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Prise en charge du diabe` te de type 2
Dossier thématique
Mise au point
Presse Med. 2013; 42: 861–870 ß 2013 Publié par Elsevier Masson SAS.
Prise en charge du diabète de type 2 : anciens ou nouveaux médicaments, comment choisir ? Serge Halimi1,2
1. CHU de Grenoble, pôle digestif-DUNE, service de diabétologie endocrinologie nutrition, 38043 Grenoble cedex, France 2. Université Joseph-Fourier Grenoble, 38041 Saint-Martin-d’Hères, France
Correspondance : Serge Halimi, CHU de Grenoble, pôle digestif-DUNE, service de diabétologie endocrinologie nutrition, 38043 Grenoble cedex, France.
[email protected]
Key points Management of type 2 diabetes: New or previous agents, how to choose? Once lifestyle measures implemented, if hyperglycemia persists, above individual HbA1c targets, a medication should be started in type 2 diabetic patients (T2DM). First, unless exception, an oral antidiabetic drug. Except in case of intolerance, the initial monotherapy, metformin remains the strengthening treatment. Latter, combination of two oral drugs, now offers several options, mainly the choice to associate a ‘‘conventional insulin-secretor’’, sulfonylureas, glinide, or a ‘‘new one’’ belonging the class of ‘‘incretin’’, more readily a gliptine (DPP-4 inhibitors) rather than injectable GLP-1 analogue which can also be sometimes chosen at this stage. These options are mostly new and have the advantage a neutral or favourable (for GLP-1) effect on body weight in obese type 2 DM patient and the absence of any hypoglycaemic risk in both classes of incretins. But this risk varies depending on the patient profile, much higher if the target HbA1c is low (6 to 6.5 or 7%), or in the elderly, fragile and/or in case of renal insufficiency. These two different situations with a high risk of hypoglycaemia, define best indications of this new class.
tome 42 > n85 > mai 2013 http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2013.04.002
Points essentiels Une fois les mesures hygiénodiététiques mises en place, si l’hyperglycémie persiste et selon les cibles d’HbA1c visées, il convient d’entreprendre un traitement médicamenteux. En premier lieu, un antidiabétique oral hormis quelques exceptions. Si la monothérapie initiale, sauf intolérance, reste la metformine, le renforcement du traitement offre maintenant plusieurs options, principalement le choix de lui associer un « insulino-sécréteur conventionnel », sulfonylurées, glinide, ou un « nouvel insulino-sécréteur » de la classe des incrétines, plus volontiers une gliptine (inhibiteurs des DPP-4) plutôt qu’un analogue du GLP-1 injectable qui peut aussi être parfois choisi dès ce stade. Ces options sont nouvelles et offrent principalement l’avantage de l’absence de risque hypoglycémique et d’un effet neutre ou favorable sur le poids. Mais ce risque est très variable selon les patients, il est d’autant plus élevé que la cible HbA1c est basse (6,5 à 7 %) ou le sujet âgé, fragile et/ou insuffisant rénal. Ici dans ces deux situations le risque hypoglycémique, selon nous, définit les meilleures indications de cette nouvelle classe. Si la bithérapie orale ne permet pas d’atteindre les objectifs on est face à trois options : une trithérapie orale, metformine– sulfonylurées–gliptine ou une des deux approches injectables, la mise à l’insuline ou l’injection de GLP-1.
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Disponible sur internet le : 2 mai 2013
S Halimi
If dual oral therapy does not achieve the goals we are faced with three options: triple oral therapy: metformin–sulfonylurea–gliptine or one of two approaches with injections, insulin or GLP-1 analogues. The use of GLP-1 analogues is often delayed today and put wrongly in balance with the transition to insulin, a use already delayed in France and insufficient. The use of incretins is new and needs to be validated by studies of sustainability on glycemic control, prevention of microvascular and macrovascular complications and after years on the market security of use, primarily on the exocrine pancreas. In short, individualization of strategies and HbA1c targets are required, the new molecules can help us in this process. This individualization can easily be done through the handy guide proposed by the experts ADA EASD statement, endorsed by the SFD, abandoning the complex algorithm recently again proposed by HAS and ANSM in 2013. A recommendation that prioritizes the costs of the strategies. An absolutely critical issue, while admitting not to have the tools to measure them in all their dimensions. Finally, we must reconsider every treatment after a maximum of 6 months of use, if the results are deemed inadequate substitute rather than adding drugs.
L’usage des analogues du GLP-1 est donc souvent aujourd’hui retardé et mis, à tort, en balance avec le passage à l’insuline, recours déjà jugé tardif et insuffisant en France. L’usage des incrétines est récent et doit être validé par des études de durabilité sur le contrôle glycémique, sur la prévention des complications micro- et macrovasculaires (en cours) et après mise sur le marché sur la sécurité d’emploi, risque pancréatique exocrine principalement. En somme l’individualisation des prescriptions s’impose, les nouvelles molécules peuvent y contribuer, une fois déterminé le « profil patient ». Cette individualisation des objectifs et moyens de traitement peut aisément se faire grâce au guide très pratique proposé par la déclaration des experts ADA EASD, endossée par la SFD, abandonnant les algorithmes complexes encore récemment proposés par la HAS et l’ANSM dans sa recommandation 2013. Une recommandation qui priorise le coût des stratégies, question absolument cruciale, tout en admettant ne pas disposer des moyens de le mesurer dans toutes ses dimensions. Enfin, on doit savoir reconsidérer la thérapeutique choisie, après six mois d’utilisation au maximum, si les résultats sont jugés insuffisants, savoir la remplacer plutôt qu’additionner les molécules.
L
d’anomalies physiopathologiques connues de longue date ne trouvaient pas de médication permettant de les corriger spécifiquement : insulinorésistance au niveau du foie et du muscle, lipotoxicité, excès de glucagon, déficit en hormones du tractus digestif et des besoins thérapeutiques non couverts, en particulier, contrôler efficacement la glycémie tout en ayant un effet pondéral favorable, au minimum ne pas favoriser la prise de poids, voire aider à l’amaigrissement. Enfin contrôler l’hyperglycémie, chez des patients très tôt dans la maladie lorsque l’HbA1c est encore peu élevée ou plus tard mais âgés et fragiles, sans les exposer au risque d’accidents hypoglycémiques surtout sévères dont la fréquence et l’impact sur la mortalité sont aujourd’hui admis depuis des études ACCORD, VADT [7–9]. L’autre raison est représentée par le marché pharmaceutique du DT2, attractif et prometteur puisque considérable et en croissance rapide. Ainsi, la plupart des grandes firmes se sont engagées dans ce domaine. Le DT2 est ainsi devenu et reste une des principales maladies où les pipelines sont aujourd’hui encore remplis. Néanmoins, des affaires récentes, surtout en France, ont abouti à la remise en cause puis au retrait d’une classe thérapeutique introduite au début des années 2000 (les glitazones) et font surveiller très strictement les nouvelles venues [10]. Enfin, les coûts du diabète sont en pleine croissance et préoccupent légitimement les tutelles tendant à prioriser l’usage des médicaments les plus anciens puisque moins coûteux et génériqués. Aujourd’hui, après le retrait des glitazones, les innovations se limitent à
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e traitement de l’hyperglycémie des diabétiques de type 2 (DT2), est resté longtemps un domaine de recherche pharmacologique peu fructueux, hormis pour la mise au point de nouvelles insulines. Nous avons pour l’essentiel disposé, durant un demi-siècle, de deux classes d’antidiabétiques oraux, dès le début des années 1950 [1] les sulfonylurées (dits sulfamides hypoglycémiants), puis en 1957 la metformine [2] et bien sûr l’insuline. C’est sur ces trois piliers qu’ont reposé, jusqu’aux années 2000, l’essentiel des stratégies thérapeutiques, sur lesquels la grande étude UKPDS a été conçue pour déboucher sur des objectifs glycémiques et des recommandations [3–5]. Depuis environ une quinzaine d’années, deux autres molécules ont ensuite été introduites l’acarbose (GlucorW) un inhibiteur des a glucosidases (IAG) disponible depuis une trentaine d’années et le repaglinide (NovonormW) un insulino-sécréteur d’action plus courte et puissante qui diffère donc un peu des sulfonylurées. Ces deux derniers antidiabétiques oraux ont été beaucoup moins étudiés et utilisés. La recherche s’est brutalement accélérée dans la dernière décennie, conduisant à un nombre important de nouvelles molécules, deux glitazones, assez distinctes l’une de l’autre et la classe des « incrétines », de nouveaux insulino-sécréteurs utilisant la voie du glucagon-like peptide 1 (GLP-1) [6]. D’autres classes thérapeutiques sont en cours de développement. Ces recherches récentes s’expliquent de plusieurs manières. D’abord, parce qu’un certain nombre
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Prise en charge du diabète de type 2 : anciens ou nouveaux médicaments, comment choisir ?
Anomalies physiopathologiques à corriger dans le diabétique de type 2 La physiopathologie du DT2 est actuellement assez bien connue. Le DT2 est caractérisé par trois anomalies métaboliques essentielles décrites dès 1988. Ces trois anomalies sont passées à huit aujourd’hui [11] : un déficit de la fonction b-cellulaire : baisse de sécrétion d’insuline (constante) ; un excès de fonction a-cellulaire : excès de glucagon mal freiné en postprandial ; un état d’insulinorésistance au niveau musculaire, moindre utilisation de glucose ; un état d’insulinorésistance hépatique : production excessive de glucose à jeun comme en postprandial ; un excès de lipolyse (AGL élevés) : accentuant la résistance à l’insuline du muscle comme du foie (lipotoxicité) ; une baisse de l’effet « incrétine » ; des troubles centraux ; une baisse de l’élimination rénale du glucose (seuil rénal élevé). L’activité physique, la perte de poids, une alimentation moins riche en graisses surtout saturées réduisent cette insulinorésistance et sont prioritaires tout au long de la maladie [5]. La metformine réduit la production hépatique de glucose. Seules les glitazones agissent sur l’ensemble des composants de la résistance à l’insuline (par baisse des AGL). C’est pourquoi, leur retrait, total en France, quelle qu’en soit la légitimité, a restreint la pharmacopée [10]. Le déficit de la sécrétion d’insuline peut être corrigé, pour partie par les insulino-sécréteurs. Dans ce groupe, deux grandes classes sont à distinguer. La première catégorie est constituée par des insulino-sécréteurs les premiers découverts, qui se fixent sur un récepteur membranaire de la cellule bêta (SUR) pour stimuler l’insulino-sécrétion. Ils sont représentés par deux types de molécules d’action similaire : les sulfonylurées et les glinides. La deuxième catégorie est représentée par les médicaments qui agissent par la voie des incrétines : les inhibiteurs des DPP-4 (ou gliptines) et les analogues ou agonistes du GLP-1, ces derniers ne peuvent être administrés que par injection sous-cutanée.
Les incrétines Principe d’action : le glucagon-like peptide 1 Il a été montré il y a une vingtaine d’années, que la réponse insulinique est nettement plus importante lorsque le glucose tome 42 > n85 > mai 2013
est administré par voie orale que par voie intraveineuse [6]. Le bol alimentaire induit une sécrétion d’hormones intestinales désignées sous le nom d’incrétines. Parmi les hormones qui ont été identifiées, l’une d’elles, le GLP-1, a fait l’objet d’un développement thérapeutique. Le GLP-1 est libéré par les cellules L de l’iléon du tube digestif dans les minutes qui suivent l’ingestion d’un repas. Il s’en suit une sécrétion d’insuline dite gluco-dépendante, puisque le GLP-1 ne stimule la sécrétion d’insuline que lorsque la glycémie est au-dessus de la normale à jeun. De plus, l’élévation du GLP-1 corrige un trouble présent chez les DT2 : l’excès inapproprié de sécrétion du glucagon en particulier son non-freinage en postprandial, un trouble qui contribue à l’excès de production de glucose par le foie. Ce phénomène est aussi gluco-dépendant. Enfin, le GLP1 exerce un effet satiétogène central et ralentit la vidange gastrique, mais seulement à forte concentration donc, en thérapeutique, avec les analogues du GLP-1 et non avec les gliptines. Outre ses effets sur le métabolisme glucidique, le GLP-1 a de nombreux effets pléiotropes, dont certains très prometteurs au niveau du système cardiovasculaire [12]. En raison de sa courte durée de vie, une demi-vie de deux minutes du fait de son inactivation par un système enzymatique ubiquitaire la DPP-4, le GLP-1 ne peut donc pas être utilisé directement en thérapeutique [6]. Deux voies thérapeutiques ont ainsi été développées. La première consiste à inhiber l’activité de la DPP-4 qui dégrade le GLP-1 de manière spécifique, ce qui se traduit par une augmentation prolongée des taux de GLP-1 endogène. C’est le mode d’action des inhibiteurs des DPP-4 ou gliptines [13–21]. Trois sont déjà sur le marché : la sitagliptine (JanuviaW), la vildagliptine (GalvusW) et la saxagliptine (OnglyzaW), une autre sont annoncées la linagliptine (TrajentaW) qui offre une caractéristique originale, une élimination extrarénale [14]. La seconde voie est représentée par les analogues du GLP-1 (incrétinomimétiques) appelés aussi agonistes des récepteurs du GLP-1 [22–26]. Ce sont des peptides à action GLP-1 et moins rapidement dégradés par les DPP-4 que le GLP-1 humain. Il s’agit de peptides issus de la recherche, d’une part, à partir de dérivés de d’un peptide contenu dans la salive d’un grand lézard l’exendine 4 dont l’analogie seulement partielle avec le GLP-1 humain (< 60 %) le rend moins rapidement dégradable par les DPP-4, d’autre part, du GLP1 humain auquel une structure un peu modifiée lui permet de se lier à l’albumine le protégeant durablement des DPP-4. Dans la première catégorie, issus de l’exendine 4, on dispose de deux dérivés, l’exenatide (ByettaW) premier analogue du GLP1 sur le marché et le lixisénatide (LyxumiaW) approuvé par la FDA en 2013 [25,26]. Ce sont des analogues dits de courte action visant plus le contrôle des excursions glycémiques postprandiales. L’exenatide (ByettaW) a été le premier analogue du GLP-1 commercialisé, avec une demi-vie de 2,5 heures nécessitant 2 injections/j [23], une forme retard (BydureonW) une injection/semaine serait sur le marché dans un délai proche. Le
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deux groupes de thérapeutiques qui agissent par un mécanisme commun, le « phénomène incrétine ». Leur action comme leur voie d’administration diffèrent, orale pour les inhibiteurs des Dipeptidyl Peptidase-4 (DPP-4) ou gliptines et injectable pour les analogues du GLP-1, et conséquemment leurs indications.
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lyxisénatide (LyxumiaW) malgré une demi-vie très courte deux heures, du fait de sa très forte affinité pour le récepteur du GLP1 qui est quatre fois supérieure à celle du GLP-1 humain, étendrait son action au-delà de sa demi-vie, permettant de l’injecter une seule fois par jour. Ses effets concerneraient peu les sécrétions d’insuline ou de glucagon et seraient principalement dus à une vidange gastrique initiale retardée et ciblent donc exclusivement les glycémies postprandiales. La seconde voie est représentée par le liraglutide (VictozaW) demi-vie 13 heures ne requérant qu’une seule injection par jour [14]. De ce fait, VictozaW est considéré comme un analogue lent, contrôlant de préférence les glycémies interprandiales et à jeun [24]. La gluco-dépendance des actions sur la sécrétion d’insuline et de glucagon de toutes les incrétines, implique que les patients qui les reçoivent sont, en principe, à l’abri du risque de présenter des épisodes hypoglycémiques en monothérapie. On parle d’insulino-sécréteurs « intelligents » n’agissant, à l’inverse des sulfonylurées et des glinides, que lorsque la glycémie est au-dessus de la normale. L’association à la metformine constitue une excellente bithérapie, renforçant les effets de chacun, sans risque hypoglycémique, en revanche l’association aux sulfonylurées ou à l’insuline, quoique possible et pratiquée, fait réapparaître le risque hypoglycémique propre à chacune de ces classes thérapeutiques [27].
Résultats des études menées avec les incrétines
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Nombreuses ont été les études menées pour la mise sur le marché de ces deux nouvelles grandes classes. Pour les gliptines (inhibiteurs de DPP-4) les résultats obtenus avec chacune d’elles semblent grossièrement équivalents [22]. Par ailleurs, si au départ il a été affirmé par nombre d’experts que les gliptines étaient, de beaucoup, moins puissantes que les sulfonylurées, cela ne résultait pas d’études face à face mais de données jadis obtenues sous sulfonylurées et menées chez des patients dont les taux d’HbA1c de départ étaient beaucoup plus élevés que ceux des patients inclus dans les études menées avec les gliptines [22]. La metformine demeurant la monothérapie universellement recommandée en première intention en l’absence d’intolérance ou contre-indication [4–6,28] absolues les principaux travaux ont porté sur les différentes bithérapies possibles. Si l’on compare, comme cela a été fait dans des grandes méta-analyses [14], à niveau de départ comparable d’HbA1c < à 8 %, ou > à 8 %, les effets des gliptines ajoutées à la monothérapie metformine à dose maximum tolérée 2000 mg/j en général, on en conclut à la non-infériorité de celles-ci par rapport aux sulfonylurées, aux glitazones, supérieurs à l’acarbose, pour l’abaissement des HbA1c. On peut certes poser la question de la titration des sulfonylurées dans ces études, qui n’était pas maximale, alors que les gliptines furent données d’emblée à dose unique donc maximale puisque sans titration. Dans ces études, face-face, la baisse globale d’HbA1c sous sulfonylurées vs gliptines fut
significativement la même : en moyenne 0,79 %, soit respectivement 0,57 et 0,51 %, pour des valeurs de départ < 8 % et 0,97 et 0,89 % pour des valeurs de départ > 8 %, Les mêmes analyses ont été appliquées aux analogues du GLP1 : 0,99 % mais partant, en moyenne, d’HbA1c initiales > 8 %. Si l’on observe le pourcentage de patients aux objectifs à 7 % d’HbA1c, celui-ci était un peu plus élevé pour les sulfonylurées et les analogues du GLP-1. En revanche, sous ces différentes bithérapies (avec la metformine) le nombre d’épisodes hypoglycémiques était très faible sous gliptines et analogues du GLP-1 (comme avec les IAG et les glitazones), quatre à cinq fois supérieurs sous sulfonylurées, sept fois plus élevé sous glinide (NovonormW). Cette différence marquée, pour le nombre total d’épisodes hypoglycémique enregistrés, est encore mieux illustrée par certaines études [17,18]. Ainsi, la bithérapie metformine–vildagliptine (GalvusW) vs glimépiride, pour une baisse similaire d’HbA1c (valeurs atteintes après 52 semaines de traitement : 6,72 et 6,75 %) il fut enregistré en nombre d’épisodes hypoglycémiques perçus 1,7 % sous vildagliptine vs 16,2 % sous glimépiride (39 vs 554), et surtout 11 patients du groupe glimépiride sont sortis d’étude en raison d’hypoglycémies sévères vs aucun du groupe vildagliptine [17]. Les données sont similaires avec la sitagliptine. Pour les analogues du GLP-1 la baisse d’HbA1c peut être très importante, 1,5 à 2 %, chez certains patients très hyperglycémiques au départ (HbA1c > 8,5 à > 10 %) et en fort surpoids (IMC > 35 kg/m2), donc en l’absence de signe de carence insulinique marquée [24–27].
Tolérance et effets indésirables des différentes stratégies Dans l’ensemble la tolérance des incrétines a été excellente pour les gliptines. Les troubles gastriques et intestinaux sont surtout présents à l’introduction des analogues du GLP-1 [24– 27], nécessitant une posologie progressive (demi-dose d’abord) et assez rarement leur arrêt définitif (< 10 %). Les deux classes d’incrétines semblent exposer, au travers des études avant mise sur le marché comme de suivi de cohortes depuis, à des effets indésirables sérieux rares : aucune hypoglycémie modérée ou sévère imputable, ni acidose lactique contrairement aux sulfonylurées et à la metformine. Les craintes, donc la surveillance, portent, d’une part, sur un risque immunitaire, dont infectieux mais inconstant et modeste, du fait du blocage des enzymes DPP-4 avec les gliptines [29,30] et quelques cas d’angioedèmes en association avec les antihypertenseurs agissant sur le système rénine-angiotensine [31]. Et, pour les deux classes d’incrétines, les gliptines et surtout les analogues du GLP-1, un risque accru de pancréatite peut être un peu plus prononcé avec l’exenatide (ByettaW) qu’avec le liraglutide (VictozaW) [32]. Néanmoins, ce risque extrêmement faible n’est pas encore établi que sur la base d’études rétrospectives et fait l’objet d’enquêtes de suivi rigoureuses depuis tome 42 > n85 > mai 2013
Prise en charge du diabète de type 2 : anciens ou nouveaux médicaments, comment choisir ?
Nouveaux ADO ou anciens : quelles données orientent-elles nos choix ? Pour choisir entre les objectifs, les stratégies et les molécules pour les atteindre, il convient de rappeler les principales études qui ont guidé les recommandations actuelles.
UKPDS et post-trial prévenir les complications : la mémoire glycémique L’étude UKPDS (dix années de suivi) et UKPDS post-trial (20 ans de suivi), ont pu montrer leur efficacité sur la prévention ou le ralentissement des complications du DT2 [3]. L’UKPDS post-trial ayant démontré l’importance d’un contrôle glycémique optimisé dès la prise en charge initiale de la maladie, sur ses complications micro- et macrovasculaires lointaines. Rappelons que la metformine, les sulfonylurées et l’insuline ont été seules utilisées dans cette étude pivot. Aujourd’hui toute nouvelle molécule visant à contrôler la glycémie devra montrer un effet sur les complications du diabète à long terme et des effets indésirables sérieux suffisamment rares pour être acceptable. Ces études sont exigées par les agences de régulation (FDA-EMEA). Elles sont en cours pour les gliptines et les analogues du GLP-1.
ACCORD, VADT : hypoglycémies sévères marqueur de surmortalité ? Les études ACCORD et VADT ont jeté le trouble dans les esprits quant aux objectifs glycémiques à viser chez les DT2, puisqu’elles ont mis en évidence l’absence de bénéfice d’un très strict contrôle glycémique ( 6,5 % d’HbA1c) sur les événements cardiovasculaires et la mortalité cardiovasculaire comme sur la mortalité globale [7–9]. Qui plus est il a été établi une relation statistique entre hypoglycémies sévères et surmortalité globale, sans toutefois pouvoir établir un lien de causalité et de temporalité direct, ici on peut donc parler de marqueur et non de facteur de risque [9]. Certains praticiens en tirèrent la conclusion hâtive que les objectifs d’HbA1c des recommandations nationales et internationales étaient trop stricts et nuisibles pour la plupart des diabétiques. Il convient de rappeler que dans ces études les investigateurs avaient été conduits à additionner un très grand nombre de molécules, de fortes doses d’insuline afin de faire baisser drastiquement et rapidement l’HbA1c (en six mois), des tome 42 > n85 > mai 2013
approches et objectifs thérapeutiques très éloignés de la pratique courante chez des patients longtemps mal équilibrés dont le diabète était souvent ancien et atteints de comorbidité ou en prévention cardiovasculaire secondaire. Il fut ainsi enregistré un grand nombre d’hypoglycémies en particulier très sévères (comas ou recours à une aide médicale urgente) et une prise de poids considérable. Les nouveaux insulino-sécréteurs « incrétines » récemment sur le marché, ne furent presque pas utilisés dans ces études. En somme, retenir de ces travaux un message pour l’ensemble des DT2 en particulier pour ceux dont le diabète est récent, en bon état général, à faible risque de morbi-mortalité serait erroné et abusif. Ces études ont néanmoins conduit à reconsidérer les objectifs et les stratégies thérapeutiques à appliquer aux DT2 et se sont traduites par une déclaration d’expert valant pour un guide pratique international, le Statement American Diabetes Association (ADA) et l’European Association for the Study of Diabetes (EASD) qui se veut centré sur le patient et abandonne toute forme d’algorithme [33].
Statement American Diabetes Association et l’European Association for the Study of Diabetes : des objectifs et moyens de traitement individualisés Depuis une dizaine d’années, la plupart des recommandations ont proposé une HbA1c 7 % comme objectif souhaitable pour une majorité de DT2 [4,5,28] (figure 1). En France les recommandations, depuis celles parues en 2006 comme celles qui viennent de les remplacer et partout ailleurs dans le monde, comme celles des experts Européo-Américains, ont proposé plusieurs cibles d’HbA1c selon le profil patient [33]. Ce Statement des deux plus importantes sociétés savantes du diabète, l’ADA et l’EASD est la position partagée et endossée par la Société francophone du diabète (SFD). La démarche est dite « centrée patient », elle consiste à tenir compte de l’ensemble des caractéristiques d’une personne atteinte d’un DT2 : âge du sujet, ancienneté du diabète, espérance de vie, fragilités, comorbidités, antécédents cardiovasculaires environnement humain et médical, isolement et motivation. Quant au risque hypoglycémique il est répété comme crucial et décrit selon deux angles. Celui de son risque propre de survenue, une incidence qui s’accroît au fur et mesure que les objectifs sont plus stricts (i.e., lorsque la cible d’HbA1c est basse) et avec certaines thérapeutiques (sulfamides–repaglinide–insuline) et, d’autre part, celui de leurs conséquences, un risque de surmortalité chez les plus fragiles. Cela conduit à établir un objectif d’HbA1c individualisé, qu’il convient de reconsidérer au fil du temps et des moyens thérapeutiques disponibles. Pour les sujets au début de la maladie, en bonne santé globale, modérément hyperglycémique (HbA1c de découverte 7,5 voire < 8 %), sans fragilité notoire et avec une longue espérance de vie, cibler une valeur de 6 à 6,5 % donc nettement inférieure à 7 %, est considéré comme légitime et atteignable sous conditions de
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leur mise sur le marché. Une surveillance thyroïdienne est exercée sur les patients recevant VictozaW mais cette crainte repose sur des travaux menés chez l’animal peu extrapolables à l’humain. Quant aux effets indésirables modérés ou graves de la metformine on rappellera l’intolérance digestive absolue pour environ 10 % des sujets, une tolérance médiocre chez encore 20 % d’entre les autres, amenant à réduire la posologie de moitié (1000 mg/j) comme chez l’insuffisant rénal modéré (50–30 mL de DFG) puis à l’interrompre en deçà. Quant aux hypoglycémies sous sulfonylurées nous y revenons un peu plus loin dans le texte.
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Figure 1 Statement ADA EASD SFD [33] Trois grandes catégories de patients DT2 sont définies : A : diabète récent sujet jeune objectifs 6 à 6,5 % certainement < 7 % ; B : diabète plus ancien sujet plus âgé objectif 7 voire 7,5 % et C : sujets âgés et/ou fragiles, à haut risque hypoglycémique objectif HbA1c > à 7,5 %. Voir code couleur pour les stratégies sur la figure 2. ADA : American Diabetes Association ; EASD : European Association for the Study of Diabetes ; SFD : Société francophone du diabète ; DT2 : diabétiques de type 2.
ne pas entraîner d’hypoglycémies surtout sévères. Viser un bon contrôle durant les dix premières années de prise en charge a, en effet, démontré son efficacité sur la prévention des complications ou leur ralentissement au terme de cette décennie mais aussi la protection induite pour les dix années suivantes [3]. Cet investissement initial est donc un moyen de réduire la fréquence et le coût humain comme économique du diabète. Par la suite ou si le patient est d’emblée plus âgé lors de la prise en charge, viser un objectif inférieur ou même égal 7 % est suffisant. Enfin, si le patient est âgé, fragile, en prévention secondaire, si son espérance de vie est restreinte, son environnement social et médical limité, alors les objectifs sont à réviser à la hausse 7,5 % voire 8 % et parfois plus mais une fois encore en ayant le souci constant d’éviter les hypoglycémies.
La recommandation Haute Autorité de santé (HAS) et l’Agence nationale de sécurité des médicaments (ANSM) 2013 Très récemment la HAS et l’ANSM ont fait paraître leurs recommandations [28]. Compte tenu du Statement ADA EASD détaillé plus haut, il semblait important de lister les points de convergence et de divergence des deux démarches. Convergences
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On retient que la convergence est forte pour ce qui concerne la nécessaire individualisation des objectifs. On retrouve la consécration d’une molécule et des stratégies basées sur la metformine, d’abord en monothérapie puis en bithérapie et jusqu’aux injectables. De même il est admis maintenant dans la recommandation HAS que l’on peut maintenir la metformine
au stade de l’insuffisance rénale modérée (DFG entre 59 et 30 mL/min) en diminuant les doses, soit au maximum 1 à 1,5 g/J. Mais au stade de la bithérapie les stratégies divergent quant à la hiérarchisation des choix. Divergences Malgré la prise en compte de la typologie de chaque patient, concept d’individualisation, la HAS affirme avoir répondu à une demande de la CNAM, avoir adopté une démarche centrée sur l’efficience c’est-à-dire la relation bénéfice/coût des stratégies, donc sur la volonté de limiter le recours aux molécules nouvelles, incrétines, plus pour leur coût que pour le faible recul. Ainsi, après la metformine, en bithérapie les sulfamides sont privilégiés et le recours aux gliptines quoique reconnu comme d’efficacité (baisse d’HbA1c) équivalente [22], ne devrait se faire que lorsqu’on juge « que la survenue d’hypoglycémie est une situation préoccupante » ou aux analogues du GLP-1 pour les questions référant aux problèmes pondéraux que « si la prise de poids est une situation préoccupante ». On peut aussi s’étonner de discuter du degré recherché d’abaissement de l’HbA1c (< ou > 1 %) alors que le Statement ADA EASD considère qu’en moyenne tout ajout d’une seconde médication à la metformine engendre une baisse équivalent de l’HbA1c.
Limites de la recommandation Haute Autorité de santé et l’Agence nationale de sécurité des médicaments On ne peut que partager le souci de limiter les dépenses de santé pour une maladie dont l’incidence est en forte progression et pèse déjà lourd dans les dépenses de santé. Toutefois, tome 42 > n85 > mai 2013
Prise en charge du diabète de type 2 : anciens ou nouveaux médicaments, comment choisir ?
faute de données propres à la France, les économistes en charge de cette recommandation avouent avoir été incapables de modéliser la dimension « coûts » des différentes stratégies et n’avoir retenu que le coût journalier des traitements, basé sur le prix unitaire quotidien de chaque médicament, une méthode médico-économique évidemment très en deçà de la réalité. En effet, les surcoûts engendrés par les effets indésirables de toute thérapeutique, ici les hypoglycémies sous sulfamides hypoglycémiants, repaglinide, comme sous insulines de type NPH, sont totalement ignorés alors qu’on dispose de données tant en Europe qu’aux États-Unis qui montrent que les hypoglycémies engendrées ou le besoin de plus d’autosurveillance glycémique auraient dû être pris en compte [34]. En somme ces deux recommandations s’opposent en ce sens qu’en France le choix est centré sur l’efficience quoique de façon avouée sans moyen de disposer d’authentiques indicateurs, pendant que le Statement est centré patient. En effet, les hypoglycémies sous insuline et sous sulfamides constituent deux des principales causes d’hospitalisation aux États-Unis pour iatrogénie au-delà de 65 ans [35]. La France aurait-elle des raisons d’échapper à ce risque ? Le coût immédiat des événements hypoglycémies sévères est en fait très élevé [36]. Les conséquences ultérieures démontrées dans les études ACCORD et VADT ne devraient pas, non plus, ignorer notre pays. Enfin, la terminologie utilisée pour recourir aux incrétines reste vague : y recourir lorsque « la survenue
d’hypoglycémie est une situation préoccupante » laisse supposer que ce risque est facilement évalué et connu en pratique médicale courante. En fait, la recommandation HAS ANSM, a pour but de limiter l’usage des nouveaux traitements, de n’y recourir que de façon exceptionnelle établissant un cadre nettement contraint de prescription. Selon nous, de plus, cette recommandation ne distingue aucunement les sulfamides hypoglycémiants entre eux, alors que les disparités pharmacologiques et de leurs effets indésirables sont bien établies. Une telle volonté centrée sur les coûts ignorant la iatrogénie semble une attitude en contradiction avec le principe de précaution tant mis en exergue par ailleurs dans la recommandation au sujet des effets indésirables à long terme « suspectés » des nouveaux traitements.
Mise au point
Prise en charge du diabe` te de type 2
Place des gliptines et du glucagon-like peptide 1 dans la stratégie thérapeutique Selon nous durant les dix premières années de prise en charge d’un DT2, si l’objectif HbA1c est fixé entre 6 et 6,5 % ou nettement en deçà de 7 %, lorsque la monothérapie metformine ne suffit plus, la bithérapie metformine–gliptine représente la solution simple, facile à prescrire et sans aucun risque hypoglycémique donc la plus adaptée (figure 2). Certes il existe des sujets non répondeurs mais cela concerne toutes les classes thérapeutiques. Contrairement à ce qui est affirmé dans la récente recommandation HAS ANSM l’alternative proposée en
Figure 2
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Stratégies selon les objectifs et fragilités : on peut estimer à environ 25 % de patients dans le groupe A, 50 % dans le groupe B, 25 % dans le groupe C
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bithérapie, metformine–acarbose, nous semble irréaliste, du fait d’une tolérance digestive insupportable pour la grande majorité des patients selon nos propres travaux [37]. Si l’objectif est situé entre 7 et 7,5 % la bithérapie metformine–sulfamide hypoglycémiant est parfaitement légitime sous réserve de vérifier l’absence d’hypoglycémies surtout redoutées entre le milieu de l’après-midi et la nuit. Si l’objectif est plus élevé 7,5 à 8 % cette bithérapie peut aussi être utilisée mais lorsque une telle cible moins stricte est choisie c’est que le patient est considéré comme plus fragile, donc chez lequel les conséquences des hypoglycémies sévères sont redoutées Alors le choix devrait se faire selon nous entre, bithérapie metformine-gliptines et metformine-insuline basale. Si l’IMC est élevé, > à 30 kg/m2 ou plus encore > à 35 voire 40 kg/m2 des analogues du GLP-1, exenatide (ByettaW) ou liraglutide (VictozaW) sont indiqués sauf lorsque le sujet est très âgé. Les analogues du GLP-1 doivent être efficaces à la fois sur le poids ( 3 % du poids de départ) et le contrôle glycémique ( 1 % HbA1c) donc être reconsidérés au bout de six mois d’essai thérapeutique maximum. C’est pourquoi tout échec avéré des ADO ne doit pas conduire à un passage obligé sous GLP-1 mais considéré aussi comme une possible indication de mise sous insuline. Celle-ci sera le plus souvent une basale (glargine surtout) en gardant la metformine et en discutant l’intérêt du maintien des insulinosécréteurs.
Cas particuliers Sujet âgé Un quart des DT2, en France, sont âgés de 75 ans et plus, plus de 30 % de plus de 70 ans. Chez ces patients s’ils sont fragiles, aux objectifs glycémiques moins stricts (HbA1c 7,5 et jusqu’à 8 %) la prévention des hypoglycémies comme de la dénutrition, constituent deux préoccupations prioritaires. C’est pourquoi, selon nous, les indications thérapeutiques chez le sujet âgé fragile, se limitent aux bithérapies metformine–gliptines si le diabète est assez récent et le patient répondeur ou à la mise sous insuline [38]. Les indications des analogues du GLP-1 sont ici assez rares, compte tenu de l’effet anorexigène et du risque de perte de poids peu souhaitables à ces âges surtout en cas d’insuffisance rénale.
Diabétique insuffisant rénal
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De par l’âge moyen des diabétiques en France et la fréquence des maladies rénales, l’insuffisance rénale de modérée à sévère n’est pas un particularisme rare, puisqu’elle concerne environ un tiers des DT2. Ici les inhibiteurs de DPP-4 (gliptines) semblent disposer de bons arguments pour leur usage si l’insuline n’est pas encore requise [39]. Il est alors recommandé [16] d’utiliser une demi-dose pour la vildagliptine (GalvusW) si la fonction rénale se situe entre 15 et 50 mL/min (clairance calculée MDRD) présentation disponible, pour la sitagliptine (JanuviaW) demi-dose 50 mg jusqu’à 30 mL/min puis 25 mg
en deçà mais ces posologies ne sont pas encore disponibles. Enfin une dose pleine avec la linaglitpine (TrajentaW) mais elle n’est pas encore sur le marché français. Rappelons que le repaglinide (NovonormW) peut aussi être utilisé chez l’insuffisant rénal diabétique. Mais dans nos travaux nous avons pu vérifier que cette spécificité conduit à un usage fréquent du repaglinide dans ces circonstances mais sans assez de prudence d’où une forte responsabilité dans les causes d’hypoglycémies iatrogènes sévères [36]. En deçà de 30 mL/min de DGF, la metformine est à proscrire. Les sulfamides hypoglycémiants sont à utiliser avec la plus grande prudence surtout le glibenclamide (DaonilW) et à faible posologie. Les gliptines leur sont préférables comme chez le sujet âgé. On aura volontiers recours aux insulines en tenant compte toutefois de l’allongement de leur durée d’action. Quant aux analogues du GLP-1, si la pharmacocinétique de l’exenatide (ByettaW) est nettement modifiée en cas d’insuffisance rénale, cela n’est pas le cas pour le liraglutide (VictozaW). Toutefois, leur utilisation chez l’insuffisant rénal est à envisager qu’avec prudence et parcimonie (DFG < 50 mL/min). Leurs effets digestifs et anorexigènes en limitent ici l’usage puisque susceptibles d’aggraver un état général et nutritionnel déjà précaire. Le choix ici encore se situe, selon nous, entre nouveaux insulino-sécréteurs à dose adaptée (gliptines) voire le repaglinide (NovonormW) manié avec grande prudence et l’insuline.
En cas de jeûne surtout de Ramadan Le recours aux glitpines peut être une solution au dilemme souvent rencontré aujourd’hui chez des patients sautant un repas ou jeûnant pour des raisons religieuses ou non [40]. En effet, en mono- ou en bithérapie metformine–gliptine le risque hypoglycémique est absent. Plusieurs études sont déjà disponibles [41,42]. Cela sera peut-être vrai aussi avec les analogues du GLP-1 mais leurs effets digestifs et centraux incitent à le vérifier par des études spécifiques.
Conclusion Les nouvelles molécules incrétines, offrent des avantages certains par rapport aux précédents insulino-sécréteurs puisque leurs effets glycémiques favorables s’exercent sans risque hypoglycémique et pour les analogues du GLP-1 en facilitant la perte de poids de certains DT2 obèses. Pour les gliptines, la souplesse de leur usage fait leur force, pour le patient comme pour le prescripteur et cette bithérapie avec la metformine convient à un grand nombre de patients quel que soient leur âge, fragilité, fonction rénale. Toutefois, tous les patients ne sont pas répondeurs à ces traitements. Leur coût surtout et malgré un bon dossier de pharmacovigilance avec un recul d’environ cinq années, la saine prudence qui convient pour toute nouvelle classe thérapeutique, incitent à les utiliser à bon escient et à rester attentif à leurs résultats à moyen terme au tome 42 > n85 > mai 2013
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travers d’études en cours portant sur les événements surtout cardiovasculaires, sous peu disponibles, et sur les effets indésirables graves potentiels qui font l’objet d’une surveillance au niveau international. Néanmoins, le risque hypoglycémique des sulfamides hypoglycémiants et des glinides doit aussi être considéré comme « indésirable » et parfois « grave »
[36–43] –, son incidence doit donc aussi être prise en compte et mesurée dans notre pays ce qui n’est pas le cas aujourd’hui contrairement à d’autres systèmes de santé [34–36]. Déclaration d’intérêts : l’auteur déclare avoir des liens d’intérêt avec l’ensemble des firmes pharmaceutiques et technologiques en relation le diagnostic et le traitement des y compris celles développant des incrétines.
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