J i-‘&,e
0 Eke&r,
i’rdh-drun
1999 ; 12 suppl
1 : 67-71
Paris
INFECTIONS
strategies et de dkpistage
de prhvention des infections
b, CMV $$-
6 CAN
F Daffos Service
de maternit
et de mbdecine
f&o/e,
L
I ensemble des communications prthkdentes sur le CMV montre la grande quantith d’interrogations qui persistent dans tous les domaines.
Les hesitations, les incertitudes et le manque d’information se concretisent en definitive dam la grande variete de strategies adoptees par les divers acteurs face au risque pCrinatal du CMV. L’ensemble des equipes est t&s loin du consensus et les pratiques dif%ent considerablement selon les regions et les hapitaux. Les raisons de ces disparites sont nombreuses et les explications financieres parfois avancees pour privikgier telle ou telle strategic ne seront pas abordees ici. Elles ne peuvent a mon sens &tre discutees de faGon pragmatique qu’apres avoir valid4 la reelle effkacitt de chacune des strategies en termes de Sante publique, ce qui est loin d’&re le cas aujourd’hui. Chacune des stratCgies que nous allons prCsenter a ses avantages et ses inconvenients et le choix de notre Cquipe repose plus sur une conception intellectuelle de la medecine que sur des arguments scientifiques statistiquement valid& et compktement document&. II nous semble evident que l’on ne peut envisager un traitement utile qu’aprb avoir porn? un pronostic precis, et que ce pronostic est evidemment impossible sans diagnostic prealable. C’est pourquoi la sequence diagnostic-pronosticJOURNAL
DE PtDlATRlE
ET DE PUkKULTURE
SupplCment
n’ 1 - I939
institut
de pubricu/ture,
26,
bd Brune,
750
I4 Pork
traitement nous parait la seule logique m&me si, a ce jour, de multiples inconnues rendent cette demarche diffkile, incomplete et source d’angoisses. Elle ne permet de progresser que tres lencement au fil des annees et de I’experience mais elle a, en revanche, l’immense avantage d’eviter les effets des modes medicales et les pressions actuelles de toutes sortes qui aboutissent parfois a des errements de dizaines d’annCes, voire a des retours en arriere dans la connaissance.
kss stratbgies
de prkvention
prim&e
Elles comportent toutes les mesures destinees a kviter les infections maternelles a CMV L’excretion du virus ayant lieu sous forme de particules libres ou de cellules infect&es, c’est essentiellement par contacts directs (ou semi-directs : postillons) de proche en proche que se fera la propagation de la maladie. En outre, les consequences de l’infection a CMV dCpendent essentiellement de l’immunit6 cellulaire des sujets atteints. 11est possible d’envisager deux modes de prevention primaire.
la vaccination
anti-CM
C’est la prevention id&le en thtorie, mais nous sommes encore loin de son application pratique. 67s
11 est indiscutable qu’une immunisation A partir de vaccins vivants att&m& assure une rtponse humorale et cell&ire et reduit l’incidence de la maladie. Des essais cliniques ont deja ete conduits chez les transplant& et les immunodeprimes. Mais cette vaccination, si elle kvite la (( primo-infection sauvage)), n’empkhe pas les reinfections. Par ailleurs, la persistance dans l’organisme d’un virus, m&me attenut, constitue un risque de reactivation et un risque oncogene qui ont fait abandonner cette voie de recherche. La fabrication de vaccin issu du genie gtnetique est actuellement la voie privikgite et, si son effrcacite et son innocuite ttaient dtmontrtes, ce vaccin aurait sa place dans l’arsenal des vaccinations infantiles.
ler mesures
d’hygkne
DiffusCes sans discernement aupres de l’ensemble de la population, on peut craindre qu’elles n’aient aucun impact. En revanche, il semble qu’une information simple, precise et &rite, bien ciblee sur une population a risque ait un reel impact positif [ 11. l Les populations cibks sont : les greffes, les immunodeprimes d’origine acquise ou iatrogene (corticoi’des au long tours) ; les femmes susceptibles d’&tre enceintes, en particulier le personnel soignant des centres anticandreux, des services de gtriatrie, des services de soins palliatifs, des iaboratoires, des centres de transfusions et de dialyse, des maternitts, des services de pediatric ; mais encore le personnel feminin en contact avec les jeunes enfants: creches, pouponn&es, gardiennes d’enfants, PMI, CAMSP, ecoles maternelles, etc. l Les mesures d%lygiPne a prendre sont simples ; elles consistent a hiter les contacts essentiellement avec les particules salivaires et l’urine: lavage des mains frequent, eviter le partage entre individus des jouets, cuilltres, linge, etc. Port de gants pour les soins en collectivite et les changes de couches ou les toilettes. l Parmi les mesures professionnelles, le changement d’activite professionnelle des femmes enceintes travaillant a des postes exposes devrait pouvoir &tre favorise, de mCme que leur eviction professionnelle des zones 2. risques. Par ailleurs, tout le personnel feminin a risque devrait conna’itre son statut vis-a-vis du CMV et renouveler regulierement ses contrbles serologiques en cas d’absence d’immunisation. 68s
strategies de prbventions
secondaires
Elles consistent a reconnaJtre les fcetus infect& avant la naissance pour les traiter et prevenir l’apparition de sequelles, voire, dans les formes s&&es, tviter leur naissance par la rtalisation d’interruption de grossesse. La reconnaissance de ces fcetus infect& repose sur deux approches differentes.
I’approche une shlogie
prospective de dkbut
de grossesse
Faite dans l’ideal juste avant la conception, cette serologic permet de reconnaitre les 40 % de femmes s&onegatives. Elles subiront ensuite une serologic mensuelle dans le but de detecter biologiquement une stroconversion eventuelle, d’autant qu’on sait qu’elle est souvent inapparente ou non reconnue cliniquement. Comme pour la toxoplasmose, le meilleur rapport cofitleffkacitt de la surveillance prtnatale serait de ne rtaliser que trois serologies en tours de grossesse : - une avant la grossesse ou au dtbut de celle-ci ; - une au milieu de la grossesse vers 4 mois ; - une a l’accouchement. Cette attitude est suffisante pour depister toutes les seroconversions en reconnaissant celles de la premiere moitie de la grossesse de celles de la seconde moitie, dont le pronostic est difirent. En revanche, le c&e Nrituel )) de la strologie mensuelle a l’avantage de rentrer dans une routine qui tchappe moins souvent a l’attention. /u survei/hnce des femmes en d6but de grossesse
shopositives
Presque tous les auteurs s’accordent actuellement pour renoncer a depister les reinfections, qui sont cependant relativement frequentes. La difficultt de leur depistage strologique, la necessite qu’il y aurait alors a surveiller toutes les femmes enceintes, les risques fetaux nettement plus faibles en cas de reinfections maternelles ont abouti a ce consensus. 11 nous semble cependant que les enfants atteints d’infection congtnitale a CMV par reinfection maternelle devraient pouvoir &tre dtpistes simplement a la naissance par une recherche de CMV dans les urines des nouveau-n& de toutes les meres seropositives en debut de grossesse. JOURNAL
DE PkDlATRlE
ET DE PUkRlCULTURE
Supplhmcnt
no I -
1999
le diagnostic
prhwtal
11 est propose aux primo-infections pergravidiques, quel que soit leur terme, par recherche du virus dans le liquide amniotique par PCR et culture cellulaire. le pronostic
et ia conduite
ci tenir
[2]
11s vont dCpendre d’un grand nombre de paramktres complexes B Ctablir et c’est cette diffkultC qui est le principal argument des partisans de l’approche p&atale rCtrospective sur signes d’appel. Cependant, seule l’approche prospective permet d’ttablir un diagnostic avant que des signes anormaux soient apparus B l’khographie et que le pronostic soit d6ja compromis. l Le pronostic repose sur deux critkres majeurs : l’aspect Cchographique et son tvolution au tours de la grossesse, la pr&ence d’une fcetopathie s&&e A CMV r&&e par l’analyse de sang f&al. l La conduite A tenir ne doit pas B notre sens &tre ni stCr6otypCe ni psychorigide mais doit pouvoir &re adaptCe au cas par cas. Les paramttres influenqant la dkision sont : - le terme de l’infection ; - la prtsence de signes Cchographiques et/au biologiques de mauvais pronostic ; - le degre d’investissement ou de dtsinvestissement du couple pour la grossesse et ses capacitts de contrcile face A la peur du handicap. I1 faut garder B l’esprit que : - I’effet de balancier antiavortement actuel dans les pathologies pr&nataIes doit se garder d’aller aussi loin q&l a pu aller dans I’autre sens, il y a 15 ans, B l’kpoque oh toute stroconversion maternelle (A CMV, A toxoplasmose, B varicelle) subissait une interruption de grossesse sans beaucoup d’ttat d’hme de la part des m?mes praticiens, sans m&me connaitre le statut fcetal; - c’est en recueillant le maximum d’informations cliniques, biologiques, Cchographiques, etc., au tours de la surveillance prospective des infections congtnitales a CMV que l’on pourra, dans l’avenir, affker les conseils pronostiques que nous donnons 2 nos patientes et que nous pourrons s6lectionner correctement les fcetus susceptibles d’un traitement p&natal ; - le diagnostic prospectif est le seul moyen de reconnaitre in utero des foetus infect& dont les stquelles sont encore inexistantes ou inapparentes. 11 est probable que c’est ce groupe de population qui, dans l’avenir, sera justiciable d’un traitement postnatal (voire prdnatal) prtcoce et effkace. En effet, lorsque des signes tchographiques en particulier ctrCbraux sont prksents, il est sans doute illusoire, m2me aprts JOURNAL
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ET DE PUkRICULTURE
Suppkment
n’ 1 . 1999
traitement, d’esp&rer la disparition de stquelles d4jA installCes. Or, pour ne donner qu’un seul exemple, les consdquences en termes de de%-eloppement psychomoteur, langage, capaciti d’acquisition d’une surditt, sont totalement diffdrentes selon que le diagnostic a 6t6 pose prkocement ou non.
I’approche
rktrospective
Elle consiste A ne rCaliser un diagnostic p&natal d’infection B CMV qu’en presence de signes tchographiques kvocateurs de CMV congtnital, tels qu’ils ont et6 dkrits au tours des communications prktdentes. Elle peut &tre rtaliste egalement lors de la dtcouverte d’une skoconversion maternelle reconnue strologiquement A la suite d’une infection ORL ou d’un syndrome grippal suspect. Cette approche, certainement la plus (( rentable )) en termes de rapport cokleffkacitt, est aussi la plus simple en termes de management puisque le diagnostic est ktabli dans ce cas apds que des &ments pronostiques pejoratifs sont apparus, puisqu’ils sont 21 l’origine de la dtmarche mtdicale. Ainsi, le discours face aux parents est beaucoup plus aisC, voire univoque, et la conduite B tenir en est grandement simplifiCe. Mais cette approche a deux inconvtkients majeurs : elle laisse sur le bord du chemin tous les f&us infect& encore susceptibles d’&re surveillts et trait& avant l’apparition de &quelles, et elle ne permet aucun prog&s scientifique et mCdical sur l’tvolution de l’infection congtnitale g CMV et laissera nos colltgues et leurs patientes devant le m&me d&bat et les m&mes incertitudes dans 10 ans.
tiss stratbgies
de prbvention
tertiaire
Elles consistent A ne tenter d’identifier t& qu’apr&s leur naissance.
le diagnostic h CMV
des infections
les fetus
infec-
nkonatales
Leur reconnaissance par la presence d’une maladie des inclusions cytomdgaliques, d’un retard mental s&&e, de troubles sensoriels ou educatifs est dramatique car les traitements et les prises en charge ne peuvent @tre alors que palliatifs. 69s
AVANT LA GROSSESSE
PENDANT
Groupe a risque
Informations kites Hygiene %rologies regulieres (l/an ?) Serodiagnostic sysdmatique
LA GROSSESSE
en debut de grossesse
d NCgatif
\
t Surveillance mensuelle k Reste negatif
Signes d’appels tchographiques
\ seroconversion \ DIAGNOSTIC
J P&NATAL $ Positif
/ N$gatif
k
v
Bilan pronostique
Surveillance classique L IMG
APRi?S LA NAISSANCE
1 Recherche du CMV dans les urines
Positif
\
$ Anapath sptcialisCe obligatoire
r
Naissance
Ic Bilan pediatrique Immtdiat + suivi traitement
Recherche de CMV dans les urines J Positif
+ Negatif
$ Bilan + suivi traitement Figure
1. Stratigie
de prbvention
et dbpistage
des infections
b CAN.
la recherche systkmatique du CMV dons les urines des nouveau-n& 21 la naissance
en ne conservant de chacune d’elles que ses tltments d’efficacite maximale. Cette strategic est rCsumCe B lafigure 1.
Cette ddmarche a priori simple permet d’identifier trks tot les enfants paucisymptomatiques afin d’entamer une surveillance adaptee. Mais elle est saris intCr&t sur les infections graves et est inutile cbez les m&es s&on6gatives qu’il &&ait alors avoir pr&lablement reconnues. Elle serait en outre de peu dint&&t dam l’kablissement dun pronostic postnatal, dam la mesure oh la date de l’infection faetale pergravidique resterait inconnue et oh la notion de primo-infection ou de reinfection serait elle aussi impossible a ttablir retrospectivement.
avant
la grossesse
Des informations &rites et des regles d’hygitne seront etre donntes 21toutes les femmes enceintes ou susceptibles de I’Ctre et appartenant aux groupes a risques dkrits prectdemment. Des controles reguliers (annuels ?) du statut strologique des groupes B risques seront pratiquts.
en tours
strotkgie de prkvention et de dhpistage proposbe Elle consiste en une combinaison et une association des trois types de prevention precedemment d&rites
70s
de grossesse
On fera : - une serologic CMV avant ou au debut de la grossesse ; - une surveillance mensuelle des femmes seron4gatives et a&t de la surveillance chez les femmes immunistes. En cas de stroconversion, on r&lise : l
JOURNAL
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SupplCmcnt
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- un diagnostic prenatal sur liquide amniotique ; - un pronostic ttabli en fonction du terme, de la biologie sanguine fcetale, de l’tvolution tchographique fcetale (en particulier l’aspect et la croissance c&ebrale), de l’aspect du cerveau faetal en IRM a partir de 30 semaines. La conduite a tenir sera fonction du terme, des elements du pronostic, de l’attitude et de la demande des parents. . En cas d’interruption de grossesse, on &&se un bilan anatomopathologique complet, en particulier autopsie neurologique sptcialisee. l En cas de poursuite de la grossesse: une prise en charge neonatale immediate et sptcialisee, une kvaluation pronostique 21court terme, et pas d’acharnement thtrapeutique dam les cas de pronostic trts s&&e d’emblte.
apt&
DE PiDIATRIE
ET DE WCRICULTURE
Seule une strategic prospective globale peut permettre A mon sens de bien prendre en charge les grossesses actuelles et de progresser pour les grossesses futures sans risque d’erreur ou de retour en arriere dam la connaissance de l’histoire naturelle de l’infection congenitale a CMV. Cette attitude devrait permettre, dans un avenir que j’espere tres proche, de mieux stlectionner les f&us infect& mais encore bien portants akin de les traiter avant que des sequelles neurologiques ou sensorielles irrhersibles soienr deja installees.
dfkrences
la naissance
On recherchera la presence de CMV dans les urines des nouveau-n& des meres deja immunistes en debut de grossesse et done non surveilltes pendant celle-ci. En cas de presence de CMV dans les urines, on rklisera une surveillance psychomotrice et sensorielle jusqu’a l’&ge de 2 ans au moins.
JOURNAL
*nclusion
Suppkment
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1
Adler Se Finney JW, Manganello AM, Best AM. Prevention of child to mother transmission of CMV by changing behaviors: a randomized controlled trial. Pediatr lnfec Dis J 1996 ; 15 : 240-6
2
Jacquemard E Don&es pr&minaires CMV et perspectives de dbpistage maternof&ale ti CMV. Med Feet 1998 ; 35 : 14-8
du Groupe de I’infection Echo Gynkol
71s