Que faut-il associer à la radiothérapie dans les stades III des CBNPC et comment ?

Que faut-il associer à la radiothérapie dans les stades III des CBNPC et comment ?

Revue des Maladies Respiratoires Actualités (2013) 5, 513-518 ISSN 1877-1203 Revue des Maladies Respiratoires Organe Officiel de la Société de Pneum...

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Revue des Maladies Respiratoires Actualités (2013) 5, 513-518 ISSN 1877-1203

Revue des

Maladies

Respiratoires Organe Officiel de la Société de Pneumologie de Langue Française

Disponible en ligne sur

Actualités

Cours du Groupe d’Oncologie thoracique de Langue Française GOLF 2013 Du 24 au 27 septembre 2013 Numéro coordonné par Fabien Vaylet, Julien Mazières, Arnaud Scherpereel Malade suspect d'un CBNPC

Clinicien - absence d'ATCD d'autre cancer - origine ethnique - statut tabagique - métastase probable

Préleveur - prélèvements multiples - bonne taille - fixateur adapté - congélation si possible

www.sciencedirect.com

Cyctopathogiste - coloration, type historique - techniques complémentaires - lames de réserve pour IHC, HIS ALK - ADN pour EGFR, HER2, PI3K, KRas, BRaf

CBNPC

CBPC + Epidermoïde

ADC

P63

Mucine/ TTF1

-

+

IHC ALK -

ADN plate-forme

+ EGFR, HER2, KRas, Braf ISH ALK

ISH ou mutation neg

83694

ISH ALK +

www.splf.org

Septembre Vol 5 2013

Mutation +



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Que faut-il associer à la radiothérapie dans les stades III des CBNPC et comment ? What to combine with radiotherapy for stage III NSCLC and how to do it

C. Massabeau1 et J. Mazières2,* 1Service

de radiothérapie, Institut Claudius Regaud, France de pneumologie, Université Paul Sabatier, hôpital Larrey, CHU Toulouse, chemin de Pouvourville, 31059 Toulouse cedex, France 2Service

MOTS CLÉS Radiothérapie ; Chimiothérapie ; Cancer bronchique localement avancé ; Thérapie ciblée

KEYWORDS Radiotherapy; Chemotherapy; Locally advanced lung cancer; Targeted therapy

Résumé Les techniques de radiothérapie ont été optimisées afin de permettre une délivrance de dose la plus précise possible au prix d’une toxicité moindre. L’escalade de dose était considérée comme la clef du contrôle locorégional, mais les récents résultats du RTOG 0618, très décevants, semblent plaider pour une infériorité du bras de traitement à 74 Gy par rapport au bras à 60 Gy. Ceci met en lumière les limites de la dose physique de l’irradiation et les nécessaires progrès à accomplir au niveau des traitements associés à la radiothérapie. Le concept de dose biologique doit continuer à se développer pour une meilleure potentialisation de l’action locale de la radiothérapie grâce aux traitements associés. Les molécules de dernière génération en chimiothérapie et les thérapies ciblant les anomalies moléculaires ont permis des progrès considérables dans le traitement des cancers bronchiques de stade IV. Leur association à la radiochimiothérapie des cancers bronchiques est une suite logique à leur développement, tout comme des molécules dédiées radiosensibilisantes. © 2013 SPLF. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Summary Radiotherapy techniques have been optimised to permit delivery of the most precise possible dose and ensure that toxicity is kept to a minimum. Dose escalation was considered to be the key to achieving locoregional control, but the recent and extremely disappointing results of RTOG 0618 appear to suggest inferior outcomes in the 74 Gy groups than in the 60 Gy group. This sheds light on the limitations associated with defining the radiation dose physically and the progress that remains to be made in terms of treatments to be combined with radiotherapy. Work on developing the concept of the biological dose must be continued to enhance the local action of radiotherapy through the effects of associated treatments. The latest generation chemotherapy molecules and treatments

Correspondance. Adresse e-mail : [email protected] (J. Mazières).

© 2013 SPLF. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

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targeting genetic anomalies have led to considerable progress in the treatment of stage IV lung cancer. Their addition to radiochemotherapeutic regimens for lung cancer is a natural continuation of their development as is the case for dedicated radiosensitizing molecules. © 2013 SPLF. Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Introduction : état de l’art de la radio-chimiothérapie

Quelle chimiothérapie concomitante utiliser ?

L’utilisation combinée de la chimiothérapie avec la radiothérapie est le standard actuel de traitement des patients avec cancers bronchiques non à petites cellules (CBNPC) inopérables ou non résécables de stade III. L’engouement pour les associations thérapeutiques a commencé dans les années 1980 avec la démonstration de la supériorité de la chimio-radiothérapie séquentielle (bithérapie à base de sels de platine), sur la radiothérapie exclusive amenant la survie médiane de 9 à 12 mois et de la survie à 5 ans de 5 à 10 %. Les résultats de ces essais publiés ont été regroupés dans deux méta-analyses publiées en 1995 [1,2], et montrent la supériorité de l’association thérapeutique chez les patients en bon état général. Plusieurs essais randomisés dont une étude française [3] ont ensuite démontré que l’administration concomitante de la chimiothérapie conduit à un gain de survie de 4 à 6 mois par rapport à un schéma séquentiel). Les médianes de survie dans les essais les plus récents se situent entre 21 et 26 mois, ce bénéfice étant probablement d’origine multifactorielle, notamment lié au meilleur rapport bénéfice/risque des chimiothérapies de dernière génération, aux progrès des thérapies de 2 e ligne, à l’inversion du rapport carcinome épidermoide/adénocarcinome, et au meilleur staging grâce à la TEP notamment. Les avantages théoriques du schéma concomitant sont nombreux, incluant une meilleure coopération spatiale et temporelle, une réduction du risque d’émergence de clones résistants, la synergie cytocinétique, l’augmentation de l’intensité du traitement par la réduction de sa durée, chez des patients à durée de vie limitée. En termes de toxicité, la tolérance des protocoles concomitants est un peu moins bonne avec un taux supérieur d’œsophagite aigue de grade 3 (20 % vs 1 %) ainsi que par la survenue de neutropénie plus fréquente. La toxicité pulmonaire est plus débattue. L’étude de Gopal et al. [4] a montré que la radio-chimiothérapie concomitante était associée à une réduction significative de la capacité pulmonaire totale et de la capacité de diffusion par rapport à la radiothérapie exclusive. Le risque de pneumopathie radique apparait plus élevé dans certaines études alors que d’autres ne retrouvent pas de différence significative entre les deux schémas concomitant ou séquentiel [5]. Il apparaît clairement que l’utilisation d’une chimiothérapie concomitante doit être très prudente chez les patients âgés, dénutris, présentant des comorbités ou à l’état général altéré.

Il n’y a pas à l’heure actuelle de données concluantes sur la supériorité d’une chimiothérapie sur l’autre. Les schémas les plus utilisés actuellement associent à la radiothérapie thoracique du carboplatine-paclitaxel, du cisplatine-vinorelbine, du cisplatine-docetaxel ou encore le cisplatine-etoposide. Le schéma avec carboplatine semble le mieux toléré sur le plan hématologique avec les taux les plus faibles de neutropénie de grade 3 et 4. Il n’y a pas de données valides issues de phase III comparatives permettant de définir l’association thérapeutique à recommander. Cependant, certaines données plaident pour une supériorité des schémas comportant du cisplatine par rapport au carboplatine, ce qui devrait être confirmé par un essai de phase III comparant les deux associations. De plus, une méta-analyse à partir de données individuelles de 836 patients traités par radio-chimiothérapie concomitante a identifié comme facteur de risque principal de pneumopathie radique l’utilisation d’une chimiothérapie par carboplatine-taxol [5]. Un essai randomisé de phase II japonais récemment publié montre des résultats intéressants en faveur de l’association cisplatine-uracile par rapport au schéma classique cisplatine-vinorelbine [6]. Les investigations actuelles sont destinées à trouver l’association thérapeutique optimale qui permette la délivrance d’une chimiothérapie à pleine dose, i.e. efficace sur la maladie micrométastatique, et radio-sensibilisante sans compromettre la tolérance des tissus sains. La gemcitabine a été utilisée avec une radio-sensibilisation et une efficacité indiscutable mais avec une toxicité trop importante qui fait actuellement contre-indiquer son utilisation en association avec la radiothérapie. Des essais de phase précoce avec le pemetrexed ont montré que l’association carboplatine AUC5 ou cisplatine 75 mg/m2/pemetrexed 500 mg/m2 pouvait être délivrée à pleine dose en combinaison avec la radiothérapie. Plusieurs essais de phase II rapportent des résultats intéressants avec une toxicité acceptable. Ces résultats sont donc prometteurs, ce d’autant qu’il n’y avait pas eu de sélection histologique, car ces essais ont été construits avant que l’on établisse le lien entre l’efficacité du pemetrexed et l’histologie adénocarcinomateuse. Un essai randomisé mondial comparant le cisplatine/pemetrexed au cisplatine/ etoposide à une radiothérapie thoracique 66 Gy chez des patients porteurs d’un adénocarcinome bronchique de stade III devrait nous livrer des résultats matures d’ici 1 à 2 ans [7]. En synthèse, l’association cisplatine-vépéside reste un standard en Amérique du Nord, cisplatine-vinorelbine ou cisplatine-docetaxel en Europe, le carboplatine-paclitaxel est une option chez les patients non éligibles au cisplatine,

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la demcitabine doit être évitée et l’alimta est une molécule prometteuse mais non utilisable en routine dans l’attente des résultats des essais cliniques.

Faut-il faire une chimiothérapie d’induction ou de consolidation encadrant la radio-chimiothérapie ? Au moins deux essais de phase III et une phase II randomisée ont montré que l’addition d’une chimiothérapie à base de carboplatine-paclitaxel avant une radio-chimiothérapie pour CBNPC ne réduit pas le risque de métastase à distance, ou de progression locorégionale et n’améliore pas la survie. Parmi ceux-ci, l’essai du CALGB 39801 a comparé un schéma hebdomadaire de carboplatine-paclitaxel/66 Gy seul ou après deux cycles d’induction de carboplatine-paclitaxel. Avec un suivi médian de 38 mois, il n’y avait pas de différence de survie globale ou de survie sans rechute entre les deux bras de traitement [8]. Toutefois, en pratique courante, l’administration d’une chimiothérapie première peut bénéficier aux patients non candidats à une radio-chimiothérapie concomitante d’emblée soit du fait d’un volume tumoral à irradier trop important ou d’un état général et/ou respiratoire trop précaire. La chimiothérapie première peut alors être utile pour mieux sélectionner les patients pour la radio-chimiothérapie. Elle permet également de donner du temps pour préparer la planification du traitement de radiothérapie. En 2000, les investigateurs du SWOG ont rapporté les résultats précoce d’une étude de phase II (SWOG 9504) comportant 83 patients avec des CBNPC de stade IIIB traités par radio-chimiothérapie exclusive, suivie d’une chimiothérapie de consolidation par docetaxel pour les patients sans maladie progressive. Les résultats à long terme de cette étude montrent des résultats encourageants de la chimiothérapie de consolidation, avec une médiane de survie de 26 mois, et des survies à 3 et 5 ans de 40 et 29 % respectivement. Cependant, ceci n’a pas été confirmé par l’essai de phase III rapporté par Hanna et al. [9] qui a mis en évidence une majoration des toxicités dans le bras consolidation avec docetaxel après une radio-chimiothérapie par cisplatine-etoposide et une radiothérapie thoracique concomitante pour CBNPC de stade III. De même, une chimiothérapie de consolidation par cisplatine-vinorelbine orale n’a pas conféré

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de gain sur la survie sans progression (6,4 vs 5,5 mois) ou la survie globale des patients (20 vs 18,5 mois) inclus dans l’essai GILT de phase III [10]. Il n’y a donc actuellement aucune donnée tangible plaidant pour une poursuite d’une chimiothérapie de consolidation après la fin d’une radio-chimiothérapie concomitante, comme en témoigne l’analyse poolée de plusieurs essais de phase II et III dont les résultats ont été présentés à l’ASCO l’an dernier [11]. En pratique courante, on administre au moins quatre cycles de chimiothérapie comprenant les deux cycles de chimiothérapie réalisés concomitamment à la radiothérapie thoracique, et deux cycles réalisés avant et/ou après le traitement concomitant.

Place des thérapies ciblées Inhibition de la voie du récepteur à l’epidermal growth factor (EGF) La voie de signalisation de l’EGFR est associée à une addiction oncogénique qui est la base de la prescription d’anti-EGFR en situation métastatique. De plus, l’EGFR contrôle la réparation de l’ADN et est ainsi impliqué dans les mécanismes de radiorésistance. Les deux grandes familles d’anti-EGFR ont été testées en complément de la radiothérapie dans les stades localement avancés : les anticorps monoclonaux (cetuximab) et les inhibiteurs tyrosine-kinase TKI (gefitinib, erlotinib) (Tableau 1). L’association de cetuximab à la radio-chimiothérapie est largement étudiée, notamment par l’essai du Groupe français GFPC08-03 présenté à l’ESMO l’an dernier par L. Greillier. Cet essai de phase II randomisé a montré la faisabilité de l’association du cetuximab à un schéma de radio-chimiothérapie concomitante (66 Gy en 33F + cisplatine-vinorelbine, bras A) ou cisplatine et oposide, bras B) avec des résultats en termes d’efficacité (taux de réponse encourageants > 80 % pour le bras A) et une toxicité acceptable. L’essai du RTOG 0324 évalue l’association caboplatine-paclitaxel hebdo + cetuximab + 63 Gy et révèle une médiane de survie à 23 mois et une survie à 2 ans à 49 %. Cependant, deux essais randomisés de phase II, qu’il s’agisse de l’essai néerlandais du NKI (CDDP quotidien 6 mg/m2 + 66 Gy ± cetuximab) ou bien de l’essai du CALBG 30407 (carboplatine AUC5 + pemetrexed 500 mg/m2 + 70 Gy ± cetuximab + quatre cycles de consolidation par pemetrexed)

Stades localement avancés

Objectifs

Contrôle local

Contrôle à distance

Technique validée

RCMI Fractionnement

Chimiothérapie à base de platine

Radiochimiothérapie concomitante Perspectives

Nouvelles énergies Stéréotaxie Radiosensibilisant Immunothérapie

Thérapies ciblées Immunothérapie

Combinaison de nouvelles techniques de radiothérapie et nouvelles molécules sur les biomarqueurs

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ne mettent pas en évidence de bénéfice significatif chez les patients traités par cetuximab. L’essai du RTOG 0617 ou les patients sont randomisés entre les bras à 60 Gy ou 74 Gy, avec ou sans cetuximab. Les résultats sont attendus. Enfin, l’IFCT mène également une étude de phase II (IFCT08-03) étudiant l’intérêt du cetuximab associé à une chimiothérapie par cisplatine-pemetrexed et une radiothérapie à 66 Gy. L’association des EGFR-TKI à la radio-chimiothérapie des CBNPC de stade III est faisable d’après les essais de phases précoces mais les résultats en termes d’efficacité sont mitigés. Des données suggèrent que l’association des TKI à la radio-chimiothérapie peut être délétère chez une population de patients non sélectionnée. L’hypothèse émise est que l’exposition continue aux TKI induirait un arrêt du cycle cellulaire en phase G1, surtout pour les tumeurs EGFR sauvage, responsable d’une diminution de la sensibilité cellulaire aux cytotoxiques. Ainsi, l’essai de phase II du MD Anderson (Houston) [12] a évalué l’association de l’erlotinib (en dehors des cycles de chimiothérapie) à une radio-chimiothérapie concomitante par carboplatine-paclitaxel hebdomadaire + 63 Gy, suivi de deux cycles de chimiothérapies seules par carboplatine-paclitaxel. Avec une médiane de survie > 25 mois, les résultats précoces présentés à l’ASCO l’an dernier sont prometteurs mais encore insuffisants pour conclure. La valeur pronostique de la présence de mutation de l’EGFR a été retrouvée dans certaines études chez les patients atteints de CBNPC de stade III traités par radio-chimiothérapie ± inhibiteurs de l’EGFR [13], mais sa valeur prédictive reste encore à démontrer. Par ailleurs, en maintenance, deux essais de phase III n’ont pas retrouvé de bénéfice à l’adjonction de TKI après une radio-chimiothérapie [14,15]. Dans l’essai du SWOG S0023, l’analyse intermédiaire a révélé que le pronostic était même significativement moins bon chez les patients traités par Gefitinib en maintenance par rapport aux patients recevant le placebo (médiane de survie de 23 vs 35 mois respectivement p = 0,013). Les TKI-EGFR ne doivent pas être prescrits après la radio-chimiothérapie des stades III et peuvent même s’avérer délétères en l’absence de sélection moléculaire.

Place des antiangiogéniques et des modificateurs du microenvironnement Par ailleurs, les mécanismes de radiorésistance font appel au microenvironnement, notamment à l’angiogenèse et à l’hypoxie. Les études visant à associer des anticorps monoclonaux inhibant VEGF (bevacizumab) à la radio-chimiothérapie des stades III se sont avérés délétères en raison de taux de toxicité trop élevés, notamment en termes d’œsophagite, de fistule œsotrachéale et d’hémorragies [16]. Ces complications concernaient principalement les histologies épidermoïdes. De plus, les résultats en termes d’efficacité étaient décevants. Le développement des antiangiogéniques dans cette indication a donc connu un arrêt prématuré, comme l’essai du SWOGS0533 [17]. L’efaproxiral est une molécule intéressante, il s’agit d’un modificateur allostérique synthétique de l’hémoglobine qui entraîne un déplacement de la courbe de dissociation de l’oxygène de l’hémoglobine. L’oxygène est alors plus facilement libéré de l’hémoglobine au sein de la tumeur diminuant ainsi l’hypoxie tumorale. L’association de L’efaproxiral à une radiothérapie thoracique 64 Gy après deux cycles de chimiothérapie par carboplatine-paclitaxel a été testée en

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phase II avec très peu de toxicité et un taux de réponse à 75 % [18]. Par ailleurs, les facteurs tels que le facteur de croissance fibroblastique FGF-2 ou les intégrines αvß3 et αvß5 contrôlent la radiosensibilité des cellules endothéliales, et l’inhibition de ces facteurs majore la radiosensibilité des cellules endothéliales conduisant à une apoptose accrue et de ce fait une radiosensibilisation des cellules tumorales in vivo. Nous avons montré que le profil d’expression protéique FGF-2/intégrine beta3 sur biopsies de patients porteurs de CPNPC de stade localement avancé avant tout traitement était associé à un risque multiplié par 9 de récidive locale par rapport aux patients pour lesquels l’intégrine αvß33 n’était pas surexprimée. De plus, ce profil d’expression protéique était également associé à un risque significativement élevé de non-réponse à l’association radio-chimiothérapique ainsi qu’un risque majoré de survenue de métastases [19]. In vitro, l’inhibition de l’intégrine αvß3 par l’inhibiteur de RGD, le cilengitide, induit une radiosensibilisation des lignées de glioblastomes mais aussi de carcinomes pulmonaires [20]. Ces résultats suggèrent que l’inhibition de l’intégrine αvß3 avant et pendant la radiothérapie permettrait d’obtenir une radiosensibilisation des CPNPC de stade avancé et pourrait ainsi permettre d’améliorer le contrôle local de ces tumeurs. Nous avons initié un essai clinique de phase I qui évalue l’association du Cilengitide à une radio-chimiothérapie concomittante (cisplatine-navelbine 4 cycles, radiothérapie 66 Gy).

Associations prometteuses Des études in vitro montrent que le crizotinib, inhibiteur d’ALK, est radiosensibilisant pour les lignées de CBNPC avec fusion EML4-ALK, mais pas pour les lignées qui ne présentent pas cette anomalie moléculaire [21]. Les mêmes résultats ont été obtenus in vivo sur des xénogreffes de tumeurs. Le développement clinique devrait suivre, associant le crizotinib à la radiothérapie des CBNPC chez des patients sélectionnés, mais reste limité par la rareté de l’anomalie moléculaire. Les autres agents comme les inhibiteurs de mTOR, de la voie de la cyclo-oxygénase, et les inhibiteurs de MEK font l’objet d’investigations actuelles visant à combiner ces molécules à l’irradiation des CBNPC. Enfin, l’immunothérapie connait un essor considérable en cancérologie thoracique, y compris dans les stades III. L’administration de L-BLP25 (stimuvax), un vaccin liposomal vis-à-vis de MUC-1, a été combinée à la radiothérapie thoracique des CBNPC de stade IIIB avec des résultats très intéressants dans la phase II randomisée avec une médiane de survie de 30,6 mois vs 13,3 mois [22]. Mais la phase III présentée à l’ASCO cette année s’est révélée négative [23]. Cet essai a montré que parmi 1 513 patients stables ou répondeurs après une radio-chimiothérapie concomitante (65 %) ou séquentielle (35 %) pour CBNPC de stade III, un traitement de maintenance avec le vaccin L-BLP25 était très bien toléré mais n’améliorait pas la survie globale par rapport au placébo. L’analyse en sous-groupe (prévue au départ) montrait tout de même un bénéfice du vaccin en maintenance après radio-chimiothérapie concomitante avec une survie globale de 30,8 mois vs 20,6 m (HR 0,78, p = 0,016). On attend les résultats d’une autre phase III asiatique évaluant ce même vaccin avec les mêmes critères d’éligibilité.

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Enfin, une phase II évaluant le GV1001 [24], un vaccin spécifique de la télomérase après radio-chimiothérapie a rapporté un doublement de la survie sans progression et une amélioration significative de la survie globale chez les patients répondeurs (19 vs 3,5 mois ; p = 0,001), des essais de phase III sont en cours.

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Liens d’intérêts Intérêts en lien avec le manuscrit : aucun.

Références [1]

L’évolution technologique en radiothérapie L’intégration des traitements combinés à la radiothérapie doit suivre l’évolution des pratiques de radiothérapie et inversement. La prise en compte des mouvements respiratoires dans la planification de la radiothérapie grâce à l’acquisition d’un TDM 4D ou bien les techniques de radiothérapie asservie à la respiration permettent une plus grande fiabilité, reproductibilité et sécurité de l’irradiation thoracique. La radiothérapie conformationnelle avec modulation d’intensité (RCMI) commence à émerger en pathologie thoracique, permettant de conformer mieux les volumes à irradier, de diminuer les fortes doses aux organes à risque, mais aussi de moduler la dose au sein des volumes cibles [25]. Cette technique d’irradiation est ainsi utilisée dans certains essais d’escalades de dose et en associations thérapeutiques. Un autre axe de développement concerne les stratégies de modification de fractionnement d’abord testées sous forme d’hyperfractionnement et d’accélération [26]. Les gains observés sont modestes au prix de contraintes organisationnelles lourdes et en pratique, l’hyperfractionnement n’est que très rarement utilisé. À l’inverse, le concept d’hypofractionnement semble séduire d’avantage actuellement et consiste à délivrer de fortes doses par séance et moins de séances. Des essais récents rapportent des résultats encourageants de radiothérapie hypofractionnée combinée à une chimiothérapie concomitante pour les stades III [27]. Toutefois, un excès de toxicité a été rapporté, notamment au niveau œsophagien, suggérant que la technique d’irradiation doit être optimisée lorsqu’on administre de fortes doses par fractions, ce d’autant que des traitements radiosensibilisants sont associés. La radiothérapie hypofractionnée stéréotaxique est une technique de haute précision permettant de très fortes doses par séance en quelques séances seulement, dont l’efficacité a d’abord été montrée pour les petits volumes tumoraux. Des essais sont en cours évaluant son utilisation pour réaliser un complément de dose localisé (boost) sur les zones tumorales radiorésistantes ou persistantes après radio-chimiothérapie ou à haut risque de rechute [28].

Conclusion Dans le futur, la sélection des thérapies (chimiothérapie et/ ou thérapies ciblées) basée sur l’histologie et sur les biomarqueurs, telle qu’elle est déjà réalisée dans les stades avancés des cancers bronchiques non à petites cellules, devrait être appliquée aux traitements combinés à la radiothérapie des stades III. Enfin, les inhibiteurs de voies de radiorésistance intracellulaires, de l’environnement tumoral et de modulateurs de l’immunité sont actuellement évalués en clinique.

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