Traitement des ruptures traumatiques de l’isthme aortique en 2014

Traitement des ruptures traumatiques de l’isthme aortique en 2014

Journal Européen des Urgences et de Réanimation (2015) 27, 161—171 Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedirect.com MISE AU POINT Trait...

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Journal Européen des Urgences et de Réanimation (2015) 27, 161—171

Disponible en ligne sur

ScienceDirect www.sciencedirect.com

MISE AU POINT

Traitement des ruptures traumatiques de l’isthme aortique en 2014夽,夽夽 Management of the traumatic aortic blunt injury in 2014 Pierre-Emmanuel Noly 1, Olaf Mercier 1,∗, Claude Angel 2, Dominique Fabre 1, Sacha Mussot 1, Philippe Brenot 2, Jean-Yves Riou 2, Riad Bourkaib 2, Olivier Planché 2, Philippe Dartevelle 1, Elie Fadel 1 1

Centre chirurgical Marie-Lannelongue, service de chirurgie thoracique et vasculaire, 92350 Le Plessis Robinson, France 2 Centre chirurgical Marie-Lannelongue, service de cardiologie et radiologie interventionnelle, 92350 Le Plessis Robinson, France Disponible sur Internet le 23 octobre 2015

Points essentiels Le diagnostic de rupture traumatique de l’isthme aortique (RTIA) doit être évoqué chez tout polytraumatisé grave. Il repose essentiellement sur le scanner injecté lors du bilan initial où des lésions associées à la RTIA, mettant en jeux le pronostic vital, sont souvent observées. La mortalité hospitalière est principalement due aux lésions associées. En dehors de la rupture complète de l’aorte, le traitement doit être entrepris après stabilisation hémodynamique et respiratoire du patient et prise en charge d’une lésion mettant en jeu le pronostic vital immédiat. Le traitement endovasculaire des RTIA est devenu le traitement de choix, surtout pour les patients ayant des lésions associées sévères et à risque hémorragique. Des données supplémentaires sur le devenir à long terme des endoprothèses sont nécessaires chez ces patients souvent jeunes. Le traitement chirurgical conventionnel a toujours une place pour les sujets jeune, stables, à faible risque hémorragique et lorsque le geste chirurgical peut être différé de plusieurs heures. © 2015 Publi´ e par Elsevier Masson SAS.

夽 Ne pas utiliser, pour citation, la référence de cet article mais la référence de sa première parution : Presse Med 2015;44(3):305—36. http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2014.06.026. 夽夽 Cet article appartient à la série « Cardiologie/traumatologie ». ∗ Olaf Mercier, Centre chirurgical Marie-Lannelongue, service de chirurgie thoracique et vasculaire, 133, avenue de la Résistance, 92350 Le Plessis Robinson, France. Adresse e-mail : [email protected] (O. Mercier).

http://dx.doi.org/10.1016/j.jeurea.2015.09.005 2211-4238/© 2015 Publi´ e par Elsevier Masson SAS.

162

P.-E. Noly et al.

Key points Diagnosis of blunt thoracic aortic injury (BAI) should be considered in any serious polytrauma. The diagnosis is mainly based on the CT scan at baseline. Life-threatening lesions are often associated with BAI. Hospital mortality is mainly due to associated lesions. Except the complete rupture of the aorta, treatment should be initiated after hemodynamic and respiratory stabilization of the patient and after the treatment of a lesion involving the immediate prognosis. Endovascular treatment of BAI became the treatment of choice, especially for patients with severe associated injuries and bleeding risk. Additional data on the long-term stents are necessary in these young patients. Conventional surgical treatment is always indicated for young subjects with stable hemodynamic, low risk of bleeding and when surgery may be delayed several hours. © 2015 Published by Elsevier Masson SAS.

Avec l’essor des techniques endovasculaires, la stratégie de prise en charge des ruptures traumatiques de l’isthme aortique (RTIA) s’est largement modifiée au cours des vingt dernières années. Considéré initialement comme une simple alternative à la chirurgie conventionnelle, le traitement endovasculaire (TEV) prend actuellement une place prépondérante dans la prise en charge des patients polytraumatisés atteints de RTIA. En l’absence d’essai randomisé, les recommandations des sociétés savantes (Guidelines of the Society of Vascular Surgery [SVS] 2011 [1] et le consensus de la Society of Thoracic Surgeons Endovascular Surgery Task Force [STS] en 2008 [2]) sont basées sur des études rétrospectives dont une méta-analyse de 7768 patients (tableau I). Bien que la supériorité du traitement endovasculaire sur le traitement chirurgical conventionnel n’ait jamais été formellement établie, la technique endovasculaire semble être à privilégier (grade 2, niveau C). Ses principaux avantages sont d’éviter l’héparinisation générale, notamment en cas de lésions associées hémorragiques, d’éviter l’inflammation liée à une circulation extracorporelle (CEC) et un clampage de l’aorte thoracique descendante favorisant les paraplégies, réduisant ainsi la mortalité et la morbidité opératoire. La principale limite de ce traitement est le devenir à long terme de l’endoprothèse sur des patients souvent jeunes lors de l’implantation. La durée de suivi de ces patients augmente avec le temps, et des séries avec un suivi à moyen et long terme commencent à être publiées avec un suivi moyen maximal de 58 mois [3—5]. Dans cette mise au point, nous exposerons les problématiques inhérentes à la prise en charge endovasculaire des RTIA et les grands principes de prise en charge selon les données récentes de la littérature.

Épidémiologie et histoire naturelle de la rupture traumatique de l’isthme aortique La rupture de l’aorte post-traumatique est la seconde cause de décès après les hémorragies intracrâniennes chez les victimes d’accident corporel. Elle concerne majoritairement des hommes jeunes (sex-ratio 9:1, âge moyen : 39 ans) et en bonne santé. Les conditions de survenue des ruptures aortiques sont variées mais un traumatisme violent est

toujours retrouvé à l’anamnèse. Une décélération brutale, un écrasement ou encore un souffle d’explosion semblent les principaux pourvoyeurs de rupture aortique. L’isthme aortique est le site classiquement atteint. Il est retrouvé dans 91 % des cas dans les études cliniques et dans 62 % des cas dans les études sur cadavres [6]. Dans une étude récente multicentrique de l’American Association for the Surgery of Trauma (AAST), réalisée à partir de 110 patients ayant une lésion aortique post-traumatique, 74 % des lésions aortiques siégeaient au niveau de l’isthme [7]. Ce site correspond à une zone anatomique de fragilité de l’aorte du fait, d’une part, de la plus faible épaisseur pariétale aortique (zone de fermeture du canal artériel) et, d’autre part, de sa situation à la jonction entre la crosse aortique « mobile » et l’aorte thoracique descendante « fixée » à la paroi thoracique postérieure par les artères intercostales. La lésion anatomique, en générale unique, dépend de la sévérité du traumatisme. En cas de déchirure intimale isolée ou associée à une déchirure de la média, le sang est contenu par l’adventice donnant un aspect de faux anévrisme avec un risque de rupture différé (figure 1). En cas de rupture totale des 3 tuniques de la paroi aortique, le patient décède sur les lieux du traumatisme. La lésion aortique peut être classée en 4 grades : Grade I : déchirure intimale ; Grade II : hématome intramural ; Grade III : pseudo anévrisme ; Grade IV : rupture aortique [2]. Il faut un traumatisme à haute énergie pour entraîner une telle lésion : la force nécessaire pour créer une déchirure aortique serait équivalente à une pression endovasculaire de 2500 mmHg [8]. Dans la majorité des séries publiées, les accidents de la circulation représentent la principale cause de rupture traumatique de l’aorte [7,9—11]. L’incidence réelle des ruptures traumatiques de l’isthme aortique n’est pas connue mais on peut penser qu’elle est en diminution grâce aux mesures directes et indirectes de prévention en matière de sécurité routière. La rupture aortique est donc une pathologie hospitalière rare, associée à une mortalité très élevée. Historiquement, l’évolution spontanée des patients avec une RTIA est marquée par le décès de la majorité des victimes sur le lieu de l’accident, un quart des survivants décédant de rupture secondaire dans les 24 h et les deux tiers dans les 15 jours [12,13]. Dans une étude plus récente sur l’incidence et le pronostic des RTIA, Richens et al. ont étudié

Traitement des ruptures traumatiques de l’isthme aortique en 2014 Tableau I

163

Récapitulatifs des guidelines de la Society for Vascular Surgery 2011.

Guideline

Consensus

Grade de la recommandation

Niveau de preuve

Choix du traitement

Le traitement endovasculaire pourrait être préféré au traitement chirurgical ou à la surveillance simple

2

C

Délai du traitement

Il devrait être urgent (< 24 h), ou au plus tard avant la sortie de l’hospitalisation

2

C

Lésions minimes aortiques

Une surveillance devrait être réalisée pour les lésions de type I

2

C

Type de traitement pour les patients jeunes

Un traitement endovasculaire serait préférable indépendamment de l’âge si la conformation anatomique est favorable

2

C

Respect de l’artère sous-clavière gauche

Une revascularisation de l’artère sous-clavière est suggérée

2

C

Utilisation de l’héparinothérapie

Elle est suggérée mais à des doses plus faibles qu’en routine

2

C

Drainage spinal

Il n’est pas suggéré

2

C

Type d’anesthésie

Une anesthésie générale est suggérée

2

C

Abord fémoral

Un abord chirurgical est suggéré

2

C

14 435 accidentés de la route impliqués dans 7067 accidents de la circulation entre 1992 et 1999 au Royaume-Uni [6]. Sur les 613 patients décédés, 21 % avaient une rupture de l’aorte. La survie des patients avec une RTIA était de 9 %. Sur les 20 % de patients arrivant vivant à l’hôpital et en l’absence de traitement adapté, la survie était seulement 70 % à 6 h, 40 à 50 % à 24 h et 10 % à 4 mois. Mais la mortalité de ces patients est plus liée aux lésions associées qu’à la rupture aortique elle-même. Le risque de rupture décroît avec le temps mais persiste à très long terme. Dix ans après le traumatisme, le risque de rupture aortique secondaire à un faux anévrisme non traité est évalué à 20 % dans les 5 prochaines années [14].

Figure 1.

Problématique de la prise en charge des polytraumatisés Stratégie diagnostique La prise en charge initiale des patients atteints de RTIA est guidée par la gravité clinique et repose sur des recommandations de bonne pratique. Les premières mesures de réanimation et le bilan lésionnel provisoire sont réalisés sur place par l’équipe du SAMU. Lorsque le patient est instable, tous les moyens doivent être mis en œuvre pour maintenir un état hémodynamique satisfaisant (remplissage, transfusion, hémostase chirurgicale, embolisation). Une RTIA doit

Pièces opératoires montrant la rupture de la paroi aortique (flèche)

164 être évoquée de principe chez tous les patients ayant subi un traumatisme avec un mécanisme lésionnel pourvoyeur de RTIA, avec ou sans lésion associé : accident de la circulation à moyenne ou haute cinétique, forte décélération, chute d’une hauteur élevée, écrasement thoracique violent. Les signes cliniques évocateurs sont rares et non spécifiques (ischémie de membre inférieur, paraplégie, douleur thoracique). Lorsque le patient est stable, un scanner corps entier est rapidement réalisé. Lorsqu’il est instable, un premier bilan de débrouillage au lit du patient est réalisé avec une radiographie de thorax et une échographie abdominale et thoracique. À l’issu de ce premier bilan, le traitement des lésions mettant en jeu le pronostic vital est effectué (splénectomie, embolisation, dérivation ventriculaire intracrânienne). La radiographie thoracique de face est le plus souvent anormale. Un élargissement du médiastin supérieur (dans 80 % des cas environ), un élargissement de la silhouette de l’aorte descendante, une déviation trachéale vers la droite sont les signes radiologiques évocateurs de RTIA dans ce contexte. Bien que non spécifique, un hémothorax gauche avec refoulement du massif cardiaque vers la droite peut être observé dans les cas les plus graves. Le scanner corps entier est l’examen de référence. Il permet d’établir un bilan lésionnel complet et de poser le diagnostic de RTIA avec certitude. L’aortographie n’a plus qu’une place très limitée dans la prise en charge diagnostique de ces patients. Elle peut encore être réalisée, « de passage », après embolisation première en cas de choc hémorragique et de suspicion de RTIA. Il faut savoir évoquer le diagnostic même en l’absence de lésion associée. En effet, les RTIA sont isolées dans 8 à 27 % des cas [15]. Mais dans la majorité des séries récentes, les patients ont une ou plusieurs lésions associées pouvant engager le pronostic vital (tableau II) [16—38].

Délai de prise en charge Le timing de la prise en charge chirurgicale des blessés ayant une RTIA a longtemps fait l’objet de débats car les données de la littérature étaient contrastées. Le dogme du traitement en urgence absolue, initié par les travaux de Parmley, a été remis en question dès le début des années 1970 par ceux de Akins qui privilégiaient un traitement différé des lésions aortiques chez des patients sélectionnés ayant des lésions associées majeures. Il est admis que pour les patients avec un bilan lésionnel lourd (saignement en particulier), il existe un bénéfice à effectuer une prise en charge différée de la rupture contenue de l’isthme à condition que le contrôle tensionnel soit optimal. En effet, si le risque de rupture aortique secondaire est proche de 4 % (2 à 5 % selon les études), il est plus faible que la mortalité liée à une héparinisation ou à une CEC précoce sur des lésions pulmonaires ou cérébrales hémorragiques (3 à 33 %). Des travaux comparant plusieurs stratégies de prise en charge (chirurgie immédiate versus chirurgie ou TEV différé versus traitement médical seul) ont montré une mortalité plus faible en cas de prise en charge différée [39]. Le délai moyen de prise en charge était de 17 jours à 5,4 mois selon les séries. Avec le traitement endovasculaire, ce débat n’a plus vraiment lieu d’être du fait de l’absence de morbidité liée à la CEC et à l’héparinisation massive nécessaire au traitement chirurgical. Le traitement peut donc être effectué

P.-E. Noly et al. dès stabilisation hémodynamique et respiratoire du patient et dès que le matériel est disponible. Dans la méta-analyse de Lettinga-van de Poll et al. [40], 61 % des patients (142 sur les 230 dont les données sont disponibles) ont été traités dans les 24 premières heures.

Traitement endovasculaire Depuis le premier cas de RTIA traité chirurgicalement avec succès par Dshanelidze (1923), le traitement chirurgical par thoracotomie gauche réalisée en extrême urgence était la règle jusqu’au début des années 2000. Malgré les progrès thérapeutiques, la mortalité opératoire restait élevée : 18,2 % avec CEC ; 12,3 % avec shunt et 19,2 % avec clampage simple. Le facteur pronostic le plus important était une durée de clampage aortique inférieure à 45 min [11]. La plupart des décès surviennent en postopératoire, principalement du fait de l’aggravation des lésions associées, essentiellement hémorragiques, aggravées par l’héparinisation et la CEC.

Rationnel Le développement des techniques endovasculaires a considérablement modifié la stratégie de prise en charge et le pronostic de ces patients [7,41]. Le TEV répond aux deux limites du traitement chirurgical : il peut être réalisé précocement, avec ou sans héparinothérapie selon la présence d’une hémorragie associée, et le risque de paraplégie est plus faible. Les premiers cas de patients traités par voie endovasculaire ont été décrits par Kato et al. en 1997 [42]. Aucune étude randomisée n’a été réalisée depuis, mais plusieurs études mono ou multicentriques, rétrospectives [16] ou prospectives [7], comparant le traitement chirurgical au traitement endovasculaire des RTIA ont été publiées. Les avantages théoriques du TEV par rapport à la chirurgie ouverte sont les suivants : une durée opératoire plus courte, l’absence d’héparinisation massive d’une CEC chez des patients à risque hémorragique, la possibilité de combiner le traitement avec des embolisations artérielles pour hémorragie d’organe plein, l’absence de thoracotomie donc moins de complication respiratoire ; un risque de paraplégie plus faible et une mortalité opératoire plus faible (tableau III) [7,10,43—46]. Les hypothèses concernant la réduction du risque de paraplégie seront discutées dans un autre paragraphe. La principale limite du TEV est l’absence de données fiables sur le devenir à long terme des endoprothèses et le suivi des patients. Les patients implantés avec une endoprothèse ont une moyenne d’âge proche de 30 ans et une espérance de vie identique à celle de la population générale. La durée de vie de la prothèse doit donc être au moins de 40 à 70 ans, sans déformation ni fracture ou migration. Le risque de complications à long terme est en partie conditionné par un choix de prothèse adaptée à l’anatomie du patient. Le choix du diamètre n’est pas toujours aisé chez des patients en collapsus, sous noradrénaline, car il existe peu de données sur l’évolution des diamètres aortiques dans ces conditions. Le diamètre peut paraître faussement abaissé, d’autant plus que le diamètre de l’aorte thoracique croît avec l’âge [47]. La qualité du suivi est également une

Traitement des ruptures traumatiques de l’isthme aortique en 2014 Tableau II

165

Importance des lésions associées à la RTIA dans la littérature.

Auteur/année

Nombre total de patients

Patients avec lésion associée engageant le pronostic vital (%)

Nombre de décès

Décès liés aux lésions associées (%)

Lachat, 2002 [19]

12

11 (91)

1

0 (0)

Orford, 2003 [28]

9

9 (100)

1

1 (100)

Broux, 2006 [29]

13

13 (100)

2

2 (100)

Melnitchouk, 2004 [30]

15

NC

1

1 (100)

Amabile, 2006 [31]

17

17 (100)

0

0

Scheinert, 2004 [32]

10

7 (70)

0

0

Bent, 2007 [18]

13

9 (69)

0

0

Marty-Ané, 2003 [33]

9

8 (89)

0

0

Tehrani, 2006 [24]

30

30 (100)

2

2 (100)

Orend, 2002 [22]

11

11 (100)

1

1 (100)

Marcheix, 2006 [21]

33

33 (100)

0

0

Saratzis, 2007 [23]

9

9 (100)

0

0

Urgnami, 2009 [5]

20

20 (100)

1

1 (100)

Agostinelli, 2006 [17]

15

15 (100)

3

3 (100)

Pitton, 2008 [4]

9

8 (89)

1

1 (100)

Lioupis, 2012 [20]

24

24 (100)

0

0

Riesenman, 2007 [34]

14

12 (85)

2

2 (100)

Czermak, 2002 [26]

6

6 (100)

0

0

Estrera, 2010 [27]

32

NC

0

0

Dake, 2011 [25]

60

60 (100)

8

8 (100)

Wellons, 2004 [35]

9

9 (100)

1

1 (100)

McPhee, 2007 [36]

8

8 (100)

2

2 (100)

Go, 2007 [37]

10

8 (80)

0

0

Canaud, 2011 [16]

40

40 (100)

1

1 (100)

Demetriades, 2008 [7]

125

53 (43,5)

9

6 (66,6)

Hoornweg, 2006 [38]

28

NC

4

4 (100)

NC : non connu.

limite. En effet, la proportion de patients perdus de vue oscille entre 0 et 75 % selon les séries. L’amélioration du matériel a permis de réduire les difficultés techniques en rapport avec l’anatomie des patients. La contre-indication à la pose d’une endoprothèse pour des raisons anatomiques est de moins en moins fréquente pour les équipes entraînées. Dans une méta-analyse incluant 17 études rétrospectives publiées entre 2003 et 2007 et portant sur 589 patients (369 traités par chirurgie ouverte et 220 par voie endovasculaire), Xenos et al. [48] rapportent une mortalité liée à l’intervention plus faible avec le TEV (OR, 0,31 ; 95 % CI, 0,15—0,66 ; p = 0,002), une mortalité à 30 jours plus faible (OR, 0,44 ; 95 % CI, 0,25—0,78 ; p = 0,005) et un risque de

paraplégie postopératoire plus faible (OR, 0,32 ; 95 % CI, 0,1—0,93 ; p = 0,037). Ces résultats en faveur du traitement endovasculaire sont confirmés dans des études plus récentes (tableau III).

Bilan préopératoire Le bilan préopératoire spécifique à la pose d’une endoprothèse comprend uniquement un angioscanner pan aortique, avec des coupes millimétriques, au temps artériel précoce et descendant jusqu’aux axes ilio-fémoraux. Ces coupes sont réalisées de manière systématique lors du scanner corps entier pour le bilan lésionnel du blessé. Le développement de l’angioscanner multibarrettes a rendu l’aortographie

166

P.-E. Noly et al.

Tableau III Comparaison entre la chirurgie ouverte et le traitement endovasculaire sur la mortalité et la survenue de paraplégie. Auteur/année

Nombre total de patient

Traitement chirurgical

Traitement endovasculaire

n

n

Paraplégie

Mortalité

n

Paraplégie

Mortalité

Rousseau [43], 2005

76

35

7%

21 %

29

0%

0%

Langanay [44], 2009

70

68

1,5 %

18,5 %

2

0%

0%

Midgley [45], 2007

30

16

6,25 %

31,2 %

12

0%

0%

Mosquera [46], 2011

66

22

0%

22,7 %

7

0%

14,3 %

Schumacher [10], 2006

205

132

0%

18,9 %

73

0%

4%

Demetriades [7], 2008

193

68

2,9 %

23,5 %

125

0,8 %

7,2 %

obsolète et constitue une pierre angulaire de la prise en charge des patients polytraumatisés. Les images scannographiques acquises précocement après injection de produit de contraste donnent une description détaillée de la lésion aortique (localisation par rapport à l’artère sous-clavière, diamètre et longueur de la lésion, présence d’un flap intimal, d’un faux anévrisme) et permettent d’évaluer la faisabilité de la technique endovasculaire (figure 2). Celle-ci repose sur la mesure des diamètres des différents segments aortiques, mesure du collet proximal et de la distance entre l’artère sous-clavière et carotide commune gauches et la lésion. L’évaluation des axes ilio-fémoraux, la mesure de leur diamètre, de la tortuosité et des calcifications de ces

mêmes artères doivent être réalisées bien que les patients soient souvent jeunes avec des artères souples et non calcifiées. Sans que cela soit prouvé, le diamètre du réseau artériel est probablement un peu diminué dans un contexte de collapsus et d’utilisation d’amines vasopressives à forte dose. La distance minimale recommandée entre l’artère sous-clavière gauche et la lésion (zone de fixation proximale ou longueur du collet proximal) est de 15 mm pour le traitement endovasculaire. Le choix de la prothèse (diamètre, longueur, marque) est donc directement conditionné par le résultat des mesures réalisées sur les coupes scannographiques millimétriques. On s’attachera également à rechercher des signes de gravité scannographique comme

Figure 2. Place du scanner dans la prise en charge diagnostique des RTIA A. Coupe axiale montrant une image en coup d’ongle au niveau de l’isthme aortique. B. Reconstruction en mode MPR permettant les mesures de l’aorte. C. Coupe coronale mettant en évidence une rupture hépatique (carré jaune) et rénale droite (étoile jaune). D. Coupe coronale mettant en évidence une contusion pulmonaire majeure bilatérale avec l’inhalation de 2 dents dans la bronche souche droite (flèche jaune).

Traitement des ruptures traumatiques de l’isthme aortique en 2014 une fuite du produit de contraste, un hémomédiastin ou un hémothorax gauche, témoins de la suffusion de sang à travers l’adventice aortique et d’un risque de rupture accru.

Technique opératoire Le traitement endovasculaire doit être réalisé idéalement en salle hybride sous amplificateur de brillance fluoroscopique et sous anesthésie générale. Le matériel et l’équipe nécessaire à la conversion en chirurgie ouverte (CEC, perfusionniste, boîte d’instruments) doivent être disponibles et prêts à intervenir en urgence. La mise en place de l’endoprothèse peut être réalisée de manière totalement percutanée ou via une courte incision en regard de l’artère fémorale. L’héparinisation générale du patient n’est pas réalisée lorsque le risque hémorragique est élevé. La taille de l’endoprothèse est déterminée au préalable grâce aux mesures scannographiques des diamètres aortiques. Dans la majorité des séries, le diamètre de l’endoprothèse est surestimé de 10 à 20 % par rapport au diamètre aortique [5,17—23]. Il faut garder à l’esprit que le diamètre mesuré de l’aorte peut être faussement abaissé par la vasoconstriction chez les patients en état de choc et sous catécholamines. Il est primordial que l’endoprothèse repose sur une zone saine d’aorte suffisamment longue ; au moins 1,5 à 2 cm sont nécessaires en proximal et en distal de la lésion aortique [2]. Ceci entraîne la couverture de l’artère sous-clavière gauche dans 13 à 60 % des cas selon les séries. L’obstruction de celle-ci est en général asymptomatique et sans conséquence fonctionnelle pour le patient. Dans une méta-analyse regroupant 284 patients [40], l’artère sousclavière était couverte dans 26,6 % des cas et seulement 3 patients (1,05 %) ont eu une complication ischémique du membre supérieur gauche nécessitant une revascularisation chirurgicale.

Résultats du traitement endovasculaire Mortalité Les résultats à court terme du TEV des RTIA sont excellents (tableau IV). Comparé à la chirurgie conventionnelle, le taux de complications liées à la procédure est relativement faible. Dans une méta-analyse portant sur 7 études comparant le TEV et la chirurgie ouverte, Lettinga-van de Poll et al. [40] retrouvaient une mortalité à 30 jours de 18,9 % chez les patients traités par chirurgie ouverte et de 4 % chez ceux traités par TEV. Aucun cas de paraplégie liée à une ischémie médullaire n’a été observé. La mortalité opératoire globale était de 5,6 % (16 patients sur 284) et de 1,40 % (4 sur 284) si l’on prend en compte la mortalité liée directement à la procédure. Dans une méta-analyse incluant 17 études rétrospectives menées entre 2003 et 2007, Xenos et al. [48] retrouvaient une mortalité relative à la procédure de 2 %, la mortalité à 30 jours était de 8 % avec un taux de paraplégie nul. Dans l’étude prospective multicentrique de l’American Association for the Surgery of Trauma (AAST), Demetriades et al. rapportaient une mortalité à 30 jours de 7,2 % sur 125 patients traités consécutivement par TEV [7]. Plus récemment, une étude de la Society for Vascular Surgery

167

Outcomes Committee montrait une mortalité de 9,1 % à 30 jours et 14,4 % à un an chez 60 patients.

Paraplégie La prévalence de la paraplégie après TEV est beaucoup plus faible que celle après traitement chirurgical conventionnel (tableaux III—V). Dans l’étude de l’AAST [7], sur 125 patients, un seul cas de paraplégie a été rapporté (0,8 %). Ce taux est confirmé par la majorité des autres études [21,40,48]. En l’absence de traumatisme du rachis, le mécanisme physiopathologique de la paraplégie postopératoire est d’origine ischémique. Lors d’un clampage aortique juste en aval de l’artère sous-clavière gauche, le taux de paraplégie est directement lié au temps de clampage, allant de 0 % pour un clampage inférieur à 15 minutes à 100 % en cas de clampage supérieur à 1 heure [49]. Le risque de paraplégie est également lié au niveau de clampage (toujours haut, proche de l’artère sous-clavière en cas de rupture de l’isthme) et de la longueur d’aorte clampée. La majorité des collatérales de l’artère spinale antérieure est donc exclue de la circulation le temps du clampage aortique. Le très faible taux de paraplégie dans le traitement endovasculaire des RTIA peut être expliqué par l’anatomie de l’artère spinale antérieure dont les collatérales sont étagées sur toute la longueur du rachis (artère vertébrale, artères intercostales, artères lombaires). La zone d’aorte thoracique couverte par l’endoprothèse et donc le nombre de collatérales exclues est assez faible. Par conséquent, la vascularisation de l’artère spinale antérieure est assurée par un nombre suffisant de collatérale. De plus, l’artère d’Adamkiewicz ne devrait pas être couverte dans la plupart des cas car son origine est comprise entre T9 et T12 dans 75 % des cas, soit plus bas que l’extrémité distale de l’endoprothèse. L’ischémie médullaire peut également être favorisée, lors du traitement chirurgical conventionnel, par une baisse de la pression de perfusion médullaire, liée à une instabilité hémodynamique, un œdème médullaire, un saignement, aux catécholamines.

Complications spécifiques Les complications spécifiques du traitement endovasculaire sont celles liées à la pose de l’endoprothèse (complications sur les abords vasculaires périphériques, endofuites de type 1 immédiates) et celles liées à l’évolution de l’endoprothèse au cours du temps (migration, rupture, endofuite) (tableau V). Le taux de complication spécifique varie de 4,2 à 20,0 % selon les séries. La complication la plus fréquente est l’endofuite de type 1 ou 2.

Problématique du suivi des patients et des complications potentielles de l’endoprothèse aortique à long terme La principale limite du traitement endovasculaire des RTIA est celle du suivi des patients et du devenir de l’endoprothèse à long terme. L’âge moyen lors de l’implantation de la prothèse est proche de 40 ans et les

168

Tableau IV

Principaux résultats du traitement endovasculaire des RTIA dans la littérature. n

Succès

Mortalité à 30 jours

Mortalité tardive

Complications per procédure

Endofuite

Paraplégie

Complications Suivi moyen vasculaires (mois)

% patients suivis

Lachat, 2002 [19]

12

100 %

1 (8,3 %)

0

0

1

0

0

17

NC

Orford, 2003 [28]

9

100 %

1 (11,1 %)

0

0

0

0

0

21

100 %

Broux, 2006 [29]

13

100 %

0

0

0

NS

0

NS

31

84 %

Melnitchouk, 2004 [30]

15

100 %

0

0

0

2

0

NS

34

100 %

Amabile, 2006 [31]

17

84 %

0

0

3 (17 %)

1 (5,8 %)

0

3 (17 %)

13,3

94 %

Scheinert, 2004 [32]

10

100 %

0

0

0

0

0

1 (10 %)

15

NC

Bent, 2007 [18]

13

100 %

0

0

2 (15,3 %)

0

0

1 (7,6 %)

28,9

100 %

Marty-Ané, 2003 [33]

9

89 %

0

0

0

0

0

0

NC

100 %

Tehrani, 2006 [24]

30

100 %

2 (%)

0

3 (10 %)

0

0

1 (3,4 %)

11,6

NC

Orend, 2002 [22]

11

100 %

1 (9 %)

0

1 (9 %)

1 (9 %)

0

0

14

NC

Marcheix, 2006 [21]

33

90,9 %

0

0

3 (9 %)

3 (9 %)

0

0

32,4

94,6

Saratzis, 2007 [23]

9

100 %

0

0

1 (11,1 %)

1 (11,1 %)

0

0

12

100 %

Urgnami, 2009 [5]

20

95 %

1 (5 %)

0

1 (5 %)

0

0

1 (5 %)

58

100 %

Agostinelli, 2006 [17]

15

100 %

2 (13,3 %)

0

0

0

0

0

29

100 %

Pitton, 2008 [4]

9

100 %

0

1 (11,1 %)

1 (11,1 %)

1 (11,1 %)

0

0

46,4

88,9 %

Lioupis, 2012 [20]

24

96 %

0

2 (8,3 %)

1 (4,1 %)

1 (4,1 %)

0

0

NC

83 %

Riesenman, 2007 [34]

14

87 %

2 (14,2 %)

0

0

0

0

0

9,4

100 %

Czermak, 2002 [26]

6

84 %

0

0

1 (16,6 %)

1 (16,6 %)

0

0

19,5

100 %

Estrera, 2010 [27]

32

100 %

0

0

1 (3,1 %)

1 (3,1 %)

0

0

NC

56 %

Dake, 2011 [25]

60

100 %

5 (8,3 %)

2 (4,2 %)

11 (18,3 %)

0

0

11 (18,3 %)

12

100 %

Wellons, 2004 [35]

9

89 %

1 (11,1 %)

0

3 (33,3 %)

1 (11,1 %)

0

2 (22,2 %)

NC

77 %

McPhee, 2007 [36]

8

100 %

2 (25 %)

0

2 (25 %)

0

NC

2 (25 %)

16,6

NC

Go, 2007 [37]

10

90 %

0

0

1 (10 %)

1 (10 %)

0

0

20

100 %

Demetriades, 2008 [7]

125

100 %

9 (7,2 %)

0

23 (18,4 %)

18 (14,4 %)

1 (0,8 %)

4 (3,2 %)

15

100 %

Hoornweg, 2006 [38]

28

100 %

0

0

0

0

0

0

26,5

100 %

Moyenne

541

96 %

27 (4,9 %)

5 (0,9 %)

48 (8,8 %)

33 (6,25 %)

1 (0,1 %)

17 (3,2 %)

19,3

75 %

NC : non connu.

P.-E. Noly et al.

Auteur/année

Traitement des ruptures traumatiques de l’isthme aortique en 2014 Tableau V

169

Prévalence des complications spécifiques précoces et tardives du traitement endovasculaire.

Auteur/année

Nombre de patients

Complications totales

Lettinga-van de Poll [40]

284

Demetriades, 2008 [8]

Précoces

Tardives

Endofuites

Vasculaires

Endofuite, migration, rupture de stent

31 (10,9 %)

19 (6,7 %)

6 (2,1 %)

10 (3,5 %)

125

25 (20 %)

18 (14,4 %)

8 (6,4 %)

NC

Marcheix, 2006 [21]

33

7 (21 %)

3 (9 %)

3 (9 %)

2 (6,1 %)

Dake, 2011 [25]

60

NC

NC

7 (11,7 %)

0

NC : non connu.

patients traités et qui survivent ont une espérance de vie proche de celle de la population générale. La prothèse doit donc avoir une durée de vie moyenne de 40 ans sans détérioration ni migration. Très peu d’études ont été publiées sur le suivi à long terme des patients car la technique est encore récente. La durée moyenne de suivi dans la littérature est comprise entre 11,6 mois [24] et 46,3 ± 43,9 mois [4] avec une moyenne d’environ 25 mois. Aucune donnée sur l’imagerie à long terme et le devenir de l’endoprothèse aortique après implantation pour le traitement des RTIA n’a été publiée jusqu’à maintenant. La perte du suivi des patients est également une limite comme dans tout autre traitement. Le pourcentage des patients suivis à distance varie de 100 % [18,25,26] à 56 % [27]. Les modalités de surveillances sont empiriques et varient selon les études. Le suivi lors de la première année peut nécessiter, selon les équipes, un scanner à la sortie du patient puis à 3 et 6 mois ou seulement un scanner thoracique à 1 an. Un suivi prolongé par un TDM annuel était réalisé dans toutes les publications précisant le suivi. Ceci soulève la question de l’irradiation par les rayons X en cas de surveillance annuelle par scanner thoracique. Nous devons garder en tête que l’irradiation délivrée pendant un scanner thoracique non injecté équivaut à environ 8 mS, soit 2,7 fois la dose d’irradiation naturelle annuelle. Certains proposent de faire une surveillance par IRM ou une surveillance plus espacée. L’augmentation physiologique du diamètre aortique (environ 1,5 mm tous les 10 ans) pourrait être une source de complication des endoprothèse aortiques. Le diamètre de l’aorte thoracique peut croître de plus de 10 mm entre l’adolescence et un âge plus avancé. Pour cette raison, on recommande une surestimation du diamètre de la prothèse de 10 à 20 %. Dans les tailles limites, par exemple lorsque l’on utilise une endoprothèse de 27 mm pour une aorte mesurée à 24 mm, l’augmentation du diamètre aortique pourrait entraîner un risque de migration, de collapsus de prothèse ou encore d’endofuite. Forbes et al. ont revu 21 scanners de 21 patients traités par voie endovasculaire pour RTIA avec un suivi moyen de 2,6 ans [47]. Ils retrouvaient une augmentation du diamètre aortique juste en aval de l’artère sous-clavière gauche 5 fois plus rapide que dans la population générale. L’endoprothèse idéale doit être souple, avec un introducteur de petite taille (inférieur à 16 Fr), de diamètre adaptable à celui de l’aorte, avec une faible zone

d’encrage, repositionnable. Malgré l’amélioration des matériaux, aucune des endoprothèses ne remplit ces conditions. La combinaison d’une arche aortique angulée et étroite avec une endoprothèse rigide entraîne un « bec » correspondant à une malposition de la prothèse par rapport au mur aortique. Ceci est associé à 64 % des cas à une endofuite et à un risque accru de collapsus de prothèse. Le collapsus de prothèse est favorisé par une angulation de l’arche aortique prononcée et à un surdimensionnement trop important. Il peut survenir immédiatement après la pause ou après plusieurs années. La durabilité des prothèses est également un point obscur du traitement. Les endoprothèses aortiques ont été approuvées par la FDA dans le cadre du traitement des anévrismes de l’aorte thoracique. Contrairement aux patients traités pour un anévrisme de l’aorte thoracique, les patients traités pour RTIA ont une espérance de vie bien plus longue. Certaines études ont montré un taux de réintervention supérieur avec le traitement endovasculaire par rapport au traitement chirurgical conventionnel.

Recommandations actuelles de prise en charge Du fait de l’absence d’essai randomisé comparant le traitement chirurgical au traitement par TEVAR, les recommandations sont basées sur des études rétrospectives et sur une méta-analyse regroupant 7768 patients (Guidelines of the Society of Vascular Surgery [SVS] 2011 [1] et le consensus de la Society of Thoracic Surgeons Endovascular Surgery Task Force [STS] en 2008 [2]). Toutes les recommandations sont donc classées grade 2 et de niveau C. La supériorité du traitement endovasculaire sur le traitement chirurgical n’a donc pas été formellement prouvée. Cependant, l’attitude adoptée dans la majorité des cas est une prise en charge immédiate par traitement endovasculaire, non seulement pour les patients à haut risque de rupture mais aussi pour les patients stables cliniquement. Celle-ci est réalisée dès que la survie première du patient est assurée, en générale dans les 4 à 6 heures après l’admission à l’hôpital. Le traitement endovasculaire est devenu le traitement de choix pour les patients jeunes, en urgence, pour les patients polytraumatisés avec un risque hémorragique et un risque de rupture importants (hémothorax gauche récidivant, hémomédiastin, syndrome de pseudo-coarctation, instabilité hémodynamique, importance de l’hématome en

170 TDM). Le délai de prise en charge préconisé est court, de moins de 24 heures. En cas de lésion aortique minime (déchirure intimale isolée), un traitement médical peut être effectué. Sur le plan technique, l’anesthésie générale est préférée à l’anesthésie locale. Un abord chirurgical de l’artère fémorale commune est recommandé. L’artère sous-clavière gauche peut être couverte mais il faudra vérifier la bonne revascularisation à rétro de l’artère vertébrale gauche ou l’intégrité de l’artère vertébrale droite. L’héparinisation systématique à faible dose est recommandée mais sera adaptée selon le rapport bénéfice/risque du patient. Le drainage du LCR n’est pas recommandé en routine. Concernant les diamètres de la prothèse, un surdimensionnement de 20 % maximal est recommandé et un collet d’aorte saine d’une longueur de 2 cm est souhaitable.

Conclusion La rupture traumatique de l’isthme aortique est une cause majeure de mortalité chez les patients traumatisés. Le développement de la prise en charge endovasculaire des patients atteints de rupture traumatique de l’isthme aortique a largement contribué à l’amélioration du pronostic immédiat de ces patients. Les patients ne décèdent quasiment plus de leur lésion aortique ou de la chirurgie, le pronostic précoce reste donc étroitement lié aux comorbidités et aux lésions associées. Le traitement par chirurgie ouverte était le traitement de référence jusqu’à récemment mais le traitement endovasculaire des RTIA s’est progressivement imposé comme traitement de choix. Il a l’avantage d’éviter une anticoagulation curative et une thoracotomie, un clampage aortique qui sont la source d’une morbi-mortalité élevée, particulièrement chez les patients avec des lésions associées sévères. Cependant, le devenir de l’endoprothèse à long terme et très long terme reste incertain et des études complémentaires sont nécessaires.

Déclaration d’intérêts les auteurs déclarent ne pas avoir de conflit d’intérêt en relation avec cet article.

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