Chirurgie de la Main 2002 ; 21 : 157-65 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés S1297-3203(02)00104-X/REV
Article original
Transferts tendineux pour paralysie radiale Raoul Tubiana ∗ Institut de la Main, 6, square Jouvenet, 75016 Paris, France
C’est au niveau du poignet et de la main, que la paralysie radiale a les plus graves répercussions fonctionnelles car trois mouvements importants sont perdus sans suppléance possible : l’extension du poignet, l’extension des premières phalanges des doigts longs et l’extension-écartement de la colonne du pouce. Il paraît donc nécessaire de rétablir par des transferts différents l’extension du poignet, l’extension des phalanges proximales des doigts, l’extension et l’écartement en rétropulsion du pouce. Il faut aussi, comme l’a démontré Zachary [37] conserver un muscle assurant la stabilité du poignet. De très nombreux procédés de transferts tendineux ont été décrits, Boyes en 1960 en dénombrait 58. Cette liste s’est allongée depuis. Aucune des techniques proposées n’est entièrement satisfaisante et ne peut être utilisée sans discernement à tous les patients. Nous faisons appel à deux variétés de montage selon que nous utilisons ou pas le cubital antérieur comme transfert [32]. D’une façon générale, nous pratiquons de larges voies d’abord sur les faces antérieure et postérieure de l’avant-bras (Figs. 1 et 2) : 1) Elles permettent le prélèvement aisé des muscles moteurs et leur libération sur une grande longueur afin de leur donner un trajet plus direct et d’éviter leur angulation lors du transfert. 2) Elles permettent aussi de libérer les constantes adhérences autour des tendons et des muscles paralysés, sur toute leur longueur, voire de pratiquer leur excision partielle.
∗ Correspondance et tirés à part.
3) Elles offrent la possibilité d’adapter le plan opératoire aux différents cas individuels et éventuellement de faire passer un tendon au travers de la membrane osseuse.
Figure 1. Voie d’abord antérieure.
Figure 2. Voie d’abord postérieure.
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4) Elles facilitent l’ajustement des différentes sutures tendineuses qui se trouvent placées dans le même champ opératoire. 5) Les incisions cutanées sont décalées des sutures tendineuses. Après avoir libéré les muscles moteurs et les tendons receveurs, nous commençons par fixer les transferts sur les tendons des doigts et du pouce car les mouvements du poignet sont utiles pour adapter la tension de ces transferts. Le transfert d’extension du poignet est fixé en dernier et sa technique est la même quelque soit le schéma de montage adopté. Dans tous les cas, les soins postopératoires ont une grande importance et influent sur la qualité des résultats. 1. MONTAGE UTILISANT LE CUBITAL ANTÉRIEUR (FLEXOR CARPI ULNARIS) PT → ECRB + ECRL centralisé FCU → EDC + EIP PL → EPL C’est le montage le plus courant. 1.1. Prélèvement du cubital antérieur et du petit palmaire Il faut libérer le tendon du cubital antérieur (FCU) jusqu’au pli de flexion du poignet. On le sectionne à ce niveau en évitant soigneusement de blesser le pédicule cubital sous-jacent. On dégage le muscle sur toute la hauteur de l’incision en le libérant de ses attaches aponévrotiques qu’on peut ruginer. Parfois, un petit pédicule vasculo-nerveux aborde le muscle assez bas, on est amené à le sectionner. Le pédicule principal est très proximal abordant le muscle par sa face profonde à environ 6 cm de son insertion épitrochéenne. Le moyen le plus sûr de le protéger est de le découvrir. La cloison aponévrotique interne est réséquée, largement, de manière à faire passer le cubital antérieur de la face antérieure à la face postérieure de l’avant-bras sans aucune coudure. On ne risque pas de manquer de longueur lorsqu’on évite une angulation, le muscle dérouté vers la face postérieure de l’avant-bras selon un trajet rectiligne atteint facilement le poignet. Un fil de traction est passé au niveau de l’extrémité du tendon, il servira à le manipuler.
Figure 3. Le tendon du cubital antérieur est sectionné au-dessus du pisiforme. Il est libéré de ses insertions musculaires sur quelques centimètres et est divisé en deux languettes.
Le corps musculaire s’attache très bas sur le tendon, il est préférable de réséquer les fibres charnues distales en excès, ne conservant que le tendon nu sur une longueur de 5 cm environ, afin de diminuer la saillie inesthétique du transfert au-dessus du poignet et de faciliter les sutures. Le tendon du petit palmaire est sectionné à sa partie distale. la longue incision sinueuse antérieure permet de le libérer sur toute sa longueur (Fig. 3). 1.2. Libération des tendons extenseurs des doigts On évite autant que possible de sectionner les grosses veines sur la face postérieure de l’avant-bras que l’on récline à l’aide de lacs de caoutchouc. L’aponévrose dorsale est épaisse à sa partie distale. Elle est largement réséquée pour que les tendons et leurs sutures glissent au contact du tissu cellulo-graisseux sous-cutané. On découvre l’extenseur commun des doigts ainsi que les extenseurs propres de l’index et du cinquième doigt et le long extenseur du pouce. Les tendons de l’extenseur commun des doigts sont souvent multiples et sont reliés entre eux par des tendinets. On tire proximalement sur ces tendons afin de libérer leurs adhérences dans les coulisses ostéofibreuses et on doit obtenir l’extension individuelle complète de chaque doigt, c’est là un temps essentiel.
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Figure 4. Vue postérieure montrant tous les tendons extenseurs passant sous le ligament annulaire postérieur du carpe. Désinsertion du rond pronateur sur le radius prolongé par une languette périostée au voisinage de la branche sensitive du nerf radial.
1.3. Prélèvement du rond pronateur L’aponévrose antébrachiale est incisée entre le long supinateur et le premier radial. On découvre le tendon nacré du rond pronateur qui, provenant de la face antérieure de l’avant-bras, s’enroule sur le bord externe de la diaphyse radiale, sous le long supinateur. On le désinsère en prélevant le périoste qui prolonge l’insertion tendineuse sur la plus grande longueur possible (2 cm environ), ce qui facilitera sa fixation. Un fil de traction est faufilé dans le tendon, il permet d’attirer le rond pronateur. Il persiste parfois des adhérences qui brident son jeu et qu’on doit totalement libérer (Fig. 4). À ce stade, les trois muscles moteurs libérés sont prêts à être transférés. Il faut préparer les tendons receveurs avant de procéder aux sutures, les libérer sur toute la longueur et leur donner un nouveau trajet quand c’est nécessaire, en particulier pour le long extenseur du pouce et le premier radial. 1.4. Recentrage de l’insertion du premier radial (ECRL) Quelque soit le type de montage, il faut s’assurer que la traction sur le deuxième radial entraîne une extension complète du poignet. Il est important de bien libérer les adhérences autour des tendons radiaux, inactifs souvent depuis de longs mois et qui risquent en laissant accolés les deux tendons d’augmenter la déviation radiale qui constitue l’écueil majeur de ce type de transferts.
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Pour lutter contre cette déviation, nous avons essayé plusieurs techniques. Nous nous sommes d’abord contentés de transférer le rond pronateur sur le seul deuxième radial. Puis, pour plus de sécurité et pour éviter que les adhérences, en se reformant entre les tendons radiaux n’entraînent une récidive de la déviation, nous avons sectionné le tendon du premier radial et l’avons solidarisé au deuxième, mais la correction de l’inclinaison radiale restait encore incomplète. La technique que nous utilisons maintenant est la suivante [32] : Le tendon du premier radial est désinséré, attiré au-dessus du ligament annulaire postérieur, libéré jusqu’à sa jonction musculaire. L’extenseur propre de l’index (EIP) dont le corps musculaire descend très bas est sectionné 3 à 4 cm au-dessus du ligament annulaire, son tendon est attiré distalement hors du tunnel ostéo-fibreux pour lui donner un trajet superficiel par rapport au ligament annulaire. La place de l’EIP dans le compartiment de l’extenseur commun sera occupée par le tendon dérouté du premier radial. Le tendon du premier radial est enfin fixé sur la partie cubitale de la base du 3e métacarpien en-dedans de l’insertion du 2e radial, symétriquement à lui par rapport à l’axe longitudinal du poignet. La fixation doit être solide, à l’aide de fil non résorbable et d’une agrafe (Fig. 5). 1.5. Ablation du garrot Il est préférable de lever le garrot et de pratiquer une hémostase rigoureuse avant la fixation des transferts, afin de mieux évaluer leut tension. 1.6. Fixation du cubital antérieur sur les extenseurs des doigts On peut pratiquer une suture tendineuse terminoterminale entre le cubital antérieur et l’extenseur commun des doigts. Nous utilisons une technique de transfixion qui permet mieux d’ajuster la tension pour chaque doigt. Comme le tendon du cubital antérieur est volumineux, nous le dédoublons sur une longueur de 5 cm environ, une bandelette servira à transfixier les tendons de l’extenseur commun, l’autre bandelette renforcera et enrobera la suture. Le siège de l’anastomose est situé à environ 5 cm au-dessus du bord proximal du ligament annulaire dorsal du carpe, le poignet étant en rectitude. La
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Figure 5. Recentrage des tendons du premier radial (ECRL) et du long extenseur du pouce (EPL). Le tendon de l’ECRL est désinséré sur la base du deuxième métacarpien et réinséré sur la partie cubitale de la base du troisième métacarpien. Le tendon de l’EPL est sectionné au niveau de la jonction musculo-tendineuse, attiré distalement hors de sa coulisse, puis passé à nouveau sous le ligament annulaire postérieur dans le compartiment des radiaux, utilisant la place laissée vacante par le recentrage de l’ECRL, pour être suturé au petit palmaire.
suture doit rester proximale au ligament, le poignet étant totalement fléchi. Un aide maintient le poignet en extension à 40◦ , le pouce et les doigts étendus. On perfore à l’aide de la « pince à tendon » dessinée à cet effet, ou à l’aide d’un ténotome, selon une ligne oblique en bas et en dehors et successivement en les comptant pour ne pas en oublier, les tendons extenseur commun des 5e , 4e , 3e et 2e doigts. L’hémi-tendon du cubital antérieur est attiré à travers tous les tendons à ranimer. Les tendons de l’extenseur commun sont fixés l’un après l’autre au-dessus de la transfixion, à l’aide d’un fil non résorbable qui empêche que la fente faite dans chaque tendon pour le passage du transfert ne s’élargisse (Fig. 6). Nous réséquons alors sur 2 cm le muscle paralysé de l’extenseur commun des doigts au-dessus de cette suture. La section de l’extenseur commun préconisée par Moberg et Nachemson [20] a l’avantage de diminuer l’angulation au niveau de la fixation du transfert. Nous réglons alors la tension pour chaque doigt séparément, en jouant sur chaque suture. La tension doit être plus importante au niveau des doigts radiaux que sur les doigts cubitaux. Les mouvements
Figure 6. Fixation de la languette profonde du cubital antérieur au travers des tendons de l’extenseur commun des doigts. Les tendons extenseurs propres de l’index et de l’auriculaire ne sont pas concernés par le premier montage. L’extenseur commun des doigts sera sectionné au-dessus des sutures. Un trait transversal indique l’emplacement de la section.
du poignet permettent cet ajustement : le poignet étant placé en extension, les doigts cubitaux doivent pouvoir être facilement et totalement fléchis, l’index et le médius plus difficilement (il se produit toujours un relâchement secondaire). Si la tension est excessive, le patient ne pourra récupérer une flexion complète des doigts le poignet étant en rectitude ou légèrement fléchi. Le poignet étant légèrement fléchi à 25◦ , on doit obtenir l’extension complète des premières phalanges. Chacun des tendons perforés est suturé indépendamment à l’hémi-tendon moteur, par des points non résorbables en U. La seconde valve du tendon du cubital antérieur est alors rabattue, ce qui permet d’ajuster avec encore plus de précision la tension pour chaque doigt. Le tendon extenseur propre de l’index qui n’a pas été transfixié est alors suturé au cubital antérieur et parfait le montage. L’extenseur propre du cinquième doigt est laissé libre sauf si la bandelette de l’extenseur commun allant au cinquième doigt est insuffisante pour assurer son extension complète, ce qui peut être testé en tirant sur l’extenseur comun ; dans ce cas, il est utile de fixer l’extenseur propre au transfert en évitant une tension trop importante (Fig. 7). On peut encore accroître l’effet d’extension en supprimant comme le propose Moberg, le ligament annulaire dorsal du poignet. Il en résulte une subluxation dorsale des tendons extenseurs, assez inesthétique ; il est préférable de ne réséquer que partiellement le ligament à sa partie proximale,
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radiale que le tubercule de Lister, à environ 1,5 cm en dehors de lui, et sa nouvelle poulie l’empêche de se luxer en avant (Fig. 5). Le petit palmaire, abordé par l’incision antérieure, est aussi largement libéré (en évitant de léser le rameau sensitif du nerf médian situé en dehors du tendon), de manière à le diriger sans coudure à la rencontre du long extenseur du pouce. Les deux tendons sont suturés sur le bord radial de l’avant-bras, au-dessus du poignet, le pouce étant en abduction radiale, extension et rétropulsion complètes, le poignet en rectitude, le petit palmaire étant sous tension. La réanimation du long extenseur du pouce rerouté par le petit palmaire suffit pour entraîner la première colonne en extension, abduction, rendant inutile la réanimation du long abducteur. Figure 7. L’extenseur commun paralysé est réséqué sur environ 2 cm. Au-dessous de lui, on voit les sections du long extenseur du pouce et de l’extenseur propre de l’index. La bandelette superficielle du cubital antérieur est rabattue sur la suture de l’extenseur commun et ajuste la tension de chaque tendon, y compris ceux des extenseurs propres.
lorsque les sutures risquent de parvenir à son contact en flexion du poignet. 1.7. Transfert tendineux sur le pouce On commence par tester au niveau de la tabatière anatomique, l’action du court extenseur du pouce (EPB) sur la colonne du pouce. Si la traction sur ce tendon entraîne une extension des deux phalanges du pouce et une abduction de l’ensemble de la colonne, il suffit de fixer le moteur sur ce tendon (Cuperman, 1980). Dans la majorité des cas l’action de l’EPB est limitée à la phalange proximale et il faudra agir sur le tendon du long extenseur. Le tendon du long extenseur du pouce (EPL) est sectionné au niveau de sa jonction musculotendineuse au tiers inférieur de l’avant-bras. Il est attiré distalement hors de sa coulisse ostéofibreuse. Nous avons modifié la technique de Scuderi [26] car la suture du tendon du LEP avec le tendon du petit palmaire selon un trajet direct parallèle au premier métacarpien, laissait persister un défaut notable de rétroposition du pouce. Le tendon du LEP est passé à nouveau sous le ligament annulaire postérieur dans le compartiment des tendons radiaux, occupant la place laissée vacante par le déplacement du tendon du premier radial. Il se trouve dans une situation plus
2. MONTAGE UTILISANT UN FLÉCHISSEUR SUPERFICIEL ET LE GRAND PALMAIRE (FCR) PT → ECRB + ECRL centralisé FS IV → EDC FCR → EPL + EIP PL → APL + EPB Le prélèvement de deux fléchisseurs superficiels comme le fait Boyes [4], nous paraît excessif, chacun de ces transferts diminue la force et l’indépendance du doigt sur lequel il a été prélevé. Le prélèvement du FS de l’annulaire est celui qui paraît le plus indiqué, laissant moins de séquelles que sur le médius. Le fléchisseur superficiel du V est trop souvent d’une force insuffisante. La technique utilisée est la suivante : l’incision antébrachiale antérieure en zigzag, légèrement plus médiane que pour le prélèvement du cubital antérieur, permet d’attirer le FS et de sectionner le tendon du Grand Palmaire au niveau du poignet, ce dernier étant fléchi. Il est libéré jusqu’au tiers moyen de l’avantbras et est amené à la face postérieure de l’avant-bras en contournant le radius. Le corps musculaire du FS bien libéré est passé en-dedans du muscle fléchisseur commun profond. Le pédicule interosseux antérieur est alors repéré et récliné sur un lac de caoutchouc. Une large fenêtre est réséquée dans la membrane interosseuse juste au contact du bord proximal du carré pronateur.
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Figure 8. Les tendons long abducteur, court extenseur, long extenseur du pouce ainsi que celui de l’extenseur propre de l’index sont sectionnés au niveau de leur jonction musculotendineuse. Le tendon du premier radial est désinséré. Tous ces tendons sont attirés hors de leurs coulisses sous le ligament annulaire postérieur.
Si l’orifice est trop proximal le tendon n’aura pas un trajet direct et risque d’accrocher sur le bord inférieur de l’orifice la membrane interosseuse. Au niveau de la loge postérieure de l’avant-bras, on commence comme dans la technique précédente par libérer tous les tendons qui seront réanimés. L’extenseur propre de l’index, le long extenseur du pouce, le court extenseur du pouce et le long abducteur du pouce sont sectionnés au niveau de leur jonction musculotendineuse. Le tendon du premier radial est désinséré sur la base du 2e métacarpien. Tous ces tendons sont extraits de leur coulisse ostéofibreuse (Fig. 8).
Le tendon du grand palmaire est fixé à la fois sur le tendon de l’extenseur propre de l’index et sur celui du long extenseur du pouce. Le tendon du LEP rerouté dans la coulisse préalablement occupée par le premier radial, transfixie le tendon plus gros du grand palmaire. Cette suture doit être aussi proximale que possible afin de ne pas gêner le glissement du tendon sous le ligament annulaire postérieur. La fixation du tendon de l’extenseur propre de l’index pourra être plus distale car ce tendon peut être passé superficiellement au ligament annulaire dorsal et avoir ainsi une traction directe dans l’axe du 2e métacarpien. Le tendon du premier radial est recentré, occupant la place de l’extenseur propre de l’index et est fixé sur la partie cubitale de la base du 3e métacarpien, comme dans la technique décrite précédemment. Le tendon du fléchisseur superficiel, dérouté dans la loge postérieure est fixé sur l’extenseur commun des doigts (Fig. 9). Les difficultés de glissement d’une suture volumineuse du FS sur les extenseurs des doigts, située proximalement au ligament annulaire postérieur peuvent être évitées en faisant passer le tendon du FS sous le ligament et en le suturant aux tendons extenseurs des doigts sur la face dorsale de la main. Le tendon du FS est divisé en quatre bandelettes qui sont suturées aux quatre tendons extenseurs commun des doigts (Fig. 10). Le long abducteur et le court extenseur du pouce sont réanimés par le petit palmaire lorsqu’il existe. Les muscles paralysés du long abducteur et court extenseur du pouce peuvent être réséqués au-dessus de la jonction musculotendineuse, pour ne pas gêner le jeu des transferts. En l’absence de petit palmaire, on peut faire un transfert du long supinateur (brachio-radialis), lorsqu’il n’a pas été paralysé, sur les tendons court extenseur et long abducteur du pouce, sinon on se contente d’une ténodèse. Ces deux tendons sont sectionnés à leur jonction musculotendineuse à environ 6 cm au-dessus de la styloïde radiale. Ils vont former une boucle autour de l’insertion styloïdienne du long supinateur et sont suturés à eux-même sous tension. 2.1. Fixation du rond pronateur Dans tous les cas, le rond pronateur est fixé en dernier. Il est passé sous la peau, superficiellement au long supinateur et aborde les muscles radiaux
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Figure 10. Le tendon du fléchisseur superficiel est passé sous le ligament annulaire postérieur et est fixé sur les tendons extenseurs des doigts. Les muscles paralysés sont en partie réséqués. Figure 9. Le tendon du fléchisseur superficiel de l’annulaire est passé au travers de la membrane interosseuse au contact du carré pronateur. Le tendon du petit palmaire est transféré sur ceux du long abducteur et court fléchisseur du pouce. Le tendon du grand palmaire sur ceux du long extenseur du pouce dérouté et de l’extenseur propre de l’index. Le tendon du premier radial est recentré : 1) fléchisseur superficiel ; 2) extenseur commun des doigts ; 3) pédicule interosseux antérieur ; 4) carré pronateur ; 5) petit palmaire (PL) ; 6) grand palmaire sur lequel est fixé le long extenseur du pouce et l’extenseur propre de l’index ; 7) ECRL (premier radial) centralisé ; 8) ECRB ; 9) long abducteur du pouce (APL) ; 10) extenseur propre de l’index (EIP).
au niveau de leur jonction musculotendineuse. La languette périostée du rond pronateur transfixie à plusieurs reprises le tendon du deuxième radial, ainsi que celui du premier radial recentré. La fixation est assurée par une série de points non résorbables 3/0, le poignet étant maintenu en extension à 40◦ les doigts étendus et le muscle moteur sous tension. 2.2. Fermeture – appareillage – rééducation Les différentes incisions sont suturées en deux plans de manière à éviter les adhérences avec les tendons.
On applique une attelle palmaire qu’on a intérêt à confectionner à l’avance, avant l’opération. Cette attelle ne doit jamais maintenir le poignet et les doigts en extension complète. Les poignet est étendu à 50◦ et à 10◦ d’inclinaison cubitale, les articulations interphalangiennes des doigts sont en extension presque complète mais les MP sont à 15◦ de flexion, le pouce est maintenu en extension, abduction et rétroposition, l’avant-bras en pronation complète. L’attelle remonte au-dessus du coude pour empêcher les mouvements de pronosupination. Cet appareillage est gardé d’une façon continue pendant 2 semaines. À cette date, seules les articulations interphalangiennes des doigts sont libérées. L’attelle est enlevée au bout de 3 semaines. Elle est remplacée par une attelle dynamique, comprenant un appui dorsal antébrachial sur lequel on attache un système dynamique élastique (broche ou ressort) auquel est suspendu un appui situé sur la face palmaire des premières phalanges. Ainsi la presque totalité de la surface palmaire de la main se trouve dégagée, permettant des mouvements équilibrés du poignet de des doigts. Le relâchement des longs fléchisseurs des doigts
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permettra l’extension des articulations métacarpophalangiennes et la flexion du poignet ; la flexion des doigts facilitera l’extension du poignet ; la flexion du poignet et des doigts ne peut être faite simultanément. Il est important d’exercer séparément les mouvements du poignet et ceux des doigts. Ce n’est que progressivement, à partir de la 5e semaine, que l’on autorisera les mouvements actifs du poignet et la flexion complète des doigts. 2.3. Choix de la technique On évite de prélever un tendon fléchisseur superficiel lorsque l’indépendance de la flexion de chaque doigt doit être préservée, en particulier chez les sujets utilisant un clavier. Dans les cas ou le patient exerce un métier de force sans avoir besoin d’une grande dextérité digitale, on aura plutôt tendance à renforcer l’extension du poignet en utilisant un transfert de fléchisseur superficiel sur les doigts, en conservant le cubital postérieur. La technique utilisant un fléchisseur superficiel est plus délicate et la rééducation plus longue si bien que nous avons tendance à transférer le fléchisseur superficiel plutôt chez des sujets jeunes et coopérants. En cas de paralysie distale ne touchant que la branche postérieure du nerf radial, le nerf interosseux postérieur, la persistance de l’innervation des muscles radiaux, entraîne une déviation radiale difficile à compenser. Dans ce cas, le prélèvement du cubital antérieur accentuerait encore le déséquilibre. Il est certes tentant d’utiliser l’ECRL comme transfert afin de diminuer la composante radiale, mais il faut s’assurer auparavant que l’ECRB est suffisamment actif pour permettre une extension complète du poignet ce qui n’est pas toujours le cas. Dans ces formes, le transfert du grand palmaire (FCR) sur l’extenseur commun nous paraît particulièrement indiqué. Il faut toujours conserver le deuxième radial et le cubital antérieur. RÉFÉRENCES 1 Axhausen. Berliner Klin Wochenschr 1916 ; 7. 2 Bevin AG. Early tendon transfer for radial nerve transsection. Hand 1976 ; 8 : 134-6. 3 Biesalski K, Mayer L. Die physiologische Schnerverps flanzung. Berlin : Springer ; 1916. p. 330.
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