Rupture de l'auricule droit après traumatisme thoracique fermé secondaire à un coup de sabot

Rupture de l'auricule droit après traumatisme thoracique fermé secondaire à un coup de sabot

Annales Françaises d’Anesthésie et de Réanimation 22 (2003) 137–139 www.elsevier.com/locate/annfar Cas clinique Rupture de l’auricule droit après tr...

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Annales Françaises d’Anesthésie et de Réanimation 22 (2003) 137–139 www.elsevier.com/locate/annfar

Cas clinique

Rupture de l’auricule droit après traumatisme thoracique fermé secondaire à un coup de sabot Right atrial rupture following a hoof kick to the chest wall A.A. Alami a,*, A. Slaoui b a

Service de chirurgie cardiovasculaire, hôpital Ibn Rochd, Casablanca, Maroc b Service de chirurgie cardiovasculaire, hôpital Ibn Sina, Rabat, Maroc Reçu le 3 janvier 2002 ; accepté le 4 novembre 2002

Résumé Les contusions thoraciques fermées peuvent engendrer un large éventail de lésions cardiaques qui vont des contusions myocardiques à la rupture des cavités cardiaques. Nous rapportons le cas d’un patient opéré avec succès pour rupture de l’auricule droit à la suite d’un traumatisme thoracique gauche fermé de cause inhabituelle : un coup de sabot. Ce cas suggère qu’il faut envisager une rupture du cœur devant n’importe quel type de traumatisme thoracique fermé. © 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. Abstract Several myocardial lesions can be induced by thoracic blunt trauma. It varies from myocardial lesions to heart rupture. We report a case of right atrial rupture due to unusual blunt trauma: a hoof kick. We describe a successful management of this case. We suggest that a diagnosis of cardiac chamber rupture should be considered in all cases of blunt thoracic trauma. © 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. All rights reserved. Mots clés : Atrium ; Cœur ; Traumatisme thoracique fermé Keywords: Atrium; Heart; Blunt thoracic trauma

Les traumatismes fermés du thorax peuvent engendrer un large éventail de lésions cardiaques qui vont des contusions myocardiques à la rupture des cavités cardiaques. Si les ruptures ventriculaires sont très rapidement mortelles, les plaies de l’oreillette droite offrent souvent un délai suffisant pour sauver le malade. Nous rapportons le cas d’une rupture de l’auricule droit traité avec succès après une contusion thoracique fermée secondaire à un coup de sabot thoracique. 1. Observation Un patient de 35 ans a été admis aux urgences 6 h après une contusion de l’hémithorax gauche par un coup de sabot. * Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (A.A. Alami). © 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. DOI: 1 0 . 1 0 1 6 / S 0 7 5 0 - 7 6 5 8 ( 0 3 ) 0 0 0 0 5 - 4

À l’examen, il présentait une agitation avec un collapsus cardiovasculaire (FC 140 b min–1, PA 70/40 mmHg, pouls paradoxal 18 mmHg), une dyspnée à type de polypnée superficielle et une turgescence jugulaire spontanée. Le thorax était stable mais le siège de lésions ecchymotiques gauches. L’auscultation cardiaque a révélé un assourdissement des bruits du cœur. La recherche d’un syndrome d’épanchement pleural ou de pneumothorax était négative à l’examen clinique. Le reste de l’examen somatique était normal. À ce stade clinique, le diagnostic de tamponnade a été posé. L’échocardiographie étant indisponible en urgence et l’état précaire du patient ne pouvant supporter le délai de prise en charge pour la réalisation d’une radiographie pulmonaire, une ponction péricardique a été pratiquée. Elle n’a pas été concluante. Une fenêtre péricardique à partir d’une mini-incision paraxyphoï-

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Fig. 1. Représentation schématique du siège de la plaie de l’auricule droit (flèche) secondaire à une contusion thoracique fermé par un coup de sabot thoracique.

dienne a été réalisée sous anesthésie locale associée à une sédation par du fentanyl (200 µg). Elle a montré un hémopéricarde avec de nombreux caillots sanguins. Une anesthésie générale a alors été réalisée, elle a consisté en l’administration d’un complément de 100 µg de fentanyl et 20 mg d’étomidate suivie d’une intubation trachéale. La voie d’abord a été élargie à une sternotomie médiane. Le patient a été maintenu en ventilation spontanée jusqu’à l’évacuation complète de l’hémopéricarde et la régression des signes de tamponnade. L’ouverture longitudinale du péricarde a mis en évidence un saignement actif en rapport avec une plaie linéaire de 1,5 cm de l’auricule droit (Fig. 1). La suture de la plaie a été suivie d’un décaillotage minutieux. Les suites opératoires ont été simples. Le patient est sorti au 7e j postopératoire et un suivi régulier de 18 mois n’a montré aucune complication particulière.

2. Discussion La rupture des cavités cardiaques au cours d’un traumatisme thoracique fermé est rare et souvent fatale [1]. La prédominance d’un site de rupture ne se dégage pas dans la littérature. La perforation des quatre cavités cardiaques sont de fréquence égale dans une série autopsique [2]. Le premier cas de rupture auriculaire après traumatisme thoracique fermé est en rapport avec un accident de la voie publique [3]. La nature du traumatisme que nous rapportons dans notre observation est inhabituelle, voire unique.

Les traumatismes fermés du thorax induisent des lésions cardiaques par plusieurs mécanismes [4,5], qui peuvent agir en synergie : • transfert direct d’énergie sur le thorax au moment de l’impact ; • accélération–décélération, la contrainte s’exerce sur les structures fixes qui soutiennent le cœur (gros vaisseaux, insertions veineuses des oreillettes) ; • compression du cœur entre sternum et rachis. Les ruptures atriales surviennent le plus souvent en fin de systole lorsque leur distension est maximale et les valves atrioventriculaires fermées [4]. Les auricules de part leur finesse sont les plus vulnérables et représentent ainsi le site de rupture atriale le plus fréquent [6]. Le régime de pression atriale contribue à prolonger le délai de survie. Dans le cas présenté, le patient a été admis 6 h après la rupture auriculaire. Le diagnostic de plaie cardiaque dans le contexte d’un traumatisme thoracique est souvent difficile [7]. De la rapidité avec laquelle sera suspecté le diagnostic dépendra le pronostic. Sur 160 cas de rupture mortelle du cœur, 30 ont survécu plus d’une heure [2]. La tamponnade constitue le plus souvent la clé du diagnostic étiologique. Le diagnostic de tamponnage s’appuie sur la triade : assourdissement des bruits du cœur, hypotension et augmentation de la pression veineuse centrale [1]. Cependant, dans 10 à 33 % des cas, elle est associée à une rupture péricardiaque, qui draine l’hémopéricarde selon un flux variable [8]. Il en résulte un tableau d’hémothorax ou mixte réalisant un état d’équilibre précaire entre la compression péricardique et l’hémothorax [6]. Les examens complémentaires ne doivent pas retarder le traitement. La radiographie thoracique n’a pas été réalisée dans notre cas. Elle peut être normale ou montrer un élargissement médiastinal. Le décès d’un patient victime d’une plaie cardiaque au cours de son déplacement vers la radiologie est rapporté [9]. L’échocardiographie transthoracique est l’examen paraclinique de référence dans le diagnostic de tamponnade [9]. Dans notre cas, cet examen n’était pas réalisable en urgence. L’échographie transœsophagienne en plus d’un diagnostic plus affiné permet de mieux guider la réanimation. Le diagnostic de tamponnade doit déboucher sur la ponction péricardique. Une ponction négative comme dans notre cas ne saurait éliminer le diagnostic [10]. Une étude rapporte 25 % de faux négatifs [11]. La réalisation d’une fenêtre péricardique constitue une suite logique dans le cas de ponction négative avec forte suspicion de tamponnade. Ce geste rapide et simple s’inscrit comme la première étape de la sternotomie et donc de la cure chirurgicale. Plusieurs auteurs recommandent de réaliser ce geste sous anesthésie locale [5,7]. Ils mettent en avant l’effet délétère de la ventilation artificielle et de l’induction anesthésique sur l’état hémodynamique, c’est particulièrement le cas au cours des plaies des cavités droites [11]. L’existence de signes de tamponnade doit conduire au cours de l’anesthésie générale à des précautions particulières ; il faut utiliser des anesthésiques avec peu d’effets hémodynamiques (kétamine, étomi-

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date) et préserver la ventilation spontanée jusqu’à l’évacuation de l’épanchement [12]. La sternotomie offre une excellente voie d’abord sur les différentes cavités cardiaques, en particulier dans le contexte de traumatisme fermé où le site de la rupture est difficile à déterminer en période préopératoire [1]. L’hémostase des plaies atriales se fait généralement à l’aide d’un clamp latéral et la circulation extracorporelle est rarement nécessaire [1].

3. Conclusion Un tableau clinique de tamponnade dans les suites de n’importe quel type de traumatisme thoracique fermé doit faire évoquer une rupture des cavités cardiaques. La rupture auriculaire est de bon pronostic si le diagnostic est posé suffisamment tôt.

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