Ne´phrologie & The´rapeutique 7 (2011) 558–561
Article original
Traitement de la carence martiale par injection d’une dose totale de fer dextran en dialyse pe´ritone´ale Treatment of iron deficiency by a bolus intravenous iron dextran in peritoneal dialysis Maxence Ficheux a, Pascale Cuny b, Ange´lique Lecouf a, Jean-Philippe Ryckelynck a, Bruno Hurault de Ligny a, Thierry Lobbedez a,* a b
Service de ne´phrologie, CHU Cle´menceau, avenue G.-Cle´menceau, 14033 Caen cedex, France Service de pharmacie, CHU Cle´menceau, 14033 Caen cedex, France
I N F O A R T I C L E
R E´ S U M E´
Historique de l’article : Rec¸u le 3 novembre 2010 Accepte´ le 27 mars 2011
Introduction. – Le fer dextran de bas poids mole´culaire peut eˆtre administre´ en une perfusion unique d’une dose totale correspondante a` la carence en fer. L’objectif de cette e´tude observationnelle e´tait de de´terminer si l’administration unique d’une dose totale de fer dextran permettait de corriger la carence martiale du patient en dialyse pe´ritone´ale pendant une dure´e de quatre mois. Patients et me´thodes. – Les patients traite´s par dialyse pe´ritone´ale depuis plus de trois mois et ayant une ane´mie (he´moglobine < 11 g/dL) par carence martiale (ferritine´mie < 100 mg/L et/ou un coefficient de saturation de la transferrine < 20 %) avec re´sistance et/ou intole´rance au fer oral e´taient inclus dans l’e´tude. Ils e´taient tous traite´s par agent stimulant l’e´rythropoı¨e`se. Ils recevaient une dose unique de fer dextran a` l’inclusion correspondant a` la carence martiale. Un suivi mensuel des parame`tres biologiques e´tait re´alise´. Re´sultats. – Douze des dix-sept patients inclus terminaient l’e´tude. La dose totale moyenne administre´e e´tait de 742 150 mg sans effet inde´sirable rapporte´. Quatre mois apre`s l’injection on observait une augmentation significative de la moyenne de l’he´moglobine´mie (10,1 0,7 g/dL vs 11,4 1,2 g/dL, p < 0,05), de la moyenne de la ferritine´mie (66 46 mg/L vs 212 121 mg/L, p < 0,05) et de la moyenne du coefficient de saturation (14 5 % vs 23 8, p < 0,05). La dose d’e´rythropoı¨e´tine n’e´tait pas modifie´e pendant les quatre mois. Parmi les 12 patients traite´s, dix avaient une ferritine´mie supe´rieure a` 100 mg/L et un coefficient de saturation supe´rieur a` 20 % quatre mois apre`s l’injection de fer dextran sans apport supple´mentaire de fer. Conclusion. – Chez le patient traite´ par dialyse pe´ritone´ale, le fer dextran de faible poids mole´culaire en injection unique d’une dose totale permet de corriger l’ane´mie ferriprive pendant une dure´e de quatre mois. ß 2011 Association Socie´te´ de ne´phrologie. Publie´ par Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s.
Mots cle´s : Dialyse pe´ritone´ale Ane´mie Carence martiale Fer dextran
A B S T R A C T
Keywords: Peritoneal dialysis Anemia Iron deficiency Iron dextran
Introduction. – The main objective of this study is to determine whether a single dose of iron dextran can correct iron deficiency during a period of four months in peritoneal dialysis patients. Method. – This was a prospective observational study in peritoneal dialysis patients who had anemia (hemoglobin <11 g/dL) and iron deficiency (ferritin <100 mg/L and/or transferrin saturation < 20%). Patients who were resistant to oral iron or who could not tolerate oral iron were included in the study. At baseline, based on the iron deficiency estimation, a single dose of iron dextran was infused over four hours. Results. – Of 17 patients included, 12 completed the study. The mean iron dose infused was 742 150 mg. No clinically significant adverse event was reported during the infusion. Four months after the iron dextran infusion there was a significant increase of the mean hemoglobin level (10.1 0.7 g/dl vs 11.4 1.2 g/dL, P < 0.05), the mean blood ferritin level (66 46 mg/L vs 212 121 mg/L, P < 0.05) and the mean transferrin saturation (14 5% vs 23 8, P < 0.05). Four months after the iron infusion 10 patients had
* Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (T. Lobbedez). 1769-7255/$ – see front matter ß 2011 Association Socie´te´ de ne´phrologie. Publie´ par Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s. doi:10.1016/j.nephro.2011.03.010
M. Ficheux et al. / Ne´phrologie & The´rapeutique 7 (2011) 558–561
559
a blood ferritin level higher than 100 mg/L and a transferrin saturation higher than 20%. There was no significant modification of the erythropoietin dose during the four months period. Conclusion. – In patients treated by peritoneal dialysis, the anemia due to iron deficiency can be treated by a single infusion of iron dextran for a period of four months. ß 2011 Association Socie´te´ de ne´phrologie. Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
1. Introduction La carence martiale, facteur de re´sistance a` l’e´rythropoı¨e´tine, est fre´quemment associe´e a` l’insuffisance re´nale chroniqu e [1,2]. Selon les recommandations europe´ennes, la ferritine´mie du patient en dialyse traite´ par e´rythropoı¨e´tine doit eˆtre comprise entre 200 et 500 mg/L sans qu’il soit fait de distinction entre les diffe´rentes modalite´s d’e´puration extrare´nale [3]. D’apre`s les recommandations ame´ricaines, en dialyse pe´ritone´ale, la ferritine´mie doit eˆtre supe´rieure a` 100 mg/L et le coefficient de saturation de la transferrine supe´rieur a` 20 % [4]. Une e´tude nord-ame´ricaine et les donne´es d’une e´tude europe´enne montrent que la carence martiale est fre´quente chez le patient traite´ par la dialyse pe´ritone´ale [5,6]. Paradoxalement, les donne´es du module ane´mie du Registre de dialyse pe´ritone´ale de langue franc¸aise (RDPLF) montrent que seulement la moitie´ des patients ayant une carence martiale sont supple´mente´s et que le fer par voie intraveineuse est rarement utilise´ en dialyse pe´ritone´ale [7]. Il est possible que la re´sistance a` l’e´rythropoı¨e´tine due a` la carence martiale soit moindre en dialyse pe´ritone´ale qu’en he´modialyse. La volonte´ de prote´ger le capital vasculaire des patients et/ou un re´seau vasculaire de mauvaise qualite´ peuvent aussi expliquer cette observation. En outre il n’existe pas de recommandation pour le traitement de la carence martiale en dialyse pe´ritone´ale. Le fer dextran de bas poids mole´culaire peut eˆtre injecte´ a` la dose maximale de 20 mg/kg de poids corporel permettant en the´orie de corriger la carence martiale en une perfusion unique. Cette modalite´ d’administration du fer devrait permettre de limiter le nombre d’injections chez les patients traite´s par la dialyse pe´ritone´ale. Cette e´tude prospective observationnelle a pour objectifs d’e´valuer l’efficacite´ et la dure´e d’action du fer dextran administre´ en injection unique chez le patient traite´ par dialyse pe´ritone´ale. 2. Objectifs de l’e´tude L’objectif principal de l’e´tude e´tait de de´terminer si, chez le patient traite´ par dialyse pe´ritone´ale, l’injection intraveineuse unique d’une dose de fer dextran (Ferrisat1) permettait de corriger la carence martiale pendant une dure´e de quatre mois. L’e´chec du traitement e´tait de´fini par la re´cidive d’une carence martiale dans les quatre mois suivant l’injection de fer dextran. Ce travail avait pour objectifs secondaires d’e´valuer les re´sultats de l’administration du fer injectable en dose unique sur les parame`tres biologiques te´moignant d’une carence martiale, sur la valeur de l’he´moglobine et sur les besoins en e´rythropoı¨e´tine. 3. Patients et me´thode Il s’agissait d’une e´tude prospective observationnelle portant sur des patients traite´s par la dialyse pe´ritone´ale pendant la pe´riode du 1er septembre 2008 au 1er septembre 2009. Pouvaient eˆtre inclus dans cette e´tude les patients traite´s par dialyse pe´ritone´ale depuis plus de trois mois, aˆge´s de plus de 18 ans ayant une ane´mie de´finie par une valeur d’he´moglobine infe´rieure a` 11 g/ dL et une carence martiale. Le de´ficit en fer e´tait de´fini par une ferritine´mie infe´rieure a` 100 mg/L et/ou une saturation de la transferrine infe´rieure a` 20 %. Le traitement par voie intraveineuse
de la carence martiale e´tait conside´re´ comme ne´cessaire en cas d’absence de correction du de´ficit apre`s trois mois de traitement par fer administre´ par voie orale ou en cas d’intole´rance digestive du fer oral. Les patients pre´sentant une inflammation chronique se´ve`re quelqu’en soit l’origine, un de´ficit en vitamine B9 ou en vitamine B12, un cancer e´volutif, une allergie connue au dextran, une cirrhose, une grossesse ne pouvaient eˆtre inclus. La dose totale de fer a` administrer e´tait calcule´e a` partir de la valeur de l’he´moglobine (en g/dL) et du poids corporel (en kg) a` la date de l’inclusion en utilisant la formule : (poids [he´moglobine cible-he´moglobine] 0,24) + 500 mg. La valeur cible de l’he´moglobine e´tait de 12 g/dL. L’injection d’une dose test de 25 mg en 15 minutes e´tait effectue´e de fac¸on syste´matique puis le fer dextran e´tait perfuse´ sur une dure´e de quatre a` six heures selon la dose prescrite au cours d’une hospitalisation de jour. Le fer dextran e´tait dilue´ dans 500 mL d’un solute´ glucose´ a` 5 %. La dose maximale perfuse´e e´tait de 20 mg/kg de poids corporel. Sous traitement par fer la dose d’e´rythropoı¨e´tine pouvait eˆtre modifie´e conforme´ment aux recommandations europe´ennes. Des pre´le`vements biologiques pour dosage de l’he´moglobine´mie, du fer se´rique, de la transferrine, de la saturation de la transferrine et de la ferritine e´taient effectue´s deux semaines et quatre semaines apre`s l’injection de fer dextran puis de fac¸on mensuelle jusqu’au quatrie`me mois apre`s la perfusion. La dure´e de l’e´tude a e´te´ fixe´e a` quatre mois correspondant a` la demi-vie des he´maties. L’index de re´sistance a` l’e´rythropoı¨e´tine (ERI) a e´te´ calcule´ en divisant la dose d’e´rythropoı¨e´tine hebdomadaire (unite´/kilogramme/semaine) par le taux d’he´moglobine (g/dL). L’ERI est donc exprime´ en UI/kg/ semaine/g/dL. 4. Statistiques Les variables quantitatives sont exprime´es avec la moyenne et l’e´cart-type lorsque la re´partition est normale ou avec la me´diane et les extreˆmes dans le cas contraire. Les variables qualitatives sont exprime´es sous la forme de proportion. Pour les comparaisons de fre´quence, le test exact de Fischer est utilise´. Les comparaisons de moyennes sont effectue´es a` l’aide du test t de Student apparie´ ou d’un test non parame´trique si la re´partition n’est pas normale. 5. Re´sultats Pendant la pe´riode d’e´tude, 17 patients re´pondant aux crite`res de participation e´taient inclus dans l’e´tude. Parmi ces 17 patients, cinq e´taient sortis en cours d’e´tude (accident he´morragique digestif aigu : deux ; de´faut de suivi : deux ; transplantectomie : un). L’aˆge moyen des patients e´tait de 65 16 ans, le sex-ratio (M/F) de 8/4, le score de comorbidite´ de Charlson moyen de 4,9 2,1. Les causes de mise en dialyse e´taient une ne´phropathie vasculaire (n = 4), la polykystose (n = 2), une glome´rulone´phrite chronique (n = 2), une ne´phropathie interstitielle (n = 1), le diabe`te (n = 1), et divers (n = 2). La dure´e moyenne en dialyse a` l’inclusion e´tait de 19 17 mois. La modalite´ de dialyse utilise´e e´tait la DPCA pour six patients et la dialyse pe´ritone´ale automatise´e pour six patients. A` l’initiation de l’e´tude la fonction re´nale re´siduelle moyenne e´tait de 3,1 0,6 mL/mn, la clairance de la cre´atinine hebdomadaire moyenne totale de 75 12 L/semaine. Parmi les 12 patients analyse´s, neuf avaient une carence martiale
M. Ficheux et al. / Ne´phrologie & The´rapeutique 7 (2011) 558–561
560
Tableau 1 E´volution des parame`tres biologiques apre`s injection du fer dextran. Inclusion He´moglobine (g/dL) He´matocrite (%) Fer se´rique (mmol/L) Ferritine (mg/L) Saturation (%) Dose d’EPO (UI/kg/semaine) ERI (UI/kg/semaine/g/dl)
14 jours
1 mois *
10,1 0,7 32 3 9,5 3,8 66 48 14 5 63 39 6,3 4,1
10,8 0,7 35 2* 14,1 8,8* 325 184* 24 10* 65 40 6,0 3,8
2 mois *
3 mois *
11,2 0,6 35 2* 15,0 8,5 285 155* 32 23* 56 39 4,2 2,6
4 mois *
11,7 1,5 36 4* 16,3 13,9 206 145* 22 8* 54 34 4,9 3,6
11,4 1,2* 36 4* 16,0 17,0 212 121* 23 8* 56 35 5,1 3,4
11,6 1,2 36 5* 14,0 6,2 174 102* 26 8* 52 31 4,7 3,3
EPO : e´rythropoı¨e´tine ; UI : unite´s internationales ; ERI : index de re´sistance a` l’e´rythropoı¨e´tine. * p < 0,05 vs inclusion.
re´sistante au fer per os, trois une intole´rance digestive au fer administre´ par voie orale. A` l’inclusion la valeur moyenne de l’he´moglobine e´tait de 10,1 0,7 g/dL, l’he´matocrite moyen de 32 3 %. La dose moyenne d’e´rythropoı¨e´tine par patient e´tait de 63 39 UI/kg par semaine correspondant a` un index de re´sistance a` l’e´rythropoı¨e´tine moyen de 6,3 4,1 UI/kg/semaine/g/dL. La ferritine´mie moyenne e´tait de 66 48 mg/L, le coefficient de saturation de la transferrine moyen de 0,14 0,5, et le fer se´rique moyen de 9,5 3,8 mmol/L. La dose moyenne de fer injecte´e e´tait de 742 150 mg (500– 1000 mg), aucun effet inde´sirable n’e´tait note´ au cours des perfusions. Comparativement aux valeurs biologiques d’inclusion l’he´moglobine moyenne et l’he´matocrite moyen e´taient significativement plus e´leve´s deux semaines, un mois, deux mois, trois mois et quatre mois apre`s l’injection de fer dextran (Tableau 1). Les valeurs moyennes de la ferritine´mie et du coefficient de la transferrine restaient significativement augmente´es a` deux semaines, un mois, deux mois, trois mois et quatre mois apre`s l’injection de fer dextran comparativement aux valeurs initiales (Fig. 1 et 2). Parmi les 12 patients traite´s, dix avaient une ferritine´mie supe´rieures a` 100 mg/L et une saturation de la transferrine supe´rieure a` 20 % deux semaines apre`s l’injection. La normalisation du stock martial apre`s l’injection de fer dextran se maintenait jusqu’au quatrie`me mois apre`s l’administration du fer intraveineux chez les dix patients. Deux semaines apre`s l’injection deux patients avaient une ferritine´mie supe´rieure a` 500 mg/L. Seul un patient avait une ferritine´mie toujours supe´rieure a` 500 mg/L un mois apre`s l’administration de fer. Au-dela` d’un mois aucun, patient n’avait de ferritine´mie supe´rieure a` 500 mg/L.
6. Discussion Notre travail montre que l’injection unique d’une dose totale de fer destine´e a` corriger la carence martiale est efficace pendant une dure [(Fig._1)TD$IG] ´ e de quatre mois permettant ainsi de limiter le nombre
d’injections intraveineuses chez des patients en dialyse pe´ritone´ale traite´s par e´rythropoı¨e´tine. Il s’agit, a` notre connaissance, de la premie`re e´tude e´valuant l’effet du fer dextran de bas poids mole´culaire sur l’ane´mie par carence martiale de patients traite´s par dialyse pe´ritone´ale et e´rythropoı¨e´tine. On sait de longue date que la de´perdition sanguine est moins importante en dialyse pe´ritone´ale qu’en he´modialyse. Cependant la carence martiale est fre´quente en dialyse pe´ritone´ale. En effet, dans une e´tude europe´enne analysant des patients traite´s par dialyse pe´ritone´ale, la pre´valence de la carence martiale absolue et de la carence martiale relative en dialyse pe´ritone´ale e´tait respectivement de 40 % et de 13 % [5]. Dans une e´tude nordame´ricaine portant sur 1219 patients traite´s par dialyse pe´ritone´ale, 36 % des patients avaient une ferritine´mie infe´rieure a` 100 mg/L et 40 % des patients un coefficient de saturation de la transferrine infe´rieur a` 20 % [6]. En France, les donne´es du module ane´mie du Registre de dialyse pe´ritone´ale de langue franc¸aise (RDPLF) montrent que parmi 211 patients pre´valents en dialyse pe´ritone´ale, 99 (47 %) avaient une carence martiale. Paradoxalement, seuls 50 % des patients carence´s sont supple´mente´s [7]. Bien qu’il n’existe pas de recommandations concernant les indications du traitement par fer chez les patients en dialyse pe´ritone´ale, il apparaıˆt logique de traiter les patients ayant une ane´mie sous e´rythropoı¨e´tine associe´e a` une carence martiale [3,4]. Il a e´te´ montre´ que le fumarate ferreux et le sulfate ferreux administre´ par voie orale sont moins bien absorbe´s chez le patient traite´ par dialyse pe´ritone´ale que chez des volontaires sains [8]. Certains auteurs ont propose´ l’utilisation de doses suprathe´rapeutiques par voie orale (420 mg de fer e´le´ment par jour) permettant d’obtenir un bilan martial positif mais au prix de nombreux effets inde´sirables digestifs ayant un impact ne´gatif sur l’observance [9]. En outre, l’absorption intestinale du fer est re´duite du fait de la prise concomitante fre´quente de che´lateurs du phosphore et d’inhibiteurs de la pompe a` protons. Afin de re´duire les troubles digestifs, le fer est ge´ne´ralement administre´ au moment des repas ce qui en re´duit encore sa biodisponibilite´.
[(Fig._2)TD$IG]
100
500
Coefficent de saturation de la transferrine (%)
ferritine (µg/l)
600
400 300 200 100 0 -100
90 80 70 60 50 40 30 20 10
J0
J15
J30
M2
M3
M4
0 JO
J15
J30
M2
M3
M4
[J0: jour d’injection, J15: 15 jours après injection, J30 : 30 jours après injection, M2: 2 moisa après injection, M3 : 3 mois après injection, M4 : 4 mois après injection]
[J0: jour d’injection, J15: 15 jours après injection,J 30 : 30 jours après injection, M2: 2 mois après injection, M3 : 3 mois après injection, M4 : 4 mois après injection]
Fig. 1. E´volution de la ferritine´mie apre`s injection du fer dextran.
Fig. 2. E´volution de la saturation de la transferrine apre`s injection du fer dextran.
M. Ficheux et al. / Ne´phrologie & The´rapeutique 7 (2011) 558–561
Une e´tude prospective randomise´e re´cente montre qu’en dialyse pe´ritone´ale en cas d’ane´mie par carence martiale le fer sucrose administre´ par voie intraveineuse est plus efficace que la voie orale pour traiter un de´ficit en fer [10]. Notre e´tude concernait des patients ayant une ane´mie avec carence martiale re´sistants et/ ou intole´rants au fer par voie orale. La dose maximale de fer sucrose par injection impose un fractionnement des injections pour corriger la carence martiale. Il apparaıˆt comme clairement ne´cessaire de re´duire la fre´quence des administrations dans le but de prote´ger le re´seau vasculaire des patients en dialyse pe´ritone´ale [11]. Le fer dextran de bas poids mole´culaire, disponible en France depuis 2008, est utilise´ en Europe et aux E´tats-unis depuis 1992. Ce dernier pre´sente l’avantage de pouvoir eˆtre administre´ en une seule injection intraveineuse. Apre`s une perfusion intraveineuse, le complexe fer dextran est rapidement absorbe´ par les cellules du syste`me re´ticuloendothe´lial (foie et rate). Le fer est libe´re´ lentement et lie´ aux prote´ines pour former de l’he´moside´rine ou de la ferritine. La demi-vie plasmatique du fer lie´ et circulant est de 20 heures. On retrouve dans les urines et les selles de faibles quantite´s de fer. Le dextran est me´tabolise´ ou excre´te´. Une augmentation de l’he´matopoı¨e`se dans les six a` huit semaines suivant l’administration est observe´e. Il est possible que le capital veineux soit prote´ge´ par le fait que le pH du fer dextran de bas poids mole´culaire compris entre 5,2 et 6,5 est plus physiologique que le pH basique du fer sucrose (pH = 9 apre`s dilution). Une e´tude relativement ancienne, portant sur un effectif limite´ de patients traite´s par dialyse pe´ritone´ale, montre qu’une injection unique de fer dextran de haut poids mole´culaire administre´e par voie intraveineuse permet d’obtenir une augmentation significative de l’he´matocrite, du fer se´rique, du coefficient de saturation de la transferrine et de la ferritine´mie pendant six mois sans qu’il ne soit constate´ d’effet inde´sirable majeur [12]. Dans notre travail 17 patients ont rec¸u une injection unique moyenne de 742 150 mg de fer dextran de bas poids mole´culaire. Il n’y a pas eu d’effet inde´sirable significatif au cours des perfusions te´moignant d’une bonne tole´rance de l’administration de fer a` forte dose. Mais cela n’exclut pas le risque d’anaphylaxie. Les effets inde´sirables graves rapporte´s lors des injections de fer dextran sont surtout lie´s a` des re´actions anaphylactiques observe´es avec le fer dextran de haut poids mole´culaire non disponible en France [13,14]. Plusieurs e´tudes ont concerne´ le fer dextran de faible poids mole´culaire en he´modialyse sans effets secondaires majeurs [15,16]. Ne´anmoins, les rapports de pharmacovigilance aux E´tats-Unis signalent une fre´quence plus e´leve´e d’effets inde´sirables graves sous fer dextran de faible poids mole´culaire comparativement au fer sucrose [14]. Une e´tude re´trospective rapporte les effets de l’administration du fer intraveineux a` la dose de 500 mg chez 62 patients traite´s en dialyse pe´ritone´ale [17]. Dans les trois groupes (33 patients sous fer dextran, 23 patients sous fer saccharose et cinq patients sous les deux formes) trois mois apre`s l’injection, on notait une augmentation significative de l’he´moglobine, du coefficient de saturation de la transferrine, de la ferritine´mie et une diminution des doses d’e´rythropoı¨e´tine. Notre travail montre que l’injection unique d’une dose totale destine´e a` corriger la carence martiale est efficace pendant une dure´e de quatre mois permettant ainsi de limiter le nombre d’injection intraveineuse dans cette population. Le ferumoxytol, nouveau fer intraveineux pouvant eˆtre administre´ par injection rapide pourrait eˆtre une alternative au fer dextran a` forte dose pour le patient traite´ par dialyse pe´ritone´ale. Le ferumoxytol vient d’obtenir l’accord de la FDA (juin 2009) pour sa commercialisation aux E´tats-Unis. Il s’agit de nanoparticules d’oxyde de fer qui ont montre´ leur efficacite´ dans des e´tudes de phase III chez des patients en pre´dialyse et en he´modialyse [18,19]. Le ferumoxytol e´tait administre´ a` la dose unitaire de 510 mg en deux injections d’une dure´e de 17 secondes a` une semaine d’intervalle. On ne dispose pas encore de donne´es
561
portant sur une population traite´e par dialyse pe´ritone´ale. D’autres nouvelles formes de fer, de´ja` disponibles dans certains pays d’Europe comme le fer carboxymaltose et le fer oligosaccharide permettent e´galement l’administration rapide de doses totales. Le fer carboxymaltose administre´ a` la dose d’un gramme paraıˆt plus efficace et mieux tole´re´ que le fer oral chez des patients en pre´dialyse [20]. 7. Conclusion Notre travail montre que le fer dextran de faible poids mole´culaire peut eˆtre utilise´ en injection unique pour corriger l’ane´mie par carence martiale des patients en dialyse pe´ritone´ale pendant une dure´e minimale de quatre mois. L’administration en dose unique, efficace dans cette population, devrait permettre de pre´server le capital veineux et de faciliter l’organisation des soins. De´claration d’inte´reˆts Les auteurs de´clarent ne pas avoir de conflits d’inte´reˆts en relation avec cet article. Re´fe´rences [1] Leray-Moragues H, Canaud B. Quels sont les principaux parame`tres a` surveiller pour optimiser le traitement de l’ane´mie chez le dialyse´ ? Quelle est la fre´quence de surveillance et quelles sont les recommandations ? Nephrol Ther 2006;2(Suppl 4):S245–8. [2] Kessler M. Conduite et surveillance du traitement martial chez le patient dialyse´. Nephrol Ther 2006;2(Suppl 4):S266–73. [3] Macdougall IC, Horl WH, Jacobs C, Valderrabano F, Parrondo I, Thompson K, et al. European best practice guidelines 6–8: assessing and optimizing iron stores. Nephrol Dial Transplant 2000;15(Suppl 4):20–32. [4] National Kidney Foundation. K/DOQI clinical practice guidelines for anemia of chronic kidney disease. 2000. III Iron support. Am J Kidney Dis 2001;37:S182– 238. [5] Jacobs C, ESAM study group. Enqueˆte sur le traitement de l’ane´mie des patients dialyse´s en France (1998–1999) (E´tude ESAM-France). Nephrologie 2002;23(2):85–91. [6] Bailie GR, Frankenfield DL, Prowant BF, McClellan W, Rocco MV. Erythropoietin and iron use in peritoneal dialysis patients. Report from the 1997 HCFA endstage renal disease core indicators project. Am J Kidney Dis 1999;33(6):1187–9. [7] consultable sur www.rdplf.org [8] Domoto DT, Martin KJ. Failure of CAPD patients to respond to an oral iron absorption test. Adv Perit Dial 1992;8:102–4. [9] Dittrich E, Puttinger H, Schneider B, Horl WH, Haag-Weber M, Vychytil A. Is absorption of high-dose oral iron sufficient in peritoneal dialysis patients? Perit Dial Int 2000;20(6):667–73. [10] Li H, Wang SX. Intravenous iron sucrose in peritoneal dialysis patients with renal anemia. Perit Dial Int 2008;28(2):149–54. [11] Wish JB. Intravenous iron: not just for hemodialysis patients anymore. Perit Dial Int 2008;28(2):126–9. [12] Ahsan N, Groff JA, Waybill MA. Efficacy of bolus intravenous iron dextran treatment in peritoneal dialysis patients receiving recombinant human erythropoietin. Adv Perit Dial 1996;12:161–6. [13] Chertow GM, Mson PD, Vaage-Nilsen O, Ahlmen J. On the relative safety of parenteral iron formulations. Nephrol Dial Transplant 2004;19:1573–5. [14] Chertow GM, Mson PD, Vaage-Nilsen O, Ahlmen J. Update on adverse drug events associated with parenteral iron. Nephrol Dial Transplant 2006;21:378–82. [15] Auerbach M, Al Talib K. Low-molecular weight iron dextran and iron sucrose have similar comparative safety profiles in chronic kidney disease. Kidney Int 2008;73:528–30. [16] Sinha S, Chiu DY, Peebles G, Lamerton E, Fenwick S, Kalra PA. Comparison of intravenous iron sucrose versus low molecular weight iron dextran in chronic kidney disease. J Ren Care 2009;35:67–73. [17] Prakash S, Walele A, Dimkovic N, Bargman J, Vas S, Oreopoulos D. Experience with a large dose (500 mg) of intravenous iron dextran and iron saccharate in peritoneal dialysis patients. Perit Dial Int 2001;21:290–5. [18] Spinowitz BS, Kausz AT, Baptista J, Noble SD, Sothinathan R, Bernardo MV, et al. Ferumoxytol for treating iron deficiency anemia in CKD. J Am Soc Nephrol 2008;19(8):1599–605. [19] Provenzano R, Schiller B, Rao M, Coyne D, Brenner L, Pereira BJ. Ferumoxytol as an intravenous iron replacement therapy in hemodialysis patients. Clin J Am Soc Nephrol 2009;4(2):386–93. [20] Qunibi WY, Martinez M, Smith M, Benjamin J, Mangione A, Roger SD. A randomized controlled trial comparing intravenous ferric carboxymaltose with oral iron for treatment of iron deficiency anaemia of non-dialysis dependent chronic kidney disease patients. Nephrol Dial Transplant 2011;26:1599–607.