Progrès en urologie (2015) 25, 692—697
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ARTICLE ORIGINAL
Azoospermie et antécédent de cure de hernie inguinale chez l’adulte Azoospermia and a history of inguinal hernia repair in adult M. Khodari a,∗, A. Ouzzane a, F. Marcelli a,b, R. Yakoubi a, V. Mitchell c, P. Zerbib d, J.-M. Rigot b a
Service d’urologie, université de Lille, hôpital Claude-Huriez, CHRU de Lille, rue Michel-Polonovski, 59000 Lille, France b Service d’andrologie, université de Lille, CHRU de Lille, 59000 Lille, France c Laboratoire de biologie de la reproduction, université de Lille, CHRU de Lille, Lille, France d Service de chirurgie digestive et transplantation, université de Lille, CHRU de Lille, 59000 Lille, France Rec ¸u le 17 mai 2012 ; accepté le 12 juin 2015 Disponible sur Internet le 14 juillet 2015
MOTS CLÉS Azoospermie obstructive ; Hernie inguinale ; Plaque polypropylène
∗
Résumé Contexte. — La cure de hernie inguinale fait partie des interventions chirurgicales les plus fréquemment pratiquées dans le monde. Il est reconnu que toute intervention chirurgicale dans la région du pelvis ou des bourses représente un facteur de risque potentiel d’infertilité masculine. Méthode. — Étude rétrospective reprenant les patients azoospermes ayant eu une cure de hernie inguinale uni- ou bilatérale postpubertaire et ayant consulté dans notre centre entre janvier 1990 et janvier 2011 pour bilan d’infertilité. Résultats. — Parmi les 69 patients azoospermes ayant un antécédent de cure de chirurgie inguinale pour hernie postpubertaire, 60 patients ont eu une extraction chirurgicale de spermatozoïdes et qui s’est révélée positive dans 75 % (n = 45). Ce taux d’extraction positive chutait dans le sous-groupe de patients ayant des facteurs de risque d’infertilité (61,4 %) ainsi que dans celui ayant eu une cure de hernie inguinale bilatérale (67,9 %). Il n’y avait pas de différence statistiquement significative du taux d’extraction positive de spermatozoïdes selon la technique chirurgicale utilisée ni selon la mise en place ou non de matériel prothétique (p > 0,05). Conclusion. — L’obstruction des canaux déférents due à une cure de hernie inguinale représentait une cause iatrogène possible d’infertilité masculine qui était rare et sous-estimée. L’influence de l’utilisation d’une prothèse de polypropylène n’a pas été clairement démontrée.
Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (M. Khodari).
http://dx.doi.org/10.1016/j.purol.2015.06.008 1166-7087/© 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Azoospermie et antécédent de cure de hernie inguinale chez l’adulte
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La prise en charge de ces patients repose sur la prévention afin de repérer les patients à risque d’infertilité et de proposer le cas échéant une cryopréservation de sperme. Niveau de preuve.— 5. © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
KEYWORDS Obstructive azoospermia; Inguinal hernia repair; Polypropylene mesh
Summary Background. — Inguinal hernia repair is one of the most performed surgeries in the world. It is recognized that any surgery of the pelvic floor may represent a risk factor of male infertility. Method. — Retrospective study of patients with azoospermia and a history of adult inguinal hernia repair surgery and referred to our center between January 1990 and January 2011 for infertility. Results. — Among 69 azoospermia patients with history of adult inguinal hernia repair surgery, 60 patients underwent surgical extraction of sperm that was successful in 75% (45/60). Positive extraction rate decreases in the subgroup of patients with risk factors for infertility (61.4%) as well as in the group with bilateral inguinal hernia (67.9%). There was no statistically significant difference in the positive rate of sperm retrieval according to surgical technique or according to the use of polypropylene mesh (P > 0.05). Conclusion. — The obstruction of the vas deferens due to an inguinal hernia repair was a potential iatrogenic cause of male infertility that was rare and underestimated. The influence of using a polypropylene mesh was not clearly demonstrated. The management of these patients is based on prevention in order to identify patients with risk factors of infertility in order to propose a presurgery cryopreservation of sperm. Level of evidence.— 5. © 2015 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
Introduction L’azoospermie correspond à une absence totale de spermatozoïdes dans l’éjaculat. Elle procède de deux mécanismes distincts : obstructif par obstacle sur les voies génitales ou non obstructif par défaut de production testiculaire des spermatozoïdes. La cure de hernie inguinale fait partie des interventions chirurgicales les plus fréquemment pratiquées dans le monde, surtout chez l’homme dont la prévalence augmente nettement avec l’âge [1]. Lorsqu’elle devient symptomatique, le seul traitement possible est chirurgical. Il est reconnu que toute intervention chirurgicale dans la région du pelvis ou des bourses représente un facteur de risque potentiel d’infertilité masculine pouvant entraîner une azoospermie obstructive [2,3]. Selon les guidelines de l’EAU, les antécédents de chirurgie herniaire sont à rechercher à l’interrogatoire dans l’exploration des troubles de la fertilité. L’objectif de notre étude était de décrire les caractéristiques clinico-biologiques et la prise en charge d’une population de patients présentant une azoospermie excrétoire et ayant des antécédents de chirurgie herniaire à l’âge adulte.
Patients et méthodes Il s’agit d’une étude rétrospective, à partir de la base de données du service d’andrologie du CHRU de Lille de
janvier 1990 à janvier 2011. Au cours de la période d’étude, 9740 nouveaux patients de sexe masculin ont consulté pour bilan d’infertilité. Parmi les 879 patients azoospermes, 69 avaient un antécédent de cure de hernie inguinale à l’âge adulte. Tous les patients azoospermes, avec antécédent de cure de hernie inguinale « postpubertaire » uni- ou bilatérale, ont été inclus. Les patients opérés d’une hernie inguinale durant l’enfance ont été exclus de l’analyse. Les caractéristiques cliniques et hormonales étaient relevées (testostérone totale, FSH, inhibine B). Les paramètres spermatiques comprenaient : le volume, le pH et les marqueurs séminaux (fructose, alpha-glucosidase). Une échographie génito-urinaire était systématiquement réalisée (volume testiculaire, étude des épididymes, du carrefour vésiculo-déférentiel et des reins). Un bilan génétique était réalisé comprenant un caryotype constitutionnel en résolution standard ; une recherche par PCR de microdélétions du chromosome Y (depuis 2002) et une recherche exhaustive de mutations du gène CFTR en cas d’atteinte des canaux déférents et/ou des vésicules séminales. Les données qualitatives ont été exprimées en effectifs (pourcentage) et les données quantitatives exprimées en moyenne (extrêmes). Pour l’analyse statistique, et afin de simplifier l’interprétation des résultats, les variables qualitatives ont été transformées en binaire. Testostérone totale (normale entre 2,30 et 6,70 ng/mL ou < 2,30 ng/mL), FSH
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M. Khodari et al.
(normale < 10 UI/L), inhibine B (normale > 238 pg/mL, ou < 238 pg/mL), le volume spermatique (normale entre 2 à 6 mL), le fructose (normal > 13 mol/éjaculat), alphaglucosidase (normale > 20 mU/éjaculat) et le volume testiculaire (normale > 16 mL). Toutes les analyses statistiques ont été réalisées à l’aide du logiciel SPSS version 17.0 (IBM Corp., Somers, NY, ÉtatsUnis). Les tests de Chi2 ou de Fisher étaient utilisés pour les comparaisons statistiques. Le risque ␣ de significativité a été fixé à 0,05.
Résultats L’âge moyen de la cure de chirurgie inguinale était de 26,4 ans (± 5). L’âge moyen de la prise en charge des patients au moment de la première consultation pour bilan d’infertilité était de 34,1 ans (± 7). Pour 84 % des patients (n = 58), il s’agissait d’une infertilité primaire et pour 16 % des patients (n = 11) d’une infertilité secondaire. L’âge moyen de la partenaire au moment de la première consultation pour bilan d’infertilité était de 30,8 ans (± 5,5). Aucune ne présentait d’antécédent gynéco-obstétrical particulier. Le Tableau 1 récapitule les caractéristiques de notre population. Au total, 42 patients (60,8 %) présentaient un ou plusieurs facteurs de risques établis d’infertilité : • un tabagisme actif non sevré pour 28,9 % des patients (n = 20) ; • un antécédent de cryptorchidie traitée chirurgicalement dans l’enfance chez 12 patients (17,4 %) dont 4 d’entre eux de fac ¸on bilatérale (5,8 %) ;
Tableau 1
Caractéristiques des patients.
Variable n Extraction chirurgicale de spermatozoïdes, n Âge lors de la chirurgie inguinale, année Âge lors de la première consultation, année Infertilité I II Autres facteurs de risques d’infertilité Tabagisme actif Cryptorchidie opérée dans l’enfance Chirurgie inguino-scrotale dans l’enfance Cure de hernie inguinale bilatérale Partenaire Âge, année ATCD gynécologiques
69 60 26,4 (17—42) 34,1 (22—50)
58 (84) 11 (16) 42 (60,8 %) 20 (28,9 %) 12 (17,4 %) 13 (18,9 %) 28 (40,6 %) 30,8 (20—42) 0
Les résultats sont présentés sous forme de moyenne (extrême) ou n (%).
• 13 patients (18,9 %) présentaient un antécédent de chirurgie inguino-scrotale dans l’enfance (autre que la cure de cryptorchidie) : 4 patients furent déjà traités chirurgicalement pour hernie inguinale ; 2 patients bénéficièrent d’une orchidectomie pour torsion ; 1 patient d’une cure de varicocèle, 3 patients d’une cure d’hydrocèle, 2 patients traités chirurgicalement pour kystes épididymaires et 1 patient fut traité par orchidopexie. La cure de hernie inguinale était bilatérale dans 40,6 % des cas (n = 28) et unilatérale dans 59,4 % des cas (n = 41). Quatorze patients bénéficièrent d’une cure de hernie inguinale gauche et les 27 autres patients d’une cure de hernie inguinale droite. La cure de hernie était réalisée par voie inguinale chez 36 patients (52,17 %) et par voie laparoscopique chez 11 patients (15,9 %). Pour 22 patients de notre série (31,8 %), le type de technique chirurgicale n’a pu être précisé. Notons que la première cure de hernie inguinale par voie laparoscopique répertoriée dans notre série d’azoospermes était réalisée en 2002. Pour la voie laparoscopique, la pose d’une prothèse en situation prépéritonéale pour renforcer le mur postérieur de la région inguinale était systématiquement réalisée. Pour la voie d’abord inguinale, 18 patients (26 %) étaient traités par herniorraphie simple et 12 patients (17,4 %) par réparation herniaire avec mise en place de matériel prothétique. Pour 6 patients (8,7 %) de notre série ayant bénéficié d’une cure de hernie par voie inguinale, la mise en place d’une prothèse n’a pu être précisée. Le Tableau 2 compare les caractéristiques cliniques et biologiques de notre population d’azoospermie selon le type d’intervention chirurgicale pour cure de hernie inguinale. À partir de 1995, 60 des 69 patients azoospermes ayant un antécédent de cure de chirurgie inguinale pour hernie postpubertaire bénéficièrent d’une extraction chirurgicale de spermatozoïdes en vue d’une ICSI. La technique réalisée pour l’extraction chirurgicale de spermatozoïdes était une extraction testiculaire (testicular sperm extraction [TESE]) dans 71 % des cas (n = 49), une extraction épididymaire (microsurgical epididymal sperm aspiration [MESA]) dans 29 % des cas (n = 20). Le taux d’extraction chirurgicale positive de spermatozoïdes était de 75 % (n = 45). Il était de 76,5 % dans le groupe de patients traités par herniorraphie simple (n = 18) ; de 74,7 % dans le groupe de patients traités par kélotomie avec prothèse (n = 12) et de 75,5 % dans celui des patients traités par voie cœlioscopique (n = 11). Il n’a pas été mis en évidence de différence significative concernant le taux d’extraction chirurgicale positive de spermatozoïdes selon la technique chirurgicale utilisée (p ≥ 0,05). Il n’existait pas de différence statistiquement significative de ce taux d’extraction positive de spermatozoïdes dans le groupe de patients traités de fac ¸on certaine par la mise en place de prothèse (n = 23) et dans le groupe de patients opérés par herniorraphie simple (n = 18) (74,5 et 75,1 % respectivement, p ≥ 0,05). En tenant compte du caractère uni- ou bilatéral de la cure de hernie inguinale, il existait statistiquement plus d’extractions chirurgicales positives de spermatozoïdes pour les patients ayant eu une cure unilatérale (n = 33) par rapport à ceux qui ont eu une chirurgie bilatérale (n = 27) (79,8 % vs 67,9 %,
Azoospermie et antécédent de cure de hernie inguinale chez l’adulte Tableau 2
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Caractéristiques des patients selon le type de chirurgie de la hernie inguinale.
Variable
Herniorraphie simple (n = 18) (n, %)
Épididyme Normal Dilaté Canal déférent Palpable Absent Volume testiculaire à l’échographie > 16 mL < 16 mL Alpha-glucosidase > 20 mU/éjaculat < 20 mU/éjaculat Fructose > 13 mol/éjaculat < 13 mol/éjaculat Testostéronémie > 2,3 ng/mL < 2,3 ng/mL Volume spermatique 2 < n < 6 mL < 2 mL
Kélotomie avec prothèses (n = 12) (n, %)
Cœlioscopie (n = 11) (n, %)
p value
0,0731 12 (66,7) 6 (33,3)
11 (91,7) 1 (8,3)
16 (88,8) 2 (11,2)
11 (91,7) 1 (8,3)
9 (50) 9 (50)
7 (58,3) 5 (42,7)
9 (81,8) 2 (18,2) 0,0025 11 (100) 0 (0) 0,0013 6 (54,5) 5 (45,5) 0,0026
4 (22,2) 14 (77,8)
3 (25) 9 (75)
23 (27,3) 8 (72,7)
10 (55,5) 8 (44,5)
7 (58,3) 5 (42,7)
11 (100) 0 (0)
13 (72,2) 5 (27,8)
11 (91,7) 1 (8,3)
10 (90,9) 1 (8,1)
10 (55,5) 8 (44,5)
7 (58,3) 5 (42,7)
8 (72,7) 3 (27,3)
0,0027
0,0019
0,0032
Les résultats sont présentés sous forme de n (%).
p = 0,03). Selon les facteurs de risques d’infertilité, le taux d’extraction chirurgicale positive de spermatozoïdes était statistiquement plus faible dans le sous-groupe de patient à risque d’infertilité (n = 34) par rapport au sous-groupe de patients sans risque d’infertilité (n = 26) (61,4 % vs 92,8 % respectivement, p = 0,009). La répartition du nombre de patients azoospermes avec un antécédent de cure de hernie inguinale postpubertaire en fonction de l’année de la première consultation pour infertilité est présentée dans la Fig. 1. Le nombre de nouveaux patients consultant pour azoospermie avec antécédent de
Figure 1.
Répartition des patients selon l’année de consultation.
chirurgie inguinale à l’âge adulte a sensiblement augmenté à partir de 2001.
Discussion Le cordon spermatique traverse le canal inguinal et comporte les éléments suivants : le canal déférent, les vaisseaux sanguins spermatiques (l’artère spermatique et le plexus veineux pampiniforme), des vaisseaux lymphatiques et des nerfs (la branche génitale du nerf génitofémoral, le nerf ilio-inguinal et les nerfs sympathiques du
696 plexus testiculaire). Le risque de lésion iatrogène sur les éléments du cordon durant une chirurgie herniaire peut concerner : • les structures vasculaires entraînant une orchite ischémique, une atrophie testiculaire ou une dysfonction endocrine ; • le canal déférent qui peut être soit comprimé soit sténosé. Ces deux mécanismes lésionnels peuvent compromettre la fertilité notamment en cas de chirurgie bilatérale ou en cas de déficience préexistante du testicule controlatéral. L’infertilité excrétoire ou post-testiculaire représente environ 6 % des infertilités masculines et peut être constitutionnelle (agénésie vésiculo-déférentielle, dysjonction épididymo-testiculaire) ou acquise (post-infectieuse, traumatique ou iatrogène) [3]. Tekatli et al. ont rapporté dans une revue récente de la littérature une fréquence plus élevée des lésions iatrogènes du cordon spermatique après chirurgie herniaire prothétique par rapport aux herniorraphies simples [4]. Cependant, ceci n’était pas corrélé à des taux d’infertilité similaires dans les séries publiées. Néanmoins, ces constatations doivent être interprétées avec précaution car : • la plupart des séries sont rétrospectives ; • les patients traités chirurgicalement pour hernie ont une moyenne d’âge élevée et n’ont le plus souvent plus de désir de paternité ; • la majorité des patients sont traités pour une hernie unilatérale. Dans notre série, le nombre de nouveaux patients consultant pour azoospermie avec antécédent de chirurgie inguinale à l’âge adulte a augmenté sur les dix dernières années. Ceci pouvait être expliqué par l’individualisation d’un service spécialisé dans la prise en charge de l’infertilité masculine au sein de notre centre. Le lien de causalité entre azoospermie et chirurgie inguinale ne pouvait cependant être affirmé par notre série en l’absence de groupe témoin. Cependant, les données de la littérature mettent en évidence une incidence plus importante d’infertilité excrétoire chez les hommes ayant eu une cure de hernie inguinale (6,65 %) par rapport à une population contrôle [5—7]. L’atrophie testiculaire par lésion vasculaire après chirurgie herniaire est plus rare et représente moins de 1 % [8]. L’introduction des prothèses a été l’avancée la plus importante dans le traitement des hernies de l’aine, permettant de supprimer la tension induite par les herniorraphies simples et surtout de diminuer les récidives à distance [9,10]. De nombreuses études expérimentales [11—17] ont rapporté une réaction inflammatoire induite par le matériel prothétique sur les structures du cordon spermatique, responsable d’une fibrose avec obstruction de la lumière [14,18]. Aussi, une étude multicentrique a rapporté les cas de quatorze malades chez lesquels une obstruction des canaux déférents responsable d’une infertilité a été attribuée à une cure de hernie inguinale utilisant une prothèse [19]. Toutefois, les données de la littérature sont pauvres quant à la difficulté d’évaluer une atteinte unilatérale des canaux déférents. Dans la majorité des cas, la cure de hernie
M. Khodari et al. unilatérale n’a pas compromis la fertilité masculine dans la mesure où la fonction testiculaire controlatérale était normale. Les patients référencés dans la littérature sont ceux pour lesquels la fécondité a été compromise en raison de l’atteinte bilatérale du système reproducteur masculin et ne pourraient correspondre finalement qu’à la partie visible de l’iceberg des patients ayant une obstruction iatrogène des canaux déférents post-cure de hernie inguinale.
Quelles précautions ? Une azoospermie obstructive après cure de hernie inguinale peut survenir si les deux canaux déférents sont obstrués (chirurgie bilatérale) ou si le testicule controlatéral au côté obstrué est déficient. D’où l’intérêt de repérer les patients à risque d’infertilité après chirurgie herniaire : hernie bilatérale, dysfonctionnement testiculaire (testicule controlatéral atrophié ou agénésique) ou patients exprimant le souhait d’une paternité tardive (> 45 ans). Dans ces cas, une cryopréservation de sperme doit être proposée, avant la réparation herniaire. Certains auteurs ont proposé d’adapter l’intervention chirurgicale en fonction de l’âge jeune du patient et de ne pas réaliser de réparation herniaire avec prothèse pour limiter le risque d’infertilité [19,20]. Malgré l’abondance de la littérature comparant les nombreuses interventions chirurgicales existantes, il n’y avait pas de consensus quant au choix de la meilleure technique qui était classiquement celle que l’on maîtrisait le mieux.
Quelles stratégies thérapeutiques ? Les lésions iatrogènes du canal déférent après cure de hernie inguinale ont été parmi les plus difficiles à reperméabiliser car souvent associées à un délai long d’obstruction responsable d’une obstruction épididymaire secondaire [6]. Selon la longueur de l’occlusion, une reperméabilisation serait tentée, des canaux déférents (vaso-vasostomie) ou entre l’épididyme et le canal déférent (vaso-épididymostomie). Avec le développement de la laparoscopie, une nouvelle alternative de réparation de l’obstruction inguinale du déférent est proposée. Elle consiste à réaliser une vaso-vasostomie pelvi-scrotale en court-circuitant le trajet inguinal du déférent grâce à la voie cœlioscopique. Le déférent pelvien est détaché de l’orifice inguinal profond, mobilisé en dedans, passé à travers l’orifice inguinal superficiel afin de faciliter l’anastomose avec le déférent scrotal [21]. Dans notre population d’étude, un patient a eu une reperméabilisation par vaso-vasostomie pelvi-scrotale mais le résultat n’a pas été satisfaisant avec recours ultérieur à une extraction chirurgicale de spermatozoïdes. La prise en charge des azoospermies obstructives a été transformée ces dernières années par les progrès de l’aide médicale à la procréation et l’arrivée des nouvelles techniques de fécondation in vitro avec micro-injection intra-ovocytaire de spermatozoïdes (FIV-ICSI). Cette technique a révolutionné la gestion de l’infertilité masculine [22] avec la réalisation de prélèvement chirurgical de spermatozoïdes au niveau des testicules et de l’épididyme.
Azoospermie et antécédent de cure de hernie inguinale chez l’adulte
Conclusion L’obstruction des canaux déférents due à une cure de hernie inguinale représentait une cause iatrogène possible d’infertilité masculine qui était rare et sous-estimée. Si la relation entre la cure de hernie inguinale et l’obstruction des canaux déférents était réelle et a semblé en augmentation depuis 2001, l’influence de l’utilisation d’une prothèse de polypropylène de renfort de la paroi n’a pas été clairement démontrée. La prise en charge de ces patients repose sur la prévention afin de repérer les patients à risque d’infertilité et de proposer le cas échéant une cryopréservation de sperme. La prise en charge chirurgicale dans l’azoospermie obstructive existe et ne doit pas être minimisée au profit du simple recueil de spermatozoïdes.
Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.
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