Éthique et T2A, un tournant ?

Éthique et T2A, un tournant ?

Édition Pascal Léger, Éditeur Gaëtan Bretéché, Secrétaire d’édition Masson, 21, rue Camille Desmoulins, 92789 Issy-les-Moulineaux Cedex 9, France. Tél...

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Édition Pascal Léger, Éditeur Gaëtan Bretéché, Secrétaire d’édition Masson, 21, rue Camille Desmoulins, 92789 Issy-les-Moulineaux Cedex 9, France. Tél. : +33 (0)1 73 28 16 74 Fax : +33 (0)1 73 28 16 89 [email protected]

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e Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé s’est exprimé, en juin 2007 sur « les enjeux éthiques de la contrainte hospitalière sur les dépenses de santé en milieu hospitalier » [1]. Le Comité dénonce la confusion entre évaluation et cotation, ce à quoi se réduit la T2A (tarification à l’activité), et rappelle qu’un acte médical répond à des exigences éthiques qui ne peuvent se satisfaire d’une « justice distributive » ou « comptable ». Il rappelle en outre les missions inhérentes à l’hôpital. Ce rapport tourne le dos à deux tendances technocratiques largement répandues depuis vingt ans ou plus : – plaquer des modèles de « gestion » et de « management » à l’hôpital. Le Comité rappelle « candidement » que l’hôpital n’est pas une entreprise commerciale mais est tenu à des misions autres que la rentabilité, sans même parler de « service public » ; – se faire le complice du discours libéral anti-services publics, gaspilleurs par nature. Le Comité « ose » écrire que « la rentabilité de l’hôpital ne peut être évaluée comme celle d’une entreprise où les coûts sont équilibrés par les recettes : les clients de cette entreprise sont à la fois capables d’acheter les biens et les services à leur prix véritable, et libres de les acquérir ou non. Telle n’est manifestement pas la situation des usagers de l’hôpital… ». La T2A, uniquement cotation, fait rechercher – ce que les syndicats hospitaliers ont dénoncé – l’acte « rentable » (mieux vaut prescrire une échographie – cotée – qu’une auscultation – non cotée – avec un stéthoscope, façon Laennec). À très juste titre, le Comité rappelle que l’on ne peut se limiter « à un équilibre comptable qui ne tiendrait compte que du passif (coût des services) sans mettre en balance l’actif qui en est la contrepartie (les bénéfices – réels ou escomptés) pour la collectivité », sans oublier que « la préservation du capital santé a une forte valeur ajoutée pour la société sans que celle-ci puisse être comptabilisée en termes de revenus ». Le Comité redécouvrirait-il la lune ou l’eau tiède, et ce, dans deux séries de réflexions : Qu’est-ce qu’un acte médical ? Peut-il se dissocier des missions de l’hôpital ? 1) Qu’est-ce qu’un acte médical ? Est-ce seulement une série d’examens biologiques ou techniques sophistiqués (cotés et remboursés) ou aussi une relation humaine où l’écoute est essentielle, avec un temps requis imprévisible car patient et… praticien-dépendant ? Ce temps n’est ni coté, ni remboursé… Comme quoi, il n’existe pas de maladies, mais seulement des malades… On ne doit pas se contenter du to cure (soigner) des anglo-saxons au détriment du to care (prendre soin). On l’a oublié, la médecine est un art. Une œuvre artistique, au moment de sa création, est-elle comptabilisable ? Picasso a t-il pensé aux « cotations » de l’hôtel Drouot en créant Guernica ?

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2) Cet « art médical » ne se dissocie pas des missions sociales de l’hôpital, de son rôle auprès des démunis et des défavorisés et son rôle essentiel dans les liens de solidarité. Est-ce un hasard si la distance moyenne entre deux hôpitaux français est la même que la distance entre les couvents de 1789 ? Cette mission de « préservation du bien commun “santé publique” ne peut être comptabilisée comme un produit ordinaire : elle est aussi la pierre angulaire d’un service public qui maintient un lien essentiel avec les citoyens [...] Son coût n’est d’ailleurs pas aussi exorbitant qu’on le croit » écrit le Comité. L’avis du Comité consultatif rappelle quelque chose de fondamental : il ne peut y avoir de progrès médical sans éthique. Sans aller jusqu’à rappeler la monstruosité des pseudo-essais médicaux pratiqués dans les camps de concentration (sans intérêt scientifique), évoquons les recherches contemporaines sur le génome humain et la thérapie génique, où l’encadrement éthique contribue au progrès de la médecine et de la science… L’hôpital n’est pas une machine commerciale comme les autres, l’éthique ne peut passer en deuxième plan. Merci au Comité de l’avoir rappelé. Un tournant vient d’être pris. Dominique Piettre Centre hospitalier de Provins (77)

RÉFÉRENCE 1.

Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé. Santé, éthique et argent, les enjeux éthiques de la contrainte hospitalière sur les dépenses de santé en milieu hospitalier. Avis n° 101 du 28 juin 2007 (http://www.ccne-ethique.fr/docs/avis101.pdf)

Commentaire : rendez-vous page 111

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