Science & Sports 1997; 12: 19-25 0 Elsevier, Paris
Article original
Sport et axe gonadotrope fbminin P Lefebvrel, 2, J Bringer2, A Orsetti’ ‘Service d’exploration physiologique des hormones hipital Lapeyronie, 371, avenue du Doyen-G-Giraud, (Rey
le 13 dtcembre
1996 ; accept6 le 16 janvier
et des mttaholismes. 34295 Montpellier
‘service d’mdr~cl.inologie. cede.\-, France
1997)
RBsum6 - De nombreux travaux ont mis en evidence I’impact negatif que pouvait avoir le sport sur I’axe gonadotrope feminin. Les manifestations sont variables : selon le degre d’atteinte de I’axe gonadotrope I’expression peut etre clinique (amenorrhee...), mais parfois seules les explorations endocriniennes mettent en evidence des anomalies. Les mecanismes qui expliquent cette inhibition gonadotrope commencent a etre mieux connus. L’inhibition est secondaire aux perturbations de la secretion pulsatile de GnRH. Les differentes caracteristiques du sport, mais egalement I’etat nutritionnel et I’alimentation des sportives, apparaissent comme des facteurs determinants et seront discutes. La pratique du sport dans certaines conditions et chez certaines femmes peut conduire a des consequences non negligeables, par I’intermediaire des perturbations de I’axe gonadotrope, comme I’infertilite mais aussi I’osteoporose ou les modifications des parametres lipidiques (facteur de risque des maladies cardiovasculaires). Le sport apparait seulement comme un des facteurs parmi les facteurs environnementaux qui peuvent etre responsables des perturbations de I’axe gonadotrope observees chez la femme sportive. sport / femme /axe gonadotrope
/ amenorrhee
/ GnRH / infertilite / ostkoporose
/ lipides
Summary - Exercise and female gonadotrop axis. Evidence for an adverse impact of sports on female pituitary-gonadal axis has been provided by many studies. Clinical manifestations are variable according to the extent of involvement of pituitary-hypophysial axis, with sometimes obvious symptoms (eg, amenorrhea) and most frequently abnormalities that could be detected only by sophisticated endocrinological testing. Mechanisms responsible for this inhibition ofpituitary-gonadal axis are better understood. Inhibition results from disturbances in the pulsatile pattern of GnRH release. Exercise characteristics as well as nutritional status appear to be major factors in this process and are discussed here. Exercising in some conditions for some women can lead via hypothalamo-pituitary disturbances to major effects such as sterility, osteoporosis, or abnormalities of blood lipids, ie, a risk factor for cardiovascular diseases. Sport appears to be only one factor among several that can induce hypothalamo-pituitary disturbances in exercising women. sports I woman / pituitary-gonadal lipids
axis I amenorrhea
/ GnRH I sterility / osteoporosis
I
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P Lefebvre
et al
Stress
Alimentation
Facteurs environnementaux + Dopamine Neuromkdiateurs centraux
Hypothalamus
i Hypophyse
Melatonine
ZZritionnel CRF Opidides
1
‘1
u
Ovaires
EpinCphrine
p
+-
St&oides ovariens Estradiol Progest&one
Fig I, Axe gonadotrope.
Durant les 15 demieres annees, la popularitt de l’exercite physique et notamment des sports d’endurance comme le marathon ont permis la reconnaissance des effets deleteres possibles du sport sur la fonction de reproduction. L’influence du sport sur l’axe gonadique feminin est soulignee par les exemples caricaturaux de l’ambnorrhee des marathoniennes [22] ou l’absence de developpement des caracteres sexuels secondaires de certaines gymnastes ou danseuses [20]. Les determnants de I’inhibition de l’axe gonadotrope sous l’influence du sport commencent a etre mieux connus. Les caracteristiques du sport ainsi que les autres facteurs environnementaux [4,5] qui contribuent a cette inhibition peuvent &tre precises. La relation causale de cette association reste difficile a quantifier dans la mesure ou de nombreux parametres interviennent. Ainsi, le type de sport, sa duree, son intensite, la composition corporelle mais aussi l’alimentation et les facteurs psychologiques comme le stress participent a cet effet et sont des facteurs confondants.
RAPPEL SUR LA PHYSIOLOGIE DE L’AXE GONADOTROPE FfZMININ L’axe gonadotrope (fig 1) est probablement l’axe dont
t nn
uu
Peptides ovariens Activine Inhibine
la physiologie est la plus complexe et qui est le plus rapidement atteint lors de pathologies organiques hypothalamohypophysaires ou sous l’influence de facteurs environnementaux comme le stress, la nutrition ou le sport. Un decapeptide, le GnRH, est secrete physiologiquement par le noyau ArquC hypothalamique dans le sang Porte hypothalamohypophysaire. Des recepteurs specifiques au GnRH se trouvent sur les cellules gonadotropes hypophysaires, qui stimulees par le GnRH synthetisent et secretant les gonadotrophines LH et FSH. La secretion de GnRH est pulsatile et cette pulsatilitt influence la synthese et la secretion des sous-unites des gonadotrophines. Une secretion pulsatile toutes les 90 minutes entraine une stimulation de la secretion de LH et de FSH, alors qu’une secretion beaucoup plus lente ou permanente de GnRH conduit a une inhibition de cette secretion. La regulation de la secretion du GnRH est complexe [ 121 et fait intervenir des neuromediateurs centraux (epinephrine, dopamine, opioi’des...), mais Cgalement des phenomenes peripheriques comme le rCtrocontri3le par les stero’ides (estradiol, progesterone) ou les peptides (inhibine, activine) d’origine gonadiques. Le metabolisme Cnergetique semble Cgalement impliqd dans cette regulation.
Sport et axe gonadotrope
PERTURBATIONS DE L’AXE GONADOTROPE PAR LE SPORT Expression
clinique
Les modifications de l’activite gonadotrope induites par le sport peuvent se presenter sous differents aspects et elles ont Ctt d&rites dans de nombreux sports comme les courses de fond ou demi-fond, la natation, la danse ou des sports d’equipes. Une inhibition totale de I’axe va s’exprimer chez la femme adulte par un tableau d’amenorrhee, avec parfois une reduction de certains caracteres sexuels secondaires (hypomastie). L’amenorrhte des athletes a une prevalence de 1 a 43 % comparee a celle de 2 a 5 % observee dans la population genetale [29]. Cette grande variabilitt s’explique par des problemes methodologiques (definition de la duree de l’amtnorrhee, exclusion des autres facteurs, type de sport...). Une spaniomenorrhee (cycles longs) ou des cycles de duree normale mais anovulatoires peuvent Ctre le resultat d’une inhibition transitoire plus ou moins marquee de l’axe gonadotrope. Ainsi, une phase luteale courte, une insuffisance luteale ou une anovulation peuvent coexister avec des cycles de duree normale et n’etre diagnostiques que par des explorations complementaires specifiques. Une infertilite d’origine dysovulatoire peut etre le seul stigmate clinique de la perturbation de cet axe. Chez l’adolescente, un retard du developpement des caracteres sexuels secondaires (souvent associe dans ce cas a un retard staturopondtral) ou une amenorrhee primaire peuvent traduire ce deficit [20]. I1 est a noter que ces manifestations cliniques resultent d’etudes d’observations transversales, d’etudes cas-temoins et que les etudes prospectives en ce domaine sont tares [7, 33, 341. Ces demieres ne confirment pas l’importance de ces manifestations cliniques lorsque seul le facteur sport est analyse et pas les autres facteurs confondants sur lesquels nous reviendront. Expression
hormonale
De nombreuses anomalies hormonales ont tte d&rites [l, 3,9, 13: 14, 19,27,41] de faGon isoltes ou associees (tableau I). Une diminution de la pulsatilite de LH est mise en evidence chez les patientes en amenorrhee, mais tgalement chez des sportives sans troubles du cycle apparent [ 141. Chez les patientes en amenotrhee, on observe habituellement une baisse plus marquee de la LH et une FSH normale ou basse. En cas d’inhibition plus severe, les deux gonadotrophines sont effondrees, mais ce tableau doit d’abord faire Cvoquer une pathologie organique
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fkminin
Tableau sportive.
I. Facteurs favorisant
Type de spar, Intensitk de I’exercice Le jeune Ige Existence de troubles &tat nutritionnel Alimentation
les troubles du cycle chez la femme
du cycle ant&ieurs
et faire realiser une imagerie hypothalamohypophysaire. En cas d’amenorrhee hypothalamique fonctionnelle, la realisation d’un test de stimulation par une injection intraveineuse de GnRH montre une elevation des gonadotrophines. Dans certaines formes s&&es, seule I’administration prolongee et pulsatile de GnRH permettra une elevation des gonadotrophines. L’absence de pit ovulatoire de LH ou une diminution de la reactivite hypophysaire au GnRH a CtC trouve. Dans les formes s&&es, le taux d’estradiol plasmatique est effondre. Darts certains cas l’atteinte de l’axe gonadotrope ne va s’exprimer que par des cycles anovulatoires, avec un taux normal d’estradiol mais une absence d’elevation de la progesterone en deuxieme partie de cycle, ce qui donne alors un tableau d’hyperestrogenie relative. Une hypoprolactinemie [29] accompagne habituellement le tableau hormonal de l’amenorrhee hypothalamique ainsi qu’une activation de l’axe corticotrope [ 16, 30,431. Certaines sportives presentent un autre type d’anovulation qui rentre darts le cadre du syndrome des ovaires polykystiques [lo] et elles presentent alors un tableau d’hyperandrogenie ovarienne fonctionnelle (augmentation de la testosterone et ou de la delta 4 androstenedione, elevation de LH). 11 semble plus s’agir d’une association fortuite (le syndrome des ovaires polykystiques touche environ 5 % des femmes en p&ode d’activite genitale) que d’une relation causale avec l’activitC sportive. MCcanismes
de l’inhibition
gonadotrope
Si le point d’impact hypothalamique est acquis dans l’inhibition de l’axe gonadotrope par le sport [30, 421, ses modalitts sont plus discutees [23]. Anomalies de l’axe corticotrope et du syst2me opioi’dergique Des anomalies de l’axe corticotrope et du systeme opioi’dergique central peuvent etre en cause. Une augmentation de l’activid opioydergique induite par le
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et al
sport peut inhiber la secretion hypothalamique de GnRH. Cette inhibition peut &tre soit directe (connexion des neurones opioi’des avec les neurones a GnRH) soit par l’intermtdiaire de la dopamine. La restauration d’une activite gonadotrope par l’utilisation d’antagoniste des opioi’des (naloxone) plaide pour l’hypothese opididergique [45]. Cependant, les resultats positifs obtenus specifiquement chez les femmes sportives sont r-ares et non randomises. De plus, certains auteurs contestent l’efficacitt des antagonistes des opio’ides dans ces cas d’amenorrhee hypothalamique fonctionnelle [ 111. L’exercice et le stress induisent une activation de l’axe corticotrope [ 16, 431. Chez le rat, l’injection intraventriculaire de CRH diminue la secretion de LH, et la liberation hypothalamique de GnRH et des anticorps anti-CRH bloquent l’inhibition de LH induite par le stress [33, 341. Le CRH peut tgalement agir indirectement par la voie des endorphines d’origine hypophysaire (pro-0piomClanocortine).
[16]. Sur le plan epidemiologique, les exemples sont nombreux ou la carence Cnergetique (famine, guerre..) est associte a une baisse de la fecondite. D’un point de vue experimental, la synthese de certains neuromtdiateurs centraux est en partie sous la dtpendance du metabolisme Cnergetique. Ainsi, l’insuline regule l’expression du gene du neuropeptide Y (NPY) qui intervient dans la prise alimentaire mais Cgalement dans la regulation du GnRH [37]. Chez le hamster, l’activitt physique ne trouble pas l’ovulation sauf si elle est associee a une carence Cnergttique [35]. Des resultats similaires sont trouves chez les primates [8]. Des correlations positives ont Ctt trouvees entre le metabolisme de base et la secretion des gonadotrophines [26] dans l’esptce humaine.
R&e de la prolactine Le role de la prolactine est Cgalement discute dans la genese des troubles du cycle de la sportive [9]. Si l’exercice physique, comme le stress, peut induire une elevation de la prolactine qui peut inhiber l’axe gonadotrope, de nombreuses etudes n’ont pas montre d’augmentation de la prolactine chez les sportives en amenorrhee [30]. 11convient probablement de distinguer, l’hyperprolactintmie transitoire induite par le sport, et qui peut conduire a une dysovulation sans amenorrhee, du tableau d’amenorrhee hypothalamique fonctionnelle qui s’accompagne habituellement au contraire d’une hypoprolactidmie. Dans le premier cas, la prolactine peut etre en cause, dans le second cas l’hypoprolactintmie est la consequence de l’hypoestrogtnie et d’une stimulation du systeme dopaminergique central.
La litterature medicale est riche en travaux ayant etudie l’impact du sport SLITl’axe gonadotrope, et les resultats sont parfois discordants. I1 convient cependant de noter la diversite des modalids d’etudes et des sujets Ctudies. De plus, la majorite desetudesconsacreesa ce theme sont des etudesretrospectives qui peuvent comporter plusieursbiais.
Augmentation de la me’latonine Une augmentation de la melatonine se produit lors de l’exercice physique, et les sportives en amenorrhee presentent une elevation plus importante de la melatonine durant la nuit que les sportives reglees [25]. Cette melatonine est impliqute chez les animaux dans la regulation du cycle de reproduction ou l’on observe une diminution des taux de gonadotrophines en cas d’hypermelatoninemie durant les periodes de faible exposition solaire. Rbgulation e’nergtftique L’hypothese d’une regulation Cnergetique de la secretion du GnRH est Ctayee par plusieurs types d’arguments
QUELS SONT LES FACTEURS QUI CONTRIBUENT A L’ATTEINTE DE L’AXE GONADOTROPE INDUITE PAR LE SPORT ?
Le sport en lui m@me Une standardisationdu type d’entrainement,de sonvolume et de son intensite ajusteeaux capacitesdu sujet (seuil du lactate ou VOZ,,,J est requisepour analyser l’effet du sport sur l’axe gonadotrope[44]. 11existe peu d’etudeslongitudinales pour lesquelles les differentes phasesdu cycle menstruelont &tCCvaluees avant et apresentrainement.La plupart concernent peu de sujets,peu de dosageshormonaux et une periode relativement come d’entrainement (quelques semaines). Plusieursparametresde confusion existent et il apparait important de les distinguer (tableau II). La prevalence de l’amenorrheedessportives, de 1 a 43 %, traduit l’impact des facteurs de confusion dans de nombreusesetudes[ 1,291. L’intensite’ de l’exercice physique L’intensid de l’exercice physique appara’itcomme un Clementimportant maispas toujours suffisant dans la genesedestroubles du cycle. De nombreux travaux ont trouve [ 18,281ou n’ont pastrouve [ 15,381de correlation entrela distanceparcourue(km/sem)ou lesperformances
Sport et axe gonadotrope Tableau observtis
II. Anamalies hormonales chez les sportives.
de l’axe gonadotrope
fkminin
23
f&Gin
Tableau III. Consitquences de I’axe gonadotrope.
nCfastes du sport intensif
par atteinte
Gonadotrophines Altkration de la pulsatilit6 de LH (phase folliculaire) Diminution des taux de LH et FSH (bioactivit6 et immunoactivik?) Diminution de LH et FSH normale Absence de pit de LR pr&ovulatoire Modification de la sensibiIid au G&H
Infertilit6 Ostkoporose Augmentation du risque vasculaire (troubles lipidiques) Pathologies mammaires ou utkrines bknignes
Hormones piriph&iques Hypoestrogtkie Diminution de la progestkmne Diminution de l’inhibine
pubertaire [2]. Dans son ktude chez les marathoniennes, Glass et al ne retrouvent pas de diffkrence significative dans 1’Lge de la menarche entre les athlktes amCnorrhCiques et eumCnorrh&ques. Des probkmes dans la dCfinition de la mtkarche (5ge osseux ou dge chronologique ?), dans les biais des Ctudes rktrospectives, ne permettent pas de conclure formellement. Si les athlktes ont un Ige moyen de mknarche plus 6levC que les nonathl&tes dans de nombreuses Ctudes [18,20], le r8le du sport comme seul facteur intervenant n’est pas dCmontrk. En effet, une maturation retardt5e s’accompagne d’une croissance des OS longs plus importante et peut favoriser la performance sportive, ce qui incite ces jeunes filles & continuer le sport alors que celles a maturation plus rapide, moins performantes, a&tent la pratique sportive. Ainsi, des &udes rktrospectives peuvent montrer une diffkrence dans l’bge de la mknarche de ces deux groupes. Les sujets jeunes apparaissent avoir un axe gonadotrope plus sensible aux facteurs environnementaux. Cette immaturitk de I’axe gonadotrope est un phCnom&e physiologique a la pubertk, qui peut Etre accent& par une activitk physique mais aussi par une alimentation mal adaptee.
obtenues (temps au marathon) et la frkquence des troubles des rkgles. Des etudes physiologiques ont cherchk B mettre en Cvidence des corklations entre le seuil lactique et les taux de gonadotrophines [ 191. Dans une ktude prospective rkcente, Rogol et al [33,34], ont suivis pendant 12 B 14 mois des jeunes femmes kdentaires eumCnonhCiques qu’ils ont soumis B un entrainement en de@ ou au-de18 du seuil des lactates. Dans cette &tude, aucun des groupes Cvaluts n’a prksentk de troubles majeurs du cycle. Seules des anomalies de la phase luteale (plus courte) ont CtC observkes dans le groupe ayant un entrafnement au-de18 du seuil des lactates. 11n’y avait pas de modification significative des gonadotrophines mais seulement une diminution de la pulsatilitk de LH sur 24 heures dans le groupe entrain& au-dessus du seuil des lactates. A l’inverse, un effort physique important (10 miles par jour) sur une p&ode courte (1 mois) chez des femmes non entrain&es et habituellement normalement r& glCes induit une abolition du pit de LH et de l’ovulation chez une grande proportion des sujets CtudiCs (8 1 % de dkficience luttale et 63 % d’anovulation) [7]. Le type de sport Les sports d’endurance et les sports portant (marathon) apparaissent plus propices 5 l’kmergence de trouble du cycle que les sports port& (natation).
L’existence de troubles du cycle ant&ieurs A la pratique sportive Quelques ttudes ont trouvC une augmentation chez les sportives amCnorrhCiques de troubles du cycle ant& rieurs g la pratique sportive [36, 381. Ce facteur doit Cgalement Etre pris en compte dans la mesure oti il rkvkle une predisposition a l’kmergence ou B I’aggravation par le sport de ces troubles.
Le jeune Ige Le stress L’impact du sport sur l’gge de la mCnarche n’est pas compl?tement rCsolu compte tenu de l’absence de donn&es prospectives et randomiskes sur ce sujet. Quand le sport est commenc6 avant la m&narche, comme chez les gymnastes ou les danseuses, des Ctudes [20] ont trouvt que l’sge de la mknarche peut Ctre retard6 de plusieurs an&es. Cependant, si cette activitb physique est infkrieure g 20 heures par semaine, il n’y a pas de retard
Alors que le sport est considkrk gtnCralement comme un moyen de diminuer son stress et son anxi&, dans certains cas, et en particulier chez les personnalitks obsessionnelles ayant un objectif sportif, le sport peut aggraver cet Ctat de stress. Ainsi, Schwartz et al ont montrC que les athlktes amknorrhkiques pksentaient un &at de stress supkrieur aux athlktes euminorrhkques. Le
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P Lefebvre
stress est capable d’induire des modifications de l’axe gonadotrope au niveau central et peripherique via l’activation de l’axe corticotrope [32].
Les rkserves
CnergCtiques endoghes
Les modifications pond&ales mais aussi les anomalies de la composition corporelle peuvent affecter la fonction ovarienne [39] chez les athletes. Le role de la masse grasse ou du rapport masse grasse/masse maigre a CtC largement CtudiC comme facteur determinant de l’activite ovarienne [21]. 11a CtC suggere la necessite d’une masse grasse superieure a 22 % pour maintenir une activite ovarienne. Cette theorie de la masse grasse regulant l’activitt gonadotrope est cependant contesde. Chez l’animal, les exemples sont nombreux oti il n’existe pas de correlation entre la masse grasse et l’activite ovarienne. Dans l’espece humaine, les maigreurs constitutionnelles gardent une activite gonadotrope normale en depit d’un faible pourcentage de masse grasse. Les etudes chez l’animal et certaines donnees humaines plaident plus pour un role important de la balance Cnergetique dans la survenue d’une inhibition de l’axe gonadotrope. En cas de reserves Cnergetiques endogenes importantes (tissu adipeux), un exercice physique intense et prolong6 ne s’accompagne pas de troubles gonadiques, alors que chez le sujet a faibles reserves endogenes, le surcroit de depenses Cnergttiques occasionne par le sport, surtout s’il n’est pas compense par une alimentation suffisante, va entrainer un deficit energetique et plus regulibrement une perturbation de l’axe gonadotrope. Ainsi peut-on expliquer la frequence plus grande des troubles du cycle (40 a 50 %) chez les sportives a faible tissu adipeux comme les danseuses ou marathoniennes. A l’inverse, les nageuses, mCme en cas d’entrainement intensif, ne presentent pas habituellement d’amenorrhee (15 %).
L’alimentation Le role de l’alimentation apparait Cgalement important [4, 51. Certains comportements alimentaires, conduisant a une selectivite alimentaire avec exclusion des graisses surtout d’origine animale, favorisent la survenue de troubles du cycle. La frequence des troubles du cycle est plus grande chez les vCg&ariennes [3 11. Une correction de l’alimentation est capable de reduire l’amenorrhee observee chez des athletes [ 171.
et al
CONShQUENCES DE L’AXE
DES PERTURBATIONS GONADOTROPE
Certains effets benefiques du sport ont CtC identifies comme la diminution des lipides, de l’insulinoresistance, des maladies cardiovasculaires, de la perte osseuse ou encore une baisse de l’incidence des cancers du sein. Cependant, ces benefices peuvent &tre modifies s’il existe une atteinte de l’axe gonadotrope associee a la pratique sportive. Une infertilite ou une diminution de la fertilite d’origine ovulatoire peut &tre observee. Cette infertilite est habituellement reversible avec une diminution de la charge d’exercice ou avec une alimentation mieux adaptee [17]. En fonction du degre d’atteinte de cet axe, on peut observer soit une hypoestrogenie soit, au contraire, une hyperestrogenie relative par defaut de secretion en phase luteale de progesterone. Si l’activite physique reguliere augmente la masse osseuse, le sport intensif avec hypoestrogenie chronique entraine un dtfaut de trophicite osseuse et peut conduire a une osteoporose [40]. De meme la pratique sportive reguliere ameliore le profil lipidique avec une elevation du HDL cholesterol et une diminution du LDL cholesterol. En revanche, la carence estrogenique va modifier le profil lipidique avec une augmentation du cholesterol total et du LDL cholesterol et une diminution du HDL cholesterol [24]. Ces modifications du profil lipidique dans un sens atherogene peuvent augmenter le risque cardiovasculaire. La balance entre les effets benntfiques du sport sur les parametres lipidiques et les effets nefastes de l’hypoestrogenie ne sont pas clairement CvaluCs. En cas d’hyperestrogenie relative, les organes-cibles comme la glande mammaire ou l’udrus vont Ctre stimules en permanence, et il peut en resulter une plus grande frequence de survenue de mastopathies benignes et d’hyperplasie de l’endometre. CONCLUSION Les exces dans l’entrainement ou les competitions peuvent conduire certaines sportives a presenter des troubles de l’axe gonadotrope. L’emergence de ces troubles sera d’autant plus frequente qu’il s’agit d’une sportive jeune, pratiquant intensement un sport qui ntcessite une masse grasse faible et qui aura une alimentation inadaptee a ses depenses energetiques. Les consequences de ces perturbations de l’axe gonadotrope ne sont pas negligeables et doivent inciter l’encadrement du sportif a la vigilance. Dans les situations a risque (danse, gymnastique, sport d’endurance...) une Cvaluation plus precise de ce parametre devrait &tre effect&e afin de sauvegarder les effets benefiques du sport sur la sand.
Sport et axe gonadotrope
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