Effets respiratoires de l’inhalation de nanoparticules

Effets respiratoires de l’inhalation de nanoparticules

Session A10 : Nanoparticules : un nouveau risque pour la santé ? Effets respiratoires de l’inhalation de nanoparticules Présidents : P. Diot (Tours)...

88KB Sizes 0 Downloads 57 Views

Session A10 : Nanoparticules : un nouveau risque pour la santé ?

Effets respiratoires de l’inhalation de nanoparticules

Présidents : P. Diot (Tours), J.-C. Pairon (Créteil) Orateur : J. Boczkowski (Créteil) Article rédigé par : M. Guillot-Gautier et N. Glas (Saint-Étienne)

Résumé Les études sur les effets respiratoires des nanoparticules sont limitées et ont été réalisées chez l’animal. Ces particules entraîneraient inflammation, fibrose et peut-être mutagenèse, ces effets étant modulés par leurs propriétés physico-chimiques. UMR 955 Inserm, Université Paris-Est, Faculté de Médecine, Créteil, F-94010, France.

Mots-clés : Nanoparticules • Inflammation • Fibrose • Cancérogenèse.

Correspondance : [email protected] Conflits d’intérêt : J. B., M. G.-G., N. G. : aucun.

Rev Mal Respir Actual 2010 ; 2 : 365-367

Rev Mal Respir Actual 2010 ; 2 : 365-367 © 2010 SPLF. Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

365

J. Boczkowski

The respiratory effects of inhaling nanoparticles

J. Boczkowski

Summary Studies on the respiratory effects of nanoparticles are limited and have been conducted in animals. These particles may cause inflammation, fibrosis, as well as mutagenesis, with these effects modulated by their physical and chemical properties. Key-words: Nanoparticles • Inflammation • Fibrosis • Oncogenesis.

Rev Mal Respir Actual 2010 ; 2 : 365-367 [email protected]

Introduction L’appareil respiratoire constitue une voie d’entrée importante pour les nanoparticules (NP) aérosolisées [1]. Leur dépôt dépend de leur taille et de leur forme, de la géométrie des voies aériennes et du mode ventilatoire. Notre propos s’intéressera aux NP d’origine manufacturée, c’est à dire celles produites par l’activité humaine de façon intentionnelle, principalement les NP métalliques et les nanotubes de carbone.

Données actuelles Il existe encore peu d’études sur l’homme. Concernant les études chez l’animal, rat ou souris, peu de travaux ont étudié les effets d’une exposition chronique et on peut se poser la question de la pertinence de résultats obtenus après des expositions de courte durée et sous des concentrations élevées. Ces études analysaient les altérations cellulaires et histopathologiques (inflammation, remodelage tissulaire, cancer), les mécanismes d’action et les interactions avec d’éventuelles pathologies respiratoires préexistantes.

Effets respiratoires des nanotubes de carbone Un nombre croissant d’études concernant les effets respiratoires des nanotubes de carbone (CNT) est publié avec un total de 30 publications en novembre 2009 s’intéressant à différentes atteintes pulmonaires (inflammation, fibrose,

366

Rev Mal Respir Actual 2010 ; 2 : 365-367

mutagenèse). Le nombre de données disponible est cependant limité. Les nombreuses propriétés physico-chimiques des CNT (dispersion, longueur, contenu en fer, caractéristiques de surface...), en plus de leur taille, seraient à l’origine de stress oxydatif et/ou d’altérations du surfactant.

Inflammation, fibrose pulmonaire et CNT Les marqueurs de l’inflammation et de l’atteinte de la barrière alvéolo-capillaire dans le liquide de lavage bronchoalvéolaire, tels que le taux de polynucléaires neutrophiles, de LDH, de protéines, de TNFα et d’IL-6, sont augmentés une semaine après une exposition à des CNT chez des souris, d’après une étude menée en 2008 [2]. Dans cette même étude, les auteurs ont constatées 28 jours après l’exposition, une augmentation des facteurs impliqués dans le remaniement bronchique et les processus de fibrose, tels que le collagène et le TGFβ. Les conclusions ne sont pour autant pas évidentes puisque viennent s’ajouter à ces résultats 2 facteurs : la dispersion et la taille des particules. En effet, des CNT mal dispersés dans l’aspiration pharyngée sont à l’origine de granulomes, ce qui n’est pas le cas si les CNT sont bien dispersés [3]. De même, les CNT longues (> 15 μm de longueur), à l’opposé des CNT courtes, provoqueraient une réaction inflammatoire avec présence de granulomes après inoculation intra péritonéale chez des souris [4]. Les mécanismes évoqués passent par le biais de l’apparition d’un stress oxydatif [2, 6]

Cancérogenèse Après exposition à des CNT à un aérosol de CNT, des souris ont présenté dès le 7e jour des mutations de l’ADN [2]. Cette mutagenèse est apparue en même temps que le pic inflammatoire. Ces résultats nécessitent d’être vérifiés à distance et distingués selon la taille des CNT inhalés. Muller et al [5] ont mesuré le contenu pulmonaire en CNT après leur instillation trachéale chez le rat en mesurant le contenu pulmonaire en cobalt, car les CNT examinés contenaient ce métal. Après instillation de CNT de 0,7 et 6 μm de longueur, les auteurs ont retrouvé 78,4 % de la quantité totale administrée des 2 types de CNT à 28 jours. Ce pourcentage baissait à 60 jours pour les CNT de petite taille (36 %), mais restait élevé pour les CNT de grande taille (81,2 %).

Atteinte pleurale Une étude menée chez des souris a retrouvé des CNT dans les macrophages sous-pleuraux, en association avec la présence d’une fibrose sous-pleurale, après exposition par inhalation [7].

Effets respiratoires de l’inhalation de nanoparticules

Effets respiratoires des NP métalliques Des données expérimentales ont constatées des effets à type d’inflammation, fibrose et cancérogenèse après administration par voie respiratoire de NP métalliques [8]. Les mécanismes moléculaires seraient les mêmes que pour les CNT. Une étude a été menée sur une longue période (2 ans) chez des rats et a permis de mettre en évidence un effet dose pour le nano-dioxyde de titane [8]. D’autres études ont montré des résultats similaires pour le dioxyde de titane et le noir de carbone.

Conclusion Il est pour l’instant difficile de déterminer si un nanomatériau est à l’origine d’un effet sur la santé. Des études sont nécessaires pour affirmer leur rôle sur l’inflammation, la fibrose et la cancérogenèse, au moyen de contrôles appropriés et après avoir caractérisé au mieux chaque nanoparticule ainsi que leur exposition sur le plan humain.

2

3

4

5

6

7

Références 1

Borm PJ, Robbins D, Haubold S, Kuhlbusch T, Fissan H, Donaldson K, Schins R, Stone V, Kreyling W, Lademann J, Krutmann J, Warheit

8

D, Oberdorster E : The potential risks of nanomaterials: a review carried out for ECETOC. Part Fibre Toxicol 2006 ; 3 : 11. Shvedova AA, Kisin E, Murray AR, Johnson VJ, Gorelik O, Arepalli S, Hubbs AF, Mercer RR, Keohavong P, Sussman N, Jin J, Yin J, Stone S, Chen BT, Deye G, Maynard A, Castranova V, Baron PA, Kagan VE : Inhalation vs. aspiration of single-walled carbon nanotubes in C57BL/6 mice: inflammation, fibrosis, oxidative stress, and mutagenesis. Am J Physiol Lung Cell Mol Physiol 2008 ; 295 : L552-65. Mercer RR, Scabilloni J, Wang L, Kisin E, Murray AR, SchweglerBerry D, Shvedova AA, Castranova V : Alteration of deposition pattern and pulmonary response as a result of improved dispersion of aspirated single-walled carbon nanotubes in a mouse model. Am J Physiol Lung Cell Mol Physiol 2008 ; 294 : L87-97. Poland CA, Duffin R, Kinloch I, Maynard A, Wallace WA, Seaton A, Stone V, Brown S, Macnee W, Donaldson K : Carbon nanotubes introduced into the abdominal cavity of mice show asbestos-like pathogenicity in a pilot study. Nat Nanotechnol 2008 ; 3 : 423-8. Muller J, Huaux F, Moreau N, Misson P, Heilier JF, Delos M, Arras M, Fonseca A, Nagy JB, Lison D : Respiratory toxicity of multi-wall carbon nanotubes. Toxicol Appl Pharmacol 2005 ; 207 : 221-31. Shvedova AA, Kisin ER, Murray AR, Gorelik O, Arepalli S, Castranova V, Young SH, Gao F, Tyurina YY, Oury TD, Kagan VE : Vitamin E deficiency enhances pulmonary inflammatory response and oxidative stress induced by single-walled carbon nanotubes in C57BL/6 mice. Toxicol Appl Pharmacol 2007 ; 221 : 339-48. Ryman-Rasmussen JP, Cesta MF, Brody AR, Shipley-Phillips JK, Everitt JI, Tewksbury EW, Moss OR, Wong BA, Dodd DE, Andersen ME, Bonner JC : Inhaled carbon nanotubes reach the subpleural tissue in mice. Nat Nanotechnol 2009 ; 4 : 747-51. Roller M : Carcinogenicity of inhaled nanoparticles. Inhal Toxicol 2009 ; 21 : 144-57.

© 2010 SPLF. Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

367