Qualité de vie après résection antérieure et amputation du rectum

Qualité de vie après résection antérieure et amputation du rectum

Analyses commentées Ann Chir 2001 ; 126 : 598-604 © 2001 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés Qualité de vie après...

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Analyses commentées

Ann Chir 2001 ; 126 : 598-604 © 2001 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés

Qualité de vie après résection antérieure et amputation du rectum

Grumann MM, Noack EM, Hoffmann IA, Schlag PM. Comparison of quality of life in patients undergoing abdominoperineal extirpation or anterior resection for rectal cancer. Ann Surg 2001; 233: 149-56

De façon générale, il est admis que la préservation sphinctérienne (résection–anastomose : RA) après exérèse rectale donne un meilleur confort de vie qu’une colostomie (amputation abdominopérinéale : AAP). Néanmoins cette appréciation dépend beaucoup des critères de jugement qui sont utilisés pour apprécier la qualité de vie. Ces critères sont en effet très nombreux et disparates d’une étude à l’autre. De plus, sur 54 publications en anglais, 14 correspondaient à des études prospectives, et trois seulement avaient utilisé des critères qui ont été validés. Enfin, la plupart des études ont inclus moins de 25 malades avec des reculs très variés, allant de un mois à 30 ans. L’objectif principal de ce travail était de déterminer celles des composantes de qualité de vie qui compromettaient le plus le résultat de la RA et de l’AAP afin d’orienter le choix entre les deux techniques. L’étude a inclus 23 patients consécutifs ayant eu une AAP et 50 ayant eu une RA à visée curative et n’ayant pas de signes de récidive pendant la période d’étude. L’évaluation a été faite avec les critères validés de l’European Organization for Research and Treatment of Cancer (EORTC) complétés par le module CR 38 (qualité de vie globale, qualité physique, sociale, émotionnelle, image du corps, perspectives d’avenir… et asthénie, diarrhée, défécation, troubles liés à la stomie, insomnie, etc.) L’étude a été prospective avec recueil des données juste avant l’intervention, six à neuf mois et 12 à 15 mois après l’opération. Seuls les malades qui ont rempli les trois questionnaires et pour lesquels il y avait moins de 50 % de données manquantes ont été retenus. La comparaison rétrospective des groupes n’a pas montré de différence significative concernant le sexe, l’âge, le stade du cancer, les traitements néoadjuvants ou adjuvants. Dans les RA, l’anastomose était à moins de 5 cm de la ligne anopectinée chez 15 malades et au-dessus chez 35. Les taux de complications postopératoires n’étaient pas différents dans les deux groupes. Les

sous-scores théoriques de qualité de vie allaient de 0 à 100, un bon score traduisant un bon résultat fonctionnel. Inversement, un score élevé traduisait des troubles sévères. Globalement les scores après RA étaient supérieurs à ceux observés après AAP sans que les différences ne soient statistiquement significatives. Une analyse de variance a montré après l’une et l’autre intervention que le sentiment de son rôle et l’image corporelle se dégradaient ; en revanche, la fonction émotionnelle et les perspectives futures s’amélioraient. Les résultats sur les troubles du transit (diarrhée, constipation) et l’insomnie étaient meilleurs après AAP qu’après RA. Les plus mauvais résultats étaient observés après anastomose colorectale à moins de 5 cm de la ligne anopectinée concernant le sentiment de son rôle, la fonction sociale, l’image corporelle, et les perspectives futures ainsi que les troubles digestifs et les troubles de la défécation. Pour les auteurs, ces résultats sont plutôt en faveur de l’AAP. Ils font remarquer que les effectifs relativement faibles de malades rendent difficile l’interprétation de leurs résultats qu’il serait souhaitable de valider par d’autres études. Les problèmes psychologiques posés par une colostomie semblent contrebalancés par les troubles du transit et un risque d’incontinence, surtout après anastomose très basse. Une autre étude allemande sur un plus petit nombre de malades mais avec les mêmes critères de jugement, allait dans le même sens. Psychologiquement, l’AAP et la colostomie sont mieux vécues que ne l’appréhendaient les malades et inversement pour les anastomoses basses. Cela pourrait, chez certains malades, nuancer le choix de la technique.

Commentaires Cette étude a le mérite d’avoir porté sur un recueil prospectif de données multiples concernant la qualité de vie ainsi que sur leur évolution dans le temps, et à partir de critères précis qui ont été validés [1]. Le nombre de malades est considéré par les auteurs comme relativement faible. Cela n’est pas gênant pour les différences statistiquement significatives. En revanche, dans les autres cas, il y a effectivement un risque de deuxième espèce [2]. Les deux seules remarques critiques que l’on puisse formuler sont : – l’absence d’information concernant le nombre des malades qui, pendant la durée de l’étude n’ont pas accepté d’y participer, ainsi que le nombre des malades

599 exclus pour un pourcentage trop élevé de données manquantes dans leurs réponses aux questionnaires ; – l’absence de précision sur la constitution ou non d’un réservoir, les résultats fonctionnels étant meilleurs, au moins la première année avec un réservoir que ceux observés en l’absence de réservoir [3]. Sur le plan carcinologique, il était impossible d’envisager une étude randomisée comparant les deux techniques dans les cancers du tiers moyen et inférieur du rectum qui respectaient le canal anal : si une RA paraissait possible dans de bonnes conditions carcinologiques apparentes, il était éthiquement impossible de faire délibérément une AAP. Le meilleur niveau de preuve ne pouvait alors être obtenu que par des techniques biostatistiques d’études multifactorielles et d’ajustement. Nous avions fait une telle étude qui montrait un risque relatif de récidive et de mortalité un peu supérieur, respectivement 1,3 (IC 95 % : 0,3–2,0) et 1,05 (IC 95 % : 0,5–2,0) après RA qu’après AAP, mais sans que cette différence ne soit statistiquement significative [4]. Les résultats de l’étude de Gruman et al. vont un peu à l’encontre de ce qui est habituellement admis. La rigueur avec laquelle l’étude a été conduite confère à ce travail un niveau de preuve scientifique supérieur à celui des études publiées jusque là sur le même sujet. Ces résultats confirment la nécessité, surtout si l’on pense être obligé de faire une anastomose colorectale basse ou coloanale, d’informer le malade des principaux avantages et inconvénients de l’AAP et de la RA. Le consentement éclairé du malade et son option préférentielle prennent, pour une fois, tout leur sens dans ce type de choix.

Références 1 Spangers MAG, Te Velde A, Aronson NK. The construction and testing of the EORTC colorectal cancer-specific quality of life questionnaire module (QLQ-CR 38). Eur J Cancer 1999 ; 35 : 28-47. 2 Huguier M, Flahault A. Comparaisons, risques d’erreur : les tests statistiques, le calcul des effectifs. In : Huguier M, Flahault A, Eds. Biostatistiques au quotidien. Paris : Elsevier ; 2000. p. 45-63. 3 Barrier A, Martel P, Dugue D, Gallot D, Malafosse M. Anastomoses coloanales directes et avec réservoir. Résultats à court et à long terme. Ann Chir 2001 ; 126 : 18-25. 4 Huguier M, Chastang C, Houry S, Sima AM, Berhouet H, Chevret S. Sphincter-saving resection, or not, for cancer of the midrectum. Am J Surg 1997 ; 174 : 11-5.

Michel Huguier Paris, France S0003394401005661/BRV

Pancréatectomie pour pancréatite chronique et autotransplantation d’îlots de Langerhans

White SA, Davies JE, Pollard C, Swift SM, Clayton HA, Sutton CD, et al. Pancreas resection and islet autotransplantation for end-stage chronic pancreatitis. Ann Surg 2001 ; 233 : 423-31

Les auteurs rapportent l’expérience de 21 pancréatectomies totales et de trois pancréatectomies subtotales pour pancréatite chronique avec auto-transplantation d’îlots de Langerhans de 1994 à 1999. Les résultats ont été comparés à ceux d’une série de 13 pancréatectomies totales pour la même indication et pendant la même période. La pancréatectomie totale était indiquée pour des douleurs persistantes et rebelles aux opiacés. Plusieurs patients avaient déjà été opérés dont trois qui avaient eu une pancréatectomie distale. Aucun patient n’était diabétique avant la greffe. La rate a été conservée dans 80 % des cas. Les îlots de Langerhans ont été obtenus par digestion enzymatique intraductale (collagénase pour les 20 premiers cas et une libérase humaine pour les quatre derniers). Après digestion pancréatique, les îlots ont été le plus souvent purifiés par un gradient de Ficoll. Dans tous les cas, le volume des tissus greffés était inférieur à 14 mL. La greffe a été faite par infusion lente en 30 minutes dans une branche de la veine porte (n = 19) ou de la veine splénique (n = 5). Quinze patients ont eu une greffe d’îlots « purifiés » avec 127 964 îlots équivalents en moyenne (nombre d’îlots équivalent à 100 µm de diamètre). Neuf patients ont eu une greffe d’îlots non purifiés avec 44 116 îlots équivalents en moyenne. Dans tous les cas, une normoglycémie a été maintenue en postopératoire par une insulinothérapie. Il y a eu deux décès postopératoires, un dans chaque groupe, greffé et non greffé. Deux autres décès sont survenus à distance. Dans le groupe greffé, trois complications étaient en rapport avec la greffe (un infarcissement splénique, une thrombose de la veine splénique, et une thrombose portale partielle), et trois complications étaient en rapport avec la technique de pancréatectomie (ischémies duodénales avec résection secondaire). Dans ce groupe, six autres complications postopératoires ont été observées, et à distance six occlusions intestinales réopérées. Dans le groupe non greffé, il y a eu quatre