Intervention de la farine de fève (Vicia faba minor) dans le degré de fixation des lipides au cours du pétrissage de la farine de blé tendre

Intervention de la farine de fève (Vicia faba minor) dans le degré de fixation des lipides au cours du pétrissage de la farine de blé tendre

Can Inst. Food Sci. Technol. J. Vo!. 21, No. 2, pp. 182·186, 1988 RECHERCHE Intervention de la farine de feve (Vicia faba minor) dans le degre de fi...

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Can Inst. Food Sci. Technol. J. Vo!. 21, No. 2, pp. 182·186, 1988

RECHERCHE

Intervention de la farine de feve (Vicia faba minor) dans le degre de fixation des lipides au cours du petrissage de la farine de ble tendre B. Laignelet INRA -

Laboratoire de Technologie des Cereales 9, Place Viala 34060 Montpellier Cedex - France

Abstract

traduisant des activites lipasiques elevees. Durant le petrissage, I'oxygene apparait comme un facteur limitant des reactions d'oxydoreduction lorsque la teneur en farine de feve est elevee. En conclusion, les activites lipoxygenasiques ne seraient pas directement impliquees dans la liberation des lipides d'un melange de farines de ble et de feve; par contre dans ce cas, les activites lipasiques joueraient un role essentiel par les modifications moleculaires qu'elles catalysent dans le degre de fixation des lipides.

By measuring free and bound lipid content and lipid oxidation levels during air-mixing of wheat flour added with increasing quantities of lipoxygenase-rich faba flour (Viciafaba minor), it has been shown: (I) that the polyunsaturated fatty acids of totallipids were quickly oxidised and that their in situ oxidation rate increased according to faba flour content. Up to 65 p. 100 of initial linoleic acid were so modified; (2) that lipid binding varied with faba flour content: with the lower contents (up to I p. 100), there was no marked change; with the higher contents (2 to 5 p. 100), the bound lipid proportion was constantly increasing and could reach 85 p. 100 in 20 min; (3) that without faba flour, the oxidised lipids were mostly distributed within bound lipids while the opposite phenomenon occurred with increasing amount of faba flour. Those results showed a parallelism between the lipid fraction oxidation level and the lipid binding capacity. The oxidation level measured allowed to take into account the hypothesis that the reactions occurring during the mixing were characterized by a fatty acid release similar to the effects of high lipase activities. During the mixing, oxygen appeared to be a limiting factor for oxydoreduction reactions when faba flour content was high. It is concluded that lipoxygenase activities would not be directly implicated in lipid release during the mixing of a wheat and faba flour blend; on the contrary in this later case, lipasic activities would play an essential role in lipid binding by induced molecular changes.

Introduction En panification fran~aise, on a coutume d'ajouter, a la dose maximale de 2 p. 100, de la farine de feve (Vicia jaba minor) a la farine de ble tendre; la farine de soja est permise depuis peu. Cet apport, quasi systematique, provoque la formation d'une pate plus facile a travailler et d'un pain a mie plus blanche et mieux developpe. La farine de soja est utilisee en panification anglo-saxonne pour les memes raisons technologiques. D'un point de vue qualitatif, ces effets favorabIes et souhaites se trouvent par contre amplifies dans un sens defavorable par un petrissage intensifie (Guinet, 1979). On attribue ces effets a l'action des lipoxygenases de la farine de feve ou de soja. Cependant la farine de feve apporte egalement dans le milieu de petrissage, tout comme la farine de soja, des quantites importantes d'acide linolelque sous forme libre ou esterifiee par des sterols (Schettino et al., 1985). Les lipoxygenases catalysent l'oxydation en hydroperoxydes de ces acides gras polyinsatures possMant le systeme de doubles liaisons non conjuguees cis-cis-I-4-pentadiene, c'est-a-dire dans les produits cerealiers principalement les acides linolelques et linoleniques (Nicolas, 1979; Nicolas et Drapron, 1981, 1983). Puis par un systeme d'oxydations couplees favorisees par le petrissage intensifie, elles co-catalysent la destruction des tocopherols et des pigments carotenoldes, conduisant ainsi a des pains a mie exagerement blanche (Drapron et al., 1971). De plus on constate une forte alteration de l'arome resultant des produits de scission des hydro-

Resume En suivant l'evolution de la teneur en lipides libres et lies et le niveau d'oxydation de ces lipides au cours du petrissage dans I'air d'une farine de ble panifiable additionnee de quantites croissantes de farine de feve (Vicia faba minor) riche en lipoxygenases, on a pu montrer: (I) que les acides gras polyinsatures des lipides totaux sont rapidement oxydes et que leur vitesse d'oxydation in situ augmente avec la teneur en farine de feve. Jusqu'a 65 p. 100 de I'acide linoleique present initialement est ainsi transforme; (2) que le degre de fixation des lipides aux autres constituants, notamment proteiques, varie avec la teneur en farine de feve: pour les faibles teneurs en feve (jusqu'a I p. 100), on ne constate pas d'evolution notable; pour les fortes teneurs (2 a 5 p. 100), la proportion de lipides lies est constamment croissante et peut atteindre 85 p. 100; (3) qu'en absence de farine de feve, les lipides oxydes se repartissent au sein des lipides lies et que le phenomene inverse se manifeste en presence de farine de feve. Ces resultats montrent un parallelisme entre le niveau d'oxydation de la fraction lipidique et le degre de fixation de ces lipides. L'importance des oxydations permet d'envisager I'hypothese que le milieu de petrissage est caraeterise par une liberation d'acides gras

Copyright e 1988 Canadian Institute of Food Science and Technology

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peroxydes, notamment en hexanal, au cours de la cuisson (Drapron et al., 1974). Enfin eIles provoqueraient I'oxydation couplee des groupements thiols du gluten en ponts disulfures, ce qui entrainerait une amelioration des proprietes rheologiques des pates (Tsen et Hlynka, 1962; Frazier et al., 1973, 1977). On a aussi attribue aux activites lipoxygenasiques un role majeur dans le mecanisme de liberation des lipides lies au cours du petrissage (Daniels et al., 1970, 1971; Frazier, 1983). Rappelons que selon la solubilite des lipides totaux dans des solvants polaires ou non, on distingue les Iipides lies et les lipides libres. Les oxydations catalysees par les lipoxygenases peuvent atteindre un niveau tres eleve puisque 45 p. 100 de I'acide linoleique total des lipides libres et lies peuvent etre oxydes en moins de 10 min de petrissage (Laignelet et Dumas, 1984). Ainsi, divers faits experimentaux et diverses hypotheses font des lipoxygenases un element important de la qualite du pain. Mais precisement, le probleme de la fixation des lipides dans le reseau de gluten au cours du petrissage de la farine de ble tendre reste un sujet d'interrogations (Frazier, 1983). En effet, la situation est loin d'etre claire car on n'en connait pas encore les mecanismes, ni la signification technologique. On peut penser que les lipides lies contractent des interactions fortes non covalentes avec les autres composants de la farine, notamment les proteines, pour la formation d'agregats au sein du gluten (Frazier, 1983). Cette equipe de recherche presente l'hypothese du role possible des activites lipoxygenasiques dans l'ensemble de ces phenomenes (Daniels et al., 1970, 1971). Dans cet article, nous examinons ce dernier point de l'intervention des activites lipoxygenasiques dans la fixation des lipides aux proteines en faisant varier l'activite lipoxygenasique par un apport de farine de feve a differents taux et en mesurant le degre de Iiai-

son des lipides au cours de petrissages de durees variables dans l'air et leur evolution sur le plan des oxydations qu'ils subissent in situ; le but vise etant une meilIeure comprehension du role technologique de la farine de feve - ou de soja - en panification.

Materiel et methodes

Materiel vegetal et reactifs La farine de ble tendre panifiable utilisee est une farine commerciale de type 45 selon les usages fran~ais, c'est-a-dire qu'elle presente un degre de purete tel qu'elle contient entre 0,40 et 0,49 p. 100 de matieres minerales; sa teneur en proteines est 10,6 p. 100 m.s. (matiere seche). La farine de feve provient egalement de l'industrie (Grandes Minoteries a Feves de France). Les differents melanges contenant de 0 a 5 p. 100 de farine de feve sont effectues dans le petrin avant l'addition de l'eau d'empatage, en tenant compte de la teneur en eau des produits. Tous les reactifs sont de grade analytique, les solvants sont cependant repurifies avant usage.

Petrissage Le petrissage a lieu dans un petrin Minorpin-Simon (Henry Simon Ltd., Stockport, Angleterre) a la vitesse de 80 Lp.m. L'hydratation est de 75 p. 100 m.s. dans tous les cas. Les petrissages sont faits en double a la temperature ambiante, l'eau d'empatage etant egalement portee a cette temperature (environ 20°C); ils ont une duree variant de 1 a 20 min. Les produits petris sont immediatement congeles pour stopper toute evolution, puis Iyophilises et broyes avant analyse des lipides.

Tableau 1. Teneurs et composition en acides gras des lipides totaux (non-amidon) en fonction de !'apport en farine de feve et de la dun~e du petrissage (Resultats en mg/100 g.m.s.). Duree de petrissage (min)

Teneur en farine de

0

0 1 2 5 0 1 2 5 0 1 2 5 0 I 2 5 0 I 2 5

5

10

20

C16:0

C18:0

C18:1

C18:2

C18:3

Total

260,7 261,4 262.1 264,2

6,0 6,4 6.8 8,1 6,1 4,5 6,2 6,4 4,5 4,1 6,2 6,7 5,9 6,0 4,9 6,5 7,0 6,3 6,7 6,9

127,1 133,4 139,8 158,8 125,1 131,3 136,8 143,5

1098,9 1105,1 1111,2 1129,7

33,6 34,2 34,8 38,7

990,3 994,3 965,7 847,7

120,0 138,0 137,4 146,7 120,9 135,7 131,1 141,5 125,5 134,4 130,1 144,5

796,3 824,1 739,8 723,4 740,5 720,4 637,4 517,0 775,9 702,5 512,8 400,5

24,0 17,7 13,8 15,3 12,1 13,4 14,1 10,1 12,0 15,6 8,6 7,5 14,8 15,0 7,3 6,2

1526,7 1540,5 1554,1 1599,5 1408,1 1407,5 1488,2 1294,1

(070)

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262,6 259,7 265,7 281,2 269,3 259,1 265,2 277,7 267,0 259,7 272,7 283,0 261,3 260,5 271,8 279,7

1202,2 1238,7 1262,7 1164,6 1146,3 1137,4 1054,7 955,5 1184,5 1118,7 928,7 837,8

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Dosage des lipides, des activites lipoxygenasique et exploitation des resultats Les Iipides acyles sont extraits a la temperature ambiante avec du pentane pour les lipides Iibres et du butanol sature d'eau pour les lipides totaux (Iipides non-amidon) et convertis en esters methyIiques d'acides gras (EMAG) pour ette doses par chromatographie en phase gazeuse apres purification par chromatographie sur couche mince de gel de silice G 60 (Merck), selon la methode decrite par Morrison et al. (1980). Par principe de la methode de mesure, l'acide linolelque oxyde est transforme en divers composes qui ne sont plus doses (Morrison, communication personnelle). Or chez les cereales l'acide Iinolelque ne peut disparaitre que par une oxydation catalysee par les lipoxygenases (Nicolas, 1979; Nicolas et Drapron, 1983; Laignelet et Dumas, 1984). Ceci permet donc la mesure precise de l'activite lipoxygenasique in situ de la fa<;on suivante: pour une molecule d'acide linolelque oxydee, la reaction d'oxydation necessite une molecule d'oxygene gazeux; connaissant precisement la quantite d'acide Iinolelque qui disparait au cours du processus et son poids moIeculaire, on peut calculer la quantite d'oxygene incorporee par une pate et ainsi obtenir une mesure specifique de l'activite lipoxygenasique, a l'exclusion des autres activites oxydoreductases (Laignelet et Dumas, 1984). Ceci explique d'ailleurs l'apparente baisse de la teneur en lipides, lorsqu'ils sont exprimes en EMAG. L'acide palmitique, ou l'ensemble des acides gras satures et monoinsatures, etant un bon indicateur de la quantite de Iipides, oxydes ou non, qui se trouvent dans un produit, dont la composition en acides gras du produit etudie est relativement constante, de ce fait le rapport de la quantite de ces acides gras a l'acide linolelque dosable renseigne sur le niveau d'oxydation des Iipides: plus ce rapport est eleve, plus les lipides sont oxydes (Laignelet et Dumas, 1984).

l'addition de farine de feve est forte. Une autre fa<;on de voir ce phenomene est d'analyser le Tableau 2 qui montre la quantite d'oxygene moleculaire absorbee par la pate petrie sous l'effet des activites lipoxygenasiques. En absence de farine de feve, cette absorption atteint son maximum en 5-10 min. de petrissage, ce qui confirme ce que nous avons deja observe (Laignelet et Dumas, 1984). En presence de farine de feve, ce maximum n'est jamais atteint, meme apres 20 min de petrissage. De plus, a cette duree, le maximum augmente sensiblement avec la richesse du milieu en farine de feve: ainsi avec 5 p. 100 de farine de feve, pres de 65 p. 100 de l'acideUnoIelque present initialement est oxyde (Tableau 1).

Evolution du degre de liaison des lipides D'apres le Tableau 3, en absence ou avec seulement 1 p. 100 de farine de feve, la proportion de Iipides lies dans les lipides totaux atteint son maximum des 1 min de petrissage, puis diminue lentement ou reste stable quand le petrissage se prolonge. Cette evolution est similaire a celle observee par Daniels et al. (1970). Pour une teneur plus elevee en farine de feve (2 et 5 p. 100), cette proportion est constamment croissante et n'est pas a sa valeur maximale, meme apres 20 min de petrissage. Neanmoins jusqu'a 85 p. 100 des lipides peuvent etre alors sous une forme liee.

Repartition des lipides oxydes

Le Tableau 1 montre que les acides gras polyinsatures subissent une forte oxydation au cours du petrissage a la fois lorsque celui-ci se prolonge et lorsque

Selon le Tableau 4, le niveau d'oxydation des Iipides totaux augmente a la fois sous l'effet de la teneur en farine de feve et de la duree du petrissage. Lors du petrissage avec uniquement de la farine de ble, ce sont les lipides lies qui ont le plus fort niveau d'oxydation. Ce resultat tend a confirmer notre observation anterieure (Laignelet et Dumas, 1984) selon laquelle les lipides oxydes se repartissent dans les fractions les moins solubles des proteines, notamment au sein des glutenines. Par contre en presence de farine de feve, le niveau d'oxydation des lipides lies est plus eleve mais reste dans des valeurs comparables. A I'oppose, ce sont les lipides libres qui, tout en devenant quantitativement moins importants, atteignent des niveaux d'oxydation tres eleves et tres superieurs apres 10 min. de petrissage a ceux des lipides lies, en particulier lorsque la teneur en farine de feve est maximale.

Tableau 2. Incorporation d'oxygene par la pate au cours de petrissages avec des teneurs variables en [arine de [eve. (Resultats en micromoles d'oxygene par g.m.s.) Teneur en [arine de [eve (010) Duree du petrissage (min) 0 I 2 5 o 0 0 0 0 4,0 4,3 I 4,9 10,4 11,0 10,2 5 12,6 14,8 12,9 13,7 17,0 10 21,9 11,6 14,3 20 21,3 25,9

Tableau 3. Proportion de Iipides lies dans les Iipides totaux (Lipides non-amidon) (Pourcentages calcules sur la base des teneurs en acides gras satures et monoinsatures) Teneur en [arine de [eve (%) Duree du petrissage (min) 2 5 o 42,2 43,3 42,3 46,4 o 77,2 75,4 80,5 76,1 1 71,6 78,2 70,7 66,8 5 75,8 72,1 71,2 69,6 10 67,7 85,0 81,2 69,0 20

Resultats Oxydation des lipides au cours du petrissage

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Tableau 4. Niveaux d'oxydation des lipides totaux, libres et lies en fonction de la teneur en farine de feve et de la duree du petrissage. (Rapport multiplie par 100 des teneurs en acides satures et monoinsatures et des teneurs en acides polyinsatures). Teneur en Duree de Lipides Lipides Lipides farine de petrissage feve (010) totaux libres lies (min) 42,6 34,8 30,6 0 0 40,1 35,2 32,2 I 35,7 29,4 47,2 2 36,9 32,1 39,4 5 38,8 40,4 38,4 0 41,6 38,5 I 39,1 36,4 37,9 43,3 2 50,0 41,5 53,1 5 5

0 I 2 5

48,7 47,9 47,9 58,8

45,1 48,1 51,1 50,1

50,7 47,8 46,7 61,7

10

0 I 2 5 0 I 2 5

52,3 54,5 63,3 82,2 49,8 55,9 78,6 106,0

44,8 60,9 71,6 88,9 45,9 61,6 232,7 344,1

56,5 52,3 60,5 66,3 51,9 53,7 68,1 94,5

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Discussion generale Les resultats presentes ci-dessus permettent de demontrer un accroissement des activites Iipoxygenasiques mesurees in situ et un accroissement simultane du degre de liaison des Iipides proportionnellement a la duree du petrissage et a la teneur en farine de feve. Dans le meme temps, la quantite de Iipides lies semble atteindre un maximum, comme s'il y avait saturation des sites de liaisons des Iipides. De plus, en presence'de farine de feve, les Iipides Iibres deviennent les plus oxydes. Ces resultats permettent aussi certaines autres constatations. D'abord la quantite de lipides oxydes est croissante tout au long du petrissage en fonction de la teneur en farine de feve. Si on admet que les Iipoxygenases ne sont a meme de catalyser que des reactions d'oxydation sur les acides gras Iinolelque et Iinolenique Iibres ou seulement engages dans des monoglycerides (Drapron et Godon, 1987), le fait d'obtenir une oxydation de ces acides gras pouvant atteindre 65 p. 100 des acides gras polyinsatures, c'est-a-dire une teneur tres superieure aux teneurs en acides gras libres et en monoglycerides, oblige a considerer l'hypothese d'enzymes de type lipasiques actives apportees soit par la farine de ble, soit par la farine de feve. D'ailleurs ces enzymes ont ete decouvertes tant dans la farine de ble (Galliard, 1986) que dans la farine de feve (Dundas et al., 1978). Un argument a contrario en faveur de cette hypothese est que Chargelegue (1974) a montre que si les farines de feve et de soja possedent des effets technologiques marques, il n'en est pas de meme Can. Inst. Food Sci. Technol. J. Vo!. 21, No. 2, 1988

des preparations de lipoxygenases purifiees extraites de ces farines et qui n'ont strictement aucun effet. Il est des lOTs plausible de croire que des activites Iipasiques, au sens large, sont tres elevees dans le milieu de petrissage. Cependant la methode de mesure utilisee ne permettait pas d'evaluer les acides gras satures liberes et nous ne pouvons donc qu'avancer cette hypothese. De plus, pendant que les oxydations des Iipides se poursuivent, on constate une augmentation quasiproportionnelle de la teneur en Iipides lies qui ne semblent pas pouvoir depasser un certain niveau d'oxydation; de telle sorte qu'apres 10 min. de petrissage, ce sont les Iipides libres qui deviennent les plus oxydes. Ce resultat parait en complete contradiction avec l'hypothese de Daniels et al. (1970) selon laquelle l'activite Iipoxygenasique favoriserait la liberation des Iipides. Dans notre travail, avec des fortes teneurs en farine de feve, I'accroissement de la teneur en Iipides lies est parfaitement similaire a celle que ces auteurs ont mesure dans le cas particulier d'un petrissage en atmosphere d'azote. Tout se passerait donc comme si les petrissages que nous avons effectues avaient eu lieu en absence d'air, peu importe que les Iipides libres aient ete sous forme oxydees ou non. Mais il n'y a pas une parfaite proportionnalite entre le degre de liaison des Iipides et l'importance des effets des activites lipoxygenasiques in situ: il faut donc admettre que I'oxygene incorpore par la pate petrie est dans notre travail le facteur limitant pour l'expression de fortes activites lipoxygenasiques. Mais des lors l'activite lipoxygenasique ne pourrait pas etre la cause de la liberation des Iipides, comme I'ont pretendu Daniels et al. (1970). Nous pensons donc qu'elle n'intervient pas dans la formation des lipides lies au cours du petrissage; par contre, les diverses activites lipasiques, par les changements conformationnels des lipides qu'elles induisent, joueraient un rOle de premier plan dans ce phenomene, d'autant plus qu'il est parfaitement independant de la nature de l'atmosphere. Des recherches sont maintenant necessaires pour identifier le mecanisme et la nature des liaisons des lipides, notamment avec les proteines du gluten, et en preciser I'importance technologique au cours du petrissage.

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Submitted June 29, 1987 Revised 1987 Accepted November 10, 1987

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