É
C H A N G E S
Panorama
Sida en France et dans le monde
908 - La Presse Médicale
des causes de mortalité. Enfin, les situations de précarité socio-économique (33 % des morts) sont à prendre en compte dans les stratégies de dépistage et de prise en charge.
DE TRÈS GRANDES DIFFÉRENCES SELON LES PAYS
Si l’on considère la situation à l’échelle mondiale, il n’est plus possible de parler d’une seule épidémie, mais de multiples épidémies (Lancet 2004 ; 364 : 1-2). En Europe, bien que plus de 500 000 cas soient recensés, avec 30000 à 40000 nou-
prévalence élevée; en 2002, trois quarts des infections diagnostiquées au Royaume Uni ont été acquises en Afrique. En Afrique justement, le virus se propage parmi les populations hétérosexuelles de nombreux pays subsahariens (Lancet 2004 ; 364 : 35-40). Là encore, il existe des différences marquées selon les pays. Au Bostwana, pays avec le taux le plus élevé d’infection de par le monde, 38 % des adultes sont infectés. Un adulte sur 4 est porteur du virus au Zimbabwe, 1 sur 5 en Afrique du Sud. Mais dans d’autres pays subsahariens, l’épidémie a progressé plus lentement ou a été contrôlée; c’est le cas du Sénégal ou de l’Ouganda. En Asie, il reste encore beaucoup d’inconnues sur la propagation du virus (Lancet 2004 ; 364 : 69-82). Dans certains pays, il y a des épidémies massives comme en Afrique subsaharienne. Au Cambodge et en Thaïlande, les taux d’infection dans les milieux de prostitution ont augmenté de manière considérable, faisant craindre une propagation massive dans le reste de la population, mais les mesures prises dans les 2 pays ont permis de réduire cette menace. © Joubert/Phanie
Une enquête intitulée « Mortalité 2000 » a eu pour objectif de décrire la répartition des causes de décès survenus en 2000 en France chez les adultes infectés par le VIH et les caractéristiques des personnes décédées (BEH 2004; n° 17: 67-8). Sur les 64000 patients infectés recensés, il y a eu 964 décès dont 924 documentés. En dehors du sida, qui est à l’origine de 47 % des causes initiales de décès, les causes les plus fréquentes sont les hépatites virales, les cancers non classant sida et non liés aux hépatites, les atteintes cardiovasculaires. Concernant les décès imputables au sida, le diagnostic de l’infection par le VIH datait de moins de 6 mois dans 1 cas sur 5. Il est déduit de cette constatation que, pour les personnes avec risque de transmission hétérosexuelle ou nées à l’étranger, l’amélioration des stratégies de dépistage est prioritaire, de même qu’une large mise à disposition des traitements hautement actifs à l’échelon international. Chez les patients pour lesquels la connaissance de l’infection était plus ancienne, il est noté que l’incidence des lymphomes malins non hodgkiniens, pathologie la plus fréquemment en cause, diminue moins nettement depuis 1996 que celle des autres pathologies opportunistes. Enfin, les décès par cancer, par virus de l’hépatite C et par atteinte cardiovasculaire, ainsi que les caractéristiques des patients décédés incitent à intensifier les actions de prévention à l’égard de facteurs de risque comme le tabagisme et la consommation d’alcool et à améliorer les stratégies de diagnostic précoce et de prise en charge des hépatites virales et des cancers. Si la part des effets thérapeutiques indésirables reste faible (acte iatrogène 2 % des décès, traitement antirétroviral 1 %), l’augmentation de la durée de traitement et l’évolution constante des stratégies thérapeutiques justifient une surveillance régulière
veaux sujets infectés chaque année, la propagation explosive redoutée n’a pas eu lieu (Lancet 2004; 364: 83-94). Cependant des épidémies sont survenues dans des populations à haut risque : homosexuels masculins, toxicomanes, prostituées. Toutefois, même dans ces groupes, il existe des variations d’un pays à l’autre et même d’une ville à l’autre. C’est ainsi que la prévalence de l’infection dans les milieux de prostitution de l’Europe de l’Est est nettement plus importante qu’en Europe de l’Ouest en raison d’un usage plus fréquent de drogues injectables. Un autre élément à prendre en compte chez les Européens hétérosexuels concerne les migrants. Dans 12 pays où des informations sont disponibles, deux tiers des infections à VIH diagnostiquées de 1997 à 2000 chez des hétérosexuels le sont chez des migrants provenant de pays à
AU POINT DE VUE THÉRAPEUTIQUE Un des traitements le plus couramment prescrit en Afrique est une association de néviparine, de stavudine et de lamivudine. Un essai mené au Cameroun chez 60 patients durant 24 semaines en a montré l’efficacité et la tolérance, comparables à celles obtenues avec d’autres thérapeutiques antirétrovirales hautement actives chez des patients dont le statut d’infection par le VIH était analogue (Lancet 2004; 364: 29-34). De tels résultats incitent à l’utilisation de combinaisons à dose fixe de ces produits sous forme générique comme traitement antirétroviral de première ligne dans les pays en voie de développement. ■
31 juillet 2004 • tome 33 • n°13