Solvatation d'ions et stabilité des complexes mercuri-thiocyanates dans le N-méthylacétamide et ses mélanges avec le N,N-diméthylformamide

Solvatation d'ions et stabilité des complexes mercuri-thiocyanates dans le N-méthylacétamide et ses mélanges avec le N,N-diméthylformamide

ELECTROANALYTICAL CHEMISTRY AND INTERFACIAL ELECTROCHEMISTRY Elsevier Sequoia S.A., Lausanne - Printed in The Netherlands 253 SOLVATATION D'IONS ET ...

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SOLVATATION D'IONS ET STABILIT]~ DES COMPLEXES MERCURI-THIOCYANATES DANS LE N-Mt~THYLACI~TAM1DE ET SES MI~LANGES AVEC LE N,N-DIMt~THYLFORMAMIDE*

A D A N E. PUCCI**, J A C Q U E S V E D E L ET B E R N A R D T R E M I L L O N

Facultd des Sciences de Paris, Laboratoire de Recherches de Chimie Analytique (associd au C.N.R.S.), E.N.S.C.P., Paris (France) (Requ le 20 f6vrier, 1969)

INTRODUCTION

L'influence du solvant sur un 6quilibre chimique fait intervenir ~t la fois la modification des forces 61ectrostatiques qui s'exercent entre les esp6ces ioniques et les diff6rences d'action exerc6es par les mol6cules de solvant sur toutes les esp6ces chimiques en solution participant h cet 6quilibre. Cette action, la solvatation, d6pend de la nature du solvant et de celle du solut6; elle en est sp6cifique. En revanche, Faction 61ectrostatique dolt entralner--comme l'indique l'6quation de Born--une variation approximativement lin6aire du logarithme de la constante d'6quilibre en fonction de l'inverse de la constante di61ectrique du milieu 1. Mais cette relation a 6t6 souvent infirm6e par les r6sultats exp6rimentaux globaux, ce qui peut provenir du fait que la distinction entre Faction de la constante di61ectrique et celle de la solvatation n'a pu &re effectu6e, sinon d'une mani6re hypoth6tique z. En particulier, lorsqu'on r6alise des m61anges en proportions variables d'eau et d'un solvant organique miscible, la constante di61ectrique et la solvatation sp6cifique varient toutes deux en m~me temps. Cependant, une 6tude r6cente 3, portant sur la comparaison de forces d'acides dans deux solvants poss6dant sensiblement la m6me constante di61ectrique--l'eau et l'ac6tamide ~ 98 ° C--, a permis de mettre en 6vidence le r61e tr6s important des diff6fences de solvatation des esp6ces chimiques dans les deux milieux. Nous avons pens6 que le N-m6thylac6tamide (NMA) et le N,N-dim6thylformamide (DMF), qui sont isom6res, pourraient fi l'oppos6 donner une solvatation sensiblement analogue et permettraient ainsi de r6aliser une 6tude off la seule influence de la constante di61ectrique interviendrait, le m61ange de ces deux solvants permettant de faire varier cette derni+re de 165 ~t 35 (~t 40°C). L'6tude d6crite ici a eu pour objet les constantes de stabilit6 des complexes mercuri-thiocyanates, ais6ment d6termin6es 61ectrochimiquement. Elle nous a fait apparaltre l'influence d'un facteur caract6ristique sur la solvatation de certains ions: la structure des solvants mol6culaires, qui semble ~tre responsable de l'existence d'un minimum de stabilit6 des complexes 6tudi6s pour un m61ange interm6diaire. * Cet article est extrait de la th+se de Doctorat d'Universit6 soutenu par A.E. Pucci le 14-10-1968 g la Facult~ des Sciences de Paris. ** Adresse actuelle: Departamento de Qulmica, Universidad Nacional del Sur, Bat~ia Blanca (Rep. Argentina).

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A.E. PUCCI, J. VEDEL, B. TRI~MILLON

I1 est ~t remarquer que les 6tudes d'6quilibre effectu6es dans les m61anges de solvants ayant des constantes dblectriques sup6rieures h celle de l'eau sont actuellement peu nombreuses; Reynaud 4 a r6cemment d6termin6 les constantes pKA de quelques couples acide-base dans les m61anges e a u - N M A h 25°C et constat6 6galement que la stabilit6 des acides de type HA (acides benzoique et ac6tique) passe par un minimum pour un m61ange interm6diaire.

Coefficients de solvatation d'ions Le coefficient de solvatation (ou coefficient de partage) Fi d'un ion i, traduisant le changement de propri6t6s thermodynamiques de cet ion lorsqu'il est transf6r6 d'une solution aqueuse ~ une solution dans un autre solvant S, est d6fini par la relation : R T log F i = ( # ° ) s - (]~°)eau L'6valuation exp6rimentale de ce coefficient n6cessite l'adoption d'une hypoth6se extra-thermodynamique concernant les solvatations des constituants d'un couple de r6f&ence. Nous avons r6cemment expos6 les r6sultats d'une 6tude de ce genre, dans laquelle nous avons exploit6 une m6thode pr6conis6e par Strehlow et coll. 5 pour la comparaison des 6chelles de potentiel dans des solvants diff6rents, consistant ~t utiliser comme r6f6rence le couple oxydo-r6ducteur ferroc6ne-cation ferricinium. En d6terminant par rapport ~t ce couple les potentiels normaux Ee°u et E ° d'un couple M/M "+ dans l'eau et dans le solvant S, on peut d6finir une grandeur R°(M) = (nV/2.3 RT)(E°a. - e °) dont la valeur est 0gale ~t - log FM. + si l'on admet que le potentiel du couple ferroc+neferricinium est invariable lorsqu'on change de solvant, ce qui implique seulement que les solvatations des deux constituants de ce couple varient de la m0me maniOre. Nous avons appliqu6 cette m6thode au cationAg +dans divers mOlanges hydro-organiques 7, ainsi qu'au proton grCtce ~ la grandeur R°(H) d6duite de mesures ~ l'61ectrode ~thydrog6ne 6 ou ~ l'61ectrode de verre 7. En outre, si un anion X - forme avec le cation M "+ un sel peu soluble, MX., dont le produit de solubilit6 est d6sign6 par Ks, son coefficient de solvatation, F x - , est calcul6 au moyen de l'expression: n log F x - = R°(M) - log [(Ks)eau/(Ks)s] Nous avons ainsi 6valu6 des coefficients de solvatation pour les anions halogOnures et thiocyanate dans divers mOlanges hydro-organiques grgtce ~t la d6termination des produits de solubilit6 des sels d'argent correspondants 7. C'est 6galement cette mOthode que nous avons utilisOe pour la comparaison des 6chelles de p H dans l'acOtamide fondu et dans l'eau ~t 98°C 3, en d6terminant R°(H) pour ces deux milieux. Dans la prOsente 6tude, nous avons h nouveau expOriment6 la mOme mOthode dans le but essentiel de tester l'hypoth+se de dOpart concernant la faible variation de solvatation des ions concernOs dans les mOlanges N M A - D M F . RESULTATSEXPERIMENTAUX 1. Comme dans nos 6tudes pr6c6dentes 3,6,7, n o u s avons adopt6 comme potentiel de r6f6rence dans les diff6rents milieux le potentiel de demi-vague de la courbe

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COMPLEXES Hgn-SCN - DANS N M A ET D M F

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intensit6-potentiel d'oxydation "r6versible" du ferroc6ne en ferricinium (ferroc6ne- e --, ferricinium 4) ~t une micro-61ectrode tournante de platine (courbe stationnaire, en r6gime de diffusion convective). En appelant i~ la valeur de l'intensit6-1imite de diffusion du ferroc6ne, il faut v6rifier pour la vague que la variation de E = f log [i/il- i)] est une droite dont la pente est 6gale/l 2.3 RT/F = 62 mV par unit6 de logarithme ~t la temp6rature des exp6riences, 40°C (+0.2°C). Dans le NMA, cette condition de r6versibilit6 n'a 6t6 v6rifi6e que pour une vitesse de rotation de l'61ectrode 6gale ~t 45-50 t/min; ~t vitesse plus 61ev6e, la pente de la droite approximative est plus grande que la valeur th6orique prdc6dente, indiquant que l'oxydation ne s'effectue pas dans les conditions o/a l'on peut appliquer l'6quation des vagues r6versibles. En revanche, dans les m61anges avec le DMF, nous avons obtenu une vague r6versible ~t des vitesses de rotation plus 61ev6es; dans le D M F pur, la vague est encore r6versible ~ 700 t/min. Si les coefficients de diffusion du ferroc6ne et de l'ion ferricinium sont peu diff6rents l'un de l'autre, le potentiel de demi-vague ainsi obtenu est peu diff6rent du potentiel normal du couple et peut &re assimil6 ~t la valeur de ce dernier, comme cela a d6j~t 6t6 admis 4,8. 2. Nous avons ensuite d6termin6 les potentiels normaux, dans les diff6rents m61anges N M A - D M F &udi6s, des couples Hg/Hg 2+, Ag/Ag + et H2/H 4. Pour cela, il a d'abord 6t6 prouv6 que les ions mercureux sont pratiquement quantitativement dismut& dans tousles m61anges h 40°C. Les ions mercuriques ont ainsi pu &re produits par oxydation coulom6trique h intensit6 constante d'une nappe de mercure; mais, si le rendement de l'oxydation a 6t6 tr6s voisin de 100~ dans le N M A pur, il a 6t6 assez nettement inf6rieur, de l'ordre de 8 0 ~ seulement, dans les m61anges avec le DMF. Les ions Ag 4 ont 6galement 6t6 produits par oxydation coulom6trique d'une 61ectrode d'argent; ~t partir de la concentration 10- 2 M, une coloration brunfitre de la solution apparait, puis une fine poudre gris~ttre. La concentration des ions Ag 4 diminue lentement au cours du temps. Ces ph6nom6nes correspondraient ~iune r6duction lente des ions Ag ÷ par le D M F 9. Les potentiels d'6quilibre ont 6t6 mesur6s ~t une 61ectrode ~t gouttes de mercure pour le couple Hg/Hg 2 4, ~ une micro-61ectrode d'argent pour le couple Ag/Ag 4, et une micro-61ectrode de platine platin6 pour le couple H z / H +. Darts ce dernier cas, l'acide fort utilis6 a 6t6 l'acide p-tolu6nesulfonique anhydre; la d6termination n'a cependant pas 6t6 possible dans le D M F pur. La validit6 de la formule de Nernst a 6t6 v6rifi6e dans les trois cas. Dans tousles m61anges, l'61ectrode de comparaison utilis6e a 6t6 l'61ectrode argent/chlorure d'argent satur6/chlorure de potassium satur6. Pour les d6terminations effectu6es en solution aqueuse ~t 40°C, nous avons utilis6 l'61ectrode au calomel et au chlorure de potassium satur6, dont le potentiel par rapport ~tl'61ectrode normale /: hydrog6ne est +0.230 V ~t 40°C. L'ensemble des r6sultats observ6s lors de ces d&erminations est report6 dans le Tableau 1. 3. Pour atteindre les coefficients de solvatation de l'anion thiocyanate, nous avons cherch6 h d6terminer les valeurs du produit de solubilit6 du thiocyanate d'argent dans les m61anges N M A - D M F . Nous avons op6r6 par titrage potentiom6trique d'ions Ag + (introduits coulom6triquement) par du thiocyanate de potassium. Mais, nous n'avons observ6 la pr6cipitation de AgSCN, comme en solution aqueuse, que J. Electroanal. Chem., 22 (1969) 253±263

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A. E. P U C C I , J. VEDEL, B. TRI~MILLON

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COMPLEXESH g l I - S C N - DAYS N M A ET D M F

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dans le cas du N M A pur. En outre, le pr6cipit6 est ensuite redissous dans un exc6s de thiocyanate par formation de complexe anionique. L'interpr6tation de la courbe potentiom6trique nous a conduit aux valeurs suivantes des constantes d'6quilibre dans le N M A ~t 40°C et # = 0.1: Ag(SCN) 2- ~ Ag + + 3 S C N -

log (f13/mole-313)= 10.7(___0.3)

AgSCN~ ~ Ag + + S C N -

- log (Ks/mole21 - 2) = 13.7( + 0.2)

En solution aqueuse e(dans les m~mes conditions de temp6rature et de force ionique, nous avons obtenu: - log (K~/mole21- 2) = 11.2(_+ 0.1) 4. Pour l'6tude des complexes mercuri-thiocyanates, diff6rentes m6thodes 61ectrochimiques ont 6t6 exploit6es: d6termination de courbes polarographiques, titrages potentiom6triques et amp6rom6triques. (a) Les courbes de titrages potentiomdtriques et amp6rom6triques (avec une 61ectrode indicatrice/t gouttes de mercure, potentiel impos6 + 0.40 V par rapport ~t l'61ectrode de comparaison) ont montr6 dans t o u s l e s cas l'apparition d'un point 6quivalent net correspondant/t l'addition de deux ions S C N - pour un cation Hg 2÷, c'est-g-dire h la r6action de formation du complexe Hg(SCN)2. I1 n'apparalt pas, dans les m61anges N M A - D M F comme dans l'eau, d'autre point 6quivalent correspondant ~t la formation d'un complexe sup6rieur anionique. Deux courbes de titrage caract6ristiques obtenues dans le N M A pur sont repr6sent6es Fig. 1 ; l'allure est identique dans le D M F pur et dans tousles m61anges. to >

500

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~ 40( :~ aoo

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o ml K S C N 0 . 1 0 0 M

Fig. 1. Courbes de titrages : (a), potentiom6trique; (b), amp6rom6trique(~ E = 0.40 V), de 25 ml de solution de Hg2÷ 1.9-10 3M dans le NMA, par du thiocyanatede potassium. T = 40°C, # = 0.1 (Et4NC104,0.1 M). (b) L'oxydation d'une 61ectrode h gouttes de mercure en pr6sence de solutions de thiocyanate de potassium conduit ~t des vagues polarographiques caract6ristiques, telles que celles repr6sent6es Fig. 2, obtenues dans le N M A pur; l'allure est identique dans tousles m61anges et dans le DMF. Le palier de ces vagues est caract6ristique de la formation du complexe Hg(SCN)2 et sa hauteur a 6t6 v6rif6e proportionnelle ~ la concentration des ions S C N - , de 10-4-5 • 10 -3 M au moins. (c) Les variations du potentiel d'6quilibre d'une 61ectrode de mercure dans une solution contenant des ions mercuriques dilu6s (environ 2- 10- 4 M, produits coulom6triquement) + Et4NC104, 0.1 M + S C N - , 1 0 - 4 - 1 0 -2 M ont permis d'identifier les J. Electroanal. Chem.,

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A. E. PUCCI, J. VEDEL, B. TRI~MILLON 550

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500

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200 400 Potentiel (en mY)

600

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-3

-2 log (SCN-)

Fig. 2. Courbes polarographiques anodiques d'oxydation du mercure dans le N M A (+ Et4NC10,, 0.1 M)/t 40°C, en pr6sence de thiocyanate de potassium /t diff6rentes concentrations: (1), 0; (2), 7.9.10-% (3), 2.34"10-3; (4), 3.84.10-3; (5) 6.00.10-3; (6), 1.00.10-2; (7), 1.66.10-2; (8), 2.00.10 2; (9), 2.50.10 -2 M. Fig. 3. Variations du potentiel d'6quilibre d'une 61ectrode de mercure en pr6sence de Hg(II) 2.10 -4 M, dans les m61anges N M A - D M F / t 40°C (/~ = 0.1), e'n fonction de la concentration de thiocyanate.

complexes sup6rieurs, [Hg(SCN)3 ] - et [Hg(SCN)4] 2-, et de d6terminer les valeurs de leurs constantes de stabilit6 dans les diff6rents milieux utilis6s. Une vingtaine de mesures ont 6t6 effectu6es dans chaque milieu (Fig. 3), conduisant aux valeurs de constantes et aux incertitudes report6es dans le Tableau 2. TABLEAU 2 CONSTANTESGLOBALESDE FORMATIONDES COMPLEXESMERCURI--THIOCYANATESDANSLES MELANGESN M A D M F ET DANSL'EAU, A 40 (--+0.2) °C Force ionique/~ =0.1. Les intervalles d'incertitude correspondent & un taux de confiance de 9 5 ~

M dlanges (% en poids) NMA DMF

H 9 (S CN )2 log (fi2/mole-2/2)

100

0

14.6_+0.3

80 60 40 20

20 40 60 80

0

100

eau

H 9 (SC N) ~ 109 (fl3/mole- 3 13)

Hg (SCN) 2-

14.4_+0.3 14.7 4- 0.2 15.0_+0.3 16.2_+0.3

18.45+0.30 18.30+0.50" 17.26+0.64 17.70___0.54 non d6terminable non d6terminable

17.7_+0.2

non d6terminable

15.2+_0.3

18.0+_0.3

20.54+0.33 20.13±0.25" 19.52+0.12 19.65+0.30 21.13+0.06 22.71 + 0.25 ~25.20+0.20 ' 25.13~0.17" 20.0_+ 0.2

log (fl4/mole- 4 p)

* R6sultats obtenus par polarographie anodique; les autres sont d6duits des mesures potentiom6triques.

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COMPLEXESH g n - s c N - PANS N M A ~T D M F

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(d) Les constantes de formation du complexe Hg(SCN)2 ont 6t6 ensuite d6duites des courbes de titrages potentiom6triques, en tenant compte, pour l'interpr6tation de la partie situ6e au-del~t du point 6quivalent, de l'existence simultan6e des trois complexes. La constante de formation/34 de [Hg(SCN)4] 2-, et dans certains cas celle /33 de [Hg(SCN)3 ] -, ayant 6t6 d6termin6es pr6c6demment, il devient facile d'obtenir la constante de formation/32 de Hg(SCN)2. f12 et/33 peuvent aussi atre d6duites simultan6ment de la courbe de titrage par r6solution math6matique (au moyen d'un calculateur EMD-848) d'une 6quation du 46me degr6, par it6ration. L'ensemble des valeurs obtenues pour les constantes globales de formation des complexes, Hg(SCN)/(/32), [Hg(SCN)3]- (/~3) et [Hg(SCN)4] 2- (/34), est report6 dans le Tableau 2. Le calcul des diagrammes de r6partition de ces diff6rents complexes en fonction de log [SCN-[,/t partir de ces valeurs, montre que le complexe interm6diaire, [Hg(SCN)3] -, n'existe jamais seul et ne pr6domine que dans un domaine restreint de ISCN-I,/t la fois dans le NMA et en solution aqueuse; il disparalt, m6me, pratiquement, dans les m61anges N M A - D M F / ~ partir d'une proportion suffisante de DMF. Technique expOrimentale 1. Purification des solvants. Les impuret6s pr6sentes dans le N-m6thylac6tamide commercial sont la m6thylamine, l'acide ac6tique et l'eau. La purification consiste ~t neutraliser successivement chacune d'elles, respectivement, par l'acide sulfurique (1%), le carbonate de potassium (2%) et l'oxyde de calcium (1%). Chacune de ces neutralisations est suivie d'une distillation sous vide (point d'6bullition du NMA sous une pression de 3 mm de mercure: 74°C). La temp6rature du bouilleur ne doit pas d6passer 130°C pour 6viter toute d6composition du produit. Le r6frig6rant et le ballon dans lequel est recueilli le distillat sont maintenus fi une temp6rature 16g6rement sup6rieure fi 30°C, ce qui 6vite la cristallisation du NMA au cours des op6rations. Le solvant ainsi purifi6 a 6t6 conserv6 dans des flacons opaques contenant 10 g de tamis mol6culaire par litre de solvant. La puret6 et la qualit6 du produit au moment de son utilisation ont 6t6 contr616es : (a) Par une d&ermination de la variation du courant r6siduel en fonction du potentiel de l'61ectrode fi gouttes de mercure. Ceci indique la pr6sence ou l'absence de m6thylamine ou d'acide ac6tique. Dans les conditions des essais, l'absence de vague d'oxydation (m6thylamine) ou de r6duction (acide ac6tique) correspond/t une concentration d'impuret6s inf6rieure a 10 -4 M. (b) Par un titragede l'eau par la m6thode de Karl-Fischer, le r6actif (iode) 6tant introduit par coulom6trie/~ intensit6 constante. La teneur en eau du solvant distill6 utilis6 a toujours 6t6 inf~rieure ~ 5- 10- 3 M. Le N,N-dim6thylformamide, produit Merck "pour synth6se" (teneur en eau inf6rieure fi 0.1%) a 6t6 purifi6 par simple distillation. Apr6s cette op6ration, le produit ne pr6sentait plus qu'une teneur en eau inf6rieure ~t 5-10- 3 M. La puret6 a 6t6 contr616e comme celle du NMA. 2. Instrumentation. Pour le trac6 des courbes intensit6-potentiel, nous avons utilis6 un polarographe Tacussel, mod61e PR 61 (montage potentiostatique fi trois 61ectrodes). L'61ectrode de comparaison a 6t6 constitu6e d'un fil d'argent en spirale, recouJ. Electroartal. Chem., 22 (1969) 253~63

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A.E. PUCCI, J. VEDEL, B. TRI~MILLON

vert d'un film de chlorure d'argent par anodisation dans une solution de chlorure, ce fil plongeant dans un solvant identique ~t celui 6tudi6, satur6 de chlorure d'argent et de chlorure de potassium. Le compartiment de cette 61ectrode a 6t6 reli6 ~t la cellule principale par l'interm6diaire d'un autre compartiment contenant une solution de EtgNC10 4 0.1 M, afin d'6viter toute diffusion ou migration de chlorure dans la cellule principale. DISCUSSION ET CONCLUSIONS La premi6re conclusion/t tirer concerne la validit6 de l'hypoth6se initiale sur une 6ventuelle invariabilit6 de la solvatation dans les m61anges N M A - D M F . Les valeurs de la grandeur Rg pour les cations Ag +, Hg 2 + et H +, tir6es des d6terminations de potentiels normaux report6s Tableau 1, sont donn6es dans le Tableau 3. Dans la mesure off est valable l'hypoth6se que la mol6cule de ferroc6ne et le cation ferricinium sont eux-m6mes solvatbs de faqon identique, ces valeurs sont voisines de - l o g F et donnent une 6valuation approximative des coefficients de solvatation des cations envisag6s. I1 apparaR ainsi que ces trois cations sont nettement plus fortement solvat6s par les m61anges N M A - D M F que par l'eau (dans l'ordre, Hg 2+ > H + > A g +) et que notre hypoth6se est v6rifi6e d'une faqon assez satisfaisante, surtout pour les m61anges interm6diaires, de 4 0 - 8 0 ~ de NMA. TABLEAU 3 COEFFIC~NTSDESOLVATATIONDESCATIONSAg+,Hg2+ETH+DANSLESM~ANGEsNMA-DMF(+Et4NCI04 0.1 M) )~ 40°C Valeurs de R~ - log F pour:

Ag + Hg2+ H+

~ en poids de N M A :

100

80

60

40

20

0

4.47 9.20 5.51

4.16 8.80 5.14

4.27 8.95 5.14

4.08 8.78 4.89

3.74 8.36 4.76

3.31 7.74

Dans le cas du proton, ce r6sultat signifie que les m61anges N M A - D M F sont plus basiques que l'eau et de basicit6s ~t peu pr6s identiques quelles que soient les proportions des deux amides. Le d6calage d'6chelles de p H des solutions aqueuses aux solutions dans les m61anges est approximativement de 5 unit6s ( c f ref. 3 pour le cas de l'ac6tamide/t 98°C). Pour l'anion S C N - , nous ne pouvons calculer qu'une seule valeur de R ° (SCN -), dans le N M A pur, le seul des milieux envisag6s off le produit de solubilit6 de A g S C N a pu &re d6termin6. On obtient R ° ( S C N ) = - 6 . 9 7 ~ - - l o g FscN-. L'anion S C N serait ainsi, au contraire des cations, beauc0up moins solvat6 par les amides que par l'eau; c'est un fait qui a d6j~t 6t6 observ6, n o t a m m e n t pour d'autres anions c o m m e les halog6nures 7'1°. C'est ~ cet effet contraire de solvatation pour cation et anion que l'on peut principalement attribuer le fait que les stabilit6s des complexes m e r c u r ~ thiocyanates ne sont pas tr6s diff6rentes en solution dans les m61anges N M A - D M F (surtout ceux de constantes di61ectriques voisines de celle de l'eau) et en solution aqueuse. J. Electroanal. Chem., 22 (1969) 253-263

COMVLEX]~S H g n - S C N - DAYS N M A ET D M F

261

Les variations du logarithme des constantes de formation que nous avons pu d6terminer, en fonction de l'inverse de la constante di61ectrique du solvant, sont reproduites Fig. 4. On peut constater que cette variation n'est sensiblement lin6aire que pour les m61anges riches en D M F , et l'on observe un minimum de stabilit6 dans un m6lange contenant approximativement 2 5 ~ de D M F . Remarquons au passage que/~4 pr6sente la m6me valeur qu'en solution aqueuse pour un m61ange ayant sensiblement la mame constante di61ectrique que l'eau, mais il ne peut s'agir que d'une coincidence fortuite.

o

4

I

e~2_~

A log ,84 . /Allog,8 " - . ~

NMA

1 (1420)

2

i

DMF 3

loo/e

Fig. 4. Variations en fonction de l'inverse de la constante di61ectrique, s, de la diff&ence de stabilit~ des complexes mercuri-thiocyanates dans les m61angesNMA DMF(S) et en solution aqueuse. Force ionique #=0.1 et temp. 40°C. L'existence du minimum de stabilit6 peut certainement ~tre interpr&6e par l'influence de la variation, avec les proportions des constituants du solvant, de la solvatation de l'anion S C N - , que l'on peut expliquer de la faqon suivante. I1 est &abli 1t,l 2 que la valeur 61ev& de la constante di61ectrique du N M A est due/t la formation de liaisons hydrog6ne associant les mol6cules de solvant en polym6re lin6aire liquide; les deux groupements m6thyle se trouvent alors en position trans. Au contraire, le D M F , dont les atomes d'hydrog6ne ne peuvent donner naissance/a de telles associations, reste monom6re et pr6sente de ce fait une constante di61ectrique beaucoup plus faible. Les r6sultats de Dawson et Wharton 13 montrent qu'il suffit de peu de D M F ajout6 au N M A pour provoquer une importante diminution de la constante di61ectrique, ce qui est l'indication d'une rupture des chaines de polym6re par l'insertion des mol6cules monom6res de D M F . Or, on peut admettre avec Parker 14 que, dans les solvants protoniques c o m m e le N M A , la solvatation des anions comporte une importante contribution de la liaison hydrog6ne entre les mol&ules de solvant et l'anion dissous. On peut alors supposer que l'effet "d6structurant" du D M F ajout6 au N M A renforce le pouvoir de liaison hydrog6ne de ce dernier et augmente par cons6quent la solvatation de l'anion S C N - . D'oia la diminution de stabilit6 des complexes mercurithiocyanates, par rapport au N M A pur, lorsque le pourcentage de D M F augmente. Le minimum de stabilit6 correspond/t l'effet, en sens oppos6, de la diminution de consJ. Electroanal. Chem., 22 (1969)253-263

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tante di61ectrique qui provoque une stabilisation des complexes. Lorsque la proportion de DMF est suffisamment grande, la solvatation de SCN- doit devenir sensiblement invariable et les modifications de log fl ne correspondent plus alors qu'fi l'influence des variations de constante di61ectrique e; c'est pourquoi, semble-t-il, nous avons pu observer les variations lin6aires de log fl en fonction de 1/e. En conclusion, l'hypoth6se effectu6e sur la possibilit6 d'obtention d'une solvatation invariable en utilisant des m61anges de deux amides isom6res s'est av6r6e convenablement v6rifi6e pour les cations mais non pour les anions. Dans le cas de ces derniers, l'intervention des liaisons hydrog6ne dans la solvatation apporte une influence importante de la structure m~me du solvant. Cet effet est vraisemblablement responsable d'autres minimums ou maximums de constantes d'6quilibre, notamment de couples acide-base, qui ont pu ~tre observ6s/~ plusieurs reprises, dans les m61anges NMA-eau 4 et aussi dans divers m61anges hydro-organiques. I1 est indubitable qu'une meilleure compr6hension de l'influence du solvant sur la stabilit6 des compos6s dissous, acides ou complexes, sera atteinte grace ~tl'6tude de l'influence de la structure du solvant sur la solvatation des ions. REMERCIEMENTS

A. E. Pucci tient ~t exprimer ses remerciements h la Commission Spgciale des Sciences Agricoles de l'Universit6 du Sud de Bahia Blanca, R6publique Argentine, qui lui a donn6 la possibilit6 d'effectuer ce travail. Rt~SUMI5

Les coefficients de solvatation des cations Ag +, Hg 2+, H +, dans les m61anges N-m6thylac6tamide + N,N-dim6thylformamide ont 6t6 6valu6s ~tpartir de mesures de potentiels normaux et en supposant l'invariabilit6 du potentiel du couple ferroc6necation ferricinium. I1 a 6t6 montr6 que la solvatation de ces cations, plus 6nergique qu'en solution aqueuse, reste h peu pr6s inchang6e quand la proportion des deux amides isom6res varie. Les constantes de formation des complexes mercuri-thiocyahates dans ces m61anges ont 6t6 6galement d6termin6es par mesures potentiom6triques et par polarographie anodique. La stabilit6 de ces complexes Hg(SCN)2 , [Hg(SCN)3]- et [Hg(SCN)4] 2- passe par un minimum pour un m61ange voisin de NMA 75~ × DMF 2 5 ~ (en poids). Ce minimum est interpr&6 par l'effet d'une augmentation de la solvatation de l'anion thiocyanate lorsque du DMF est ajout6 au NMA, brisant la structure de polym6re lin6aire par liaisons hydrog6ne de ce dernier. Dans les m61anges riches en DMF, le logarithme des constantes de formation augmente sensiblement lin6airement en fonction de l'inverse de la constante di61ectrique. SUMMARY

The solvation coefficients of Ag +, Hg 2+ and H + in N M A - D M F mixtures were determined by formal potential measurements, the potential of the ferroceneferricinium couple being assumed constant. The solvation of these cations, stronger than in aqueous solutions, has been found to remain approximately unchanged as the proportion of the two isomeric amides is varied. The formation constants of the J. Electroanal. Chem., 22 (1969) 253-263

COMPLEXESHg~I-SCN - DANS NMA ET DMF

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mercury(II)-thiocyanate complexes in these mixtures have been determined by potentiometric measurements and also by anodic polarography. The stability of the complexes is minimum for a mixture of approximately 7 5 ~ NMA and 2 5 ~ (by weight) DMF. This minimum is interpreted by the effect of an increase in the solvation of the thiocyanate anion when DMF is added to NMA, so breaking the structure of the linear polymer (due to hydrogen bonds) of the latter. In mixtures of high DMF content, the logarithm of the formation constants is approximately directly proportional to the inverse of the dielectric constant. RI~F]~RENCES 1 I.M. KOLTHOFFET S. BRUCKENSTEIN,Acid Base Equilibria in Non-Aqueous Solutions, dans T r e a t i s e o n Analytical Chemistry, I. M. KOLTnOFF ET P. J. ELVING 6d., Part I, Vol. 1, Interscience Publ. Inc., New-York, 1959, chap. 13. 2 J. C. TOULLER, M. GRALL, M. BIGOISET B. TREMILLON, Bull. Soc. Chim. France, (1965) 1853. 3 S. GUIOT ET B. TRI~MILLON,J. Electroanal. Chem., 18 (1968) 261. 4 R. REYNAUD, Bull. Soc. Chim. France, (1968) 3945. 5 H. M. KOEPP, H. WENDT ET H. STREHLOW, Z. Elektrochem., 64 (1960) 483. 6 J. VEDEL, Ann. Chim. Paris, (1967) 335. 7 C. BARRAQU~,J. VEDELET B. TR~MILLON, Bull. Soc. Chim. France, (1968) 3421. 8 I. M. KOLTnOFF ET F. G. TIJOUAS, J. Phys. Chem., 69 (1965) 3049. 9 J. K. GORMAN, Th6se, Univ. Micr. 58-7254; Dissertation Abstr., 19 (1959) 1930. 10 S. GUIOT, Ann. Chim. Paris, (1969), h paraitre. 11 S. MIZUSHrMA,J. Am. Chem. Sot., 72 (1950) 3490. 12 G. R. LEADERET J. F. GORMLEY,J. Am. Chem. Sot., 73 (1951) 573. 13 L. R. DAWSONET W. W.WHARTON, J. Electroehem. Sot., 107 (1960) 710. 14 A. J. PARKER, Quart. Rev. (London), 16 (1962) 163.

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