Recommandations pour la prise en charge de la forme systémique l’arthrite juvénile idiopathique (maladie de Still)

Recommandations pour la prise en charge de la forme systémique l’arthrite juvénile idiopathique (maladie de Still)

Rec¸u le : 3 novembre 2009 Accepte´ le : 2 avril 2010 Disponible en ligne 2 juin 2010 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com Recommandati...

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Rec¸u le : 3 novembre 2009 Accepte´ le : 2 avril 2010 Disponible en ligne 2 juin 2010

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com



Recommandations

Recommandations pour la prise en charge de la forme syste´mique l’arthrite juve´nile idiopathique (maladie de Still) Guidelines for diagnosis and treatment in systemic-onset juvenile idiopathic arthritis B. Bader-Meuniera,1*, C. Woutersa,b,1, C. Job-Deslandrec,1, R. Cimazd,e,1, M. Hoferf,1, P. Pilletg,1, P. Quartiera,1 a

Service d’immunologie, he´matologie, rhumatologie pe´diatriques, hoˆpital Necker–Enfants-Malades, Assistance publique–Hoˆpitaux de Paris, universite´ Paris V, Paris, France b Service de pe´diatrie, hoˆpital universitaire, Leuven, Belgique c Service de rhumatologie, hoˆpital Cochin, Assistance publique–Hoˆpitaux de Paris, Paris, France d Service de pe´diatrie, hospices civils de Lyon, Lyon, France e Service de rhumatologie pe´diatrique, universite´ de Florence, Florence, Italie f De´partements de pe´diatrie, service de rhumatologie pe´diatrique, CHUV, Lausanne et HUG, Gene`ve, Suisse g Urgences pe´diatriques, hoˆpital Pellegrin, Bordeaux, France

Summary

Re´sume´

A guideline group of pediatric rheumatologist experts elaborated guidelines related to the management of idiopathic juvenile arthritis in association with the Haute Autorite´ de Sante´ (HAS). A systematic search of the literature published between 1998 and August 2008 and indexed in Pubmed was undertaken. Here, we present the guidelines for diagnosis and treatment in systemic-onset juvenile idiopathic arthritis. ß 2010 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Le centre de re´fe´rence « Arthrites juve´niles » a e´labore´ en 2009 en lien avec la Haute Autorite´ de sante´ (HAS) un protocole national de soin concernant la prise en charge des principales formes d’arthrite juve´nile idiopathique (AJI) en consultant les principales re´fe´rences de la litte´rature publie´es en langues anglaise et franc¸aise indexe´es dans Pubmed de 1998 a` aouˆt 2008, a` partir des mots cle´s « systemic juvenile arthritis, Still disease, juvenile arthritis ». Nous pre´sentons les recommandations concernant le diagnostic et le traitement d’une forme syste´mique d’AJI. ß 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s. Mots cle´s : Arthrite juve´nile idiopathique, Maladie de Still, Corticoı¨des, Anti-interleukine 1

1. Introduction * Auteur correspondant. e-mail : [email protected] 1

Tous les auteurs sont re´dacteurs du Protocole national de soin (PNDS) « Arthrite juve´nile idiopathique » publie´ par la Haute Autorite´ de sante´. 0929-693X/$ - see front matter ß 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s. 10.1016/j.arcped.2010.04.001 Archives de Pe´diatrie 2010;17:1090-1094

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Le centre de re´fe´rence « Arthrites juve´niles » a e´labore´ en 2009 en lien avec la Haute Autorite´ de sante´ (HAS) un protocole national de soin concernant la prise en charge des principales formes d’arthrite juve´nile idiopathique (AJI)

Maladie de Still

[1]. Selon la classification de l’International League of Associations for Rheumatology (ILAR), l’AJI comporte 7 entite´s cliniques. Celles-ci comprennent la forme syste´mique d’AJI (FS-AJI) dite maladie de Still (environ 4–17 % des cas), la forme oligoarticulaire (environ 27–56 % des cas), la forme polyarticulaire sans facteur rhumatoı¨de dite se´rone´gative (11–28 %), l’AJI associe´e aux enthe´sopathies (3–11 %), l’AJI associe´e au psoriasis (2–11 %), la rare polyarthrite rhumatoı¨de (forme polyarticulaire avec facteur rhumatoı¨de) (2–7 %), et les arthrites indiffe´rencie´es [2]. Nous exposons dans ce document les principaux points de ces recommandations, concernant la prise en charge de l’AJI dans sa FS-AJI (maladie de Still).

2. Me´thode Le groupe de travail a consulte´ les principales re´fe´rences de la litte´rature (me´ta-analyses, essais cliniques et e´tudes de cohortes) et les principaux ouvrages de rhumatologie pe´diatrique publie´s en langues anglaise et franc¸aise indexe´s dans Pubmed de 1998 a` aouˆt 2008, a` partir des mots-cle´s « systemic juvenile arthritis, Still disease, juvenile arthritis ». Seuls les articles concernant les manifestations cliniques et la prise en charge ont e´te´ retenus. L’ensemble des recommandations formule´es dans ce document repose sur des ‘‘avis d’experts’’ du fait de l’absence ou insuffisance des donne´es de la litte´rature.

3. Diagnostic et bilan initial Le diagnostic initial de FS-AJI doit eˆtre fait en lien avec un centre de re´fe´rence ou de compe´tence en rhumatologie pe´diatrique. Il s’agit d’un diagnostic d’e´limination qui repose sur un ensemble d’e´le´ments cliniques et paracliniques. La FS-AJI survient pre´fe´rentiellement entre l’aˆge de 1 et 5 ans ; elle s’observe rarement avant l’aˆge de 1 an et a` l’adolescence. Le diagnostic de FS-AJI ne´cessite la pre´sence :  d’une fie`vre quotidienne pendant au moins 15 j : typiquement, la courbe thermique prise et note´e toutes les 4 h comporte 1 a` 2 pics supe´rieur ou e´gal a` 39 8C quotidiens, avec retour rapide a` une tempe´rature normale ou basse (typiquement infe´rieur a` 37 8C entre les pics) ;  d’une ou plusieurs arthrites (qui peuvent cependant parfois n’apparaıˆtre qu’apre`s plusieurs mois ou anne´es), souvent associe´es a` des arthralgies ou myalgies se´ve`res ;  et au moins de l’un des e´le´ments suivants :  e´ruption cutane´e : typiquement macules transitoires survenant lors des pics fe´briles. Sa pre´sence associe´e a` celle d’arthrite(s) est particulie`rement e´vocatrice du diagnostic. Un dermographisme ou un aspect urticarien sont plus rares,  he´patome´galie, sple´nome´galie et/ou ade´nopathie,  se´rite (e´panchement pe´ricardique, e´panchement pleural, e´panchement pe´ritone´al).

Certaines formes sont atypiques ou re´ve´le´es par une complication :  les formes incomple`tes ou atypiques se manifestent par une courbe thermique non typique, l’absence d’arthrite pendant plusieurs mois ou anne´es, une absence d’e´ruption maculeuse typique, une e´ruption urticarienne. Ces formes doivent be´ne´ficier d’une prise en charge similaire a` celle des formes typiques. Le diagnostic de FS-AJI ne peut eˆtre affirme´ que lors de l’apparition d’une ve´ritable arthrite. En l’absence d’arthrite documente´e, le diagnostic de FS-AJI est conside´re´ comme probable, mais non certain ;  certaines formes sont re´ve´le´es par une complication : insuffisance cardiaque secondaire a` une myocardite (rare), syndrome d’activation macrophagique (SAM) [3], premie`re cause de mortalite´ aigue ¨ au cours de la FS-AJI du fait essentiellement d’he´morragies se´ve`res. Il repre´sente donc une urgence vitale ne´cessitant une corticothe´rapie imme´diate. Aucun examen paraclinique n’est spe´cifique. Dans les formes typiques on observe une hyperleucocytose avec e´le´vation des polynucle´aires neutrophiles, une hyperplaquettose, une ane´mie inflammatoire, une e´le´vation du fibrinoge`ne, une vitesse de se´dimentation (VS) acce´le´re´e et une prote´ine C re´active (CRP) augmente´e. L’e´chographie cardiaque peut montrer une pe´ricardite et plus rarement une myocardite. Dans une forme complique´e de SAM, on observe une thrombope´nie, une leucope´nie et une fibrinope´nie. Peuvent e´galement eˆtre observe´es une e´le´vation des triglyce´rides sanguins, des transaminases, de la ferritine´mie, une hyponatre´mie et une hypoprotide´mie ; typiquement, le mye´logramme montre la pre´sence d’he´mophagocytose. Dans les formes incomple`tes ou atypiques, les diagnostics diffe´rentiels a` e´liminer sont nombreux et de´pendent de l’aˆge, de l’anamne`se personnelle et familiale et des signes cliniques et biologiques. Les principaux diagnostics diffe´rentiels sont : une infection bacte´rienne, virale ou parasitaire ; une arthrite re´actionnelle, un rhumatisme articulaire aigu ; une affection maligne : leuce´mie aigue ¨, lymphome, neuroblastome ; une maladie syste´mique : maladie de Kawasaki dans une forme incomple`te (surtout avant l’aˆge de 2 ans), maladie inflammatoire chronique intestinale (MICI) en particulier une maladie de Crohn, plus rarement lupus e´rythe´mateux disse´mine´ (surtout chez une fille aˆge´e de plus de 8 ans), dermatomyosite, pe´riarte´rite noueuse, maladie de Takayasu, maladie de Castleman ; un syndrome auto-inflammatoire d’origine ge´ne´tique ; un SAM non lie´ a` une FS-AJI, notamment de´ficits immunitaires he´re´ditaires. Devant une fie`vre prolonge´e, on e´voque surtout une infection, une maladie syste´mique ou une ne´oplasie et devant une fie`vre re´currente, un syndrome autoinflammatoire. L’e´valuation clinique initiale ne´cessite un interrogatoire et un examen clinique complets avec une e´tude de la courbe de croissance staturoponde´rale.

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Les examens comple´mentaires indispensables sont : un he´mogramme avec e´tude du frottis sanguin, une mesure de la VS, de la CRP, des transaminases, du fibrinoge`ne, de la cre´atinine´mie, de la protide´mie, un ionogramme sanguin, des he´mocultures, une bandelette urinaire (de´pistage d’une prote´inurie, he´maturie), en fonction du contexte, des se´rologies virales (virus d’Epstein-Barr [EBV], cytome´galovirus [CMV], griffe du chat. . .) et une e´chographie cardiaque. Les examens comple´mentaires recommande´s dans les formes typiques et indispensables dans les formes atypiques sont : un dosage de la ferritine´mie dont l’e´le´vation tre`s marque´e doit faire suspecter un SAM, de lactate de´shydroge´nase (LDH) dont l’e´le´vation franche devra faire e´voquer le diagnostic de pathologie maligne alors qu’une e´le´vation mode´re´e peut eˆtre observe´e au cours d’une authentique FS-AJI, des cate´cholamines urinaires chez le jeune enfant, une recherche de facteurs antinucle´aires (surtout apre`s l’aˆge de 8 ans), d’anticorps antisaccharomyces cerevisiae (ASCA) pour e´liminer une MICI en cas de symptomatologie digestive, d’anticorps associe´s a` des vascularites ou des maladies auto-immunes en fonction du contexte, un mye´logramme (en cas de douleurs osseuses, d’anomalies du frottis sanguin, d’un taux de leucocytes infe´rieur a` 8000 par millime`tre cube ou de plaquettes infe´rieur a` 250 000 par millime`tre cube, notamment), une radiographie de thorax, une radiographie et si possible e´chographie de l’articulation atteinte en cas d’atteinte monoarticulaire (lorsque plusieurs articulations sont atteintes, l’indication

de l’imagerie doit se discuter en fonction du contexte clinique avec un centre spe´cialise´ en rhumatologie pe´diatrique), une e´chographie abdominale (recherchant un e´paississement des anses digestives en cas de douleurs abdominales, diarrhe´e ou infle´chissement staturoponde´ral a` la recherche d’une MICI), un examen ophtalmologique. Les examens inutiles sont : le dosage de la fraction glycosyle´e de la ferritine, peu sensible et peu spe´cifique pour le diagnostic de FS-AJI, de la procalcitonine et des facteurs rhumatoı¨des, et la recherche du HLA B27.

4. Prise en charge the´rapeutique La prise en charge the´rapeutique est multidisciplinaire. Les coordonne´es des associations de patients concerne´es par la pathologie sont transmises a` la famille (association Kourir, http://www.kourir.org). Les principaux traitements utilise´s figurent dans le tableau I. Les anti-inflammatoires non ste´roı¨diens (AINS) sont indique´s en premie`re intention, en l’absence de contre-indication et de crite`res de gravite´. On propose un essai de 1 a` 4 semaines de traitement pour e´valuer l’ame´lioration des manifestations syste´miques, de la fie`vre et des douleurs. L’effet antiinflammatoire sur les arthrites est moins marque´. Lorsque l’enfant est traite´ a` domicile par AINS seuls, sa famille doit eˆtre en mesure de pouvoir joindre un me´decin en urgence,

Tableau I Principaux traitements ge´ne´raux disponibles utilise´s dans la forme syste´mique de l’arthrite juve´nile idiopathique (FS-AJI). Traitement

Dose initiale

Modalite´s de prescription

AINS Indome´tacine Naproxe`ne

2–3 mg/kg/j en 2–3 prises p.o. (dose maximale : 150 mg/j) Hors AMM avant 15 ans 20–30 mg/kg/j en 2 prises (dose maximale : 2400 mg/j) Hors AMM pour les doses pre´conise´es Ibuprofe`ne 30–40 mg/kg/j en 3–4 prises dose maximale : 2400 mg/j) Hors AMM pour les doses pre´conise´es Diclofe´nac 3 mg/kg/j en 2 prises (dose maximale : 225 mg/j) Acide ace´tyl salicyliquea 75–100 mg/kg/j (maximum 3 g/j) en 6 prises re´gulie`res taux de salicyle´mie max 150–200 mg/ml 2 h apre`s la prise Corticoı¨des syste´miques (prednisone, Doses variable selon la pre´sentation clinique AMM prednisolone, me´thylpre´dnisolone) Me´thotrexate Une fois par semaine : 10–15 mg/m2 (sans de´passer AMM. p.o. le matin a` jeu ˆ ne ou sc 25 mg/semaine) Thalidomide 3–5 mg/kg/j Prescription hospitalie`re Ciclosporine 2 a` 3 mg/kg/j Hors AMM AMM pour l’enfant aˆge´ de Etanercept 0,4 mg/kg sc  2/semaine (sans de´passer plus de 4 ans pour les formes 25 mg  2/semaine) polyarticulaires Ou 0,8 mg/kg sc  1/semaine (sans de´passer 50 mg/semaine) Anakinra 2 mg/kg/j (maximum 100 mg) sc Hors AMM Tocilizumab 8 a` 12 mg/kg/14 j iv Hors AMM (e´tude en cours) Canakinumab 4 mg/kg sc toutes les 4 semaines Hors AMM (e´tude en cours) Rinolacept Non encore disponible en France AMM : autorisation de mise sur le marche´ ; AINS : anti-inflammatoires non ste´roı¨diens ; p.o. : per os ; sc : voie sous-cutane´e ; iv : voie intraveineuse. Prescription devenue rare dans les arthrites juve´niles infantiles, sauf quelques formes syste´miques du tre`s jeune enfant.

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Maladie de Still

notamment en raison du risque de survenue de SAM. La mole´cule la plus efficace chez la plupart des patients est l’indome´tacine (avis d’expert) a` la dose quotidienne de 3 mg/ kg en 2 ou 3 prises (hors autorisation de mise sur le marche´ (AMM) avant l’aˆge de 15 ans). Cependant, l’utilisation de ce traitement chez l’enfant jeune ne´cessite une concertation avec un pe´diatre expert de la maladie. Les doses pre´conise´es pour certains autres AINS sont supe´rieures a` celles de l’AMM (avis d’expert). La prise d’AINS ne´cessite une surveillance e´troite des e´ventuels effets inde´sirables cliniques et biologiques qui ne seront pas aborde´s dans ce document [1]. La survenue d’un SAM ne´cessite une prise en charge en urgence. En cas de re´mission sous traitement pendant 4–6 mois, les AINS sont diminue´s progressivement en quelques mois en fonction de l’e´volution clinique jusqu’a` un arreˆt e´ventuel. La corticothe´rapie par voie ge´ne´rale est indique´e, apre`s avis spe´cialise´, pour le traitement des manifestations syste´miques (extra-articulaires) dans les cas suivants (avis d’expert) : toxicite´ he´patique (e´le´vation des transaminases) ne´cessitant la re´duction de la dose ou l’arreˆt temporaire du traitement par AINS si les taux des transaminases de´passent 2 fois la limite supe´rieure de la normale, efficacite´ insuffisante des AINS (en cas d’efficacite´ partielle et de bonne tole´rance, l’association AINS-corticoste´roı¨de est a` recommander pour permettre dans certains cas le recours a` une corticothe´rapie ge´ne´rale a` doses plus faibles ; elle ne´cessite une attention particulie`re a` la tole´rance digestive), intole´rance digestive aux AINS, pre´sence de signes de se´ve´rite´ : alte´ration de l’e´tat ge´ne´ral importante, perte de poids, ane´mie se´ve`re, se´rite symptomatique significative, persistance de la fie`vre, SAM. La corticothe´rapie ge´ne´rale par voie orale est administre´e initialement en 2 prises a` une dose de 1 a` 2 mg/kg par j (maximum 60 mg/j) de prednisone ou e´quivalent puis en une prise matinale (avis d’expert). L’inte´reˆt des bolus de corticoı¨des (me´thylprednisolone 15–30 mg/kg) en phase aigue ¨ reste discute´. Si la maladie est controˆle´e, la dose de corticoı¨des est progressivement diminue´e en quelques mois en fonction de l’e´volution des manifestations syste´miques cliniques et biologiques. La prise de corticoı¨des par voie ge´ne´rale ne´cessite une pre´vention et une de´tection de ses effets secondaires classiques. Une corticode´pendance e´leve´e impose l’instauration d’un traitement de fond suivant avis spe´cialise´. Une e´valuation par un centre spe´cialise´ est indispensable pour l’indication d’un traitement de fond dont l’introduction n’est en ge´ne´ral a` envisager que chez un patient ayant au minimum 3 mois de recul par rapport aux premie`res manifestations de la maladie. Son principal crite`re d’introduction en 2010 est l’existence d’une corticode´pendance proble´matique apre`s 3 mois d’e´volution de la maladie (avis d’expert), notamment devant une difficulte´ a` diminuer la corticothe´rapie ge´ne´rale quotidienne a` moins d’1 mg/kg d’e´quivalent prednisone (ou 30 mg/j chez les grands enfants) apre`s 3 mois de traitement ou a` moins de 0,3 mg/kg (ou 10 mg/j chez les grands) apre`s 6 mois. Il ne faut pas freiner la de´croissance de

la corticothe´rapie ge´ne´rale ni prendre la de´cision d’introduire un traitement de fond sur des parame`tres uniquement biologiques. Toute introduction d’un traitement de fond ne´cessite d’informer les parents et l’enfant sur les risques lie´s aux immunosuppresseurs et aux biothe´rapies et sur la ne´cessite´ de prendre un contact me´dical tre`s rapide en cas d’e´ve´nement inde´sirable notamment infectieux (dont la varicelle). Tous ces traitements entraıˆnent un risque accru d’infection. Dans les formes avec signes syste´miques persistants, le traitement de fond a` privile´gier en 2010 en premie`re intention est le re´cepteur antagoniste de l’IL-1 anakinra (KineretW) (avis d’expert), dont l’efficacite´ a e´te´ mise en e´vidence dans 2 e´tudes prospectives d’un petit nombre d’enfants [4,5], une e´tude re´trospective [6] et une e´tude prospective randomise´e [7] (Niveau 1). La tole´rance de ce traitement est bonne. Les effets secondaires fre´quents rapporte´s sont la survenue d’une re´action au point d’injection de type rougeur et gonflement, qui a tendance a` diminuer avec le temps, et, plus rarement, un risque d’infection possiblement grave, de neutrope´nie, d’he´patite. Les 2 autres axes the´rapeutiques les plus prometteurs pour les anne´es a` venir sont des antagonistes de l’IL-1 plus puissants actuellement a` l’e´tude (rinolacept, canakinumab) ainsi que le tocilizumab (Actemra), anticorps monoclonal anti-re´cepteur de l’IL-6 dont l’efficacite´ a e´te´ de´montre´e dans une e´tude prospective randomise´e [8] (Niveau 1). Les traitements de fond classiques de l’AJI tels que le me´thotrexate et les anti-TNF alpha ne sont a` conside´rer que dans des formes d’e´volution essentiellement polyarticulaires et peu inflammatoires. Dans les formes re´fractaires aux traitements pre´ce´dents avec signes syste´miques persistants le traitement par thalidomide est le principal a` envisager (avis d’expert) (Niveau 4) [9]. Sa te´ratoge´nicite´ et sa toxicite´ neurologique constituent cependant des facteurs limitant son utilisation. La re´alisation d’un e´lectromyogramme avec mesure des vitesses de conduction nerveuse tous les 6 mois et l’arreˆt du traitement en cas d’anomalie sont recommande´s. L’injection intra-articulaire de corticoı¨des (en privile´giant l’he´xace´tonide de triamcinolone pour les grosses articulations) a une efficacite´ moindre que dans les autres formes d’AJI lorsqu’il existe des signes syste´miques. Elle peut eˆtre propose´e en cas d’atteinte articulaire unique ou dans les formes d’e´volution oligo- ou polyarticulaire. En cas de douleur lie´e aux arthrites, un traitement antalgique utilisant des produits non opioı¨des, opioı¨des faibles ou opioı¨des forts selon le niveau de la douleur e´value´e sur une e´chelle visuelle analogique adapte´e doit eˆtre associe´ au traitement spe´cifique. Les douleurs lie´es aux injections sous-cutane´es doivent eˆtre limite´es par l’application de cre`me lidocaı¨ne-prilocaı¨ne ou de froid avant injection. Certaines complications (articulaires, ophtalmologiques, re´nales, cardiovasculaires, SAM, retard de croissance secondaire a` une corticothe´rapie prolonge´e et oste´oporose) peuvent survenir au cours de l’e´volution. Leur pre´vention et prise en charge ne seront pas aborde´es dans ce document.

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B. Bader-Meunier et al.

Le calendrier vaccinal usuel doit eˆtre suivi, conforme´ment aux recommandations en vigueur. En cas de traitement par immunosuppresseur ou biothe´rapie, la vaccination contre la grippe et le pneumocoque est recommande´e, et celle par les vaccins vivants est contre-indique´e. La vaccination du patient, de ses parents et de sa fratrie contre la varicelle doit eˆtre discute´e en fonction des traitements rec¸us (contre-indication en cas de traitement immunosuppresseur ou de biothe´rapie), du statut se´rologique et de l’aˆge du patient (vaccination possible a` partir de l’aˆge de 9 mois). Une a` plusieurs consultations annuelles doivent eˆtre effectue´es en fonction de la se´ve´rite´ de la maladie tant qu’il y a des signes de maladie active, un traitement me´dical ou des se´quelles a` prendre en charge.

Conflit d’inte´reˆt Aucun conflit d’inte´reˆt n’est a` de´clarer pour aucun auteur.

Re´fe´rences [1] [2]

[3]

[4]

Participants a` la relecture du Protocole national de soins [5]

Mme Claude Andrieux, Association Inflamoeil, Paris ; Dr Catherine Adamsbaum, Hoˆpital St Vincent de Paul, Paris ; Dr Bahram Bodaghi, Hoˆpital Pitie´ Salpeˆtrie`re, Paris ; Dr Michel Fischbach, CHRU, Strasbourg ; Dr Martine Grall-Lerosey, CHU, Rouen ; Mr Anton Gruss, Association Kourir, Paris ; Dr Laurent Kodjikian, Hoˆpital de la Croix Rousse, Lyon ; Dr Sarah Kone´, HAS, St Denis la Plaine ; Dr Isabelle Kone´-Paut, Hoˆpital Biceˆtre, le Kremlin-Biceˆtre ; D,r Lionel de Lumley, Hoˆpital de la me`re et de l’enfant, Limoges ; Dr Franc¸oise Mazingue, Hoˆpital Jeannes de Flandres, Lille ; Dr Richard Mouy, pe´diatre, Paris ; Dr Georges Picherot ; CHU, Nantes, Dr Mathide Risse, CNAMTS, Paris ; Dr Bertrand Roude, me´decin ge´ne´raliste, Thorigne´ Dr Jean Sibila, CHRU, Strasbourg ; Dr Isabelle Yoldjian, AFSSAPS, St Denis.

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[7] [8]

[9]

ald_31_pnds_arthrite_juvenile_web.pdf. Petty RE, Southwood TR, Manners P, et al. International League of Associations for Rheumatology classification of juvenile idiopathic arthritis: second revision. Edmonton 2001 J Rheumatol 2004;31:390–2. Ravelli A, Magni-Manzoni S, Pistorio A, et al. Preliminary diagnostic guidelines for macrophage activation syndrome complicating systemic juvenile idiopathic arthritis. J Pediatr 2005;146:598–604. Pascual V, Allantaz F, Arce E, et al. Role of interleukin-1 (IL-1) in the pathogenesis of systemic onset juvenile idiopathic arthritis and clinical response to IL-1 blockade. J Exp Med 2005;201: 1479–86. Lequerre´ T, Quartier P, Rosellini D, et al. Interleukin-1 receptor antagonist (anakinra) treatment in patients with systemiconset juvenile idiopathic arthritis or adult onset Still disease: preliminary experience in France. Ann Rheum Dis 2008;67: 302–8. Gattorno M, Piccini A, Lasiglie` D, et al. The pattern of response to anti-interleukin-1 treatment distinguishes two subsets of patients with systemic-onset juvenile idiopathic arthritis. Arthritis Rheum 2008;58:1505–15. Quartier P, Allantaz F, Cimaz R, et al. Arthr Rheum 2008; 58(Suppl.):S632. Yokota S, Imagawa T, Mori. et al. Efficacy and safety of tocilizumab in patients with systemic-onset juvenile idiopathic arthritis: a randomised, double-blind, placebo-controlled, withdrawal phase III trial. Lancet 2008;371:998–1006. Lehman TJ, Schechter SJ, Sundel RP, et al. Thalidomide for severe systemic onset juvenile rheumatoid arthritis: A multicenter study. J Pediatr 2004;145:856–7.