Rééducation des patients ayant une artériopathie oblitérante des membres inférieurs avec une claudication

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Journe´ es europe´ ennes de la Socie´ te´ française de cardiologie

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Presse Med. 2013; 42: 1032–1038 ß 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Dossier thématique

Rééducation des patients ayant une artériopathie oblitérante des membres inférieurs avec une claudication Ana de Holanda1, Marion Aubourg2, Valérie Dubus-Bausière3, Dominique Eveno4, Pierre Abraham1,5

1. CHU d’Angers, centre régional de médecine du sport, service d’explorations fonctionnelles vasculaires, 49933 Angers cedex 09, France 2. Centre de réadaptation cardiovasculaire de Bois-Gibert, 37510 Ballan Miré, France 3. CRRRF, rue des capucins, BP 40329, 49103 Angers cedex 02, France 4. CRF La Tourmaline, boulevard Allende, BP 40249, 44818 Nantes St-Herblain cedex, France 5. Lunam université, UMR CNRS 1083–Inserm 6214, 49045 Angers, France

Correspondance : Disponible sur internet le : 10 mai 2013

Pierre Abraham, CHU d’Angers, explorations fonctionnelles vasculaires et centre régional de médecine du sport, 49933 Angers cedex 09, France. [email protected]

Key points Vascular rehabilitation in patients with peripheral arterial disease

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Lower limb peripheral arterial disease (PAD) is a frequent debilitating disease associated with a high morbidity and mortality rate. The benefit of rehabilitation in PAD patients has been largely demonstrated, both for patients that undergo amputation, and for patients with claudication. In these latter patients, rehabilitation programs rely on a variety of additional techniques or tools, among which: stretching, specific muscle proprioception, walking and a variety of other physical activities, exercise or situations adapted to community life, lower limb and respiratory physiotherapy, patient’s education, support for smoking cessation and healthy nutrition, social support, etc. Whether rehabilitation is performed in specialised integrated structures or performed on a home-based basis, various clinicians are involved.

Points essentiels L’artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI) engage non seulement directement le pronostic fonctionnel du membre concerné, mais aussi et surtout, indirectement le pronostic vital du patient du fait du caractère systémique de la maladie. La rééducation concerne à la fois la prise en charge des patients amputés (qui ne sera pas abordée dans cette revue) mais aussi les patients au stade de la claudication d’effort (stade 2 de la classification de Leriche et Fontaine). La rééducation vasculaire consiste en un programme de prise en charge du patient ambulatoire ou en institution spécialisée qui repose sur une approche globale comprenant toutes ou plusieurs des techniques suivantes : assouplissements, travail des exercices sous-lésionnels, exercices actifs analytiques, rééducation à la marche, réentraînement à l’effort, activités physiques adaptées à la vie quotidienne du malade et à sa maladie, kinésithérapie respiratoire, éducation thérapeutique du patient, aide à la cessation tabagique, prise en charge

tome 42 > n86 > juin 2013 http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2013.03.008

Despite evidence-based proof of efficacy, rehabilitation of PAD patients with claudication is still under-used.

psychologique, prise en charge nutritionnelle, relaxation, aide à la reprise professionnelle, soins corporels, crénothérapie. La réadaptation vasculaire de l’artéritique fait appel à des compétences variées mais se heurte encore à la carence manifeste de structures adaptées. Elle reste peu prescrite et mal connue des prescripteurs habituels.

L’

centres de rééducation ainsi que les délais nécessaires à l’obtention d’un résultat sur la distance de marche. La rééducation vasculaire est actuellement recommandée en première intention (niveau A) chez les patients avec une claudication intermittente par de nombreuses sociétés savantes [1–4]. Elle revient au premier plan notamment du fait de l’essor de l’éducation thérapeutique ainsi que des résultats à long terme des gestes endovasculaires (lésions fémorales).

artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI) engage non seulement directement le pronostic fonctionnel du membre concerné, mais aussi et surtout indirectement le pronostic vital du fait d’une pathologie artérielle diffuse engageant le pronostic cardiovasculaire global [1]. Au stade de la claudication d’effort (stade 2 de la classification de Leriche et Fontaine), la rééducation vasculaire consiste en un programme de reconditionnement à l’effort global cardiovasculaire et spécifique de l’artériopathie. Elle est recommandée par la Haute autorité de santé (HAS) (niveau A) au cours de l’AOMI [2]. L’éducation thérapeutique est indissociable de la prise en charge de l’AOMI, elle est indispensable au maintien à long terme des règles hygiénodiététiques et à l’observance thérapeutique. Bien que la maladie sous-jacente (athéromatose) soit en tout point identique, les patients ayant une AOMI échappent souvent aux mesures de prévention secondaire dont bénéficient les patients coronariens. Parmi ces mesures de prévention secondaire, les techniques de réadaptation vasculaire sont moins bien connues et moins pratiquées que les techniques de réhabilitation cardiaque. Pourtant la rééducation vasculaire devrait faire partie intégrante du traitement de ces patients. Ses objectifs sont audelà de l’augmentation de la distance de marche : amélioration la qualité de vie et du lien social, diminution de la morbimortaliité, amélioration de l’autonomie. La modification du mode de vie avec la correction des facteurs de risques cardiovasculaires, la pratique quotidienne de la marche, la réalisation d’exercices dédiés au développement de la collatéralité l’observance thérapeutique sont des objectifs aussi importants. En effet, on sait que la mortalité cardiovasculaire de ces patients dépend moins de la distance de marche proprement dite que de l’amélioration du profil de risque cardiovasculaire et de l’observance thérapeutique en prévention secondaire [2].

Pourquoi rééduquer ? Bien que l’amélioration de la distance de marche par l’exercice ait été décrite dès 1898 par le Dr ERB, un neurologue allemand, les premiers centres de réadaptation ont été ouverts dans les années 1960 en Allemagne. À cette époque en France, cette thérapeutique a été négligée pour diverses raisons comme la valorisation des gestes de revascularisation, l’absence de tome 42 > n86 > juin 2013

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Impact sur la qualité de vie L’ AOMI est responsable d’une dégradation de la qualité de vie de part la réduction des activités, les limitations dans la vie sociale et professionnelle, les troubles de l’humeur comme la dépression [5]. Ces facteurs peuvent être modifiés par le programme de rééducation avec l’amélioration de l’estime de soi inhérente à l’amélioration des capacités fonctionnelles. D’autres facteurs comme la gravité des lésions artérielles, la présence de comorbidités, un contexte socioéconomique défavorable [6] ou encore une altération des fonctions cognitives [7] interfèrent avec la qualité de vie mais restent non ou peu modifiables par la rééducation.

Action sur la morbi-mortalité L’impact de la prise en charge médicale sur la morbi-mortalité passe par la participation à un programme d’éducation thérapeutique. Ce programme est indispensable au maintien des règles hygiénodiététiques à long terme prenant en compte le sevrage tabagique, l’observance thérapeutique (statines, antiagrégants plaquettaires, inhibiteurs de l’enzyme de conversion), l’activité physique adaptée et régulière et l’éducation nutritionnelle Bien entendu, la durée, la fréquence et l’intensité des activités physiques doivent être prescrites selon des recommandations précises [8]. La responsabilisation du patient fait également partie du programme d’éducation thérapeutique. Ainsi la vérification de la distance de marche, la sensibilisation aux premiers signes d’une ischémie, la prévention des lésions aux membres inférieurs, le dépistage précoce des manifestations cardiaques (angor, dyspnée, malaise), ainsi que le respect des prescriptions des contrôles biologiques et des bilans vasculaires sont les messages inhérents au programme d’éducation thérapeutique.

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Amélioration de la distance de marche La rééducation vasculaire permet une augmentation de la distance de marche en moyenne de 150 % [9]. Cette amélioration dépend de mécanismes métaboliques, biologiques, hémorrhéologiques, microcirculatoires ou encore biomécaniques. L’amélioration fonctionnelle serait expliquée par l’amélioration de l’extraction et de l’utilisation périphérique de l’oxygène [9]. Quelques études ont mis en évidence que les effets sur les capacités physiques liés à un programme d’exercice sont similaires à ceux associés à une geste de revascularisation par angioplastie ou pontage [10–12]. La différence étant le fait que l’entraînement n’augmente pas les index de pression systolique à la cheville ni les valeurs de pression transcutanée (TcPO2) au repos [9]. À l’amélioration de la distance de marche s’associe, dans certaines études, à une augmentation du pic de VO2 de 20 à 30 % expliquant la meilleure tolérance à l’effort et la réduction de la fatigue physique [9]. L’amélioration de la distance de marche a une influence directe et positive sur les activités quotidiennes par une meilleure adaptation à l’effort avec réduction de la fatigue, moindre apparition de douleurs et une certaine mise en confiance amenant à la reprise des activités [14]. Les principaux mécanismes qui interviennent dans l’amélioration de la distance de marche, comprennent des adaptations cardiorespiratoire, circulatoires, biochimiques (action de facteurs de croissance comme VEGF et FGF-2) et musculosquelettiques comme cela a été bien synthétisé par Brenner et al., dans une récente étude [15].

Où rééduquer ? Plusieurs possibilités existent. La rééducation peut se faire dans un centre de rééducation spécialisé en pathologies vasculaires dans le cadre d’une hospitalisation complète ou en ambulatoire ; elle peut aussi être réalisée à domicile, avec ou sans supervision. Plusieurs études ont démontré la supériorité de la rééducation vasculaire en centre versus à domicile [13] mais les résultats sont contradictoires. Certains auteurs ont également démontré une efficacité sensiblement identique sur la distance de marche, chez les patients rééduqués en centre versus à domicile sous supervision [14].

Qui rééduquer ?

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Une activité régulière de marche doit être proposée à tous les patients ayant une AOMI, que celle-ci soit symptomatique ou non. Devant l’importante prévalence de l’AOMI et le manque de structures spécialisées, il a été nécessaire de proposer des critères d’indication à la rééducation vasculaire. Actuellement, les recommandations de la HAS sont de réserver la

réadaptation en structure spécialisée aux patients les plus sévères, symptomatiques avec des facteurs de risque cardiovasculaire non contrôlés, avec atteinte coronarienne avérée et un risque de désinsertion [2]. La réadaptation sera donc particulièrement indiquée lorsque les conséquences fonctionnelles – notamment la limitation de la distance de marche – sont importantes, et que les facteurs de risque ne sont pas contrôlés, notamment que le sevrage tabagique n’est pas acquis [13]. Les résultats devront être analysés sur ces différents aspects (en particulier performances aux tests de marche) et, en l’absence d’efficacité, confrontés aux données d’imagerie pour réorienter les indications de revascularisation. Ainsi un programme de reconditionnement est un élément contributif dans la décision thérapeutique en cas de lésion fémoro-poplitée car il est le traitement de première intention avant une éventuelle revascularisation [1,2]. Plus les lésions artérielles seront proximales, plus elles relèveront d’une revascularisation, la réadaptation pouvant être associée pour faciliter la récupération fonctionnelle et participer à la prévention secondaire dans le cadre d’une prise en charge globale du patient. Les indications à une rééducation à la marche sont actuellement [2] :  ischémie d’effort, en particulier pour les lésions fémorales. Les patients présentant des lésions iliaques ou distales également mais avec des résultats moins satisfaisants ;  ischémie de repos chez un patient présentant une contreindication opératoire. Dans ce cas, il est préférable de la réaliser dans un centre spécialisé ;  suite de chirurgie ou de techniques endovasculaires voire d’amputation. Cette orientation thérapeutique devrait être envisagée conjointement avec le chirurgien vasculaire.

Quelles sont les contre-indications ? Toute contre-indication à l’effort comme la présence d’une pathologie cardiaque, pulmonaire ou cérébrale non stabilisée. L’anévrisme de l’aorte abdominale et les embolies artérielles sont aussi classiquement des contre-indications, même si des équipes semblent montrer un bénéfice à la rééducation dans les petits anévrismes aortiques [16]. La présence de pathologies graves évolutives ainsi que la présence d’atteintes ostéoarticulaires sévères. En résumé, les contre-indications au reconditionnement à l’effort, le plus souvent transitoires, selon la Société française de cardiologie (SFC) sont :  l’angor instable ;  l’insuffisance cardiaque décompensée ;  l’arythmie ventriculaire sévère ;  l’hypertension artérielle sévère (PAP systolique > 60 mmHg) ;  le thrombus intracavitaire volumineux et/ou pédiculé ;  l’épanchement péricardique de moyenne à grande abondance ; tome 42 > n86 > juin 2013

   

un antécédent récent de thrombophlébite avec ou sans embolie pulmonaire ; la cardiomyopathie obstructive sévère ; le rétrécissement aortique serré ou symptomatique ; les affections inflammatoires ou infectieuses évolutives ; toutes pathologies locomotrices gênant la pratique d’exercices physiques.

Quel bilan initial effectuer ? Le bilan doit être global et comprendre un interrogatoire et un examen clinique soigneux avec palpation des pouls périphériques et auscultation des trajets vasculaires. Un bilan artériel des membres inférieurs (écho-Doppler, IPSc) et si possible microcirculatoire (TcPO2) est réalisé et confronté aux données cliniques. Il est important de dépister d’autres localisations de la maladie athéromateuse comme une cardiopathie ischémique, une sténose carotidienne ou un anévrisme de l’aorte abdominale. Le bilan est complété par la recherche systématique d’une atteinte de l’appareil locomoteur pouvant nécessiter une adaptation du programme de rééducation. Dans certains certains centres, la TcPO2 dynamique est réalisée systématiquement dans le bilan initial pour définir le programme de réentrainement et surtout son intensité.

Modalités et techniques de la réadaptation vasculaire La prise en charge se fera de préférence en ambulatoire, soit en centre spécialisé, soit en cabinet de kinésithérapie ou encore au domicile du patient sous supervision d’un kinésithérapeute associée dans tous les cas à une évaluation médicale régulière. L’indication d’une rééducation en centre en hospitalisation complète peut-être intéressante dans le cadre d’un sevrage tabagique difficile afin d’extraire le patient de son environnement quotidien. Le choix de l’endroit dépendra du choix du patient, de la gravité des atteintes artérielles, de la présence ou non de comorbidités ou encore d’un risque de désinsertion sociale. Ainsi, les cas plus compliqués seront de préférence réservés aux centres de rééducation vasculaire. La variété des programmes de réadaptation est considérable. Un programme de réadaptation vasculaire est composé, au minimum, de trois séances hebdomadaires d’une heure pendant une période de trois à six mois en centre spécialisé, sous supervision à domicile ou dans un cabinet de kinésithérapie. Dans tous les cas, le programme doit comporter deux axes qui sont complémentaires : le reconditionnement à l’effort et l’éducation thérapeutique du patient. Le reconditionnement à l’effort comporte deux phases. La phase d’évaluation suivie de la phase de réentraînement. L’évaluation à pour but de quantifier la limitation à la marche du patient, et de guider les modalités du réentraînement tome 42 > n86 > juin 2013

en évaluant la capacité d’adaptation à l’effort et dépister une intolérance coronarienne ou une autre contre-indication. Plusieurs modalités d’évaluation de l’aptitude à l’effort sont possibles :  mesure de la distance de marche sur terrain plat jusqu’à l’apparition de la crampe : test peu standardisé et de faible reproductibilité [17]. Cette étape permet néanmoins de rechercher une déformation du pas que l’on peut retrouver chez le claudicant sévère et qui nécessitera le cas échéant une correction ;  test de marche de six minutes : standardisé et validé dans l’évaluation des maladies chroniques incapacitantes. Explore les capacités endurantes avec une bonne reproductibilité [18] ;  tests sur tapis roulant permettant de suivre l’évolution des patients dans des conditions standardisées et donc reproductibles de vitesse et de pente. Le plus souvent il s’agit de tests avec une augmentation progressive du travail [19]. Les tests sur tapis roulant peuvent être à charge constante (vitesse et pente fixes) ou progressive [20] ;  test sur bicyclette ergométrique : Peut être utile en cas d’obésité ou de troubles de la marche liés à des déficiences orthopédiques ou neurologiques. Ce test est intéressant sur le plan respiratoire et cardiologique, mais ne teste pas le handicap lié à l’artériopathie ;  test d’effort sur ergomètre à membres supérieurs : Constitue une bonne alternative lorsque les membres inférieurs ne sont pas utilisables avec une sensibilité proche de celle d’un test sur tapis roulant [21]. La deuxième phase dite de réentraînement est personnalisée, adaptée à chaque cas et prend en compte les résultats obtenus par le malade lors de la phase d’évaluation. Le protocole mis en place pourra évoluer selon l’évolution de l’artériopathie. Il est important d’établir des objectifs adaptés et réalistes afin de ne pas décourager les patients. Il existe deux grands types de techniques qui sont souvent associées :  l’entraînement global ;  le reconditionnement analytique. L’entraînement global consiste en la réalisation d’exercices variés de marche soit sur tapis roulant, soit sur un cycloergomètre afin de solliciter les membres inférieurs, les membres supérieurs et ainsi recruter un maximum de volume musculaire. Le reconditionnement ergométrique sollicitant les membres supérieurs et le tronc peut s’avérer utile lorsque les membres inférieurs ne sont pas utilisables avec un effet systémique positif, améliorant l’oxygénation tissulaire au niveau des membres inférieurs [22]. Le reconditionnement analytique (segmentaire) des membres inférieurs est l’ensemble des techniques qui visent le renforcement musculaire par contraction musculaire contre une résistance progressive ainsi que l’augmentation du débit

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sanguin dans le réseau artériel. Il est moins souvent préconisé car les effets systémiques sont moins importants par rapport à l’entraînement global [23]. Les contractions musculaires dynamiques à une fréquence comprise entre 20 à 50 contractions par minute contre une résistance progressive et selon la tolérance clinique sont réalisées en évitant la survenue de crampe musculaire. D’autres techniques rééducatives pourront être appliquées en fonction des situations comme la kinésithérapie respiratoire en cas de BPCO associée, le drainage lymphatique en cas d’oedème, la mobilisation en cas de rétractions et raideurs, la rééducation posturale en cas de troubles de l’équilibre, comme le balancement des membres et exercices de proprioception, les massages dits réflexes afin de stimuler la microcirculation, intéressante en cas de trouble trophique ou de claudication très serrée, ou encore la marche en milieu aquatique lorsque le périmètre de marche est très limité. Enfin, la crénothérapie, qui fait partie de l’arsenal thérapeutique physique, peut être proposée. Par ailleurs les patients claudicants peuvent progressivement déformer le déroulement de leur pas du fait de la douleur. La correction des attitudes vicieuses apparaissant à la marche est le préalable à toute amélioration du périmètre de marche. À titre d’exemple le programme ci-dessous est le programme réalisé au centre de réadaptation fonctionnelle (Les Capucins) d’Angers : Le programme de rééducation sera réalisé en hospitalisation complète ou hospitalisation à temps partiel sur cinq semaines, en groupe de six à huit patients.

Assouplissements Le travail d’assouplissement ou d’étirement est un préalable indispensable au travail musculaire et d’endurance. Il permet également d’améliorer la souplesse. Seront privilégiés les exercices d’ouverture de la ceinture scapulaire et du thorax ainsi que les étirements des membres inférieurs sollicités dans les activités d’endurance notamment. Il est assuré par les kinésithérapeutes ou l’éducateur sportif, en groupe de six à huit patients sur des séances d’une demi-heure tout au long de la prise en charge.

puissance des contractions est fixée de 20 à 50 % de la force maximale volontaire préalablement évaluée de façon à rester sur un travail en aérobie. Il est assuré par les kinésithérapeutes ou l’éducateur sportif, en groupe de huit patients de niveau de travail semblable. Les séries d’exercices sont répétées cinq à huit fois avec des temps de repos entre chaque série double du temps de travail. Ce travail de renforcement est assuré par les kinésithérapeutes ou l’éducateur sportif, en groupe de six à huit patients sur des séances d’environ 45 minutes à raison de deux à trois séances par semaine.

Rééducation à la marche Les exercices de marche sont quotidiens et fondés sur l’évaluation initiale du périmètre de gêne. La distance de marche travaillée est fixée à 80 % du périmètre de gêne, de même que le temps de récupération qui est fixé à 80 % du temps de disparition de la douleur.

Réentraînement à l’effort Les séances durent de 30 à 45 minutes. L’intensité du réentraînement est toujours basée sur la fréquence cardiaque d’entraînement et le seuil de dyspnée. Les séances comportent une phase d’endurance à la fréquence cardiaque cible de 30 minutes, précédée d’une phase d’échauffement et suivie d’une phase de récupération active. La phase d’endurance peut être maintenue en plateau à charge constante ou en faisant alterner des périodes de moindre intensité et des pics d’activité. Le réentraînement à l’effort peut être réalisé sur différents ergomètres (bicyclette, ergomètre à bras, tapis roulant, stepper, rameur) mais peut également être une marche extérieure, du vélo extérieur, de la natation. . . Les patients travaillent en groupe, portent un cardiofréquencemètre pour suivre leur fréquence cardiaque et peuvent parfois nécessiter une surveillance électrocardiographique sur une dérivation par télémétrie. Ils sont sous la surveillance d’un kinésithérapeute ou de l’éducateur sportif.

Travail des exercices sous-lésionnels À partir des résultats des tests de répétition segmentaires, les exercices sous-lésionnels sont réalisés quotidiennement. Les séries sont réalisées à 50 % (deux séries) puis à 70 % (trois séries) du total des répétitions. Le temps de récupération entre chaque série est de trois minutes. Les tests sont réalisés chaque début de semaine et permettent de réajuster les séries de travail. Cette prise en charge est assurée par le kinésithérapeute.

Exercices actifs analytiques

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Le renforcement musculaire segmentaire permet d’améliorer la force d’endurance des muscles et la capacité fonctionnelle. La

Activités physiques adaptées à la vie quotidienne du malade et à sa maladie Ces activités permettent de développer la souplesse, la coordination, la gestion du souffle à l’effort et la force musculoligamentaire. Elles viennent optimiser le reconditionnement à l’effort. Ces activités peuvent également être réalisées en piscine. Les patients apprennent également durant toutes ces activités à surveiller leur fréquence cardiaque. Ces activités sont assurées par les kinésithérapeutes, l’éducateur sportif et sur le versant activités de la vie quotidienne et tome 42 > n86 > juin 2013

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activités professionnelles plus spécifiquement par les ergothérapeutes.

Kinésithérapie respiratoire Le travail de contrôle ventilatoire est intéressant, tout au long de la réadaptation, chez les patients souvent « gros fumeurs ». Elle permet la prise de conscience de la respiration abdominodiaphragmatique et d’améliorer ainsi l’apport en O2. Cette prise en charge est assurée par les kinésithérapeutes du CRRRF en individuel et/ou en groupe.

Éducation thérapeutique du patient L’éducation thérapeutique fait partie intégrante du programme de soins. Elle devrait permettre la pérennisation des résultats obtenus durant le programme. Les principaux sujets abordés concernent le traitement, les dyslipidémies, l’excès pondéral, le contrôle de la tension artérielle, le diabète, le tabac, l’activité physique, les soins des pieds. . .

propice pour faire le lien avec le médecin du travail avant le retour au travail.

Soins corporels Les soins, en particulier l’importance des précautions à prendre en ce qui concerne les pieds, sont essentiels et sont rappelés au patient soit par le médecin soit par une pédicure-podologue.

Conclusion La réadaptation vasculaire de l’artéritique fait appel pratiquement aux mêmes compétences et souvent au même plateau technique que chez le coronarien (reconditionnement et

Encadre´ 1 Schéma de démarche de rééducation d’un artériopathe au stade de la claudication

Aide au sevrage tabagique

Pourquoi rééduquer ?

C’est une mesure primordiale chez ces patients. Les patients sont systématiquement sensibilisés au sevrage tabagique au cours du programme de soins et peuvent bénéficier de consultations de tabacologie avec notre infirmière tabacologue et/ou par l’unité de coordination de tabacologie du département de pneumologie du CHU d’Angers.



Amélioration de la distance de marche



Impact positif sur la qualité de vie



Importance de l’éducation thérapeutique



Réduction de la morbi-mortalité cardiovasculaire



« Tout patient ayant une AOMI symptomatique ou non doit avoir

Prise en charge psychologique Une prise en charge psychologique individuelle est assurée par le psychologue du CRRRF avec possibilité d’avis complémentaire d’un médecin psychiatre. Le retentissement psychologique de la maladie est à prendre en compte avec souvent des réactions d’anxiété et de dépression. Cette prise en charge est également très importante comme soutien au sevrage tabagique.

Prise en charge nutritionnelle Une diététicienne assure un bilan personnalisé à chaque patient et anime les séances d’éducation thérapeutique sur la diététique. Les séances ont lieu deux fois par semaine.

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une activité régulière de marche » (recommandation HAS) Où rééduquer ?  Centre spécialisé - Les cas les plus sévères et symptomatiques - Facteurs de risque cardiovasculaires non contrôlés - Atteinte coronarienne avérée - Risque de désinsertion 

Cabinet de kinésithérapie



Domicile du patient sous supervision kinésithérapeute et

évaluation médicale régulière Bilan initial :  Interrogatoire, examen clinique soigneux : pouls périphériques ? Souffles vasculaires ? 

Bilan artériel des membres inférieurs : écho-doppler et IPS minimum  TcPO2 d’effort

Les séances sont assurées par le kinésithérapeute, en groupe. Ce travail de relaxation est notamment un support à la gestion du stress.

Aide à la reprise professionnelle Le travail avec les ergothérapeutes permet l’approche des conditions de travail et une mise en situation de certaines activités. L’aspect social est pris en compte par l’assistante sociale. Cette phase de réadaptation est également un moment tome 42 > n86 > juin 2013



 Bilan microcirculatoire : TcPO2 de repos



Dépistage d’autres sites de maladie athéromateuse :

coronarienne, carotidienne, anévrisme de l’aorte Programme type :  1 à 3 séances hebdomadaires minimum 

30 minutes à 1 heure par séance minimum



durée : 1 à 3 mois minimum



2 axes complémentaires : le reconditionnement à l’effort et l’éducation thérapeutique

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Relaxation

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prévention secondaire). Elle doit être adaptée et pluridisciplinaire (encadre´ 1). Elle correspond à un besoin évident mais non satisfait par la carence manifeste de structures adaptées. Elle reste peu prescrite et mal connue des prescripteurs habituels (cardiologue, chirurgiens vasculaires, médecins vasculaires, médecins généralistes). Sa prescription doit s’intégrer dans

les réseaux de prise en charge des pathologies cardiovasculaires et doit impliquer directement les patients comme c’est le cas pour le patient coronarien. Déclaration d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

Comple´ment e´lectronique disponible sur le site Internet de La Presse Médicale (http://www.emconsulte.com/revue/lpm). Actes et prestations – affection de longue durée. Artériopathie oblitérante des membres inférieurs. Actualisation avril 2012 (Haute autorité de santé)

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tome 42 > n86 > juin 2013