, grâce aux progrès récents des traitements ciblant l’angiogenèse ou les défenses immunitaires anti-tumorales.
Épidémiologie du mésothéliome pleural malin (MPM) Le MPM est une tumeur agressive qui, bien que rare, demeure un véritable problème sociétal, du fait de la responsabilité des autorités sanitaires et des États dans l’utilisation industrielle de l’amiante, dénuée de toute précaution vis-à-vis des salariés de cette industrie, des industries de transformation ou du bâtiment, exposés ainsi à leur insu à un risque mortel, et ce, pendant la plus grande
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partie du xxe siècle. L’exposition professionnelle aux fibres d’amiante reste en effet le facteur de risque principal qui explique l’augmentation d’incidence de cette tumeur depuis les années 1960 [1]. La survenue d’un MPM reste cependant rare dans une population exposée professionnellement aux fibres d’amiante, puisque seuls 2 à 5 % des sujets exposés seront atteints. Ainsi, en 2012, 26 000 anciens salariés de plus de 50 ans étaient indemnisés par le Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (FCAATA), car victimes d’une maladie liée à l’amiante, ou ayant travaillé dans des entreprises inscrites sur la liste de celles dans lesquelles une exposition a été démontrée (liste mise à jour par arrêté ministériel). Parallèlement, 73 000 personnes avaient déposé un dossier de demande auprès du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA). De même, la fraction attribuable (c’est-à-dire le nombre de cas directement liés) à une exposition professionnelle à l’amiante est estimée à 83 % chez les hommes, mais à seulement 38 % chez les femmes. La prédominance masculine conforte le rôle de l’exposition professionnelle, tandis que les femmes pourraient être victimes d’une exposition indirecte, para-professionnelle (par exemple nettoyage des bleus de travail contaminés des époux travailleurs en milieu « amianté »), domestique ou environnementale. Ainsi, la sur-incidence de mésothéliomes (et de cancers
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bronchiques) chez les femmes de la région des mines de chrysotile au Québec a-t‑elle été bien décrite, avec un index standardisé de mortalité par mésothéliome significativement augmenté à 7,63 (p < 0,05 ; IC95 : 3,0‑15,7). Cependant, l’augmentation du taux d’incidence standardisé sur l’âge des MPM chez les femmes non exposées à l’amiante entre 1998 et 2005 (0,18 pour 100 000 versus 0,29 pour 100 000 respectivement) pourrait aussi suggérer l’existence d’étiologies ou d’expositions carcinogéniques encore non identifiées dans cette pathologie [1]. La découverte récente qu’un gène de susceptibilité au cancer, BAP-1, est altéré de façon somatique (et inactivé) dans près de 50 % des mésothéliomes, et impliqué dans de très rares formes familiales de cancers rares (triade mélanome uvéal, mésotheliome et cancer rénal), ne permet pas cependant d’expliquer cette augmentation d’incidence chez des femmes apparemment non exposées à l’amiante. En effet, les patients avec mésothéliome dans ces familles étant le plus souvent exposés, alors que les membres de ces familles développant d’autres cancers et non exposés ne font pas de mésothéliomes. Si le lien entre l’amiante et le MPM ne fait plus aucun doute, et si la relation dose-effet et la notion de seuil d’exposition ont été déterminées pour les lésions asbestosiques bénignes, il n’a pas été possible de définir de seuil d’exposition minimal dans le cas du mésothéliome. Du fait du temps de latence entre l’exposition à l’amiante et le développement de la maladie (de 20 à 40 ans), l’incidence du MPM n’a cessé de croître depuis une quarantaine d’années. Cependant, le réseau français des registres des cancers (FRANCIM), et le Programme national de surveillance du mésothéliome (PNSM) ont récemment rapporté que l’incidence aurait atteint un plateau chez les hommes en France, alors qu’elle continue à croître chez les femmes [1]. Ce plateau d’incidence n’est pas encore décrit dans les tous les pays occidentaux, ayant banni l’amiante plus tardivement qu’en France (1997), et encore moins dans les pays émergents ou du Tiers-Monde dont nombre d’entre eux n’ont pas banni l’extraction et/ou l’utilisation de l’amiante. Ce dernier point fait craindre une pandémie mondiale de mésothéliomes malins dans le futur ! Bien qu’encore rare dans la population générale non exposée à l’amiante (moins de 1 cas par million d’habitants et par an), le MPM représente 100 cas par million d’habitants et par an dans la population exposée, soit une incidence de 800 à 1 000 cas par an en France. Certaines régions, telles que la Normandie, le Nord, les régions de Marseille et de Nantes, ont une incidence relativement élevée, de 30 nouveaux cas ou plus par an, du fait de la concentration passée d’industries de transformation de l’amiante, de fonderies ou de chantiers navals [1]. Mais des régions non couverte par les registres de mésothéliomes et le PNSM ont aussi des incidences élevées, mises en évidence notamment dans l’essai clinique MAPS : ainsi la région de Toulouse où de nombreux sous-traitants, disparus depuis, ont utilisé de l’amiante. Le MPM est reconnu comme maladie professionnelle au tableau numéro 30 du régime général de la Sécurité sociale et au tableau numéro 47 du régime agricole, et il constitue, depuis le décret n° 2012‑47 du 16 janvier 2012, la 31e maladie à déclaration obligatoire, cette déclaration devant permettre d’améliorer la connaissance de l’épidémiologie française et la prise en charge sociale (réparation) des patients.
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Diagnostic histologique du mésothéliome pleural La cellule mésothéliale transformée est capable d’adopter une différenciation très variable et peut donc mimer des cellules de types très différents, de la cellule épithéliale à la cellule sarcomateuse. Sur l’ensemble des mésothéliomes, 80 à 85 % sont dits « épithélioïdes », 11 % sont dits « sarcomatoïdes », comprenant la redoutable – mais rare : 1 % – variante desmoplastique, et 5 à 10 % sont mixtes (ou « biphasiques »), intégrant les 2 composantes, le pronostic étant dans ce cas lié à l’importance de la composante épithélioïde. L’analyse du liquide pleural est insuffisante pour poser le diagnostic de certitude du MPM, et seul le mésothéliome épithélioïde desquame dans la cavité pleurale. La sensibilité de la cytologie pleurale n’est donc que de 60 %. Les biopsies pleurales à l’aiguille « fine » (Abrams ou Castelain) soulèvent les mêmes difficultés diagnostiques que la cytologie, du fait du grand polymorphisme des lésions histologiques pleurales. Seule l’analyse anatomopathologique de prélèvements de taille suffisante, après une analyse immunohistochimique utilisant différents marqueurs (3 positifs et 3 négatifs), permet d’établir le diagnostic par un anatomopathologiste expérimenté. Le diagnostic de MPM doit être validé obligatoirement par les experts régionaux puis national (centre de référence localisé au CLCC Léon Bérard à Lyon) du réseau national pathologique expert « MESOPATH ». La thoracoscopie reste la meilleure méthode pour l’obtention du diagnostic histologique de certitude devant une suspicion clinique ou radiologique permettant de multiples biopsies pleurales sous contrôle de la vue, profondes et de large taille (« lambeaux » de plèvre pariétale…). Sa rentabilité diagnostique est supérieure à 90 % et la morbidité de ce geste est inférieure à 10 %. En revanche, aucun marqueur tumoral sanguin (mésothéline…) ne peut être considéré comme suffisamment fiable pour contribuer efficacement à ce diagnostic et la pratique de ces dosages n’est pas validée en routine.
Bilan d’extension – classification TNM L’une des difficultés est la faillite des systèmes de classification TNM existants pour déterminer le pronostic ou les indications thérapeutiques, contrairement à l’ensemble des autres tumeurs solides. En effet, la classification TNM de cette tumeur à développement quasi-exclusif endothoracique a été établie sur des critères d’exploration chirurgicale de la cavité thoracique, alors même que la chirurgie du mésothéliome dite à visée curative (cf. plus loin) est actuellement très limitée, restreinte à des patients très sélectionnés et réalisée par de rares équipes multidisciplinaires expertes selon les recommandations internationales. Une 8e classification AJCC/UICC des stades TNM a été proposée à l’initiative en 2016 de l’International Association for the Study of Lung Cancer (IASLC) [2], plus simple que les précédentes, mais qui reste encore fondée sur les données de séries chirurgicales de patients, et s’avère donc tout aussi difficile à appliquer sur les seuls scanners thoracique et TEP de patients médicaux. De fait, 80 % des patients pour lesquels les données de l’imagerie suggèrent
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un stade précoce (I ou II) s’avèrent, lors de la thoracotomie, présenter un stade avancé, témoignant de l’inadaptation du cTNM. La quantification volumétrique tumorale, non invasive, au scanner thoracique injecté, intégrant notamment l’épaisseur de l’atteinte scissurale, pourrait permettre de mieux stratifier les patients en 4 stades de pronostic distinct, mais cette approche devra être validée sur de larges séries prospectives [3]. Des facteurs clinico-biologiques simples ont une valeur pronostique importante permettant de stratifier les patients plus simplement que le TNM : une anémie, une thrombocytose, une hyperleucocytose, une histologie nonépithélioïde ou un mauvais index d’état général constituent ainsi les plus puissants facteurs de mauvais pronostic, avant le TNM, dans les classifications pronostiques déjà anciennes du CALGB et de l’EORTC [4], et non validées pour la routine. Enfin, un score pronostique britannique, assez simple, a été proposé récemment par Brims et coll [5], basé sur plusieurs paramètres (perte de poids, taux sanguins d’hémoglobine et d’albumine, sous-type histologique) semble intéressant en essai clinique mais aussi en routine.
Prise en charge thérapeutique Chirurgie La chirurgie « à visée curative » du MPM se définit par le but d’obtenir au moins une résection macroscopiquement complète de la tumeur. Elle comprend la pleuro-pneumonectomie élargie (PPE), c’est-à-dire la résection monobloc pleuropulmonaire élargie au péricarde fibreux et au diaphragme, et la pleurectomie complète incluant une décortication pulmonaire pour réséquer la plèvre viscérale (P/D) parfois étendu comme la PPE au péricarde et au diaphragme. Selon toutes recommandations nationale (AURA 2018) ou internationales (BTS 2017, NCCN 2018, ASCO 2018…) [6‑8], la place de cette chirurgie, en particulier de la PPE, se réduit à une portion congrue de patients très sélectionnés, « jeunes », PS 0‑1, sans comorbidités contre-indiquant cette lourde chirurgie, atteints d’un mésothéliome de stade peu avancé (maximum cT3N1M0 ?) et d’histologie épithélioïde stricte classiquement. La PPE, sous réserve d’être validée par une RCP experte labellisée par le réseau national MESOCLIN selon les recommandations AURA 2018, doit être effectuée si possible dans le cadre d’un essai clinique, dans des centres entraînés à cette chirurgie d’exception, aux suites souvent compliquées, suivie par une chimiothérapie standard (platine-pemetrexed 6 cycles maximum) et par une irradiation hémi-thoracique avec des techniques modernes de type IMRT (irradiation en modulation d’intensité). Cependant, un essai EORTC de phase II [9] puis l’essai britannique MARS en 2011 [10] étaient en défaveur de l’EPP, même si ce dernier essai était très critiquable par ses multiples déviations de protocole. La survie globale (SG) dans ces essais était modeste au regard d’une morbi-mortalité postopératoire à 90 jours trop importante (5 à 10 %). En particulier, dans l’essai MARS, la médiane de survie globale (mSG) après PPE n’était que de 14,4 mois, contre 19,5 mois chez les patients n’ayant pas eu d’exérèse radicale, avec 12 % de mortalité péri-opératoire, alors que les sujets avec envahissement ganglionnaire N2 avaient été
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exclus de l’étude. L’ensemble des équipes chirurgicales, à l’instar des Nord-Américains, se tourne désormais vers la P/D +/- « étendue » (eP/D) suivie d’une chimiothérapie, ce d’autant que la mSG après P/D est meilleure qu’après PPE dans tous les registres nord-américains, avec une morbidité et mortalité (< 5%) opératoires moindres. En France, l’indication d’une (e)P/D doit d’être aussi validée par une RCP experte MESOCLIN selon les recommandations AURA 2018, et effectuée si possible dans le cadre d’un essai clinique, par une équipe multidisciplinaire experte du MPM. La plus récente analyse des données du registre nordaméricain des cancers pour la décennie 2004‑2014 montre que seuls 3 058 mésothéliomes pleuraux sur 20 561 (soit 15 %) ont fait l’objet aux États-Unis d’une chirurgie à visée radicale, seule ou associée à une chimio- et/ou radiothérapie, ce qui témoigne d’une sélection drastique. Cette chirurgie était associée à un taux de mortalité à 90 jours de 15,5 %. Seul un traitement trimodal avec chirurgie radicale, chimiothérapie et radiothérapie (chez seulement 499 patients, soit 2,4 % de l’ensemble des cas) était associé à une survie plus longue en analyse multivariée, utilisant la technique des scores de propension pour s’affranchir des biais d’une telle analyse rétrospective de registre. La médiane de SG était de 20,8 mois tous stades et histologies confondus (23,5 mois dans les formes épithéliales de stade I), contre 17,7 mois en l’absence de traitement trimodal (et 18,17 mois en cas de chirurgie de cytoréduction dans une forme épithélioïde), la chirurgie (quelle que soit sa modalité) étant associée à une diminution de la mortalité de 23 % (HR ajusté = 0,77 ; IC95 : 72‑0,81 ; p < 0,001), et la chimiothérapie seule obtenant une diminution de la mortalité de 26 % (HR ajusté = 0,74 ; IC95 : 0,69‑0,78 ; p < 0,01) [11].
Radiothérapie Les cellules mésothéliales malignes sont radiosensibles mais le MPM pose des problèmes balistiques pour la radiothérapie externe, limitée par le voisinage direct d’organes critiques. La radiothérapie est donc d’usage limité en routine dans le MPM, principalement utilisée à visée palliative antalgique. La radiothérapie (néo)adjuvante à la chirurgie n’est pas validé en routine et doit donc comme la chirurgie (PPE, P/D) être validée en RCP MESOCLIN, et être réalisée uniquement dans des centres experts, si possible dans le cadre d’un essai clinique. Radiothérapie prophylactique (RTP) des orifices de ponction, drainage, de thoracoscopie ou thoracotomie : La colonisation tumorale de ces orifices peut être à l’origine de nodules tumoraux de perméation (NTP) pariétale souvent douloureuses, de sensibilité parfois pauvre à une radiothérapie antalgique. Leur incidence n’a pas franchement diminuée avec l’avènement de la chimiothérapie moderne à base de pémétrexed, pouvant être évaluée à 10‑11 % dans les bras contrôles des essais australien de S. Bydder et écossais de N. O’Rourke [12,13], à 16 % après thoracoscopie, voire 24 % après thoracotomie dans une série canadienne de 100 patients consécutifs [14]. L’utilisation prophylactique de la radiothérapie (RTP) des orifices de drains ou cicatrices chirurgicaux dans les 4 semaines (3 x 7Gy) après une chirurgie ou un geste invasif de la plèvre pour prévenir l’apparition de
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nodules tumoraux de perméation (NTP) liés à une procédure, validée en France depuis l’essai randomisé de Boutin et coll [15], est très controversée par d’autres pays devant des études de résultats discordants [16,17]. Deux essais randomisés britanniques récents ont tenté d’en démontrer l’inefficacité… sans apporter des arguments définitifs. Par souci d’économie de patients, l’essai SMART [16] s’est fondé sur une hypothèse irréaliste puisqu’il visait à faire décroître la fréquence des NTP, de 15 % dans le bras sans RTP (mais avec radiothérapie palliative à l’émergence de NTP), à… 2 % dans le bras RTP, pour n’avoir à randomiser que 203 patients. D’emblée, un biais important a été de tolérer un délai d’irradiation post-procédure allant jusqu’à 42 jours (le double de l’essai marseillais). Dans le bras abstention, la fréquence des NTP a été de 16 %, ou de 13 % pour les patients ayant reçu une chimiothérapie, cette dernière ne faisant que repousser le délai médian d’émergence des NTP de 5,4 à 7,3 mois. L’objectif statistique irréaliste n’a de fait pas été atteint, puisque 9 % de NTP étaient observées dans le bras RTP (soit une diminution relative de 49 % : HR = 41, p = 0,14). Mais, l’analyse « per protocole » prévue dans le plan statistique initial a montré que le pourcentage de NTP passait de 16 % à 6 % lorsqu’on excluait les patients n’ayant pas reçu la RTP dans les délais prescrits ou suivant les modalités recommandées (soit 11 % de déviations protocolaires), ce qui représente une diminution relative de 67 %, cette fois nettement significative (p = 0,037), suggérant l’intérêt conservé d’une RTP bien réalisée [17). Un deuxième essai britannique « PIT » [18] a randomisé 375 patients traités majoritairement par une chimiothérapie à base de pémétrexed avec, une nouvelle fois un objectif irréaliste, puisqu’il s’agissait d’observer l’incidence des NTP à 6 mois (alors que « SMART » avait bien montré que 50 % ou plus des NTP apparaissent au-delà des 6 premiers mois). Il n’y avait pas de différence statistiquement significative à 6 mois entre le bras RTP systématique réalisée dans les 42 jours et le bras sans RTP (3,2 % versus 5,3 %). Cependant, sur les 24 premiers mois, l’incidence cumulée des NTP était de 10,1 % dans le bras RTP versus 18,7 % dans le bras sans RTP, soit une diminution relative du risque de 43 % (HR = 0,57 ; p = 0,06) en intention de traiter (ITT), témoignant d’un bénéfice non négligeable de la RTP [19]. Sur la base de ces 2 larges essais, la RTP a été retirée de nombreuses recommandations mais reste une option thérapeutique en France (AURA 2018).
Chimiothérapie Les associations à base d’anti-métabolites et sels de platine ont apporté une amélioration décisive en matière de chimiothérapie. En effet, selon un large essai randomisé de phase 3, l’association cisplatine + pemetrexed était significativement plus efficace qu’une mono-chimiothérapie par cisplatine seul (Cis/Pem) chez des patients PS 0‑1 [20]. La survie à un 1 an du groupe Cis/Pem avec supplémentation vitaminique était de 56,5 %, contre 41,9 % pour les patients traités par cisplatine seul ; la mSG étant de 13,3 mois dans le groupe Cis/Pem versus 10 mois dans le groupe cisplatine… mais avec une survie à 5 ans toujours virtuellement nulle. Cependant, l’association Cis/Pem a démontré qu’elle pouvait améliorer la qualité de vie et le symptôme de dyspnée chez ces patients, et est
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donc recommandée en première ligne jusqu’à progression, ou toxicité de grade 3‑4, ou avec un maximum de 6 cures, sans maintenance par pemetrexed inefficace voire délétère [21]. Les arguments disponibles dans la littérature, bien que ténus, plaident en faveur d’une chimiothérapie dès l’obtention du diagnostic [22], récemment soutenus par les données d’un poster au congrès de l’ASCO 2019. Il est donc recommandé de ne pas retarder la chimiothérapie après diagnostic d’un MPM et de ne pas attendre l’apparition de signes fonctionnels [21]. Plusieurs essais de phase 2 ont montré une efficacité comparable avec l’association pemetrexed + carboplatine, ce qui en fait une alternative intéressante en cas d’altération modérée de l’état général (PS) ou de la fonction rénale [23]. Il n’y a pas de traitement standard recommandé en deuxième ligne après échec d’un traitement de première ligne à base de pemetrexed [21]. La reprise séquentielle de pemetrexed (±carboplatine) a montré d’intéressants résultats chez des patients dont la maladie progressait au-delà de 3 mois après la fin du traitement d’attaque, avec un taux de réponse de 19 %, un taux de contrôle de 48 % et une médiane de SG à partir du début de ce retraitement de 10,5 mois, même si ces résultats mériteraient confirmation dans un essai prospectif [24].
Thérapeutiques ciblées Le VEGF est un puissant mitogène pour les cellules endothéliales. Il a été montré que les lignées cellulaires de mésothéliome malin pouvaient sécréter du VEGF et co-exprimer ses 2 principaux récepteurs, Flt-1 et KDR. Le VEGF est capable, en activant ses récepteurs, d’induire la croissance autocrine des cellules de mésothéliome [25]. La sécrétion de VEGF par différents types cellulaires tumoraux a été corrélée avec la néo-angiogenèse et la densité de microvaisseaux. Les essais de phase 2 ayant testé des ITK oraux du VEGFR en monothérapie et en deuxième ligne de traitement – sunitinib, sorafénib, cédiranib – étaient négatifs, tout comme un essai de phase 3 de maintenance après chimiothérapie par thalidomide [26]. Dans un essai randomisé de phase 2 de première ligne testant gemcitabine + cisplatine + bévacizumab (anticorps humanisé anti-VEGF ; 15 mg/ kg/3 semaines) versus Cis/Gemci [27], il n’y avait pas de différence significative entre les groupes pour la mSG (15,6 vs 14,7 mois, respectivement) et pour la médiane de survie sans progression (mSSP) (6,9 mois vs 6 mois). La même équipe a rapporté par la suite les résultats d’une étude de phase 2 associant bévacizumab + Cis/Pem chez 43 patients, avec un taux de 41 % de réponse partielle, une mSSP de 6,9 mois et une mSG encourageante de 14,8 mois [28]. Un autre essai de phase II (n = 70 patients) testant l’association carboplatine + pémétrexed + bévacizumab (15 mg/kg) était négatif mais mesurait une mSSP et une mSG encourageantes, de 7,9 et 14,3 mois respectivement [29]. L’essai de phase 3 IFCTGFPC 07‑01 « MAPS » a randomisé 448 patients avec MPM, PS 0 à 2, entre un bras Cis/Pem et un bras Cis/Pem/bévacizumab [30]. Cet essai était nettement positif avec une mSG de près de 19 mois dans le bras bévacizumab vs 16 mois dans le bras Cis/Pem ; la mSSP étant aussi significativement allongée par l’addition du bévacizumab (p < 0,0001). Recommandé depuis par les recommandations nord-américaines du National
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Comprehensive Cancer Network (NCCN) et de l’ASCO 2018 [7,8], ce triplet bévacizumab/Cis/Pem est reconnu aussi en France (AURA 2018) comme standard de traitement de première ligne des patients sans contre-indication au bévacizumab mais n’a pu obtenir l’agrément de la FDA américaine ou de l’EMEA européenne. Un essai de phase II randomisé (n = 87 patients) a comparé le triplet Cis/Pem + nintédanib oral (inhibiteur notamment de l’activité kinase du récepteur au VEGF) Cis/Pem/placebo [31]. Cet essai positif, avec une augmentation significative dans le bras nintédanib vs bras placebo de la mSSP (9,4 vs 5,7 mois, respectivement) et de la mSG (18,8 vs 14,2 mois), n’a pas été confirmé par un essai de phase 3 selon le même schéma sauf une exclusion des patients avec un sous-type histologique non-epithélioïde, pouvant expliquer partiellement cet échec car ces patients ont pu bénéficier parfois avec succès du triplet Cis/Pem/ bevacizumab [32]. Le bevacizumab reste donc à ce jour le seul anti-angiogénique ayant démontré son intérêt dans le traitement de première ligne du MPM, après échec également du cediranib en combinaison avec le Cis/Pem [33]. Les antiangiogéniques pourraient cependant se révéler intéressants en combinaison avec l’immunothérapie ± chimiothérapie dans les essais en cours. De nombreuses autres thérapies ciblées sont en cours d’évaluation en essais de phase I ou II (revue dans référence [34]) mais aucune n’est validée à ce jour.
Immunothérapie anti-tumorale Récemment, les premières données d’essais de phase II évaluant en deuxième ligne ou plus, après traitement par pemetrexed et sels de platine, les inhibiteurs des points de contrôle immunologique (ICI), anticorps monoclonaux dirigés contre les molécules CTLA-4, PD-1 ou PD-L1, utilisés en monothérapie, se sont avérées prometteuses. Conceptuellement, cibler PD-L1 semble pertinent, car les mésothéliomes, qui sont souvent des tumeurs très inflammatoires avec un stroma abondant, peuvent expriment fortement PD-L1 notamment les sous-types non-épithélioïdes ; sa surexpression constitue de plus un facteur de mauvais pronostic [35,36]. Après une étude de phase II prometteuse [37], le large essai « DETERMINE » de phase IIb, randomisé (571 patients) testant le Trémélimumab, un anticorps anti-CTLA-4, contre placebo en traitement de 2e/3e ligne n’a montré aucun intérêt thérapeutique d’un anti-CTLA-4 en monothérapie [38]. En revanche, le Pembrolizumab, un anticorps monoclonal antiPD-1 (10 mg/kg/2 semaines, au maximum 2 ans ou jusqu’à progression ou toxicité inacceptable), a été évalué dans le traitement du MPM dans l’essai de phase Ib, KEYNOTE-028 [39], ayant inclus des patients présentant des tumeurs solides exprimant PD-L1 sur au moins 1 % des cellules tumorales en immunohistochimie (IHC, test centralisé) dont 25 patients MPM éligibles pour l’essai, prétraités et échappant à la chimiothérapie classique (68 % d’hommes, PS 0‑1, âge médian : 65 ans). Chez les patients ayant déjà reçu une ligne de chimiothérapie, le taux de réponse était de 28 %, et le taux de contrôle de la maladie, de 76 %. La durée de réponse semble prolongée de 10,4 mois à plus de 40 mois, et la mSG n’était pas atteinte au moment de la présentation orale des résultats. La mSSP est de 5,8 mois, mais aucun lien n’a été
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retrouvé entre la fréquence de la réponse et le taux élevé de PD-L1. Les toxicités semblaient gérables : 60 % des patients ont présenté un effet indésirable lié au traitement, dont 5 (20 %) avec des toxicités de grade 3‑4, mais seuls 2 patients ont dû interrompre transitoirement le traitement. Ces résultats très encourageants de l’immunothérapie anti-PD-1 ont donné lieu à plusieurs essais en monothérapie. L’étude néerlandaise « NivoMes », présentée en 2016 au WCLC [40], a ainsi inclus 34 patients traités par Nivolumab (anti-PD-1) en 2e/3e lignes de traitement : le taux de contrôle tumoral (DCR) était de 50 %, la mSSP de 3,7 mois avec quelques patients longs survivants traités pendant plus de 1 an. Les résultats de la première partie d’une étude de phase II, également présentés [41], concernaient 34 patients traités par Pembrolizumab en 2e/3e lignes : les auteurs ont retrouvé un surprenant DCR de 80 % (taux de réponse objective, ORR à 20 %), une mSSP de 6,2 mois et une mSG de 11,9 mois. La strate mésothéliome de la phase Ib « JAVELIN » [42], a inclus 53 patients traités en 2e/3e lignes par l’anti-PD-L1 Avélumab avec un DCR de 56,6 % pour seulement 9,4 % de réponses objectives. L’étude japonaise de phase II « MERIT » a testé elle aussi le Nivolumab chez 34 patients, avec un DCR de 67,6 % pour un ORR de 29,4 %, une mSSP de 6,1 mois, et une mSG non atteinte après 10 mois de suivi [43], aboutissant à la première approbation gouvernementale du Nivolumab dans cette indication. Enfin, l’étude néerlandaise « INITIATE » a testé une bithérapie de Nivolumab et Ipilimumab (antiCTLA-4) chez 34 patients en 2e/3e lignes de traitement, retrouvant un ORR de 27 %, un DCR 74 %, et une mSSP de 4,8 mois, les données de SG étant encore attendues [44]. Seules les données de SG permettront en effet d’apprécier la pertinence de ces premiers résultats, mais l’essai IFCT-1501 MAPS-2 de l’IFCT donne déjà des indications solides chez des patients dont la maladie progressait et prétraités par sels de platine + pemetrexed (1 à 2 lignes), en bon état général, PS 0‑1 [45]. Cet essai évaluait en 2e/3e ligne, 125 patients randomisés entre un bras Nivolumab seul, anticorps anti-PD-1, et un bras Nivolumab + Ipilimumab. Il a atteint son objectif principal : un DCR à 12 semaines de plus de 40 %, avec relecture centralisée de la réponse par des radiologues experts indépendants, en aveugle du bras de traitement. Le taux était de fait de 44,4 % dans le bras monothérapie (ORR = 18,5 %) et de 50 % dans le bras bithérapie (ORR = 27,8 %), alors que les mSSP étaient de 4 et 5,6 mois respectivement, pour des durées médianes de réponse de 7,4 et 8,3 mois, respectivement. La probabilité de réponse et de contrôle tumoral était significativement associée à une forte expression tumorale (> 25 %) de l’antigène PD-L1 ; la bithérapie étant, quant à elle, pareillement efficace chez les patients PD-L1 positifs ou négatifs. Enfin, après une médiane de 20 mois de suivi, la mSG était de 11,9 mois dans le bras Nivolumab et 15,9 mois dans le bras Nivolumab + Ipilimumab, avec une survie à 1 an de respectivement 49 et 58 %. Les résultats de tous ces essais d’immunothérapie, qui totalisent plus de 300 patients, se comparent favorablement à ceux, décevants, de tous les traitements testés à ce jour en 2e/3e lignes (à l’exception de la reprise du pémétrexed), avec des mSSP de 4,8 à 6,1 mois, un DCR constamment > 50 %, des ORR entre 19 % et 29 % et, pour MAPS-2, une mSG comparable à celle obtenue dans l’essai d’enregistrement du pémétrexed… en traitement de première ligne ! Sur la base de cet essai de
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phase 2 randomisée, le panel d’experts des recommandations nord-américaines du NCCN a validé, en tant qu’options, la monothérapie anti-PD-1 (Nivolumab ou Pembrolizumab) et la bithérapie anti-PD-1 + anti-CTLA-4 (Nivo + Ipi), cependant qu’un dossier d’enregistrement a été déposé par l’industriel et qu’une demande de recommandation temporaire d’utilisation (RTU) a été effectuée par l’IFCT auprès de l’ANSM. Parallèlement, un essai britannique de phase 3 randomisé, l’essai « CONFIRM », compare le Nivolumab à un placebo (problème éthique sur la base des essais de phase 2 ?) en 2e ligne thérapeutique, cependant qu’un essai industriel de phase 3 (essai CheckMate 209‑743), à visée d’enregistrement, compare la chimiothérapie classique au doublet Nivolumab/ Ipilimumab dès la première ligne de traitement (revue dans référence [34]). Enfin les résultats préliminaires de l’essai australien « DREAM » ont été rapportés au congrès de l’ASCO 2018. Il s’agit d’une phase 2 mono-bras évaluant l’association chimiothérapie (par pemetrexed et sel de platine) au Durvalumab (anti-PD-L1, 1 125 mg/3 semaines) en 1re ligne de traitement. Sur 54 patients recrutés, les résultats pré liminaires des 31 premiers inclus ont été présentés, avec un ORR de 55 % en RECIST-meso et un DCR de 84 %, une mSSP de 7,3 mois, soit une SSP à 6 mois de 65 %, avec 35 % d’effets indésirables immunologiques de grade 2‑3, soit des données très encourageantes mais méritant confirmation par un essai randomisé de phase 3 prévu prochainement aux États-Unis et en Australie [46]. D’autres immunothérapies prometteuses en cours d’évaluation (revue dans références [34,47,48]), pour certaines en France, incluent notamment la thérapie cellulaire soit dendritique en maintenance post chimiothérapie de première ligne (essai européen de phase 3 DENIM ; PI France : A Scherpereel), soit lymphocytaire T avec notamment des essais de phase 1 de chimeric antigen receptor (CAR-T) aux États-Unis et en Chine. Un autre essai international de thérapie génique intrapleurale par Adénovirus transfectant le gène de l’interferon-alpha (aux cellules cancéreuses et mésothéliales) plus de la gemcitabine en 2e/3e ligne versus la gemcitabine seule va démarrer en Juillet 2019 en France.
Conclusion Le MPM était une maladie presque orpheline du fait de son pronostic sombre et de la rareté des traitements disponibles efficaces. Le grand tournant thérapeutique a été l’introduction du pémétrexed au début des années 2000 qui, en association avec les sels de platine, a changé l’histoire naturelle de cette maladie. La chirurgie de type pleurectomie-décortication reste réservée à des patients très sélectionnés dans le cadre d’un traitement multimodal par des équipes expertes, après validation obligatoire en RCP MESOCLIN. L’ajout du bévacizumab à la chimiothérapie par pémétrexed et sels de platine constitue une avancée certaine, du fait de son impact sur la SSP et sur la SG, démontrée par l’essai IFCT-GFPC « MAPS », constituant désormais le nouveau standard thérapeutique. Enfin, les résultats prometteurs de l’immunothérapie en 2e/3e lignes de traitement annoncent sans aucun doute la révolution prochaine des traitements du MPM, sans pouvoir
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A. Scherpereel et al.
dire à ce jour, dans l’attente des résultats d’essais de phase 3 en cours, si les ICI seront utilisés en monothérapie dans le futur ou plutôt en combinaison avec la chimiothérapie de 1re ligne, une autre immunothérapie et/ou une thérapie ciblée notamment un anti-angiogénique comme déjà démontré dans le cancer pulmonaire non à petites cellules non épidermoïde [49]. Enfin, la recherche de biomarqueurs prédictifs de la réponse (et/ou de la toxicité) des immunothérapies est un enjeu majeur notamment pour les études ancillaires des essais cliniques [50] afin de sélectionner les meilleurs patients candidats à ces traitements seuls ou en combinaison lors des discussions en RCP MESOCLIN. À noter qu’en complément des recommandations françaises AURA 2018, les nouvelles recommandations européennes de la Taskforce ERS/ESTS/ EACTS/ESTRO sur la prise en charge du MPM seront présentées cette année au congrès annuel de l’ERS.
Liens d’intérêts Au cours des 5 dernières années, A. Scherpereel a été invité aux congrès de l’ASCO 2019-2017, WCLC 2019 et 2016 par les laboratoires Astra-Zeneca, BMS, MSD, et Roche ; il a participé à des groupes d’experts (boards) et réunions avec les laboratoires Astra-Zeneca, BMS, Boehringer-Ingelheim, MSD et Roche, et il a été investigateur principal d’études cliniques promues par les laboratoires Astra-Zeneca, BMS, Boehringer-Ingelheim, MSD, Roche, Verastem et Trizell avec rémunération à son institution (CHU de Lille). C. Gauvain : aucun. Au cours des 5 dernières années, S. Baldacci a perçu des honoraires ou financements pour participation à des congrès, actions de formation, participation à des groupes d’experts, de la part des laboratoires Pfizer, GSK, Lilly, MSD et Astrazeneca. D. Nunes : aucun. X. Dhalluin : aucun. E. Surmei : aucun. M.-C. Copin : aucun. S. Brosseau : aucun. Au cours des 5 dernières années G. Zalcman a été invité aux congrès de l’ASCO 2019, 2018, 2017, 2016, 2015, ESMO 2019, 2018, WCLC 2019, 2018, 2016 par les laboratoires Astra-Zeneca, Abbvie, ROCHE, Pfizer, BMS, Lilly, a participé des groupes d’experts avec rémunération à son Institution (Fondation Recherche de l’AP-HP) de la part des laboratoires BMS, Astra-Zeneca, MSD et a été investigateur principal d’études cliniques promues par les Laboratoires BMS, AstraZeneca, Roche, Pfizer, MSD et GSK.
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