Transfusion Clinique et Biologique 18 (2011) 485–487
Mise au point
Procédés de réduction des pathogènes applicables aux produits cellulaires : la perspective canadienne Pathogen inactivation processes applicable to cellular products: The Canadian perspective G. Delage Affaires médicales en microbiologie, Héma-Québec, 4045 Côte-Vertu, H4R 2W7, Saint-Laurent, QC, Canada Disponible sur Internet le 28 juin 2011
Résumé Les faits saillants de la récente conférence de consensus sur les procédés de réduction des pathogènes sont rapportés. Par la suite, les démarches entreprises à ce jour en vue de l’introduction de ces procédés au Canada sont brièvement décrites. © 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Réduction des pathogènes ; Sécurité transfusionnelle ; Agents infectieux émergents
Abstract The highlights of the recent Canadian consensus conference on pathogen inactivation are summarized. Also, a brief summary of steps taken to date in order to implement these technologies is presented. © 2011 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. Keywords: Pathogen reduction; Transfusion safety; Emerging infectious agents
1. Introduction Les procédés de réduction des pathogènes applicables aux produits plaquettaires sont implantés ou en voie de l’être dans plusieurs pays européens. Quelle est la situation en Amérique du Nord et plus particulièrement au Canada ? Le présent texte se veut un état de situation sur cette question. 2. Conférence de consensus canadienne sur les procédés de réduction des pathogènes applicables aux produits cellulaires Le développement de méthodes de réduction des pathogènes applicables aux produits cellulaires a suscité un certain nombre de questions interpellant les opérateurs du système du sang au Canada. C’est pourquoi au printemps 2007, Héma-Québec, la Adresse e-mail :
[email protected] 1246-7820/$ – see front matter © 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.tracli.2011.05.003
Société canadienne du sang (SCS), en collaboration avec le groupe BEST (BEST collaborative) ont parrainé une conférence de consensus qui s’est tenue à Toronto. Héma-Québec et la SCS n’en étaient pas à leurs premières armes dans le domaine, puisqu’au fil des ans, les deux établissements en avaient déjà organisé cinq, prenant pour modèle le format prescrit par le programme de développement de consensus du National Institutes of Health [1,2]. La conférence a été planifiée par un comité organisateur présidé par le Dr Morris Blajchman (composé de dix membres dont l’auteur de cet article). Le comité a mis sur pied un programme scientifique d’une journée durant laquelle 15 conférenciers ont résumé les principales données scientifiques sur le sujet, répondant par la suite aux questions du panel et des 270 participants [3]. Le panel, présidé par le Dr Harvey Klein, était constitué de huit membres représentant plusieurs disciplines (médecine transfusionnelle, hématologie, épidémiologie, microbiologie, toxicologie, réanimation, politique de la santé, éthique) et d’un
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malade nécessitant un support transfusionnel chronique. Après les présentations scientifiques, le panel s’est retiré pour délibérer et répondre à une série de questions préparées à leur intention par le comité organisateur. Le lendemain, ils ont présenté le résultat de leurs discussions, répondu aux questions des participants, pris en note leurs commentaires, puis se sont à nouveau retirés pour préparer la version finale de leur document. Leurs recommandations ont été publiées d’abord sous forme préliminaire et, par la suite, sous forme plus détaillée [4,5].
3. Recommandations du panel Voici un résumé des recommandations du panel : • en tenant compte des données disponibles (concernant les agents infectieux connus), le panel ne recommande pas l’introduction d’un procédé d’inactivation des pathogènes avec les risques connus qui y sont associés. Cependant, la stratégie réactive de surveillance, d’identification et de mise au point des tests permet à un agent infectieux émergeant de se disséminer largement avant même que la maladie ne soit connue. Le panel reconnaît que de tels risques nécessitent une approche proactive conformément au principe de précaution qui prévoit un processus décisionnel distinct pour la gestion de menaces sérieuses dans un contexte d’incertitude scientifique et ce, afin de rencontrer les attentes de la société concernant la gestion des risques ; • considérant le fait que des agents transmissibles par transfusion entrent dans l’approvisionnement sanguin et le risque associé aux agents infectieux en émergence, le panel est d’avis qu’un processus d’inactivation des pathogènes devrait être implanté lorsqu’une méthode réalisable et sûre, permettant d’inactiver un large éventail d’agents infectieux, est disponible ; • les critères de sécurité, de faisabilité et d’efficacité devraient s’appliquer à tous les produits sanguins labiles traités. L’idéal serait qu’il existe une seule méthode qui permettrait d’inactiver les pathogènes dans tous les produits sanguins labiles. Cependant, l’absence d’un système intégré ne signifie pas qu’il faut retarder l’inactivation des pathogènes pour un produit jusqu’à ce qu’une méthode ait fait ses preuves pour l’ensemble de ceux-ci ; • après avoir pris la décision d’aller de l’avant et d’implanter une méthode d’inactivation des pathogènes pour un produit sanguin spécifique, le produit traité devrait être utilisé de manière universelle ; • concernant l’évaluation préalable à l’autorisation des procédés d’inactivation des pathogènes, le panel approuve l’application rigoureuse de normes visant la sécurité et l’efficacité, notamment dans le domaine de la toxicologie. Le panel recommande fortement l’utilisation d’essais cliniques randomisés, bien conc¸us, avec des effectifs suffisants et des critères d’évaluation cliniquement pertinents pour établir l’efficacité des produits soumis aux procédés d’inactivation des pathogènes ;
• la surveillance post-commercialisation des effets indésirables devrait être reliée aux systèmes d’hémovigilance nationaux ; • avant d’adopter un procédé d’inactivation des pathogènes à grande échelle, une consultation auprès des parties prenantes (groupe de malades, médecins, services transfusionnels) est essentielle. Au départ, la nouvelle procédure devrait être introduite sous forme de projet pilote dans une région géographique afin de régler des questions de logistique, d’environnement et de santé au travail avant d’être implantée sur une plus grande échelle ; • advenant l’implantation du processus d’inactivation des pathogènes pour tous les produits, il serait possible que les procédures existantes soient modifiées afin de réduire les coûts ou diminuer la fréquence d’interdiction des donneurs. Les personnes intéressées à prendre connaissance des questions posées et des recommandations détaillées du panel pourront consulter les rapports publiés [4,5]. 4. Situation au Canada en 2010 Aucun procédé applicable aux produits sanguins cellulaires n’a encore rec¸u son homologation de Santé Canada. Les préoccupations des organismes réglementaires nord-américains concernant ces procédés (Food and Drug Administration [FDA], Santé Canada) sont bien résumées dans le compte rendu publié de la conférence de consensus et dans une présentation des scientifiques de la FDA à une récente réunion du Blood Products Advisory Committee [3,6]. Les manufacturiers des divers procédés sont en discussion avec les autorités réglementaires canadiennes. De leur côté, les deux opérateurs canadiens ont entamé des démarches préliminaires en vue de se préparer à l’arrivée de ces procédés sur le marché. Ces démarches sont d’ordre administratif (document de décision, opinions de comités consultatifs, consultation de la clientèle) et d’ordre opérationnel (évaluation par les unités de recherche opérationnelle des caractéristiques de ces procédés et de leur impact sur la fabrication des produits sanguins labiles). Donc, dans le contexte actuel, il est impossible de prédire à quel moment les procédés de réduction des pathogènes seront disponibles pour implantation au Canada. Déclaration d’intérêts L’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article. Références [1] Sher GD, Devine D. The Consensus Development Process in transfusion medicine: does it add value? Transfusion 2007;47:2176–9. [2] National Institutes of Health (NIH) Consensus Development Program [page d’accueil sur Internet]. Kensingto, MD: NIH Consensus Development Program. URL: http://consensus.nih.gov/aboutcdp.htm.(accès le 20/5/2011). [3] Webert KE, Cserti CM, Hannon J, Lin Y, Pavenski K, Pendergast JM, et al.Proceedings of a Consensus Conference: pathogen inactivation – making decisions about new technologies. Transfus Med Rev 2008;22:1–34.
G. Delage / Transfusion Clinique et Biologique 18 (2011) 485–487 [4] Klein HG, Anderson D, Bernardi MJ, Cable R, Carey W, Hosh JS, et al.Pathogen inactivation: making decisions about new technologies – preliminary report of a Consensus Conference. Vox Sang 2007;93:179–82. [5] Klein HG, Anderson D, Bernardi MJ, Cable R, Carey W, Hosh JS, et al. Pathogen Inactivation: making decisions about new technologies. Report of Consensus Conference. Transfusion 2007;47: 2338–47.
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[6] Blood Products Advisory Committee. Topic II: Study Designs (Phases 3 and 4) for Product Development of Human Platelets Using the Cerus INTERCEPT Blood System for Pathogen Inactivation Silver Spring, MD: Food and Drug Administration (FDA); 2009. Disponible à l’adresse: http://www.fda.gov/downloads/advisorycommittees/committeesmeetingsmaterials/bloodvaccinesandotherbiologics/bloodproductsadvisorycommittee/UCM190168.pdf (accès le 20/5/11).[Meeting Material; 96th Meeting, November 16-17, 2009].