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sionnels sans efficacité sur les douleurs, la patiente a nécessité une prise en charge réanimatoire complexe avec mise en place d’une circulation extracorporelle, une exploration par laparotomie dans sa chambre de réanimation complétée d’une colectomie totale. Discussion Les CVO sont rarement à l’origine de douleurs abdominales chez le patient adulte drépanocytaire. En revanche, la constipation est considérée comme fréquente en raison des antalgiques de palier II et III et de l’immobilisation liée aux crises [1]. Celle-ci est probablement le facteur favorisant de l’occlusion chez nos deux patients malgré un transit conservé, cependant, on ne retrouve une cause de constipation que chez l’un de nos deux patients. En outre, nous notons, que dans les deux cas décrits le côlon a été touché par cette occlusion, en accord avec une précédente étude recensant les localisations de complications gastro-intestinales chez les patients en CVO [2]. L’occlusion colique d’origine non mécanique (syndrome d’Ogilvie) décrite chez notre patient est rare chez l’adulte jeune mais a déjà été décrite chez des patients drépanocytaires [3]. Enfin, concernant le traitement de ce dernier, nous n’avons pas pu pratiquer d’échange transfusionnel compte tenu des antécédents du patient, mais cette dernière n’a pas démontré son efficacité dans cette indication et n’a pas permis d’éviter la nécrose intestinale chez notre patiente. Conclusion Le clinicien doit être alerté par la douleur abdominale chez le patient drépanocytaire, a fortiori dans un contexte de constipation même avec conservation du transit, et demander rapidement un examen radiologique afin d’écarter un syndrome occlusif dont l’absence de prise en charge peut mener à un syndrome thoracique aigu. Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. Références [1] Habibi et al. « Recommandations franc¸aises de prise en charge de la drépanocytose de l’adulte ». [2] Gardner et Jaffe, « Acute Gastrointestinal Vaso-Occlusive Ischemia in Sickle Cell Disease ». [3] Gürkan, « Ogilvie’s Syndrome in Sickle Cell Disease ». https://doi.org/10.1016/j.revmed.2019.03.208 CA118
Association hémophilie acquise et maladie associée aux IgG4 : présentation d’un cas et étude physiopathologique S. Sanges 1,∗ , E. Jeanpierre 2 , B. Lopez 3 , J. Russick 4 , S. Delignat 5 , R. Dubois 6 , E. Hachulla 7 , C. Paris 2 , S. Susen 2 , D. Launay 1 , S. Lacroix-Desmazes 5 , L. Terriou 8 1 Service de médecine interne, centre national de référence de la sclérodermie systémique, hôpital Huriez, CHRU Lille, Lille 2 Laboratoire d’hémostase, CHU de Lille, Lille 3 Institut d’immunologie, CHRU Lille, Lille 4 Umr s 1138, Inserm, Centre de Recherche des Cordeliers, Paris 5 Centre de recherche des cordeliers, Umrs 1138, Inserm, Paris 6 Laboratoire d’anatomopathologie, CHU de Lille, Lille 7 Service de médecine interne - immunologie clinique, CHRU Lille, Lille 8 Hématologie, hôpital Claude-Huriez, Lille ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail : sebastien
[email protected] (S. Sanges) Introduction Nous rapportons l’observation d’un patient de 75 ans adressé dans notre service pour bilan d’adénopathies cervicales. Une biologie préopératoire systématique a mis en évidence une élévation asymptomatique du TCA avec effondrement des taux de facteur VIII et présence d’anticorps anti-VIII, conduisant au diagnostic d’hémophilie A acquise (HAA). L’analyse histologique d’une adénopathie cervicale a révélé une hyperplasie folliculaire bénigne avec infiltration de plasmocytes IgG4 ; et le dosage des sous-classes d’immunoglobulines G (IgG) retrouvait une élévation majeure des taux sériques d’IgG4, compatibles avec une maladie
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liée aux IgG4 (MAG4). On retenait donc le diagnostic d’HAA associée à une MAG4 et traitée avec succès par corticothérapie systémique pendant 9 mois. Neuf mois après l’arrêt de la prednisone, la survenue d’une rechute a motivé l’introduction d’un traitement par rituximab. Partant de cette observation, nous avons voulu étudier la possibilité d’un lien physiopathologique potentiel entre les deux maladies en déterminant l’isotype des auto-anticorps anti-VIII. Matériels et méthodes En utilisant une approche ELISA modifiée, nous avons mesuré les taux circulants d’IgG4 et IgG1 anti-facteur VIII (les isotypes les plus fréquents des inhibiteurs du facteur VIII) dans le sérum de notre patient et dans un groupe témoin de 7 patients présentant une HAA mais sans diagnostic connu de MAG4. Résultats Chez notre patient présentant l’association HAAMAG4, l’inhibiteur du facteur VIII était principalement de l’isotype IgG4, avec un rapport IgG4/IgG1 anti-VIII à 42 lors du diagnostic et à 268 lors de la rechute. Ce ratio semblait inférieur dans le groupe témoin (médiane [min–max] : 8,1 [0,4 ; 56]) ; cependant, les témoins n◦ 1 et n◦ C2 présentaient une élévation du rapport IgG4/IgG1 anti-VIII dans des proportions similaires à celui de notre patient au moment du diagnostic (56 et 41, respectivement). Aucun des contrôles n’avait un rapport IgG4/IgG1 anti-VIII proche de la valeur de la rechute de notre patient. Globalement, ces résultats suggèrent une production préférentielle d’anticorps anti-VIII d’isotype IgG4 chez notre patient, bien qu’elle soit également observée en cas d’HAA non associée à une MAG4. Les IgG4 anti-VIII ne représentaient qu’une faible proportion des IgG4 totales de notre patient, avec un ratio de 2,7,10–3 au diagnostic et de 1,0,10–3 au moment de la rechute. Ces valeurs semblaient plus élevées dans le groupe témoin (médiane [min–max] : 4,6,10–2 [4,4,10–3 ; 1,79,10–1]). Ceci suggère que la production d’IgG4 anti-VIII ne rend pas compte de l’augmentation des taux sériques d’IgG4 observée chez notre patient, ce qui conforte le caractère polyspécifique de la prolifération plasmocytaire dans la MAG4. Conclusion Nous rapportons ici un cas d’un patient présentant à la fois une HAA et une MAG4, association inhabituelle de deux maladies immunologiques rares, et suggérons que ses anticorps anti-facteur VIII sont principalement de l’isotype IgG4, en particulier lors de la rechute. Ceci pourrait plaider en faveur d’un lien physiopathologique entre les deux pathologies, bien que la présence d’IgG4 anti-VIII soit également constatée en cas d’HAA non associée à une MAG4. Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. https://doi.org/10.1016/j.revmed.2019.03.209 CA119
Traitement chirurgical d’une maladie associée aux IgG4 E. Stuchfield-Denby 1,∗ , L. Olagne 1 , A. Mania 2 , M. Andre 1 , M. Franc¸ois 3 , A. Baldini 4 1 Médecine interne, CHU Gabriel-Montpied, Clermont-Ferrand 2 Médecine interne, CH Henri-Mondor, Aurillac 3 Urologie, CHU Gabriel-Montpied, Clermont-Ferrand 4 Urologie, hospices civils Lyon, Lyon ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (E. Stuchfield-Denby) Introduction La maladie associée aux IgG4 est caractérisée par une atteinte fibro-inflammatoire d’organes, associée ou non à une élévation des IgG4 sériques. Les lésions sont caractérisées par la présence de fibrose et d’infiltrat lymphoplasmocytaire avec prédominance de plasmocytes IgG4+. La pancréatite fibrosante est l’atteinte historique [1], et la fibrose rétropéritonéale est la première atteinte extra-pancréatique rapportée. Son pronostic est lié à l’engainement d’organes voisins, telles que les uretères.
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Observation Nous rapportons l’observation d’un homme de 41 ans, sans antécédent hormis un tabagisme, admis dans le service de médecine interne début 2016 pour l’exploration d’une asthénie associée à des douleurs pelviennes évoluant depuis fin 2015. Ces symptomes faisaient découvrir au scanner des lésions péri-urétérales droites engainantes responsables d’une dilatation pyélo-calicielle, nécessitant la pose d’une sonde double J. Une biopsie de ces lésions révélait des plages d’îlots inflammatoires lympho-plasmocytaires sans critères de malignité, associées à une fibrose dense. L’immuno-marquage IgG4 représentait moins de 1 % des cellules. L’examen clinique initial était sans particularité. Le bilan biologique révélait : polynucléaires éosinophiles 0.7 G/L, CRP 5 mg/L, fibrinogène 4,4 g/L, QuantiFERON négatif, sérologies VIH, VHB, VHC, syphilis négatives, ANCA positifs à 1/320 avec fluorescence péri-nucléaire, sans spécificité, pas d’élévation des IgG4 sériques. Le Tep-Scanner montrait un hypermétabolisme uniquement localisé à ces lésions. La biopsie des glandes salivaires accessoires ne révélait pas d’anomalie. Une corticothérapie d’épreuve à la posologie de 0,25 mg/kg était débutée, permettant une diminution significative de la taille des lésions. Le sevrage secondaire de la corticothérapie provoquait une ré-aggravation des lésions péri-urétérales. Une corticothérapie était entreprise à nouveau, à la posologie de 0,5 mg/kg/j et permettait une nouvelle amélioration scannographique. Cependant, 2 ans après le début de la maladie et sous corticothérapie à 5 mg/j, le patient présentait toujours d’importantes douleurs pelviennes, un syndrome irritatif urinaire et il était nécessaire de recourir à des changement itératifs et de plus en plus fréquents de sonde double J. Le taux d’IgG4 sériques atteignait 1,7 g/L sans autre anomalie des sous-classes IgG. Un traitement par Methylprednisolone 500 mg/j pendant 3 jours était débuté avec relai oral par Prednisone à 1 mg/kg/j. À 1 mois du traitement, la fibrose régressait partiellement et un traitement par METHOTREXATE était débuté. Par la suite, malgré le traitement immuno-suppresseur, le patient gardait des symptômes urologiques invalidants associées à une stabilité des lésions d’engainement péri-urétéral sur l’imagerie. Dans ce contexte, une prise en charge chirurgicale était décidée. Une urétéro-iléoplastie droite était réalisée en juillet 2018, permettant une résection complète de la fibrose rétro-péritonéale. L’histologie de la pièce opératoire confirmait le diagnostic de maladie associée aux IgG4 avec la présence d’une fibrose intense et d’un infiltrat lymphoplasmocytaire avec rapport IgG4+/IgG+ > 50 %. Le Methotrexate était arrêté en post-opératoire devant la survenue d’une pyélonéphrite aiguë à Enterobacter cloacae, la Prednisone était maintenue à 5 mg/j. Grâce à la résection chirurgicale de la fibrose, la sonde double J pouvait être définitivement retirée, le patient ne présentait plus de symptôme urologique. Le taux d’IgG4 sérique était normalisé à 0,44 g/L. Quatre mois après l’intervention, le scanner de contrôle n’apportait aucun argument en faveur d’une rechute de la maladie. Conclusion L’évolution de l’atteinte fibrosante rétropéritonéale liée à la maladie associée aux IgG4 est classiquement favorable sous corticothérapie ou immunosuppresseurs [2] et la chirurgie n’est habituellement pas nécessaire et est très peu rapportée dans la littérature. Dans le cas rapporté elle semble avoir joué un rôle central dans le maintien de la rémission de la maladie et fait poser la question de sa place dans la prise en charge de certaine manifestations de cette pathologie. Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. Références [1] Sarles. Chronic Inflammatory Sclerosis of the Pancreas - An Autonomous Pancreatic Disease? Am J Dig Dis 1961;6:688–98. [2] Ebbo, et al. IgG4-related systemic disease: Emergence of a new systemix disease? Literature review. Rev Med Interne 2012;33:23–34. https://doi.org/10.1016/j.revmed.2019.03.210
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IgM avec M comme Myélome ? P. Durand 1 , N. Lechevalier 2 , P. Duffau 1 , G. Baulier 1,∗ Médecine interne et immunologie clinique, hôpital Saint-André, CHU Bordeaux, Bordeaux 2 Laboratoire d’hématologie, hôpital Haut-Lévêque, CHU Bordeaux, Pessac ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (G. Baulier)
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Introduction La découverte d’un pic monoclonal IgM doit faire rechercher rapidement l’une de ses complications urgentes : le syndrome d’hyperviscosité. Comme dans toutes les pathologies associées aux gammapathies monoclonales, il est fondamental de préciser la nature de l’infiltrat tumoral afin d’optimiser le traitement et de déterminer le pronostic de la pathologie. Observation Un homme de 75 ans avec pour seul antécédent une coronaropathie stentée, était hospitalisé pour le bilan d’une anémie à 8 g/dL. La mise en évidence d’une hyperprotidémie à 110 g/L en rapport avec un pic monoclonal IgM Kappa à 51 g/L, associée à des signes d’hyperviscosité (céphalées, vertiges, hypertension artérielle, epistaxis, flou visuel) nous ont fait réaliser d’emblée une série d’échanges plasmatiques qui ont permis d’améliorer rapidement l’état du patient. Une biopsie médullaire couplée à un myélogramme avec analyse phénotypique ont permis de mettre en évidence un infiltrat médullaire plasmocytaire évalué à 36 % de phénotype CD38+, CD19−, CD56 neg, CD27 faible avec monotypie Kappa, en faveur d’un myélome IgM Kappa. La recherche de mutation MYD88 était négative. La calcémie et la fonction rénale était normale. Il n’y avait pas d’atteinte des autres lignées sur la NFS. Les chaînes légères sériques kappa étaient à 1370 mg/L, lambda 3,49 mg/L avec un rapport à 392,6. L’IRM corps entier montrait une infiltration diffuse rachidienne. Après 3 cycles de VRD (Bortezomib, revlimid, dexamethasone), le patient était en très bonne réponse partielle. Discussion Le myélome à IgM est une pathologie rarissime et grave [1] mais qui doit être évoquée lorsque les chaînes légères libres sont très élevées ou qu’il existe une infiltration osseuse à l’IRM. La prise en charge d’un syndrome d’hyperviscosité doit être rapide et inclure des échanges plasmatiques si nécessaires et éviter le plus possible les transfusions. Conclusion Les clones responsables de la production d’une IgM ne sont pas nécessairement lymphocytaire ou lymphoplasmocytaire [2]. Il est fondamental de typer avec précision la nature de l’infiltrat cellulaire dans le cadre des gammapathies IgM afin d’optimiser le traitement et le pronostic qui sont parfois très différents. Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. Références [1] Tedeschi A, Conticello C, Rizzi R, Benevolo G, Laurenti L, Petrucci MT, et al. Diagnostic framing of IgM monoclonal gammopathy : Focus on Waldenström macroglobulinemia. Hematol Oncol 2018, http://dx.doi.org/10.1002/hon.2539. [2] Schuster SR, Rajkumar SV, Dispenzieri A, Morice W, Aspitia AM, Ansell S, et al. IgM multiple myeloma : disease definition, prognosis, and differentiation from Waldenstrom’s macroglobulinemia. Am J Hematol 2010;85(11):853–5, http://dx.doi.org/10.1002/ajh.21845. https://doi.org/10.1016/j.revmed.2019.03.211