Syndrome inflammatoire de reconstitution immune chez un patient traité par natalizumab présentant une leucoencéphalopathie multifocale progressive

Syndrome inflammatoire de reconstitution immune chez un patient traité par natalizumab présentant une leucoencéphalopathie multifocale progressive

Journal de Radiologie Diagnostique et Interventionnelle (2013) 94, 103—106 LETTRE / Neuroradiologie Syndrome inflammatoire de reconstitution immune c...

477KB Sizes 0 Downloads 139 Views

Journal de Radiologie Diagnostique et Interventionnelle (2013) 94, 103—106

LETTRE / Neuroradiologie

Syndrome inflammatoire de reconstitution immune chez un patient traité par natalizumab présentant une leucoencéphalopathie multifocale progressive夽 D. Métivier a,∗, F.X. Arnaud a, F. Dutasta b, B. Nguema a, C. Teriitehau a, O. Berets b, J. Baccialone a, J. Potet a a

Service de radiologie, hôpital d’instruction des armées Percy, 101, avenue Henri-Barbusse, 92141 Clamart cedex, France b Service de médecine interne, hôpital d’instruction des armées Percy, 101, avenue Henri-Barbusse, 92141 Clamart cedex, France

MOTS CLÉS Syndrome inflammatoire de reconstruction immune ; Leucoencéphalopathie multifocale progressive ; Sclérose en plaques ; Natalizumab ; IRM

Le syndrome inflammatoire de reconstitution immune (IRIS) est un phénomène survenant lors de la reconstitution de l’immunité à la suite d’un épisode d’immunodépression. Il peut être individualisé à la suite de différentes situations d’immunodépression : traitement antirétroviral du patient VIH, sortie d’aplasie après une chimiothérapie, arrêt d’un traitement immunosuppresseur. Nous rapportons le cas d’un patient atteint d’un IRIS après leucoencéphalopathie multifocale progressive dans le cadre d’une sclérose en plaques (SEP) à l’arrêt du natalizumab. Nous rapportons l’apport de l’IRM cérébrale dans le diagnostic d’IRIS.

Observation Un patient de 33 ans était suivi pour une SEP depuis huit ans, traitée successivement par mitoxantrone, interféron beta-1a puis natalizumab depuis un an. Suite à un épisode de manque du mot, une IRM cérébrale de contrôle a été réalisée (Fig. 1). Les lésions de la substance blanche avaient augmenté de taille en comparaison avec l’examen précédent (Fig. 2). Une ponction lombaire permettait de déceler la présence de papovirus JC virus par PCR dans le liquide céphalorachidien, évoquant le diagnostic de leucoencéphalopathie multifocale progressive (LEMP) et imposant l’arrêt du natalizumab.

DOI de l’article original : http://dx.doi.org/10.1016/j.diii.2012.10.004. Ne pas utiliser, pour citation, la référence franc ¸aise de cet article, mais celle de l’article original paru dans Diagnostic and Interventional Imaging, en utilisant le DOI ci-dessus. ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (D. Métivier). 夽

2211-5706/$ — see front matter © 2012 Publié par Elsevier Masson SAS. http://dx.doi.org/10.1016/j.jradio.2012.07.011

104

D. Métivier et al.

Figure 1. IRM encéphalique initiale. Coupes axiales transverses en séquence fluid-attenuated inversion recovery (FLAIR), T1 spin echo (SE) sans, et avec injection de gadolinium : a : plages d’hypersignal FLAIR bilatérales de la substance blanche fronto-pariétale bilatérale ; b,c : hyposignal T1 des anomalies de la substance blanche. Présence de nodules rehaussés après injection de gadolinium.

Une nouvelle IRM cérébrale était réalisée. Elle révélait l’apparition d’hypersignaux T2-FLAIR multiples, bilatéraux et punctiformes de la substance blanche périventriculaire se rehaussant après injection de produit de contraste (Fig. 3), évoquant un IRIS. Un traitement par corticoïdes à forte dose était instauré permettant une diminution des signes cliniques et permettant de conclure à un IRIS.

Discussion

Figure 2. IRM encéphalique précédente en séquence fluidattenuated inversion recovery (FLAIR) au même niveau de coupe.

La LEMP a été traitée par plasmaphérèse, afin de diminuer la concentration sérique de natalizumab et réduire l’immunodépression, ainsi que par mirtazapine et méfloquine. Au décours de la plasmaphérèse, le patient a présenté un état de mal épileptique nécessitant une hospitalisation en réanimation. L’examen clinique retrouvait de plus une aphasie, un syndrome frontal, des troubles moteurs des membres inférieurs et des troubles sphinctériens avec incontinence urinaire. Plusieurs diagnostics différentiels étaient envisagés : une progression de la LEMP, des effets secondaires liés à la toxicité de mirtazapine et/ou la méfloquine, ou un IRIS.

La survenue d’un IRIS est classiquement retrouvée dans 23 % des cas de LEMP chez les patients VIH positifs [1]. Il correspond au passage d’un état d’immunodépression acquise et réversible à un état d’immunité fonctionnelle, lié à l’arrêt d’un traitement immunosuppresseur ou provoqué par un traitement anti-infectieux. L’IRIS semble être le résultat d’une réponse immunitaire explosive liée à une stimulation excessive des lymphocytes T CD8. Dans le cas de l’infection à papovirus JC, la baisse de concentration du natalizumab induite par la plasmaphérèse conduit à une augmentation massive de la concentration de lymphocytes T CD4 et CD8 au sein du LCR [2]. L’activité inflammatoire intense de la SEP avant institution du natalizumab peut favoriser la survenue d’un IRIS [3]. L’IRM cérébrale est un élément indispensable du diagnostic d’IRIS après arrêt du natalizumab dans le cadre d’une LEMP. Elle retrouve des lésions en hypersignal FLAIR de la substance blanche périventriculaire, punctiformes, bilatérales qui se différencient des lésions de LEMP par leur caractère beaucoup plus diffus, nodulaire et par une prise de contraste plus intense, diffuse et patchy due à la rupture de la barrière hémato-encéphalique. Les lésions d’IRIS sont souvent retrouvées en périphérie des plages de démyélinisation existantes avant traitement [3]. La prise de contraste des lésions est un phénomène transitoire et peut ne pas être retrouvée sur les examens de contrôle [4]. Ces signes

Syndrome inflammatoire de reconstitution immune dans un contexte de sclérose en plaques

105

Figure 3. IRM encéphalique après l’épisode d’état de mal épileptique. Coupes axiales transverses en séquence fluid-attenuated inversion recovery (FLAIR), T1 spin echo (SE) sans, et avec injection de gadolinium : a : apparition d’hyper signaux FLAIR multiples, bilatéraux et punctiformes de la substance blanche périventriculaire ; b, c : ces nodules se rehaussent après injection de gadolinium.

peuvent être accompagnés d’un œdème cérébral diffus pouvant être responsable d’une hypertension intra crânienne, d’un engagement cérébral engageant de ce fait le pronostic vital. La LEMP survenant au décours d’un traitement par natalizumab se différencie de la LEMP classique du patient VIH positif par des lésions plus invasives et une prise de contraste plus fréquente. Le rehaussement des lésions peut être retrouvé avant même l’arrêt du natalizumab, ce phénomène est considéré comme un IRIS précoce [5]. Le traitement de l’IRIS est la corticothérapie à forte dose [6].

Conclusion Cette observation souligne l’intérêt d’un suivi radiologique rapproché chez les patients atteints d’une SEP porteurs d’une LEMP après interruption du traitement par natalizumab, d’autant plus en cas de point d’appel clinique. En combinaison avec l’examen clinique, l’analyse par PCR du LCR (recherche du papovirus JC), elle permet d’orienter le diagnostic vers un IRIS et d’éliminer de ce fait le diagnostic de LEMP en progression.

106

Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

Références [1] Cinque P, Koralnik IJ, Gerevini S, Miro JM, Price RW. Progressive multifocal leukoencephalopathy in HIV-1 infection. Lancet Infect Dis 2009;9(10):625—36. [2] Breton G. Immune reconstitution inflammatory syndrome or IRIS. Med Sci (Paris) 2010;26(3):281—9. [3] Miravalle A, Jensen R, Kinkel RP. Immune reconstitution inflammatory syndrome in patients with multiple sclerosis

D. Métivier et al. following cessation of natalizumab therapy. Arch Neurol 2011;68(2):186—91. [4] Tan CS, Koralnik IJ. Progressive multifocal leukoencephalopathy and other disorders caused by JC virus: clinical features and pathogenesis. Lancet Neurol 2010;9(4): 425—37. [5] Tan IL, McArthur JC, Clifford DB, Major EO, Nath A. Immune reconstitution inflammatory syndrome in natalizumabassociated PML. Neurology 2011;77(11):1061—7. [6] Schröder A, Lee D-H, Hellwig K, Lukas C, Linker RA, Gold R. Successful management of natalizumab-associated progressive multifocal leukoencephalopathy and immune reconstitution syndrome in a patient with multiple sclerosis. Arch Neurol 2010;67(11):1391—4.