Traumatismes abdominaux : les lésions élémentaires

Traumatismes abdominaux : les lésions élémentaires

J Radiol 2008;89:1812-32 © 2008. Éditions Françaises de Radiologie. Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés formation médicale continue ...

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J Radiol 2008;89:1812-32 © 2008. Éditions Françaises de Radiologie. Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

formation médicale continue

le point sur…

Traumatismes abdominaux : les lésions élémentaires C Ridereau-Zins (1), J Lebigot (1), G Bouhours (2), C Casa (3) et C Aubé (1)

Abstract

Résumé

Abdominal trauma: spectrum of lesions J Radiol 2008;89:1812-32

Les lésions traumatiques abdominales surviennent le plus souvent au cours d’un polytraumatisme. La détection et la description précise des signes d’hémopéritoine, des lésions des organes pleins (contusions, hématomes, lacérations et fractures), des signes de perforation digestive et d’hémorragie active permettent une prise en charge multidisciplinaire optimale. Les lésions intestino-mésentériques sont de diagnostic difficile et elles peuvent être occultées par d’autres lésions plus fréquentes (rate, foie). L’exploration tomodensitométrique s’impose en cas de traumatisme grave.

Abdominal injuries are more often observed in the setting of polytrauma. Detection and accurate description of hemoperitoneum, solid organ injuries (contusion, hematoma, laceration, fracture), bowel perforation and arterial bleeding allow optimal multidisciplinary management. Mesenteric and bowel injuries are often difficult to diagnose and may be masked by the presence of more frequent injuries (spleen, liver). MDCT is the gold standard imaging modality for severe blunt abdominal trauma. Key words: Abdomen, injuries. Liver, injuries. Spleen, injuries. Intestines, injuries. Abdomen, hemorrhage.

Mots-clés : Abdomen, traumatisme. Foie, traumatisme. Rate, traumatisme. Tube digestif, traumatisme. Abdomen, hémorragie. Urgence.

n France, les traumatismes graves sont la première cause de décès des adultes de moins de 40 ans (1). Les lésions abdominales s’intègrent le plus souvent dans le tableau d’un polytraumatisme associant des lésions cérébrales, thoraciques ou osseuses. Le bilan lésionnel initial conditionne la prise en charge. Celle-ci a été profondément modifiée ces dernières années grâce aux scanners multidétecteurs qui permettent un diagnostic lésionnel rapide et précis, orientant le traitement vers une attitude chirurgicale ou conservatrice, couplée à un éventuel geste d’embolisation. Le radiologue doit savoir gérer l’exploration radiologique d’un blessé, identifier et analyser les lésions élémentaires, reconnaître quelques pièges diagnostiques. Connaissant l’impact thérapeutique des différentes lésions, il doit en transmettre une description claire aux réanimateurs et chirurgiens. Les objectifs de ce cours sur les traumatismes abdominaux sont de décrire et d’illustrer les lésions élémentaires en soulignant des points particulièrement importants pour chaque organe.

E

éléments : variables physiologiques, éléments de cinétique, lésions anatomiques, réanimation pré-hospitalière et terrain (tableau I). Un seul des critères (hormis le terrain) suffit à caractériser la gravité du traumatisme, à orienter le patient vers une unité de déchocage et vers la réalisation d’un examen tomodensitométrique si l’état hémodynamique le permet. En effet, en pratique quotidienne, deux situations se dessinent rapidement avec une gestion différente des examens (tableau II) : • celle d’un patient demeurant instable : une imagerie rapide, pratiquée en salle d’accueil des urgences vitales (SAUV) comprend la réalisation d’une radiographie de thorax, de bassin et une échographie abdominale et permet de guider un geste urgent (drainage thoracique) et/ou d’hémostase (laparotomie ou thoracotomie d’hémostase, embolisation pelvienne) ; • celle d’un patient stable ou suffisamment stabilisé sur le plan hémodynamique par une réanimation pré- et intra-hospitalière : une exploration tomodensitométrique (TDM) « corps entier » est l’examen de référence (3).

Le contexte du polytraumatisé

Les différents examens d’imagerie

À la phase initiale, le polytraumatisé est un blessé grave soit atteint de plusieurs lésions, dont une au moins engage le pronostic vital à court terme, soit dont le mécanisme ou la violence du traumatisme laisse penser que de telles lésions existent. Ainsi, des critères de gravités pour le triage pré-hospitalier des patients traumatisés ont été élaborés (2). Ils sont fondés sur l’analyse de cinq

Après avoir éliminé une urgence vitale extra-digestive telle qu’un hématome extra-dural ou une rupture de l’aorte thoracique, le radiologue doit rechercher prioritairement une hémorragie active ou une perforation digestive qui constituent les deux lésions abdominales urgentes. L’échographie et la tomodensitométrie sont réalisées dans un contexte différent.

1. L’échographie abdominopelvienne (1) Département de Radiologie ; (2) Pôle Anesthésie-Réanimation ; (3) Service de Chirurgie Viscérale, CHU d’Angers, 4 rue Larrey, 49933 Angers cedex 9, France. Correspondance : C Ridereau-Zins E-mail : [email protected]

Elle s’adresse aux patients instables sur le plan hémodynamique, qui ne peuvent être transportés sans risque en salle de scanner. Décrite comme un examen de débrouillage sous l’acronyme de

C Ridereau-Zins et al.

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FAST (Focused Assessment with Sonography for Trauma) (4), elle explore systématiquement les quatre sites où les collections hémorragiques peuvent être identifiées : la loge inter-hépatorénale de Morison, l’espace péri-splénique, le cul-de-sac de Douglas, les culs-de-sac pleuraux et le péricarde. Sa sensibilité varie dans la littérature de 42 à 100 %, en fonction particulièrement des populations étudiées et des critères principaux de jugement mais elle présente une excellente valeur diagnostique pour les patients en instabilité hémodynamique (5-6). L’échographie abdominopelvienne recherche essentiellement la présence d’un épanchement intrapéritonéal. Elle doit tenter de quantifier grossièrement son abondance ; le score proposé par Huang et al est le plus simple (7) : pour un total de 3 points, l’épanchement est estimé supérieur à 1 litre (tableau III). Qualifier l’épanchement en identifiant du sang est parfois facile devant des images hyperéchogènes au sein du liquide (fig. 1). L’identification de la présence d’air est plus difficile. Elle est évoquée en cas de petites images hyperéchogènes au sein du liquide. Un examen des principaux organes pleins est souhaitable. Les lésions parenchymateuses sont observées sous forme de plages le plus souvent hyperéchogènes, hétérogènes, aux contours irréguliers (fig. 2). Un hématome sous-capsulaire se traduit par une image lenticulaire, périphérique, hypo ou hyperéchogène. Cette analyse, décrite sous l’acronyme de « BOAST » (Bedside Organ Assessment with Sonography in Trauma) dans la littérature anglosaxonne, ne doit pas faire perdre de temps et le risque de sousévaluation ou de méconnaissance de lésions doit être connu (8).

Tableau I Critères de gravité pour le triage des patients traumatisés (Critères de Vittel) (2). Évaluation

Critères de gravité

Variables physiologiques

Score de Glasgow < 13 Saturation O2 < 90 % Pression artérielle systolique < 90 mmHg

Éléments de cinétique

Éjection d’un véhicule Autre passager décédé dans le même accident Chute > 6 m Victime projetée ou écrasée Appréciation globale (déformation véhicule, vitesse estimée, absence casque, absence ceinture) Blast

Lésions anatomiques

Trauma pénétrant : tête, cou, thorax, abdomen, bassin, bras, cuisse Volet thoracique Brûlure sévère, inhalation de fumée Fracas du bassin Suspicion d’atteinte médullaire Amputation au niveau du poignet, de la cheville ou au-dessus Ischémie aiguë de membre

Réanimation pré-hospitalière

Ventilation assistée Remplissage > 1 000 ml colloïde Catécholamines Pantalon antichoc gonflé

Terrain (à évaluer)

Âge > 65 ans Insuffisance cardiaque ou coronarienne Insuffisance respiratoire Grossesse (deuxième et troisième trimestre) Trouble de la crase sanguine

2. La tomodensitométrie (TDM) Parce qu’elle permet une acquisition volumique rapide avec exploration de plusieurs régions anatomiques et une optimisation

Tableau II Stratégie de l’imagerie dans la prise en charge initiale du patient traumatisé grave.

Patient traumatisé grave Patient stabilisé

Patient instable

Radiographies thorax, bassin Échographie abdominale

TDM « corps entier » +/– radiographies extrémités

Patient stabilisé Réanimation

Artériographie (embolisation, stent)

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Chirurgie

1813

Drainage thoracique Lapartomie Embolisation

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Fig. 1 : a b

Fig. 2 : a b

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a b Aspect échographique d’un hémopéritoine. Image hyperéchogène (flèche blanche) au sein d’un épanchement liquide siégeant dans l’espace de Morison. Épanchement liquidien dans le cul-de-sac de Douglas.

a b Lésion traumatique hépatique. En échographie : plage hyperéchogène (flèches blanches), aux contours flous, située en plein parenchyme hépatique, semblant être peu étendue. En TDM : la lésion correspond à une fracture des segments VII et VIII (têtes de flèche), plus étendue que l’image visualisée en échographie.

Tableau III Score échographique de l’épanchement péritonéal, d’après Huang et al. (7). Évaluation de la quantité de liquide intra-abdominal Points Espace de Morison

Cul-de-sac de Douglas

Significatif (> 2 mm)

2

Minime (≤ 2 mm)

1

Significatif (> 2 mm)

2

Minime (≤ 2 mm)

1

Espace périsplénique

1

Gouttière paracolique

1

Espace inter-anses intestinales

2

des temps d’exploration vasculaire, la TDM s’impose en cas de traumatisme grave supposé ou avéré (9-12). Elle n’est toutefois possible que pour un patient stable ou stabilisé sur le plan hémodynamique.

La recherche des lésions est guidée par la clinique et comprend des éléments standardisés : une exploration systématique du crâne incluant la totalité du massif facial, puis du rachis cervical, suivie d’une exploration du thorax et de la cavité abdominale. L’exploration de l’abdomen débute par un passage en contraste spontané à la recherche d’hyperdensités spontanées traduisant la présence de sang. Cette séquence est importante pour détecter des petits hématomes, notamment mésentériques, et décider d’un éventuel temps artériel (délai de 30 secondes ou détecteur de bolus centré sur l’aorte) en cas d’hémopéritoine ; cette phase artérielle permettra une analyse en MIP utile pour l’analyse vasculaire en vue d’une éventuelle embolisation d’hémostase. Le passage au temps portal (délai de 70 à 90 s, selon l’état tensionnel du patient) est toutefois le temps le plus important car il permet l’analyse des parenchymes, des parois digestives et de l’ensemble des axes vasculaires ; une hémorragie active d’origine artérielle est encore correctement analysable à ce moment. J Radiol 2008;89

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Un passage au temps sécrétoire (délai d’au moins 10 minutes) doit être envisagé en cas de suspicion de lésion de l’appareil urinaire ; un clampage d’une éventuelle sonde urinaire doit être fait dès le début de l’examen. Les paramètres techniques TDM sont fonction de chaque machine en cherchant une optimisation permettant des reconstructions multiplanaires (RMP) et vasculaires (MIP) de la meilleure qualité possible. Le produit de contraste iodé (concentration à 350 g d’iode/L) est injecté à un débit de 3 à 4 ml/s, à la dose habituelle (2 ml/kg).

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• soit d’une embolisation en cas de persistance d’une instabilité hémodynamique avec suspicion d’un saignement dans une zone peu accessible à un traitement chirurgical (rétropéritoine, pelvis) ou en cas d’une hémorragie active hépatique, splénique ou rénale chez un patient stabilisé pour tenter un traitement conservateur (13). La TDM oriente sur le site de saignement et dirige le cathétérisme. Le taux de réussite de l’embolisation sélective dans le cadre de la facture complexe du pelvis est de 80 à 100 % (14). L’embolisation chez le polytraumatisé ne s’applique qu’au versant artériel des lésions vasculaires ; • soit de la mise en place d’une endoprothèse dans le cadre de rupture traumatique de l’aorte, notamment en cas de contreindication à la circulation extracorporelle – CEC (15).

3. L’artériographie Sa seule indication est thérapeutique. Il s’agit :

a b

Fig. 3 : a b

Fig. 4 : a b

Aspect TDM d’un hémopéritoine. Épanchement liquidien entre les anses grêles (flèche) et dans la gouttière colique droite, spontanément hyperdense (environ 45 UH). Hémopéritoine dans le cul-de-sac de Douglas (flèche) ; à noter l’aspect parfois moins hyperdense de l’épanchement (environ 20 UH).

a b Aspect TDM d’un hémopéritoine. Épanchement liquidien sous diaphragmatique gauche (flèche) nettement hyperdense avant injection IV de produit de contraste. L’hyperdensité de l’épanchement apparaît « effacée » au temps portal (flèche) ; cet aspect souligne l’importance d’une exploration de la cavité abdominale en contraste spontané pour rechercher un hémopéritoine parfois de petite abondance et localisé au contact de l’organe lésé (signe du caillot sentinelle).

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a bc d

Fig. 5 : a-d

Hématome parenchymateux hépatique (a-b) et sous capsulaire splénique (c-d) en TDM. Lésion hyperdense avant injection IV de produit de contraste (a, c) et hypodense après injection IV de produit de contraste au temps portal (b, d).

a bc d

Fig. 6 : a-b c-d

Contusion hépatique (a-b) et lacération splénique (c-d) en TDM. Lésion spontanément hyperdense et hypodense après injection IV de produit de contraste au temps portal : contusion hépatique (flèche blanche). Lésions linéaires hypodenses au temps portal : lacération splénique (têtes de flèches noires).

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a b

Fig. 7 : a b

Fractures splénique (a) et hépatique (b) en TDM : lésions linéaires, hypodenses après injection IV de produit de contraste, traversant tout l’organe ou de longueur supérieure à 3 cm. Fracture splénique simple (flèche blanche). Fractures hépatiques multiples.

a b

Fig. 8 : a b

Perforation digestive en TDM. Pneumopéritoine de petite abondance (flèches blanches). Signes associés traduisant l’existence d’une atteinte intestinale : épaississement pariétal d’une anse grêle (flèche noire) et infiltration du mésentère (tête de flèche noire).

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a bc d

Fig. 9 : a b c d

Hémorragie active en TDM : extravasation de produit de contraste ou « blush » (flèches noires) traduisant l’existence d’un saignement actif au niveau : du foie, de la rate, du mésentère, du diaphragme.

a bc d

Fig. 10 : a-b c-d

Hémorragie active compliquant une fracture du bassin. Extravasation du produit de contraste par plaie d’une branche de l’artère iliaque interne gauche en TDM en coupe axiale (a) et en reconstruction sagittale (b). Confirmation de la lésion vasculaire en artériographie avant embolisation (c) et après embolisation (d). À noter l’aspect de vasoconstriction vasculaire (syndrome hémorragique) et l’intérêt de l’examen TDM pour guider le cathétérisme pour l’embolisation.

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Les lésions élémentaires Leur identification est de difficulté variable. Seront successivement évoqués les signes d’hémopéritoine, les lésions des organes pleins (contusions, hématomes, lacérations et fractures), les signes de perforation digestive, d’hémorragie active et de choc hypovolémique.

1. L’hémopéritoine C’est le premier élément à rechercher devant un traumatisme abdominal ; il est souvent facile à identifier sous forme d’un épanchement intrapéritonéal spontanément hyperdense (environ 45 UH) (fig. 3). Son importance, corrélée à la réanimation nécessaire au maintien d’un état hémodynamique satisfaisant, peut être appréciée par un score similaire à celui appliqué en échographie en codant sa présence dans chaque compartiment de l’abdomen (gouttières pariéto-coliques droite et gauche, espace inter-anses, espace de Morison, cul-de-sac de Douglas) (tableau III) (16-17). Sa localisation élective autour d’un organe, avec une densité spontanée élevée, attire l’attention sur cet organe, faisant rechercher une lésion parfois discrète de celui-ci : c’est le signe du caillot sentinelle. Quelques pièges sont à connaître : la densité d’un authentique hémopéritoine peut être moins élevée, inférieure à 20 UH ; elle peut « s’effacer » au temps injecté (fig. 4). Tout épanchement intrapéritonéal n’est pas obligatoirement du sang, il peut s’agir de liquide digestif (en cas de perforation digestive) ou d’urine (en cas de rupture vésicale intrapéritonéale).

2. Les lésions des organes pleins Leur définition est commune à tous les organes. Il existe pour chacun d’eux une classification, gradant la gravité de l’atteinte établie par l’AAST (American Association for the Surgery of Trauma) (18-19). Ces classifications sont importantes pour une étude des dossiers ; mais, en pratique quotidienne, une description simple et précise est capitale pour communiquer clairement entre les différents intervenants et pour la prise en charge adaptée du polytraumatisé.

2.1. L’hématome Il est une collection hématique. Spontanément hyperdense et hypodense par rapport au parenchyme sain après injection IV de produit de contraste, il peut être intraparenchymateux ou souscapsulaire (fig. 5).

2.2. La contusion Elle est produite par une « pression ou choc » du parenchyme (17). Ses contours sont limités ; elle est hypodense avant et après injection IV de produit de contraste.

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2.4. La fracture C’est une lacération plus profonde. De longueur supérieure à 3 cm ou traversant complètement l’organe, elle peut être simple ou complexe (fig. 7).

3. La perforation digestive Les segments digestifs le plus souvent atteints sont l’intestin grêle et le duodénum, puis le côlon et exceptionnellement l’estomac (20). La présence de gaz extra-digestif signe la perforation digestive. Le diagnostic est facile quand le pneumopéritoine est de grande abondance, associé à un épanchement liquidien, plus difficile lorsqu’il n’y a que quelques bulles d’air. Il faut alors savoir rechercher un défect de la paroi digestive, une infiltration du mésentère ou un épaississement des parois digestives (21) (fig. 8). La perforation peut être de siège rétropéritonéal, notamment dans les atteintes duodénales. L’étude en fenêtrage gazeux est utile pour bien différencier un pneumopéritoine d’un pneumothorax ou d’un emphysème sous-cutané.

4. L’hémorragie active C’est un signe de gravité. Elle se traduit par une extravasation du produit de contraste ou « blush », réalisant une flaque de même densité que celle de l’aorte (fig. 9). Il est capital de préciser le siège exact de cette hémorragie afin de pouvoir guider un geste d’embolisation, réalisé en fonction de l’évolution de l’état hémodynamique du patient. Ce geste s’adresse essentiellement aux lésions artérielles ; celles-ci sont visibles au temps artériel mais également au temps portal sous forme d’une flaque nettement hyperdense. Une étude en MIP est alors intéressante pour diriger le cathétérisme souvent difficile en raison d’un vasospasme secondaire au syndrome hémorragique et notamment dans les fractures complexes du bassin (fig. 10). Les lésions traumatiques du bassin ne sont pas traitées dans ce cours. Il importe cependant de souligner la difficulté d’abord chirurgical en cas d’hémorragie active pelvienne et l’apport des techniques d’embolisation guidées par la TDM (22).

5. Le choc hypovolémique Les signes tomodensitométriques de choc hypovolémique doivent être connus pour ne pas être confondus avec une lésion traumatique. Il s’agit : d’une petite aorte, d’un spasme des artères viscérales, d’un défaut voire d’un non rehaussement de la rate en l’absence d’une atteinte pédiculaire splénique, d’une petite veine cave inférieure (diamètre inférieur à 9 mm à hauteur de l’abouchement des veines rénales), d’un rehaussement intense des parois des anses grêles qui sont dilatées ou d’un hyper rehaussement des deux glandes surrénales (23) (fig. 11). En cas d’insuffisance cardiaque droite majeure, un reflux du produit de contraste injecté par IV peut être observé (fig. 11).

2.3. La lacération

Les lésions particulières

C’est une lésion linéaire, visualisée sous forme d’un trait hypodense avant et après IV de produit de contraste. Au niveau du foie, elle se fait le long des axes vasculaires, réalisant une image en « griffes d’ours ». Elle est peu étendue (moins de 3 cm de longueur) ; elle peut être profonde ou superficielle (fig. 6).

À côté des classifications de gravité propres pour chaque organe, essentielles pour évaluer les dossiers cliniques et parfaitement décrites par l’AAST (18-19), quelques éléments plus particuliers à chaque organe et leurs conséquences thérapeutiques méritent d’être soulignés.

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1. Les lésions spléniques La rate est l’organe le plus souvent touché. La prise en charge des lésions est autant que possible conservatrice, compte tenu des risques infectieux à long terme en cas de splénectomie. La classification AAST grade les lésions en 4 stades, de la lésion superficielle à la fragmentation splénique (tableau IV). Quatre atteintes doivent être clairement identifiées : l’existence d’une hémorragie active, l’atteinte du hile splénique et l’atteinte du pédicule vasculaire qui vont conduire à un geste de chirurgie ou d’embolisation (fig. 12). L’existence d’un hématome sous-capsulaire impose une surveillance attentive car il existe un haut risque de rupture secondaire. Quelques images sont des pièges « classiques » à reconnaître : une hétérogénéité du parenchyme splénique au temps artériel est physiologique, l’homogénéisation du parenchyme se fait au temps portal ; une lobulation des contours ne doit pas être confondue avec une lacération (intérêt des reconstructions multiplanaires) ; l’interface entre une languette de foie gauche venant au contact de la rate et celle-ci ne doit pas être prise pour une fracture.

2. Les lésions hépatiques Le foie est le deuxième organe le plus atteint, le plus souvent au cours d’un polytraumatisme. Le traitement est habituellement conservateur (24). La classification TDM de Mirvis et al. (24) grade les lésions en 5 stades du petit hématome sous-capsulaire à la dévascularisation lobaire (tableau V). Les points importants à signaler sont : le siège sous capsulaire d’un hématome en raison du risque de rupture (fig. 13) ; le siège

Tableau IV Classification des lésions traumatiques de la rate, d’après l’AAST (18). Grade

Rate

1

Lacération superficielle < 1 cm ou hématome sous-capsulaire

2

Rupture capsulaire ou plaie superficielle < 1 cm

3

Plaie profonde (> 1 cm) sans atteinte hilaire

4

Plaie atteignant le hile

5

Fragmentation splénique

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central d’une contusion ou d’une fracture en raison du degré d’atteinte biliaire au niveau de la confluence. Les lésions vasculaires doivent être attentivement recherchées : l’atteinte des veines sus-hépatiques impose une manipulation prudente du foie lors de la chirurgie ; l’atteinte de l’artère hépatique et/ou de ses branches peut conduire à une embolisation. L’atteinte de la veine porte est plus rare et de pronostic plus péjoratif (fig. 14). Des images hypodenses entourant complètement les vaisseaux portaux sont parfois les seules lésions hépatiques observées (fig. 15). Cet « œdème » périportal associe une diffusion de sang, de bile et une dilatation des lymphatiques. Il peut correspondre à des lésions traumatiques minimes mais est souvent en rapport avec une gène au retour veineux (pneumothorax, tamponade) ou une réanimation hydro-électrolytique intense. Il ne doit pas être confondu avec des images de lacération du parenchyme hépatique, plus linéaires et plus irrégulières.

3. Les lésions vésiculaires Elles sont rares, le plus souvent associées à une atteinte hépatique ou duodénale. Elles sont suspectées devant la présence d’une vésicule collabée, au contenu hémorragique, d’anomalies pariétales de la vésicule (épaississement irréguliers des parois) ou un épanchement périvésiculaire (25). Le traitement est chirurgical.

4. Les lésions pancréatiques Rares, elles sont l’apanage de l’enfant et du sujet maigre (pancréas écrasé sur le billot rachidien). Elles sont rencontrées dans des traumatismes graves. La classification AAST distingue 4 stades de la contusion à l’atteinte pancréatique (tableau VI). Les éléments de gravité qui vont conduire à un geste chirurgical sont l’existence d’une fracture, une atteinte du canal de Wirsung et une rupture duodénale (19) (fig. 16). L’atteinte canalaire sera recherchée dans un second temps par cholangiopancréato-IRM.

5. Les lésions intestino-mésentériques Elles relèvent d’un traumatisme violent par choc direct ou phénomène de décélération. Leur pronostic est mauvais avec un taux élevé de mortalité et de morbidité, essentiellement en raison du retard diagnostique (26). Leur traitement est chirurgical. Une rupture intestinale est aisément évoquée en cas de pneumopéritoine franc ; mais celui-ci peut se résumer à quelques bulles

Tableau V Classification TDM des lésions traumatiques du foie, d’après Mirvis et al. (24). Grade

Foie

1

Avulsion capsulaire ; fracture superficielle < 1 cm Hématome sous capsulaire < 1 cm épaisseur ; infiltration périportale

2

Fracture de 1 à 3 cm de profondeur Hématome central ou sous capsulaire de 1 à 3 cm de diamètre

3

Fracture(s) > 3 cm Hématome central ou sous capsulaire > 3 cm

4

Hématome sous-capsulaire ou central > 10 cm Destruction tissulaire ou dévascularisation d’un lobe

5

Destruction tissulaire ou dévascularisation des 2 lobes Lésions des veines hépatiques ou de la veine cave rétrohépatique

Tableau VI Classification des lésions traumatiques du pancréas, d’après l’AAST (19). Grade

Pancréas

1

Contusion ou lacération, canal de Wirsung intact, absence de lésion duodénale

2

Lacération, section complète corps ou queue, canal de Wirsung atteint, sans atteinte duodénale

3

Section complète de la tête

4

a : atteinte duodénopancréatique, atteinte pancréas limitée b : atteinte duodénopancréatique, atteinte pancréas sévère

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Traumatismes abdominaux : les lésions élémentaires

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a b c d e f

Fig. 11 : a b c-d e f

Signes TDM de choc hypovolémique : ces signes traduisent l’existence d’un choc hypovolémique et ne correspondent pas à des lésions propres des organes intéressés. Aorte de petit calibre (flèche blanche) associée à un intense rehaussement des parois des anses grêles qui sont dilatées (« intestin de choc ») (tête de flèche). Intense rehaussement après injection IV de produit de contraste des deux glandes surrénaliennes dont la morphologie reste normale. Trouble de rehaussement du parenchyme splénique, en dehors de toute atteinte vasculaire splénique : faible rehaussement (c) ou absence de rehaussement (d). Reflux du produit de contraste injecté dans la veine sus-hépatique droite. Veine cave inférieure de petit calibre (diamètre inférieur à 9 mm à hauteur de l’abouchement des veines rénales).

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Traumatismes abdominaux : les lésions élémentaires

C Ridereau-Zins et al.

a bc d

Fig. 12 : a-b c-d

Fig. 13 : a-b

Lésions d’hémorragie active de la rate. Extravasation de produit de contraste (« blush ») associée à des fractures du parenchyme splénique en TDM en coupe axiale (a) et en reconstruction coronale (b). Artériographie réalisée pour embolisation chez un patient difficile à stabiliser sur le plan hémodynamique : confirmation du « blush » (c) ; embolisation par mise en place de coils (d).

a b Lésions hépatiques en TDM. Fractures (flèches blanches) et hématome sous-capsulaire (têtes de flèches noires) en coupe axiale (a) et en reconstruction coronale (b) ; le siège sous-capsulaire de l’hématome impose une surveillance attentive en raison du risque de rupture intrapéritonéale.

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Traumatismes abdominaux : les lésions élémentaires

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a b c d e

Fig. 14 : a-c d e

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Lésions vasculaires hépatiques. Plaie d’une segmentaire de la branche droite de l’artère hépatique (flèche blanche) visualisée en TDM au temps portal (a), traitée par embolisation par coils (b-c). Arrachement de la veine sus-hépatique médiane (tête de flèche blanche) avec extravasation du produit de contraste en TDM (temps portal). Plaie de la branche portale droite (flèche noire) responsable d’un volumineux hémopéritoine.

1824

Fig. 15 : a-b

Traumatismes abdominaux : les lésions élémentaires

C Ridereau-Zins et al.

a b Signe d’œdème périportal. Images d’hypodensité visualisées au temps portal, entourant les vaisseaux portaux, correspondant à des lésions traumatiques minimes ou pouvant être en rapport avec une gêne au retour veineux (pneumothorax, tamponade) ou avec une réanimation hydro-électrolytique intense.

a bc d

Fig. 16 : a b c-d

Lésions pancréatiques. Lésion hypodense localisée du parenchyme pancréatique : contusion. Lésion traversant le corps du pancréas : fracture. Présence de quelques bulles d’air extradigestives intra et rétropéritonéales et solution de continuité de la paroi antérieure du duodénum (flèche blanche) (c) : rupture duodénale associée à une fracture de la tête du pancréas (Clichés dû à la courtoisie du Dr Éric Frampas – Nantes).

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Traumatismes abdominaux : les lésions élémentaires

Une hémorragie active par plaie d’un vaisseau mésentérique peut bénéficier d’une embolisation, mais dans des délais rapides car elle est fréquemment abondante. Le côlon est plus rarement touché. Il peut s’agir d’hématomes pariétaux, visualisés sous forme d’un épaississement localisé, modérément hyperdense avant contraste, de la paroi colique (fig. 18) ; ces hématomes ne relèvent pas de la chirurgie contrairement aux perforations. Si le diagnostic de lésions intestino-mésentériques n’a pas été correctement porté lors du bilan initial, il faut savoir renouveler

d’air extra-digestives ou être absent. L’atteinte du mésentère peut être œdémateuse ou hémorragique (hyperdensités spontanées de la graisse mésentérique) (fig. 17) ; son retentissement sur la vascularisation des anses grêles doit être recherché (absence de rehaussement pariétal localisé). Au moindre doute clinique, une exploration chirurgicale de l’abdomen, à la recherche d’une perforation intestinale, est réalisée : tout le tube digestif est examiné en peropératoire et il n’est pas utile d’essayer de mettre en évidence en imagerie par une opacification digestive le siège de la perforation.

Fig. 17 : a-b

Fig. 18 : a b

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a b Contusion mésentérique hémorragique. Lésion limitée spontanément hyperdense (tête de flèche blanche) de la racine du mésentère (a), plus difficile à reconnaître après injection IV de produit de contraste (b) : contusion hémorragique du mésentère, devant faire rechercher une lésion intestinale associée.

a b Lésions digestives. Présence de quelques bulles d’air extradigestives en avant des anses grêles, seuls stigmates de la perforation intestinale (flèche). Épaississement focal de la paroi du côlon droit, peu dense (tête de flèche) : hématome pariétal colique (Cliché dû à la courtoisie du Dr Éric Frampas – Nantes).

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Traumatismes abdominaux : les lésions élémentaires

l’examen TDM abdominal en présence de douleurs ou d’un syndrome fébrile et traquer la moindre anomalie mésentérique.

6. Les lésions diaphragmatiques (27-28) Plus rares, elles peuvent être associées à des lésions thoraciques et abdominales ou isolées. Leur traitement est chirurgical, le plus précocement possible. La coupole gauche est plus souvent atteinte que la droite, le siège préférentiel est postérolatéral. La taille de la déchirure varie entre 2 et 20 centimètres. Elle se manifeste par une discontinuité de la coupole ou par un épaississement focal du diaphragme, visualisé au mieux sur les reconstructions frontales ou sagittales. Le diagnostic est plus aisé quand il existe une herniation intrathoracique des organes abdominaux (estomac, rate, foie) et de la graisse péritonéale. Un signe précoce, avant la constitution de la hernie, est la modification des rapports anatomiques normaux des viscères sous diaphragmatiques avec une bascule postérieure de ceux-ci (signe des « viscères dépendants »).

7. Les lésions surrénaliennes Elles sont habituellement associées à des lésions hépatiques, spléniques ou rénales homolatérales ; la glande droite est plus souvent atteinte que la gauche (29). L’hématome se traduit par une image nodulaire hyperdense en contraste spontané, hypodense après injection de produit de contraste (fig. 19) ; une infiltration de la graisse péri-glandulaire est souvent associée. Les pièges diagnostiques sont les lésions des piliers diaphragmatiques et l’aspect hyperdense de la surrénale en cas de choc hypovolémique. L’existence d’une lésion tumorale surrénalienne sous-jacente sera évoquée ultérieurement en cas de persistance d’un syndrome de masse au-delà de 6 mois. Il n’y a pas d’insuffisance surrénalienne quand l’atteinte est unilatérale.

8. Les lésions rénales et de l’appareil excréteur (30-31) Le plus souvent, il s’agit de lésions mineures, fréquentes. La classification AAST distingue 4 stades comprenant les atteintes corticales, les lésions des voies excrétrices et les plaies vasculaires (tableau VII) (fig. 20).

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Les lésions de l’appareil excréteur peuvent être secondaires soit à une fracture rénale passant par les cavités, soit à une rupture de l’uretère siégeant habituellement au niveau de la jonction pyélourétérale. L’extravasation de l’urine et la constitution d’un urinome sont à rechercher sur un temps tardif (fig. 21). Leur traitement est habituellement conservateur avec pose éventuelle d’une sonde double « J ». L’atteinte vasculaire est classée en deux types, de sanction thérapeutique différente : • soit par rupture du pédicule vasculaire rénal : il existe un défaut de rehaussement de l’ensemble du rein avec signe d’hémorragie active ; le traitement par embolisation doit être proposé ; • soit par dissection vasculaire par des phénomènes de cisaillement exercés sur le pédicule : le défaut de rehaussement parenchymateux est focal, à type d’hypodensité bien limitée, cernée par un liseré capsulaire se rehaussant normalement (corticalis) ; le traitement est conservateur. Les lésions de la vessie peuvent être associées à des fractures du bassin mais également observées dans les traumatismes fermés, surtout en cas de réplétion vésicale au moment de l’examen. La rupture est le plus souvent sous-péritonéale, objectivée par la présence d’urine dans l’espace de Retzius ; son traitement est conservateur (fig. 22). La rupture intrapéritonéale a en revanche une sanction chirurgicale. Elle peut être plus difficile à mettre en évidence et doit être systématiquement recherchée par une acquisition au temps tardif (au moins 10 minutes) en cas d’épanchement intrapéritonéal, surtout s’il n’a pas été visualisé de lésion intrapéritonéale et en cas de fracture de bassin.

9. Les lésions traumatiques de la veine cave inférieure et de l’aorte (32-33) 9.1. Les lésions traumatiques de la veine cave inférieure Ce sont des lésions majeures, avec une mortalité élevée, notamment pour les atteintes rétro ou supra-hépatiques. Le diagnostic est évoqué en présence d’un hématome péricave, d’un aspect irrégulier des parois de la veine ou d’une extravasation du produit de contraste. Ce dernier signe est toutefois inconstant en raison du tamponnement par l’hématome adjacent ou d’une faible pression dans la veine cave. L’exploration chirurgicale s’impose.

9.2. Les lésions traumatiques de l’aorte

Tableau VII Classification des lésions traumatiques des reins, d’après l’AAST (18). Grade

Rein

1

Contusions, hématomes ou petites lacérations du parenchyme qui ne s’étendent pas à la médullaire ou au système excréteur ; infarctus cortical sous-segmentaire.

2

Lésions parenchymateuses profondes qui s’étendent à la médullaire ou au système excréteur, éventuellement associées à une fuite d’urine et/ou à un infarctus rénal segmentaire.

3

Lacérations rénales multiples et lésions vasculaires avec atteinte du pédicule rénal.

4

Rupture-avulsion complète ; lacération du bassinet ou de la jonction pyélocalicielle.

Elles sont plus rares, souvent associées à des fractures rachidiennes et des lésions mésentérico-intestinales. Le siège est souvent sous-rénal. Il peut s’agir d’un hématome intramural (à rechercher sur la série sans injection), d’une déchirure intimale avec éventuelle thrombose (visible sous forme d’un flap pariétal et d’un rétrécissement de la lumière aortique) ou d’une rupture (se traduisant par une extravasation du produit de contraste). Quand elle est peu étendue, en l’absence de rupture, la lésion aortique est accessible à un traitement conservateur par stent (fig. 23). La rupture est le plus souvent létale.

10. Les lésions musculaires Les lésions traumatiques musculaires peuvent être très hémorragiques. Quand il existe une hémorragie active, une embolisation sélective peut être proposée. Un hématome de la paroi abdominale ne doit pas être confondu avec un hémopéritoine. J Radiol 2008;89

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a b

Fig. 19 : a b

Hématome surrénalien. Lésion spontanément hyperdense de la glande surrénalienne droite. Hypodense après injection IV de produit de contraste : hématome surrénalien unilatéral.

a b c

Fig. 20 : a-b

c

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Lésions traumatiques rénales en TDM. Lésion spontanément hyperdense péri-rénale (tête de flèche blanche) (a), hypodense après injection IV de produit de contraste (b) : hématome sous capsulaire du rein droit. Lésion corticale hypodense avant et après injection IV de produit de contraste (flèche blanche), traversant tout le cortex rénal : fracture rénale. Lésion corticale hypodense après injection IV de produit de contraste (temps tubulaire), bien limitée avec respect d’un liseré cortical : ischémie vasculaire par dissection artérielle.

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a bc d

Fig. 21 : a b c-d

Lésions du système excréteur urinaire. Extravasation de l’urine opacifiée (temps tardif) : urinome secondaire à une fracture du parenchyme étendue au calice. Extravasation de l’urine opacifiée (temps sécrétoire tardif) dans la loge rénale : plaie de la jonction pyélo-urétérale droite. Important épanchement liquidien de la loge rénale visualisé au temps tubulaire (c) sans anomalie parenchymateuse, correspondant au temps sécrétoire tardif (15 minutes) à de l’urine opacifiée (d) : rupture pyélique.

a bc

Fig. 22 : a b-c

Lésion vésicale. Vessie en faible réplétion associée à un comblement spontanément isodense de l’espace de Retzius (flèche blanche). Opacification de cet épanchement de l’espace de Retzius au temps sécrétoire tardif par de l’urine, en coupe axiale (b) et en reconstruction sagittale (c) : plaie de vessie sous péritonéale ; à noter : l’intérêt de clamper la sonde urinaire en début d’examen pour pouvoir visualiser la fuite de l’urine.

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a bc

Fig. 23 : a-b c

Traumatisme de l’aorte abdominale. Déchirure intimale peu étendue (flèche blanche) de l’aorte abdominale, en coupe axiale (a) et en reconstruction sagittale (b) en regard de fractures vertébrales (flèches noires) (b). Traitement par mise en place par voie radiologique d’un stent.

Conclusion

Références

Le bilan lésionnel initial d’un polytraumatisé doit être complet et repose sur un examen tomodensitométrique protocolisé. Pour les lésions abdominales, il faut souligner trois points : • la nécessité d’une technique d’exploration scanographique comprenant une série sans injection de produit de contraste puis une série au temps portal après injection ; une série au temps sécrétoire doit être pratiquée en cas de suspicion de lésion de l’appareil urinaire excrétoire ou de la vessie. La lecture de l’examen se fait par l’étude en défilement des coupes axiales puis par celle des reconstructions multiplanaires et vasculaires ; • la nécessité de savoir décrire clairement les différentes lésions traumatiques aux réanimateurs et aux chirurgiens, en connaissant l’impact thérapeutique de ces lésions ; • l’importance de savoir traquer les lésions intestino-mésentériques.

1.

Points à retenir • L’examen tomodensitométrique est l’examen-clé dans la prise en charge d’un polytraumatisé. • L’exploration tomodensitométrique abdominale s’intègre dans un protocole d’exploration d’un polytraumatisme et nécessite une étude en contraste spontané et à des temps vasculaires optimisés selon les lésions suspectées. • Les lésions hépatiques et spléniques sont les plus fréquentes ; un bilan lésionnel précis permet leur prise en charge thérapeutique (traitement conservateur, chirurgie ou embolisation). • Les lésions intestino-mésentériques sont de diagnostic difficile et doivent être recherchées selon un mode de lecture rigoureux ; leur traitement est chirurgical.

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cas clinique

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Cas clinique

Histoire de la maladie

Questions

Homme de 49 ans victime d’un accident de la voie publique, conducteur éjecté de son véhicule. Le patient est stable sur le plan hémodynamique. Il présente des douleurs abdominales associées à une défense. Il n’existe pas de déficit neurologique. Le bilan initial d’imagerie médicale est un examen tomodensitométrique thoraco-abdomino-pelvien réalisé à H2 (fig. 1-3).

1) Quelles sont les lésions observées et quels sont vos arguments radiologiques ? 2) Une exploration supplémentaire est-elle nécessaire ? 3) Quelle va être l’attitude thérapeutique ?

Diagnostic Contusion mésentérique sans lésion intestinale associée ; rupture intrapéritonéale de la vessie avec présence d’urine dans la cavité abdominale ; burst fracture de L3 et fracture du bassin droit.

a b

Fig. 1 :

TDM coupes axiales transverses sans injection de produit de contraste (a-b).

a b

Fig. 2 :

TDM coupes axiales transverses après injection (a-b).

a b

Fig. 3 :

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TDM coupes axiales transverses abdominales en fenêtre osseuse (a) et pelvienne à un temps tardif 9 minutes (b).

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a b

Fig. 4 :

a b

Fig. 5 :

a b

Fig. 6 :

Réponses 1) Il existe plusieurs lésions : • une infiltration modérée du mésentère, visible sur l’exploration de l’abdomen en contraste spontané (fig. 4a flèche blanche) et après injection IV de produit de contraste au temps portal (fig. 5a flèche blanche), sans pneumopéritoine associé ni anomalie pariétale des anses grêles. Les lésions siègent en regard d’une fracture corporéale de L3, de type « burst », précisée en fenêtrage osseux (fig. 6a) et en reconstruction sagittale ; • un épanchement liquidien intrapéritonéal, visible dans les gouttières pariéto-coliques (fig. 5a tête de flèche blanche) ; • un comblement modéré de l’espace de Retzius associé à un aspect vide de la vessie dont les parois sont discrètement spontanément hyperdenses (fig. 4b tête de flèche blanche) ; • des fractures du bassin droit (fig. 4b flèche noire).

2) Une exploration de la cavité abdominale au temps sécrétoire tardif est nécessaire pour affirmer le diagnostic de rupture intrapéritonéale de la vessie, suspectée en raison des fractures du bassin associées à aux discrètes anomalies pariétales et de la vacuité vésicale. Chez ce patient, l’exploration a été réalisée 9 minutes après l’injection de produit de contraste et a montré une petite quantité d’urine opacifiée intravésicale (fig. 6b flèche blanche) ; une acquisition plus tardive (15 minutes) aurait dû être pratiquée pour visualiser le passage intrapéritonéal de l’urine opacifiée. 3) Une exploration chirurgicale de l’abdomen s’impose en raison du tableau clinique abdominal, de l’existence d’un épanchement liquidien intrapéritonéal avec suspicion d’une éventuelle lésion mésentérico-intestinale et un doute sur une rupture vésicale intrapéritonéale. L’intervention a confirmé d’une part la présence d’urine intrapéritonéale avec plaie du dôme vésical, d’autre part l’existence d’une contusion mésentérique minime sans lésion digestive associée. J Radiol 2008;89