Revue du Rhumatisme 76 (2009) 424–428
Article original
Signification clinique des mutations du gène MEFV dans la spondylarthrite ankylosante夽 Clinical significance of MEFV mutations in ankylosing spondylitis Dilek Durmus a , Gamze Alayli a,∗ , Kivanc Cengiz a , Serbulent Yigit b , Ferhan Canturk a , Hasan Bagci b a
Service de médecine physique et de réhabilitation, faculté de médecine, université Ondokuz Mayis, Samsun, Turquie b Service de biologie médicale et de génétique, faculté de médecine, université Ondokuz Mayis, Samsun, Turquie Accepté le 18 septembre 2008 Disponible sur Internet le 14 avril 2009
Résumé Objectif. – L’objectif de cette étude était de rechercher la prévalence des mutations du gène MEFV chez les patients atteints de spondylarthrite ankylosante (SA) et d’évaluer leur signification clinique dans la SA. Méthodes. – Douze mutations fréquentes du gène MEFV ont été recherchées chez 80 patients souffrant de SA et 85 volontaires sains du groupe témoin par la technique Strip-Assay. L’activité de la maladie a été évaluée avec les mesures suivantes : Bath Ankylosing Spondylitis Disease Activity Index (BASDAI), Bath Ankylosing Spondylitis Functional Index (BASFI), échelle visuelle analogique pour la douleur (Eva), vitesse de sédimentation globulaire, protéine C-réactive (CRP), test de Schober, mesures d’ampliation thoracique, atteinte de la hanche, atteinte oculaire, arthralgies, et présence de syndesmophytes. Résultats. – Vingt-quatre patients souffrant de SA (30 %) et 17 du groupe témoin (20 %) étaient porteurs d’une mutation unique du gène MEFV. Il n’y avait pas de différence significative entre les patients atteints de SA et ceux du groupe témoin en termes de fréquence de mutation du gène MEFV (p = 0,13, OR :1,71, 95 % CI : 0,83–3,50). Entre les patients porteurs et les non porteurs de mutations du gène MEFV, il y avait une différence significative entre les groupes pour le BASFI et le BASDAI alors que la différence entre les groupes n’était pas significative pour la douleur évaluée par l’Eva. Aucune association n’a été retrouvée entre les signes cliniques et la mutation du gène MEFV à l’exception de l’atteinte de la hanche. Les patients porteurs d’une mutation MEFV avaient une VS plus élevée que les non porteurs, mais la différence n’était pas significative pour les taux de CRP. Conclusion. – Le taux de portage de mutation du gène MEFV n’était pas significativement plus élevé chez les patients atteints de SA en comparaison aux patients sains. Toutefois, être porteur d’une mutation MEFV semble aggraver l’évolution de la SA. © 2009 Société Franc¸aise de Rhumatologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Spondylarthrite ankylosante ; MEFV ; Mutation génétique ; Activité de la maladie Keywords: Ankylosing spondylitis; MEFV; Gene mutation; Disease activity
1. Introduction La spondylarthrite ankylosante (SA) est un rhumatisme inflammatoire fréquent qui affecte typiquement les articulations 夽
Ne pas utiliser, pour citation, la référence franc¸aise de cet article, mais sa référence anglaise dans le même volume de Joint Bone Spine (10.1016/j.jbspin.2008.09.011). ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (G. Alayli).
sacro-iliaques et le rachis. Elle se manifeste principalement par une lombalgie inflammatoire, une raideur et une ankylose rachidienne causées par l’inflammation et les dommages structuraux du squelette axial [1]. L’atteinte structurale est la conséquence de l’activité inflammatoire de la maladie et se manifeste par des atteintes irréversibles représentées par les syndesmophytes, l’ankylose et la destruction des articulations sacro-iliaques et de la hanche [2]. Les facteurs génétiques ont un rôle important dans la SA. L’allèle human leukocyte antigen B27 (HLA-B27) est le marqueur majeur de susceptibilité
1169-8330/$ – see front matter © 2009 Société Franc¸aise de Rhumatologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.rhum.2008.09.024
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génétique de la SA [3,4]. Cependant, des données convaincantes issues d’études de jumeaux ou de familles indiquent que d’autres gènes, notamment des gènes n’appartenant pas au complexe majeur d’histocompatibilité (non-MHC), ont également un rôle important dans la transmission de la SA. Il semble que les gènes non-MHC aient une influence significative sur l’activité de la maladie [5]. Le gène MEFV, responsable de la fièvre méditéranéenne familiale (FMF), est localisé sur le bras court du chromosome 16. La FMF est une maladie autosomique récessive, auto-inflammatoire, caractérisée par des épisodes récurrents de poussées inflammatoires touchant les membranes séreuses et synoviales [6,7]. La FMF est répandue dans les populations méditéranéennes de l’est, particulièrement chez les juifs nonashkenazes, les Arméniens, les Turcs et les Arabes [8]. La prévalence estimée de la FMF en Turquie est de 1 sur 1000, et la fréquence des porteurs de mutations MEFV est approximativement de 20 % [9], bien qu’une étude récente dans notre région indique une fréquence plus élevée, aux environs de 25 % [10]. Les mutations du gène MEFV entraînent une diminution de l’expression de la pyrine. On suppose que la diminution de l’expression de la pyrine induirait une hyperactivation inapropriée des polynucléaires neutrophiles et serait à l’origine de brefs accès paroxystiques et spontanés d’inflammation systémique observés dans les crises de FMF [8]. En plus de ces poussées cliniques, on observe fréquemment entre les crises et pendant des périodes prolongées, une inflammation subclinique chez les patients atteints de FMF [8,11]. D’autres travaux ont retrouvé chez les hétérozygotes MEFV, des concentrations en protéines aiguës de l’inflammation plus importantes à l’état basal et en poussée que chez les patients témoins sains [8,12,13]. La régulation positive de l’inflammation chez les porteurs de mutations MEFV peut également affecter la sévérité des maladies chroniques sous-jacentes telles que la polyarthrite rhumatoïde (PR), la sclérose en plaque (SEP), la maladie de Behcet (MB) et la rectocolite ulcéro-hémorragique (RCH) [14–17]. Les patients atteints de ces maladies inflammatoires chroniques paraissent hautement suceptibles de développer une maladie plus sévère s’ils ont une mutation du gène MEFV associée. La pyrine semble être un modulateur de certaines maladies inflammatoires [14]. Dans la littérature, il existe quelques observations rapportant la coexistence de la FMF et de la SA [18,19]. Dans ces travaux, les auteurs ont principalement discuté les différences entre SA+FMF (coexistence SA et FMF) et la spondylarthropathie séronégative (SNSA) de la FMF. Langevitz et al. [20] ont sélectionné 3000 patients atteints de FMF et ont trouvé 11 cas de SNSA de FMF. Contrairement aux patients souffrant de SA, la plupart des cas de SNSA de FMF étaient HLA-B27 négatifs et n’avaient pas d’atteinte lombaire radiologiquement significative. La présence de mutations MEFV chez les patients souffrant de SA et leur possible retentissement clinique n’a pas été étudiée dans ces études. À notre connaissance, c’est la première étude qui recherche l’association possible entre les mutations du gène MEFV et la SA. Dans ce travail, nos objectifs étaient la comparaison de la fréquence des mutations du gène MEFV chez les patients atteints de SA et chez les patients sains, ainsi que la comparaison de la
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sévérité de la maladie entre les porteurs de la mutation et les non porteurs. 2. Méthodes 2.1. Description de l’étude et patients Quatre-vingt patients souffrant de SA (M/F : 68/12) remplissant les critères modifiés de New York [21] et 85 patients sains du groupe témoin (M/F : 68/17) ont été inclus dans l’étude. Les patients atteints de SA étaient les patients vus en consultation externe du service de médecine physique et réadaptation, l’hôpital universitaire d’Ondokuz Mayis, Samsun, en Turquie. Les patients sains du groupe témoin ont été recrutés à partir du personnel de l’hôpital. Tous les patients du groupe SA et du groupe témoin étaient des Turcs originaires du pourtour de la mer noire en Turquie. Les patients atteints et ceux du groupe témoin ont été évalués par le même praticien. L’interrogatoire a recherché des épisodes de fièvres récurrentes, pouvant être accompagnées de crises de péritonite, d’arthrites, de pleurésies et d’érythème de type érisypèle se résolvant spontanément en 12–72 heures. Aucun des patients ne présentait les caractéristiques cliniques de FMF ou d’amylose. Ceux qui avaient un antécédent familial de FMF ou des symptômes qui ressemblaient aux épisodes caractéristiques de FMF ont été exclus. L’étude a été conduite après consentement écrit de tous les patients et approbation du comité d’éthique local. Les patients atteints et ceux du groupe témoin ont été étudiés pour 12 mutations fréquentes du gène MEFV. Des données démographiques comprenant l’âge, l’index de masse corporelle (IMC), l’âge du début de la symptomatologie, la durée des symptômes et les antécédents familiaux étaient collectées. Des radiographies des articulations sacro-iliaques et des vertébres ont été pratiquées dans le groupe SA. Les patients atteints de SA ont été assignés en deux groupes en fonction du portage ou non de mutations du gène MEFV. Les données des examens cliniques et biologiques ont été comparées entre les deux groupes. Quatre des patients porteurs (16,7 %) et un des non porteurs (1,8 %) ont rec¸u un traitement par anti-TNF. 2.2. Tests génétiques Des échantillons sanguins de cinq millilitres ont été prélevés chez tous les patients et témoins. L’extraction de l’ADN a été réalisée comme l’ont décrite Miller et al. [22]. Douze mutations communes du gène MEFV localisées sur l’exon 2 (E148Q), l’exon 3 (P369S), l’exon 5 (F479L), et l’exon 10 (M680I [G/C], M680I [G/A], I692del, M694 V, M694I, K695R, V726A, A744S, et R761H) ont été recherchées par dosage d’hybridation reverse tel que décrit par le fabriquant (FMF Strip Assay ; Vienna Lab Labordiagnostika GmbH, Vienne, Autriche) [23]. 2.3. Mesures cliniques Les niveaux de douleur ont été mesurés par une échelle visuelle analogique (Eva). Les caractéristiques cliniques de
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la maladie telle que les syndesmophytes, l’atteinte occulaire, l’atteinte de la hanche (limitation et douleur dans l’amplitude articulaire de l’articulation coxofémorale) et les arthralgies (présence actuelle ou antécédent d’arthralgies périphériques ou d’arthrites) ont également été recherchées. L’expansion thoracique (en centimètres) a été mesurée avec un mètre ruban placé autour de la poitrine au quatrième espace intercostal. La flexion et l’extension du rachis lombaire ont été mesurées avec un mètre, en utilisant la méthode de Schober modifiée [24]. L’activité clinique de la maladie a été évaluée par le BASDAI. Le BASDAI est un questionnaire comprenant six questions en rapport avec les cinq symptômes principaux de la SA (fatigue, douleur rachidienne et des hanches, articulations douloureuses ou gonflées, enthésites, sévérité et durée de la raideur matinale). Les réponses aux questions étaient notées sur une Eva de 10 cm. Un score inférieur ou égal à 3,9 témoignait d’une maladie inactive, un score inférieur ou égal à 6,9 correspondait à une activité de la maladie douteuse, et un score supérieur ou égal à 7 définissait une maladie active [25]. Les patients avec un score de BASDAI supérieur ou égal à 4 étaient considérés comme en poussée. La fonction était évaluée par le BASFI. Le BASFI est un questionnaire de dix questions concernant la capacité fonctionnelle du patient atteint de SA à réaliser ses activités journalières. Tous les items sont estimés avec une Eva horizontale de 10 cm. Le score de BASFI est la somme de toutes les valeurs. Plus le score de BASFI est élevé, plus la limitation est importante [26]. La VS globulaire était déterminée selon la méthode de Westergren et la CRP était mesurée par dosage néphélométrique. La présence de l’HLA-B27 a été recherchée par PCR utilisant des séquences spécifiques.
Tableau 1 Caractéristiques démographiques et cliniques des patients souffrant de spondylarthrite ankylosante (SA).
Âge (années) Sexe (M/F) IMC (kg/m2 ) Durée de la maladie (années) Âge de début des symptômes (années)
Porteurs de mutation MEFV (n = 24)
Non porteurs de mutation MEFV (n = 56)
p
38,1 ± 9,9 20/4 24,8 ± 5,4 13,5 ± 9,6
38 ± 10,8 48/8 26,3 ± 4,0 10,5 ± 7,3
> 0,05 > 0,05 > 0,05 > 0,05
24,6 ± 6,3
27,4 ± 9,5
> 0,05
Les données ont été analysées avec le logiciel SPSS. Pour comparer deux groupes, le test Mann-Whitney U et le test t ont été utilisés lorsque cela était nécessaire en fonction de la distribution normale des paramètres. L’association entre les groupes a été analysée avec le test du Khi2 et le test exact de Fisher lorsque cela était possible. Les relations entre les porteurs de la mutation et le phénotype étaient analysées en utilisant le Khi2 . Les odds ratio (OR) et les intervalles de confiance (IC) à 95 % ont été utilisés pour l’évaluation des facteurs de risque. Une valeur de p inférieure à 0,05 et un OR avec un IC à 95 % ne comprenant pas un était considéré statitiquement significatif.
significative entre les patients atteints de SA et les sujets témoins en termes de fréquence de mutations du gène MEFV (p = 0,13, OR : 1,71, 95 % CI : 0,83–3,50). Quand les patients étaient divisés en deux groupes en fonction du portage ou non de la mutation du gène MEFV, il n’y avait pas de différence statistiquement significative entre les groupes pour l’âge, l’IMC, la durée de la maladie, ou l’âge du début de la symptomatologie (Tableau 1). Les antécédents familiaux étaient statistiquement significativement plus élevés chez les patients porteurs de mutations en comparaison aux non porteurs (37,5 % versus 14,3 %) (p = 0,02, OR = 3,6 ; 95 % CI = 1,18–10,97). Aucune association n’a été retrouvée entre les caractéristiques de la maladie (représentées par les syndesmophytes, l’atteinte oculaire, l’atteinte de la hanche et les arthralgies) et les mutations du gène MEFV, excepté pour l’atteinte de la hanche (p < 0,05) (Tableau 2). L’expansion thoracique et l’indice de Schober étaient plus limités dans le groupe des porteurs. Cependant, il n’y avait pas de différence significative pour l’ampliation thoracique. Alors que la différence entre les groupes n’était pas significative pour la douleur mesurée par l’Eva, la différence était significative pour le BASFI (p < 0,05). Treize (54,2 %) des porteurs et treize (23,2 %) des non-porteurs étaient actifs selon le score BASDAI. Il existait une différence significative entre les groupes pour le BASDAI (p = 0,007, OR = 3,90, 95 % CI = 1,41–10,78). Les patients porteurs de mutations MEFV avaient une VS plus élevée que les non porteurs (p < 0,05) mais la différence n’était pas significative pour le taux de CRP (Tableau 3). Quatre porteurs et un nonporteur ont rec¸u un traitement anti-TNF. La différence entre les groupes était significative pour le traitement anti-TNF (16,7 % versus 1,8 %) (p = 0,02, OR = 11, 95 % CI = 1,15–104,39).
3. Résultats
4. Discussion
Les moyennes d’âges des patients atteints de SA et du groupe témoin étaient respectivement de 38,05 ± 10,52 et de 34,71 ± 15,89 ans. L’HLA-B27 était positif chez 79 (98,75 %) des patients atteints de SA. Vingt-quatre des patients souffrant de SA (30 %) avaient une mutation unique du gène MEFV (sept porteurs de la mutation E148Q, dix M694 V, quatre M680I, deux V726A et un A744S) tandis que 17 sujets du groupe témoin (20 %) portaient une mutation unique du gène MEFV (quatre E148Q, quatre M680I, trois M694 V, deux V726A, un K695R, un F479L, un R761H et un P396S). Il n’y avait pas de différence
Nos résultats suggèrent que la fréquence de mutations du gène MEFV dans le groupe des patients atteints de SA est similaire à celle du groupe témoin bien qu’être porteur d’une mutation MEFV puisse exacerber la sévérité de la maladie chez les patients atteints de SA. Il a été montré que les mutations du gène MEFV exacerbaient la sévérité des maladies chroniques sous-jacentes. Récemment, Shinar et al. [16] ont démontré une progression rapide de la SEP chez les juifs non-ashkenazes, porteurs de la mutation. Notamment, il a été trouvé que la mutation M694V était associée à une progression rapide de l’incapacité.
2.4. Analyse statistique
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Tableau 2 Comparaison des signes cliniques des patients.
Syndesmophytes Oui Non Atteinte oculaire Oui Non Atteinte de la hanche Oui Non Arthralgie Oui Non Ants familiaux Oui Non
Porteurs de mutation MEFV (n = 24)
Non porteurs de mutation MEFV (n = 56)
p
OR
95 % CI
9 (37,5 %) 15 (62,5 %)
17 (30,4 %) 39 (69,6 %)
0,53
1,37
0,50–3,75
6 (25 %) 18 (75 %)
10 (17,90 %) 46 (82,10 %)
0,46
1,53
0,48–4,84
10 (41,7 %) 14 (58,3 %)
9 (16,1 %) 47 (83,9 %)
0,01
3,73
1,26–10,98
14 (58,3 %) 10 (41,7 %)
10 (37,5 %) 35 (62,5 %)
0,08
2,33
0,88–6,18
9 (37,5 %) 15 (62,5 %)
8 (14,3 %) 48 (85,7 %)
0,02
3,60
1,18–10,97
p < 0,05 Significatif.
Rabinovich et al. [15] ont recherché chez 98 patients atteints de PR, la présence de trois mutations fréquentes du gène MEFV : M694V, V726A, E148Q. Les taux de mutations dans le groupe PR et le groupe témoin étaient similaires, mais les scores d’activité de la maladie chez les patients atteints de PR et porteurs de mutations du gène MEFV étaient plus elévés que chez les patients souffrant de PR et non porteurs de mutations. Les auteurs ont rapporté qu’après ajustement des groupes porteurs et non porteurs pour la durée de la maladie, l’âge de début, le sexe et la positivité du FR, la présence de mutation du gène MEFV prédisait un OR de 15 fois supérieur en termes d’activité par rapport au score médian de sévérité. Ils ont ainsi indiqué qu’une mutation du gène MEFV pouvait être un modulateur indépendant de la sévérité de la PR. Récemment, Giaglis et al. [17] ont rapporté une fréquence élevée de mutations MEFV chez les patients atteints de RCH et ont suggéré un effet potentiel des mutations MEFV sur l’évolution de la maladie, notamment sur la présence d’arthrites. Fidder et al. [27] ont étudié les mutations Tableau 3 Comparaison des paramètres cliniques et biologiques des patients.
Eva (douleur) VS (mm/hr) Protéine C-Réactive (mg/L) Test de Schober (cm) Ampliation thoracique (cm) BASFI BASDAI BASDAI (≥ 4) (< 4)
Porteurs de mutation MEFV (n = 24)
Non porteurs de mutation MEFV (n = 56)
p
4,9 ± 2,5 26 ± 14 19,2 ± 6,4
3,9 ± 2,2 20 ± 13 15,4 ± 7,5
> 0,05 < 0,05 > 0,05
2,2 ± 1,4 3,2 ± 1,4
3,1 ± 1,6 3,7 ± 1,4
< 0,05 > 0,05
4,04 ± 2,90 2,91 ± 1,61 13 (54,2 %) 11 (45,8 %)
2,45 ± 2,07 2,45 ± 1,50 13 (23,2 %) 43 (76,8 %)
< 0,05 > 0,05= 0,007
Eva : échelle visuelle analogique ; VS : vitesse de sedimentation ; BASFI : the Bath Ankylosing Spondylitis Functional Index ; BASDAI : Bath Ankylosing Spondylitis Disease Activity Index ; p < 0,05 Significatif.
MEFV chez les patients avec une maladie de Crohn et ils ont démontré une association entre la présence de mutations MEFV et la capacité sténosante de la maladie et la présence de manifestations gastrointestinales. Rabinovich et al. [14] ont examiné 54 patients atteints de MB et ont démontré qu’être porteur d’une mutation MEFV prédisposerait peut-être à une MB. Plus de thromboses veineuses ont été rapportées, et cela de fac¸on significative, chez les patients atteints de MB et porteurs de mutations du gène MEFV. Dans cette étude, le score de BASFI et le score de BASDAI, qui sont des instruments complets d’autoévaluation de l’activité de la maladie, étaient plus élevés dans les porteurs de mutations du gène MEFV. De plus, l’atteinte de la hanche qui est également considérée comme un signe de mauvais pronostic dans les spondyloarthropathies [28] était plus élevée dans le groupe porteur de mutations MEFV. Le taux plus élevé de traitement par agent biologique (anti-TNF) dans le groupe porteur de mutations MEFV peut également être considéré comme un indicateur indirect d’inflammation augmentée chez les patients souffrant de SA et porteurs de mutations MEFV. Ces observations confirment le rôle possible de modulateur des mutations MEFV sur l’évolution de la maladie chez les patients atteints de SA. Pour les maladies rhumatologiques, le terme « sévérité de la maladie » pourrait peut-être être plus précisément décrit par « activité inflammatoire », car l’inflammation est le facteur conducteur de la maladie et le déterminant majeur de sa progression [2]. Dans cette étude, la réponse inflammatoire augmentée chez les porteurs de mutations MEFV semble également exacerber le poids de l’inflammation chez les patients atteints de SA et a entraîné une maladie plus sévère. On connaît peu de choses sur le contrôle génétique de la sévérité de la maladie dans la SA. Hamersma et al. [29] ont utilisé un modèle de variance pour déterminer les composants génétiques et environnementaux chez 384 patients et ont conclu que la sévérité de la maladie est en grande partie déterminée génétiquement et que les facteurs environnementaux jouent un rôle mineur dans la sévérité de la maladie. Khan et al. [30] n’ont pas trouvé de différence dans la sévérité de la maladie et la survenue de manifestations extraarticulaires entre les
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D. Durmus et al. / Revue du Rhumatisme 76 (2009) 424–428
patients HLA-B27 positifs et les patients HLA-B27 négatifs, si ce n’est une incidence augmentée d’uvéite antérieure aiguë chez les patients HLA-B27 positifs. Dans une méta-analyse examinant la positivité ou la négativité de l’allèle HLA-B27 chez les patients atteints de SA, les patients HLA-B27 négatifs débutaient leur maladie plus tradivement, avaient une atteinte rachidienne plus modérée et donc un meilleur pronostic [31]. Dans une étude récente, Freeston et al. [32] ont démontré que les patients atteints de SA qui étaient HLA-B27 positifs, avaient une activité de la maladie plus élevée, une incapacité fonctionnelle plus importante, une plus mauvaise qualité de vie, plus de manifestations extraarticulaires et nécessitaient plus souvent un traitement biologique que les patients HLA-B27 négatifs. Dans notre étude, tous les patients atteints de SA étaient HLA-B27 positifs, sauf un. Il semble que nos résultats n’aient pas été influencés par le status HLA-B27 des patients. Brown et al. [33] ont réalisé une étude du génome entier pour identifier les régions génomiques liées aux déterminants de la sévérité de la maladie dans la SA et ont conclu que les manifestations cliniques et la sévérité de la maladie étaient en grande partie déterminées par un petit nombre de gènes non liés au CMH. Ils ont observé une liaison (avec un risque d’association du au hasard inférieur à une fois par tour de génome complet) avec le BASDAI sur les chromosomes 11q, 16p, 18p et 20q. En conclusion, bien que le gène MEFV ne soit pas un gène de susceptibilité majeur pour la SA, les résultats de notre étude suggèrent que les patients atteints de SA et porteurs de mutations du MEFV seraient plus susceptibles de développer une maladie plus sévère. La découverte des gènes qui modifient la sévérité de la maladie dans la SA est importante pour dépister les patients à risque d’avoir une évolution délétère de la maladie. L’identification de ces gènes peut fournir de nouvelles cibles dans le développement des nouvelles thérapies et pourrait élucider la physiopathologie de la maladie. Conflits d’intérêts Les auteurs ne déclarent aucun conflit d’intérêts. Références [1] Braun J, Sieper J. Ankylosing spondylitis. Lancet 2007;369:1379–90. [2] Zochling J, Braun J, van der Heijde D. Assessments in ankylosing spondylitis. Best Pract Res Clin Rheumatol 2006;20:521–37. [3] Brown MA. Human leucocyte antigen-B27 and ankylosing spondylitis. Intern Med J 2007;37:739–40. [4] Wordsworth P. Genes in the spondyloarthtopathies. Rheum Dis Clin North Am 1998;4:845–62. [5] Brown MA. Non-major-histocompatibility-complex genetics of ankylosing spondylitis. Best Pract Res Clin Rheumatol 2006;20:611–21. [6] Sohar E, Gafni J, Pras M, et al. Familial Mediterranean fever. A survey of 470 cases and review of the literature. Am J Med 1967;43:227–53. [7] French family Mediterranean fever (FMF) Consortium. A candidate genr for Familial Mediterranean Fever. Nat Genet 1997;17:25–31. [8] Lachmann HJ, Sengül B, Yavuzs¸en TU, et al. Clinical and subclinical inflammation in patients with familial Mediterranean fever and in heterozygous carriers of MEFV mutations. Rheumatology (Oxford) 2006;45:746–50. [9] Turkish FMF Study Group. Familial Mediterranean fever in Turkey. Medicine 2005;84:1–11.
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