Scoliose d’évolution rapide et IMC sévère

Scoliose d’évolution rapide et IMC sévère

© 2007. Elsevier Masson SAS Tous droits réservés Motricité cérébrale 2007 ; 28(1) : 3-12 www.masson.fr/revues/moce Évaluation clinique Scoliose d’é...

513KB Sizes 0 Downloads 111 Views

© 2007. Elsevier Masson SAS Tous droits réservés

Motricité cérébrale 2007 ; 28(1) : 3-12 www.masson.fr/revues/moce

Évaluation clinique

Scoliose d’évolution rapide et IMC sévère Étude longitudinale d’un cas clinique de 1987 à 2006 D. Truscelli (1), M.F. Rietz (2), P. Toullet (3) (1) Médecin, ancien chef du service de rééducation neurologique infantile, CHU Bicêtre. (2) Kinésithérapeute, Lycée Toulouse Lautrec, Vaucresson. (3) Kinésithérapeute, Apetreimc Formation, 217, rue Saint Charles, 75015 Paris. Tirés à part : P. Toullet, à l’adresse ci-dessus. e-mail : [email protected]

Résumé L’étude longitudinale de ce patient de 4 à 22 ans met en évidence les liens entre une paralysie cérébrale sévère et les déformations vertébrales progressives qui se fixent. Les facteurs de risques de scoliose connus sont l’asymétrie motrice et la faiblesse du soutien postural chez les sujets non-ambulants. C’est le cas de notre patient : ses problèmes de hanches dysplasiques, de raideur et de douleurs des genoux en extension ont été traités successivement par des interventions chirurgicales à 11 et 13 ans. L’attention s’est portée sur l’évolution des deux courbures rachidiennes; l’une précoce est dorsale gauche haute à petit rayon et l’autre dorso-lombaire droite dite de compensation du déséquilibre du bassin. L’aggravation a été rapide au début de la puberté à 12,6 ans comme l’indique le diagramme. Une arthrodèse D2-sacrum a été faite à 14,10 ans. L’avenir du sujet est discuté étant donné le retentissement de la raideur du dos sur ses possibilités d’autonomie : ce sujet vit dans un appartement aidé d’une tierce personne, assis dans un fauteuil roulant électrique, qu’il conduit lui-même et travaille à mi-temps à l’extérieur. Mots-clés : Scoliose, Facteurs de risque, Traitement chirurgical.

Summary Rapidly progressive scoliosis and severe cerebral palsy: a longitudinal clinical study from 1987 to 2006 The long-term clinical history of this patient from 4 to 22 years highlights the links between severe cerebral palsy and progressive and fixed vertebral deformations. The risk factors in this patient were asymmetrical motor disease and a weakness of righting reactions observed in non ambulatory subjects. Hip dysplasia and painful stiffness of both knees required surgical palliation at the age of 11 and 13 years. Progressive spinal deformation affected both lateral curvatures. The first occurred early, producing a left dorsal curvature with a short radius, the second compensatory curvature affected the the dorsal and lumbar vertebrae producing a right sided curvature with a large radius related to pelvic imbalance. The graphic presentation of the spinal curvatures revealed rapid worsening at puberty.

4 / D. Truscelli et al.

Arthrodesis from D2 to the sacrum was performed at 14.10 years. Given the stiffness of the trunk, it can be expected that the independence of this young adult who lives alone in a flat seated in an electrical wheelchair with assistance for special needs and works half time in the community, may be compromised in the future. Key-words: CP, scoliosis, risk factors, surgical treatment.

L’objet de la communication pose le double problème d’une scoliose dorsale gauche à court rayon (origine génétique ?) associée à une scoliose dorsolombaire droite dite « compensatoire » à grand rayon, souple, qui s’est structurée en un temps court, chez un IMC gravement atteint. Il s’agit du cas de David, né le 03/01/1984 GÉNÉRALITÉS

L’étiologie de son atteinte cérébro-motrice est indéterminée : rien n’est noté à l’accouchement à terme, son poids est de 2,8 kg. La mère ne se rappelle aucune inquiétude pendant la période périnatale. À 2 ans, les parents vont consulter dans un milieu de neuropédiatrie classique pour retard du développement moteur et hypotonie de leur enfant. Le diagnostic est celui d’une tétraplégie extra pyramidale, assimilée à une IMC 1 en raison de ses capacités mentales et de ses adaptations qui évoluent positivement. Pas d’antécédents familiaux notoires sinon que la mère a une forte cyphose dorsale (négligée ?) Le milieu familial : David est l’aîné de 3 (un frère et une sœur). Sa mère est au foyer, son père, gardien de prison. Les parents viennent régulièrement tous les deux aux consultations et respectent les décisions thérapeutiques auxquelles ils participent. Par la suite, une déstabilisation de la famille et une mésentente des parents se produira. L’évaluation psychométrique donne un QI dans la zone normale faible, sans hétérogénéité. Son comportement d’enfant peut être timide et devenir opposant ; David peut accepter de collaborer, mais se montre peu dynamique dans la relation. Il n’aime pas l’internat et n’aimera jamais être séparé des siens. 1 Ces formes assimilées concernent encore 11 % des cas, dans l’étude du JAMA, résumée dans Motricité Cérébrale 2006 ; 254 : 177-179.

Son cursus scolaire se fait en milieu normal et spécialisé avec des allers-retours, selon les soins dont il relève : – Ainsi, maternelle en milieu normal pendant la prise en charge au CAMSP d’Evreux. Ensuite, dans le service de rééducation de l’hôpital de Bicêtre, de 1990 pour son CP, jusqu’en 1993. – Puis la Source à Vernon, en externat proche de chez lui – Puis de septembre 1996 à juin 2002 au collège/lycée de Vaucresson en banlieue parisienne de la 6e à la 2e. – À son retour au domicile il prépare et obtient son BEP de comptabilité.

Habileté Il mange seul ce qui lui est accessible, boit au verre qu’il tient à sa façon, ne peut se servir des plats ni couper sa viande. Il ne fait pas de fausses routes trachéales. Habillage et déshabillage : ne peut qu’aider. Propreté sphinctérienne : acquise dans les délais habituels. Il reste, jeune adulte, dépendant d’un tiers dans la vie quotidienne, au même niveau de ce qu’il faisait à 5 ans. Il écrit sur clavier, bien qu’il puisse tracer grossièrement des lettres en script de la main droite.

Station-Locomotion Il tient assis au bord d’une table vers 4 ans mais est vite déséquilibré et n’a pas les réactions de parachute suffisantes pour résister. Avance à 4 pattes, au besoin. Ne marche pas. A eu un verticalisateur statique, une flèche, a utilisé un déambulateur aménagé en milieu spécialisé vers l’âge de 7 ans. A fait du tricycle sous surveillance. Le FRE est utilisé en permanence, conduit de main droite, avec d’emblée un bon repérage de l’espace pour faire les manœuvres. Vue, pas de problème sensoriel, poursuite du pendule normale dans le plan horizontal. Audition

Scoliose d’évolution rapide et IMC sévère / 5

normale, dysarthrie à I-II, mais la construction du langage est normale. Croissance au demi écart-type inférieur, enfant mince avec un bon état général. Les médicaments vont jouer un rôle à la préadolescence, pas avant. Il n’a pas d’épilepsie.

Les réactions antigravitaires sont cotées à IV. À noter que, en suspension, tenu sur le flanc gauche (fig. 2-3) la flexion du tronc est très marquée car le côté droit est souple contrairement au côté gauche. Assis en bord de table et sous surveillance, David ne reste pas sur ses deux fesses mais s’incline vite vers la droite (fig. 4), prend appui

ÉVALUATION

Globalement, il s’agit d’une atteinte des quatre membres et du tronc, de type dystonique, de forme asymétrique plus marquée à gauche. L’atteinte bucco-faciale est à I-II sans retentissement fonctionnel dans l’alimentation. L’étude des facteurs déficitaires et de contrôle chez ce sujet a été publiée en 1990 2. Rappelons les plus frappants : En décubitus dorsal, son attitude préférentielle (fig. 1) est très évocatrice de ses problèmes : tout le MIG est en forte rotation interne, tandis que le côté droit est déporté en rotation externe ; les pieds sont en extension. Les membres supérieurs sont en chandelier mais sur consigne, D. parvient à les descendre le long du corps, progressivement. La tête est tournée spontanément vers la gauche, position qui est permanente, plus ou moins prononcée selon l’activité en cours, mais qui n’empêche pas des essais de rotation vers la droite, qu’il ne peut maintenir. Il peut ébaucher un mouvement de pédalage très imparfait.

FIG. 2.

FIG. 3.

FIG. 1. 2 Truscelli D. Recherche des facteurs déficitaires et de contrôle dans l’examen de l’IMC. Mot cérébr 1990 11,4, 133-142.

FIG. 4.

6 / D. Truscelli et al.

sur sa main droite, sur son dos se dessine une gibbosité dorso-lombaire droite de compensation. La réaction de l’assis-couché met bien en évidence l’atteinte massive de la régulation automatique d’équilibration et le manque d’indépendance de l’axe et des membres. Quand la poussée en arrière démarre (fig. 5), l’enfant immédiatement cherche un appui de sa main droite, malgré la consigne de ne pas le faire, ses MI se crispent et l’extension active des pieds s’accentue. Quand la poussée est plus vive, l’enfant essaie encore de redresser sa tête mais il accentue le croisement de ses membres inférieurs, le MIG chevauche le droit (fig. 6). La commande volontaire est faible à droite, moins bonne encore à gauche. En suspension verticale, l’enfant peut écarter un peu ses membres inférieurs ; très soutenu, debout, le bassin n’est pas d’aplomb, car le côté gauche est ascensionné ; quand il veut passer le pas, il propulse son MI gauche en adduction. Dans les positions assis-plage, l’asymétrie est nette : seule la position pieds fléchis à gauche, recentre la hanche gauche et stabilise l’axe ce qui permet à David de manipuler les jouets de sa main droite, facilement (fig. 7).

FIG. 5.

ANALYSE

Le facteur B est côté de I à II, le facteur E est absent. La mobilisation rapide des segments de membres ne déclenche pas de spasticité, juste aux épaules un accrochage transitoire dans le « geste du semeur ». Il n’y a pas de brièveté musculaire suffisante pour créer une gêne spécifique. C’est l’organisation du mouvement qui est en cause dans l’impotence motrice. La réalisation du geste est faite au mieux possible de son trouble neurologique, il n’y a pas de dyspraxie. D. sait anticiper sur ce qui peut faire obstacle à l’exécution du geste.

FIG. 6.

SUIVI DE 5 À 10 ANS

Objectifs de rééducation motrice : 1/ Améliorer la qualité des réponses de l’axe corporel, 2/ Maintenir des amplitudes correctes au niveau des membres inférieurs, 3/ Développer la commande en extension des MI et la capacité de soutien, 4/ Ralentir l’évolution orthopédique insatisfaisante en réalisant des installations variées : siège moulé, attelles de mise

FIG. 7.

Scoliose d’évolution rapide et IMC sévère / 7

en charge, conseils de positionnement… 5/ Améliorer son autonomie de déplacement : en position érigée, au début avec aides à la déambulation de type flèche, déambulateur adapté puis FRE ; L’effondrement des pieds en valgus – à la fois actif et passif – est mesuré et chaussé en conséquence, pour étayer la fragile station debout ; les chaussures orthopédiques seront toujours très mal supportées par David. ORTHOPÉDIE

Les hanches En dépit de la prise en charge, les 4 radios des hanches de juillet 1989 à octobre 1994 (fig. 8-11) montrent que la tête fémorale se découvre progressivement et de façon asymétrique : à gauche la mesure de l’excentration passe de 39 % à 48 % contre 14 à 30 % à droite ; à gauche, le cintre cervico-obturateur est nettement rompu, la pente du toit du cotyle est raide, la hanche est dysplasique.

Le rachis Le rachis ne retient que secondairement l’attention, après l’inquiétude sur les hanches dysplasiques. Cliniquement, cependant, dans les manœuvres d’inflexion du rachis en assis-plage, on retrouve l’asymétrie aux dépens du côté gauche qui est raide ; la compensation se fait par une gibbosité dorso-lombaire de compensation (fig. 1213). Mais, en septembre 1991, sur une radio du rachis dans son entier il existe une mini-courbure cervico-dorsale gauche à petit rayon (constitutionnelle ?) peu mobile (fig. 14). Le rachis est mobilisé en kinésithérapie, mais aucune contention n’est prescrite. SUIVI DE 1993 À 1996

Il rentre au domicile des parents, est scolarisé localement et suivi au centre de la Source.

FIG. 8.

FIG. 9.

FIG. 10.

FIG. 11.

8 / D. Truscelli et al.

FIG. 12.

FIG. 13.

FIG. 14.

FIG. 15.

L’attention se focalise sur la tête fémorale gauche menacée de luxation puisque l’excentration atteint la limite supérieure de tolérance (50 %). Dans le but de stopper l’aggravation des hanches et d’installer au mieux, en position assise et debout, cet enfant définitivement nonmarchant, il est décidé de l’opérer par une double action, passive sur les tendons mais aussi nerveuse. L’intervention chirurgicale a lieu, en juin 95, et comporte une libération de hanches bilatérale

par allongement du demi-tendineux et du droit interne, section du Moyen Adducteur, neuroclasie de la branche antérieure du nerf obturateur. Les suites opératoires ne sont pas trop difficiles. LA PÉRIODE DE VAUCRESSON

Pour faciliter sa scolarité, il revient dans un milieu normal, protégé, en septembre 1996. À la suite d’un bilan hanches et rachis, le rachis inquiète: sur un cliché d’octobre 1996,

Scoliose d’évolution rapide et IMC sévère / 9

16 17

FIG. 16. FIG. 17.

apparaît une courbure dorsale gauche D2-D10 de 27° et une courbure dorso-lombaire droite D10sacrum de 14° (fig. 15). Les chiffres sont mis sur un diagramme pour suivre l’évolutivité. Sur ces entrefaites, un nouveau problème, aigu cette fois, se greffe sur les difficultés précédentes, il concerne des douleurs des genoux intolérables : les radios (fig. 16-17) sont en faveur d’une ostéochondrite des genoux, avec fracture de rotule sur des rotules très ascensionnées, dans un contexte de puberté qui démarre à 12 ans 9 mois (l’âge moyen de la puberté chez le garçon est de 13 ans). En janvier 1997, une intervention chirurgicale est décidée et a lieu sans délai, pour le traitement de la raideur en extension des genoux et des douleurs. Allongement du tendon quadricipital, simple à droite, plus complexe à gauche avec transfert du Droit Antérieur en dedans, droit interne résectionné à gauche, uniquement. La récupération est difficile et le gain reste partiel sur la flexion des genoux mais David est moins douloureux. L’ÉVOLUTION DU RACHIS

– En décembre 1997, on note une aggravation aux deux niveaux des déformations du rachis. La scoliose dorsale gauche D2-D10 est à 43° soit + 16° en 14 mois, et la dorso-lombaire

droite D10-sacrum à 24° soit + 10° en 14 mois (fig. 18). La décision de faire porter un corset garchois avec minerve a été prise avant l’été 1997, mais D. est parti en vacances sans l’avoir reçu et essayé. Il ne l’aura qu’en novembre 1997 et aura bien du mal à accepter de le porter plus de 2 h/j. – En juin 1998, la dorsale est à 54°, soit + 27° depuis les premières mesures et la Dorso-lombaire à 46° soit + 32° (fig. 19). – À la même date, soit à 14 ans 6 mois, on vérifie l’effet correcteur du corset. Sur la Radio Face Assis (RFA) + Corset : 46° en dorsal donc gain de 12° par rapport à la Radio Face Couché (RFC) de 54°. Au niveau lombaire le gain est de 20° : RFA + Corset : 26° contre 46° sur le RFC (fig. 20). Par ailleurs le corset maintient un bassin équilibré avec un bon pince-taille. – Sous traction, à la même époque, les chiffres sont de 40° en dorsal et de 25° en Dorso-lombaire (fig. 21). Le bassin est en rotation et oblique en bas à droite menaçant de plus en plus la hanche gauche sub-luxée. L’installation au fauteuil est de plus en plus inconfortable, l’appui sur la fesse droite avec les membres inférieurs en coup de vent à droite persiste.

10 / D. Truscelli et al.

18 19 20 21 FIG. FIG. FIG. FIG.

18. 19. 20. 21.

ARTHRODÈSE VERTÉBRALE POSTÉRIEURE

Avant l’arthrodèse l’épreuve de spiromètrie en position couchée, est à 39 % de la capacité respiratoire théorique. David a fait du relaxateur de pression avant l’intervention et en post opératoire. • Novembre 1998 : 14 ans et 9 mois.

FIG. 22.

• Arthrodèse vertébrale de D1 au sacrum (montage Cotrel Dubousset) suivie d’un corset de maintien (fig. 23-24). • David a grandi de 7 cm après l’intervention chirurgicale.

– La décision d’arthrodèse vertébrale par voie postérieure est posée devant l’évolution rachidienne et la station assise au fauteuil très défectueuse. Sur le plan fonctionnel, David ne fait plus de transfert, il n’a jamais retrouvé le déplacement à genoux dressés. Il conserve un équilibre assis avec appui des mains. Diagramme, uniquement en position couchée, pour la clarté de la courbe : montrant le pic pubertaire avec flambée de 12 ans 9 mois à 14 ans 6 mois soit sur 21 mois (fig. 22).

• Des douleurs sacrées conduisent à l’ablation des vis ilio-sacrées en juin 99. Un traitement oral contre la « spasticité » entendue ici comme une excitabilité nerveuse avec contractions envahissantes est prescrit mais la pose d’une pompe à baclofène est récusée. • Néanmoins, si l’arthrodèse est correcte elle n’a pas réussi à stabiliser complètement le bassin. David reste assis préférentiellement sur la fesse droite avec coup de vent des membres inférieurs vers la droite ; sa tête est inclinée à droite et en rotation gauche. Son installation au fauteuil a été

Scoliose d’évolution rapide et IMC sévère / 11

fessionnels accessibles ayant le goût de s’occuper de cas complexes à double pathologie cérébromotrice et orthopédique. DISCUSSION

– Certains peuvent se poser la question de la nécessité qu’il y a eu d’arthrodéser David qui a tant besoin de ses faibles capacités de mobilité pour garder son autonomie.

23 24 FIG. 23. FIG. 24.

améliorée avec la mise en place d’un coussin anti-escarre, d’un appareil de Grenier et d’un appui-tête avec rappels latéraux. David ne se plaint plus de douleur. • Pour des raisons diverses psychologique (climat familial dégradé et divorce des parents), physique post-opératoire, D. a eu une dépression nerveuse ayant nécessité une médication appropriée qu’il a eu du mal à abandonner. SUR LES PHOTOS DE DAVID PRISES CHEZ LUI EN DÉCEMBRE 2006

• La position assise se fait toujours sur la fesse droite, et sa tête est inclinée à droite et tournée vers la gauche. La rotation, par un tiers, de la tête vers la droite est limitée. L’abduction des hanches, en decubitus dorsal, est asymétrique, très limitée à gauche, le recul de l’hémi-bassin gauche persiste avec ascension et bascule sagittale. • La maigreur des membres inférieurs est évidente témoignant de la nécessité d’une rééducation motrice, pour entretenir la musculature et veiller aux installations. • Ce fait soulève le problème angoissant de la prise en charge des IMC et autres infirmes adultes qui sont en milieu normal, heureux et fiers de l’être mais qui ne trouvent pas forcément de pro-

La chirurgie qui lui a évité le pire au niveau rachidien l’enraidit bien sûr et progressivement peut compromettre son avenir de jeune travailleur à l’extérieur et conduire à des restrictions douloureuses. Néanmoins, le diagramme montre qu’il n’était pas possible de surseoir à la chirurgie puisqu’on était proche des 50°couché en dorsolombaire avec bascule du bassin importante et station assise inconfortable et une dorsale à 54°couché avec une compensation importante au niveau du rachis cervical et de la tête. Le corset n’aurait pas empêché une évolution négative, surtout que David n’a jamais réussi à le supporter. • Le regret que l’on peut avoir est de ne pas avoir mis en place un suivi sous corset dès les premières observations cliniques de gibbosité dorsale et de mesures radiologiques d’une scoliose débutante en phase pubertaire avec l’apparition des premiers poils pubiens. Le fait que le sujet ait vécu en milieu normal puis spécialisé n’a pas favorisé la coordination des prescriptions et de leur application. • En outre, aucun soin n’était parvenu à faire sortir durablement David de ses attitudes préférentielles, pelviennes et rachidiennes : ni la kinésithérapie, ni les installations statiques et dynamiques, ni la chirurgie musculo-tendineuse qui bien que nécessaire n’est pas arrivée à traiter complètement des problèmes des membres inférieurs. • La scoliose gauche dorsale haute et son lien avec le port de tête asymétrique n’est pas clair. • Cependant, une évaluation des facteurs de risques dont on a appris qu’ils combinent asymétrie motrice et faiblesse posturale auraient dû nous alerter davantage et plus tôt. • Lespargot, dans le long article cité en référence, insiste, en cas de scoliose sur terrain neurologique, sur le rôle de la faiblesse des spinaux pour tout niveau de la scoliose et pour les courbures dorso-lombaires, sur l’asymétrie de force des muscles thoraco-iliaques. Il discute des

12 / D. Truscelli et al.

modes de contention par corset et autres installations, selon le niveau fonctionnel. • L’étude de I. Hodgkinson et collaborateurs montre, que sur 234 sujets IMC quadriplégiques non marchant, 66,2 % ont développé une scoliose. • Alors que les scolioses d’une vingtaine de degrés ont « bonne » réputation chez des patients ayant acquis la déambulation aidée ou non, l’évolution d’une déformation rachidienne vers la structuration d’une scoliose est étroitement liée aux atteintes lourdes au plan moteur et cognitif. CONCLUSION

Il faut être attentif, au démarrage pubertaire, à ne pas négliger le rachis quand les membres inférieurs posent problèmes surtout chez des jeunes qui ont leur avenir en fauteuil roulant électrique. Si des interventions des membres inférieurs se font durant cette phase pubertaire il faut discuter de la manière de prendre en charge simultanément le rachis, sachant que le port d’un corset est délicat pour un jeune qui essaie de récupérer un potentiel moteur, après chirurgie des membres inférieurs. Quand on prend en charge un enfant quadriplégique non-marchant IMC ou polyhandicapé, nous devons garder à l’esprit le risque potentiel de voir se développer une scoliose grave.

Un suivi clinique et radiologique dès les premiers signes de maturation pubertaire s’impose, répétons-le, que le pic pubertaire soit précoce ou tardif car l’évolutivité peut prendre une dimension imprressionnante que l’on ne constate pas dans les scolioses idiopathiques. RÉFÉRENCES [1] VIALLE R., KHOURI N., BATAILLE J., HAMIDA M., DUBOUSSET J., GUILLAUMAT M. Déformations du rachis d’origine neurologique et musculaire. EMC appareil locomoteur 2006, 15-877-A-10 & 15-878-A-10. [2] LESPARGOT A. Les scolioses chez les enfants IMC ou polyhandicapés. Motricité cérébrale 2003 ; 24(4) : 135-150. [3] LATTRE C., BÉRARD C. La scoliose neurologique de l’IMC, 10e congrès Novembre 2005. Résonances Européennes du Rachis 2005 ; 13(41) : 1685-1686. [4] HODGKINSON I, BÉRARD C et al. Excentration de hanche chez l’IMC. Chirurgie osseuse et douleur. Étude de 234 patients. Motricité Cérébrale 2002 ; 23 : 109-119. [5] TRUSCELLI D. Recherche des facteurs déficitaires et de contrôle dans l’examen de l’IMC. Motricité Cérébrale 1990 ; 11 (4) : 133-142.