La contraception du post-partum : les recommandations médicales, le point de vue des femmes

La contraception du post-partum : les recommandations médicales, le point de vue des femmes

Journal de Gynécologie Obstétrique et Biologie de la Reproduction 36 (2007) 369–374 TRAVAIL ORIGINAL La contraception du post-partum : les recommand...

130KB Sizes 0 Downloads 90 Views

Journal de Gynécologie Obstétrique et Biologie de la Reproduction 36 (2007) 369–374

TRAVAIL ORIGINAL

La contraception du post-partum : les recommandations médicales, le point de vue des femmes Postpartum contraception: medical guidelines, women’s point of view S. Fanelloa,*, V. Parat-Pateub, C. Dagornea, H. Hitotoa, J. Colletb, T. Routiotb, C. Baronc, A. Fourniéd a b c d

Département universitaire de santé publique, UFR de médecine, CHU d’Angers, 49045 Angers cedex 01, France Service de gynécologie obstétrique, CHU de Le Mans, 72037 Le Mans cedex, France UFR de médecine, 49045 Angers cedex, France Service de gynécologie–obstétrique, CHU d’Angers, 49933 Angers cedex 09, France

Reçu le 3 août 2005 ; avis du comité de lecture le 23 novembre 2006 ; définitivement accepté le 12 décembre 2006 Disponible sur internet le 22 janvier 2007

MOTS CLÉS Contraception ; Post-partum ; Recommandations médicales ; Allaitement

Résumé But. — La contraception du post-partum est définie par des recommandations particulières liées au mode d’allaitement. Le médecin doit concilier les règles de prescription et les attentes des femmes. L’objectif de ce travail était d’évaluer la pratique médicale à la maternité d’un centre hospitalier régional et la pratique réelle des femmes à domicile, en post-partum immédiat et durant l’année qui suit l’accouchement. Méthode. — Cent quatre accouchées de la maternité du Mans, en septembre 2004, ont participé à cette étude. Durant leur séjour en suite de couches, elles ont rempli un questionnaire concernant la contraception. Différentes données ont été extraites de leur dossier obstétrical. L’analyse de la littérature a permis la synthèse des recommandations sur la contraception du post-partum. Un an plus tard, les patientes ont répondu à une enquête téléphonique concernant leur pratique contraceptive. Résultats. — Dans notre étude, les deux tiers des accouchées (61,5 %) ont choisi l’allaitement maternel. Soixante-dix pour cent d’entre elles ont reçu pour contraception des progestatifs. Cette prescription a été suivie par les trois quarts des femmes (78 %) à leur retour à domicile. Les femmes qui ont choisi l’allaitement artificiel avaient reçu, pour les deux tiers d’entre elles (62,5 %), une ordonnance d’estroprogestatifs. Elles l’ont utilisée, en majorité (96 %), à leur retour à domicile. Un grand nombre de femmes (87,5 %) estimait ces contraceptions efficaces, mais plus d’un tiers les trouvait peu pratiques (38,9 %). Une femme sur deux (52,8 %)

* Auteur

correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (S. Fanello).

0368-2315/$ - see front matter © 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.jgyn.2006.12.002

370

S. Fanello et al.

oubliait sa contraception pendant le post-partum et la majorité (86 %) l’ont modifiée durant l’année. Un quart (23,1 %) des suivis contraceptifs durant cette période était effectué par un médecin généraliste. Conclusion. — La pratique de la maternité de ce centre hospitalier est globalement en accord avec les recommandations médicales. Il apparaît cependant primordial d’adapter la contraception du post-partum à la pratique réelle des femmes. Le médecin généraliste joue un rôle majeur dans cette prise en charge, et notamment lors des visites de suivi du nourrisson.

© 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

KEYWORDS Contraception; Post-partum; Medical guidelines; Sucking

Abstract Purpose. — Postpartum contraception is subjected to specific medical guidelines related to the suckling mode. The practitioner must conciliate prescription rules with women’s expectations. The purpose of this work was to estimate the medical practice in the maternity centre at a local hospital and the actual practice of women at home, in immediate postpartum and during the year that followed the childbirth. Method. — One hundred and four new mothers from the maternity centre, in September 2004, took the survey. During their stay after birth, they filled a questionnaire on contraception. Various data have been collected from their obstetrical file. The analysis allowed the synthesis of medical guidelines on postpartum contraception. One year later, patients answered a telephone survey about their contraceptive practice. Results. — In our survey, two-third of the new mothers (61.5%) chose breast-feeding. Seventy percent of them received progestins as contraceptives. Three out of four women (78%) followed this prescription after they left the hospital. Two-third (62.5%) of the women who had chosen artificial suckling received a prescription of estroprogestin. The majority of them (96%) used it after their return home. A high number of women (87.5%) estimated that these contraceptions were efficient, but more than a third of them thought they were uneasy to use (38.9%). Half of the women (52.8%) forgot their contraception during postpartum and the majority of them (86%) changed it within a year. A quarter (23.1%) of the contraception follow-up during this time was made by a general practitioner. Conclusion. — The practice in the maternity centre generally follows medical guidelines. However, it seems important to adapt postpartum contraception to the real practice of women. The general practitioner plays a major role in this management, especially during well-baby visits.

© 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Introduction

Méthodologie

La contraception revêt une place importante dans la vie d’une femme et celle-ci nous est apparue particulièrement délicate à mettre en place après l’accouchement. Les femmes attendent qu’une contraception soit adaptée à leur mode de vie, leur sexualité et leur statut de mère. La bonne tolérance d’une contraception influence leur choix et l’observance. Le médecin généraliste doit concilier les attentes de ses patients et les recommandations médicales afin d’optimiser l’efficacité de la contraception suivie. Quelques références médicales sur la contraception du post-partum existent [1–3] ; celles de l’Anaes « Allaitement maternel : mise en œuvre et poursuite dans les six premiers mois de la vie de mai 2002 » et « Stratégie de choix des méthodes contraceptives chez la femme de décembre 2004 ». Il nous paraît utile d’y ajouter « Consensus canadien sur la contraception : février, mars et avril 2004 » pour étayer notre propos et analyser les pratiques dans notre échantillon [4–6]. L’objectif de cette étude était d’évaluer les connaissances et attentes des femmes sur leur contraception du postpartum et de confronter les pratiques médicales aux recommandations de bonne pratique.

Les patientes incluses dans l’étude devaient avoir accouché à la maternité d’un centre hospitalier régional au cours du mois de septembre 2004 ; elles devaient accepter de remplir un premier questionnaire (14 items) dans le service de suites de couches (grossesse normale ou pathologique) afin de connaître la contraception utilisée avant la grossesse et leurs connaissances sur les méthodes contraceptives ; ce questionnaire permettait par ailleurs de faire une évaluation qualitative de l’information fournie à la maternité ; étaient exclues de l’enquête : ● les femmes dont le pronostic vital du bébé était en jeu ; ● les femmes ayant refusé l’accord écrit (utilisation ultérieure des données et contact téléphonique à un an) ; ● les femmes n’ayant pas rempli le questionnaire ou ayant répondu à moins de six items. Elles devaient pouvoir être contactées téléphoniquement après leur retour à domicile afin de pouvoir apprécier les critères d’observance et leur satisfaction.

La contraception du post-partum : les recommandations médicales, le point de vue des femmes

Nous nous sommes ensuite intéressés à l’évolution de leur pratique contraceptive un an plus tard et aux modalités de leur suivi médical en téléphonant à chacune d’entre elles dans le courant du mois de septembre 2004 (un an après l’accouchement). La dernière étape a consisté en l’analyse du dossier obstétrical des patientes incluses dans l’étude afin de relever les éléments obstétricaux (déroulement de la grossesse) et la contraception prescrite à la sortie. C’est ainsi que nous avons pu sélectionner 104 femmes répondants aux critères sus-cités et ayant accepté l’accord écrit. Les données ont été saisies et analysées sur logiciel Épi Info 2000. Les analyses univariées ont utilisé le test du chi2 de Pearson pour les variables qualitatives ou le test exact de Fischer (effectifs théoriques inférieurs à 5), le test de Student pour les variables quantitatives ou le test de Mann-Whitney si les effectifs étaient inférieurs à 30 : le seuil de significativité a été fixé à 5 %.

Résultats Cent quatre dossiers de parturientes ont donc été analysés. Les femmes ayant accepté de participer à l’enquête avaient en moyenne 29,4 ± 5,1 ans (16 % avaient moins de 25 ans). La moyenne du nombre d’enfants vivants était de 1,9 ± 1,14 enfant ; entre 20 et 29 ans, une femme sur deux avait un enfant unique et, à partir de 30 ans, plus d’un tiers étaient mères de deux enfants ; La date du terme moyen était de 40,6 ± 1,4 SA et 4 % des femmes avaient présenté un accouchement précoce avant 37 semaines. Durant la grossesse, 35,6 % des patientes reconnaissaient avoir régulièrement consommé du tabac. 88,5 avaient accouché par voie basse (11,5 % par césarienne) ; 61,5 % d’entre elles avaient choisi l’allaitement maternel. La durée moyenne d’hospitalisation avait été de 4,34 ± 1,06 jours. Concernant la contraception avant le passage à la maternité, nous constations que trois quarts des femmes utilisaient une pilule contraceptive ; six d’entre elles utilisaient deux moyens de contraception de façon simultanée : pilule/préservatif (n = 5) et pilule/retrait (n = 1) (Tableau 1). Sept femmes n’utilisaient aucune contraception. Nous avons, par ailleurs, demandé aux femmes de citer le ou les avantages liés au moyen de contraception ; nous avons regroupé les différentes propositions faites (87 réponses) en trois catégories : fiabilité (56,7 %), aspect pratique (50,7 %), autres avantages (tolérance, innocuité) (22,4 %) (20 patientes ayant proposé au Tableau 1 Fréquence des différents moyens contraceptifs utilisés avant la grossesse Table 1 Contraception before pregnancy Nombre (n) Pilule Préservatif DIU Retrait Spermicide Total

86 11 3 2 1 103

Pourcentage (%) 82,7 10,6 2,9 1,9 1 100

371

moins deux avantages). Nous avons pu établir la fréquence des avantages cités ci-dessus pour chaque type de contraception. La fiabilité était celui mis en avant par deux tiers des femmes sous pilule et l’aspect pratique par deux tiers des femmes qui utilisaient le préservatif. Les principaux inconvénients apparaissent dans le Tableau 2. Les deux tiers des femmes qui prenaient la pilule ou utilisaient le préservatif considéraient l’oubli comme l’inconvénient majeur de ces deux modes de contraception. Nous avions, par ailleurs, demandé aux patientes de définir le sentiment d’efficacité de leur contraception selon les critères suivants (très bon, bon, moyen et médiocre) et avons considéré qu’une contraception était jugée efficace quand les critères « très bon et bon » avaient été choisis et non efficace pour « moyen et médiocre ». C’est ainsi que la contraception choisie avant la grossesse était jugée efficace par 93,8 % des femmes (94 % pour la pilule et 100 % pour le préservatif). Dans notre étude, sept femmes sur 99 ayant répondu à la question avaient débuté une grossesse sous contraceptif : toutes prenaient la pilule. Concernant l’évaluation des connaissances des femmes sur la contraception, nous avons réparti les différents moyens contraceptifs en quatre groupes : méthode hormonale, méthode barrière, DIU et méthode naturelle. C’est ainsi que 43,5 % des femmes connaissaient plus de trois moyens de contraception (médian = 3). Parmi les moyens les plus connus, la contraception hormonale (33 %), le DIU (29 %) et les méthodes barrières (30 %) étaient cités de façon équivalente. Les méthodes naturelles étaient les moins connues (8 %). Durant le séjour à la maternité, la pilule représentait la moitié des moyens de contraception évoqués par l’équipe soignante, le DIU était évoqué dans 32 % des cas, les méthodes barrière dans 20 % et l’information sur les méthodes naturelles était quasi nulle. Quant à la contraception conseillée lors de la sortie des suites de couches, elle concernait une contraception hormonale dans un cas sur deux (49 %) : l’autre moitié ne se voyait proposer aucun autre moyen de contraception. Les patientes jugeaient cependant l’information reçue durant leur séjour comme suffisante (75,4 %) et adaptée (83,3 %). Les souhaits des femmes en matière de contraception sont résumés dans le Tableau 3 : Les deux tiers des femmes souhaitaient prendre la pilule et un quart envisageait la pose d’un stérilet. Les propositions faites par l’équipe Tableau 2 Fréquence des inconvénients cités dans l’utilisation des moyens de contraception Table 2 Contraception’s disadvantages

Oubli Saignement Prise de poids Aucun Autres difficultés matérielles/ inefficacité Total

Nombre (n) 37 7 5 5 12

Pourcentage (%)

64

111,8

62,5 11,9 8,5 8,5 20,4

372

S. Fanello et al.

Tableau 3 Contraception souhaitée par les femmes et proposée par l’équipe Table 3 Contraception women expectations and staff’s proposals

Tableau 5 Contraception utilisée dans le post-partum et un an après l’accouchement Table 5 Post-partum contraception and one year later

Contraception Pilule DIU Préservatif Implant Aucun Total

OP Stérilet Progestatifs Préservatif Méthodes naturelles Ligature trompes Aucune Total

Souhaitée (%) 64 (n = 57) 22,5 (n = 20) 6,7 (n = 6) 4,5 (n = 4) 2,2 (n = 2) 100 (n = 89)

Proposée (%) 35 (n = 23) 4,6 (n = 3) 12,3 (n = 8) – 47,6 (n = 31) 100 (n = 65)

Tableau 4 Contraception prescrite à la sortie de la maternité selon le type d’alimentation choisi Table 4 Prescribed contraception in accordance to choice concerning suckling mode

OP Progestatif Préservatif Aucune Total

Allaitement maternel (%) 0 70 10 20 100

Allaitement artificiel (%) 62,5 0 20,5 17 100

n’ont été concordantes que dans un cas sur deux pour la pilule et dans un cas sur cinq des cas pour le stérilet. À la sortie de la maternité, les patientes bénéficiaient d’une prescription médicale : c’est ainsi que la moitié d’entre elles s’étaient vues prescrire un progestatif et un quart un estroprogestatif. Le Tableau 4 permet de voir leur répartition selon le mode d’allaitement choisi. Dans notre étude, parmi les femmes qui souhaitaient la pilule, une grande majorité (86 %) en avait reçu la prescription. Parmi celles qui prévoyaient un stérilet, 70 % avaient une ordonnance d’OP et les autres aucune contraception. Un quart des femmes qui désiraient l’implanon® en avait eu la prescription et les autres un OP. De retour à domicile, un tiers des patientes avait utilisé une pilule estroprogestative, 40 % prenaient un progestatif (Microval® ou Cérazette®) et 20 % d’entre elles ne suivaient aucune contraception (Tableau 5). La majorité des femmes (96 %) ayant reçu une ordonnance d’OP l’avaient débuté à domicile. Les trois quarts des femmes sous progestatifs (78 %) avaient poursuivi cette contraception et les deux tiers des patientes sans prescription de sortie n’utilisaient aucune méthode contraceptive. Quatre femmes sur cinq avaient poursuivi le préservatif au post-partum. Parmi les 72 femmes qui utilisaient une méthode contraceptive, 90 % estimaient que la contraception suivie en post-partum était efficace, dont les utilisatrices d’OP et de Microval® (89 et 85 %). Les femmes sous Cérazette® la jugeaient efficace à 78 % ; pour celles utilisant le préservatif ou une méthode naturelle les taux atteignaient 100 %. L’aspect pratique de la contraception était estimé à 40 % pour les OP, 54 % pour le Microval® et 100 % pour le préservatif et les méthodes naturelles. La tolérance de Cérazette® et Microval® était jugée très bonne et bonne pour trois quarts des femmes. Un tiers des femmes déclarait mal tolérer les OP ; les principaux effets secondaires

Post-partum (%) 30,8 0 38,5 8,8 1 0 20,9 100

1 an après (%) 42,9 30,7 2,2 7,7 3,3 1,1 12,1 100

signalés étaient de saignements (36 %), des céphalées, mastodynies et une prise de poids (18 %) ou des troubles de la lactation (9 %). Sur les 72 femmes ayant utilisé un moyen de contraception, deux avaient présenté une grossesse non désirée (2,7 %) : ces deux patientes étaient sous OP. Durant l’année suivant le post-partum, 53 % des femmes, dont celles sous Microval® (50 %), affirmaient avoir régulièrement oublié d’utiliser leur méthode contraceptive ; parmi les utilisatrices d’OP, les trois quarts d’entre elles avaient eu des oublis de prise contre un tiers des utilisatrices de Cérazette®. Deux tiers des femmes « oublieuses » durant le post-partum, l’étaient aussi avant la grossesse et un tiers l’était devenu. Si 80 % des utilisatrices de Microval® jugeaient son coût faible, les deux tiers utilisant Cérazette® trouvaient le prix trop élevé contre un quart pour les utilisatrices d’OP. Moins de 10 % des femmes utilisaient plusieurs moyens de contraception de façon simultanée. Un an après leur sortie de la maternité nous avons pu interroger 91 femmes sur les 104 incluses au début de l’enquête, soit un taux d’adhésion de 87,5 %. Un an après l’accouchement 86 % des femmes utilisaient un moyen de contraception différent du postpartum. Le stérilet s’était substitué aux progestatifs. Parmi celles-ci, environ un tiers avait changé sur les conseils de leur médecin et un autre tiers par choix personnel ; l’arrêt de l’allaitement ou une contreindication constituaient les autres motifs de changement. Le suivi médical était assuré dans les deux tiers des cas par un gynécologue ; le médecin généraliste (MG) n’étant concerné que dans un quart des cas. Une femme sur cinq ne bénéficiait d’aucun suivi. Parmi les patientes suivies par un gynécologue, nous obtenons une proportion de 40 % de femmes utilisant un OP et 30 % le stérilet ; les femmes suivies par un MG étaient pour les trois quarts sous OP. Dans notre enquête, 60 % des femmes avaient choisi l’allaitement maternel et plus de la moitié avait allaité moins de trois mois. Les principaux motifs d’arrêt étaient des difficultés d’alimentation du bébé (33 %) et la reprise du travail (33 %). Le tabagisme était un facteur d’arrêt prématuré de l’allaitement maternel (p = 0,003).

Discussion Dans notre étude, les prescriptions de sortie sont globalement conformes aux recommandations, sauf en ce qui concerne les spermicides et la méthode MAMA [4–6] qui ne

La contraception du post-partum : les recommandations médicales, le point de vue des femmes

sont pas mentionnés dans le dossier. Pourquoi ces méthodes n’ont-elles pas été abordées par l’équipe ? S’agit-il d’une carence de formation de la part des soignants ? De nonsignalement car ces méthodes ne nécessitent pas d’ordonnance ou de réelle absence de prescription ? Le nombre croissant de retours précoces à domicile (un quart des accouchées dans notre étude), dans les maternités de niveau III [7] peut expliquer certaines difficultés de prise en charge autour de l’accouchement et durant le post-partum immédiat : il semble cependant nécessaire de proposer, au sein de chaque maternité, une formation spécifique des équipes à l’enseignement des méthodes barrières et des méthodes naturelles ; il faut cependant qu’elles informent les patientes de la fiabilité modérée de ces méthodes ! Concernant les souhaits des femmes de notre enquête en matière de contraception, nous sommes proches de l’enquête de l’INED de 1994 où les deux tiers voulaient utiliser une contraception orale et un quart un DIU [8] : Les propositions des femmes restent les mêmes depuis dix ans et témoignent d’une certaine sous-information. Nous avons, par ailleurs, noté une divergence importante entre les moyens de contraception envisagés par les femmes et la contraception prescrite : en dehors des OP pour lesquels on retrouve près de 90 % de concordance, la pose d’un stérilet ou la prescription d’Inplanon® n’ont été satisfaites que dans un quart à un tiers des cas. Or, la littérature souligne que le choix du mode de contraception par la femme elle-même (niveau de preuve III) et la prise en compte de l’accord du partenaire (niveau II) sont les garants d’une bonne observance [6]. Aux yeux des femmes, il est primordial que leur contraception soit aussi fiable que pratique. Les femmes utilisant la pilule font de la fiabilité leur argument principal. Les utilisatrices du préservatif et du stérilet mettent en avant l’aspect pratique ; en effet la réversibilité immédiate du préservatif séduit les utilisatrices, le partenaire participe aussi à la contraception qui n’est plus le monopole féminin. Le DIU plaît par son côté permanent et surtout parce que la femme ne doit « pas penser » à sa contraception ; n’oublions pas que, dans notre étude, les deux tiers des femmes signalaient oublier fréquemment leur contraception, dont deux tiers d’utilisatrices d’OP et de préservatifs. Ces résultats sont équivalents à ceux du consensus canadien sur la contraception de 2004, qui signalait 60 % d’oublis de contraceptifs chez les femmes [9] ; rappelons que les oublis correspondent à un risque accru de grossesses non désirées et d’IVG : il existe en France encore 200 000 IVG par an [8]. Dans notre étude, 7 % des femmes avaient débuté leur grossesse sous OP. Cette situation peut s’expliquer par l’ambivalence chez la femme de son désir de grossesse et ses conséquences sur la pratique contraceptive [6]. Évaluer le niveau de connaissance des femmes sur la contraception est indispensable pour adapter l’information délivrée, obtenir leur adhésion au moyen choisi et une bonne observance ; plus de la moitié des femmes connaissait moins de trois moyens de contraception et le niveau de connaissance augmentait avec l’âge et la parité : il sera important de tenir compte des critères d’âge et de parité dans le conseil donné. Les modalités et le moment idéal pour délivrer cette information restent

373

à définir, car la majorité des femmes ne souhaitent pas d’information de groupe durant leur séjour à la maternité et seulement un tiers souhaite être informé durant les cours de préparation à l’accouchement : les visites de suivi du nourrisson pourraient être le lieu d’échanges approprié. La prescription de sortie de la maternité est globalement respectée ; les femmes ayant modifié leur contraception sont en majorité celles sous progestatifs et qui allaitaient : elles ont plutôt choisi des méthodes barrières en relais. L’utilisation du Microval® est jugée peu pratique contrairement à Cézarette®, mais cette dernière n’est pas remboursée ; l’abandon des progestatifs peut être lié aux effets secondaires (aménorrhée ou spotting, prise de poids, mastodynie) et à la contrainte horaire des prises, mais également à l’idée faussement répandue qu’une femme qui allaite ne peut concevoir. Rappelons que la méthode MAMA est une méthode contraceptive efficace si les consignes sont bien respectées : dans notre étude, aucune des femmes interrogées ne les connaissait. La période de changement corporel et de modification hormonale vécue dans le post-partum pourrait expliquer la désaffection des femmes pour les OP. L’observance de la contraception du post-partum reste médiocre, en particulier pour les OP : ces résultats nous encouragent à privilégier une contraception simple à l’emploi et souple dans ses horaires, présentant une bonne tolérance afin d’éviter les abandons [6]. Dans notre enquête, nous retrouvions deux femmes ayant eu recours à l’IVG en raison d’une grossesse non désirée durant le post-partum ; ces femmes sous OP les oubliaient régulièrement : ces résultats peuvent être interprétés comme un échec de l’information du post-partum ; le médecin traitant peut et doit y porter toute son attention, la prescription de sortie de maternité n’est pas figée, elle doit être réévaluée au besoin un an plus tard, le profil contraceptif des femmes est modifié avec l’apparition du DIU (une femme sur trois) au détriment des OP et de Microval® et cela sur avis médical et pour convenance personnelle. L’utilisation du DIU n’apparaît qu’à cette période en raison des pratiques habituelles : celles-ci encouragent sa pose en post-partum tardif (fin d’involution utérine) et chez les multipares ; Signalons que l’HAS reconnaît la pertinence du DIU chez les nulligestes [6]. Quant à l’arrêt du Microval® il correspond en partie à l’arrêt de l’allaitement, mais aussi à un choix personnel sans doute lié aux difficultés pratiques du contraceptif. Les médecins traitants n’interviennent qu’auprès d’un petit nombre de femmes, en majorité sous OP. Le grand nombre de femmes, utilisatrices d’un stérilet et ayant eu recours à un gynécologue, peut s’expliquer par le moment particulier de sa pose, qui s’est effectuée probablement à la visite post-natale du deuxième mois, souvent réalisée par un spécialiste. L’accessibilité au médecin généraliste devrait être favorisée par la suite, grâce au suivi du nourrisson. Son rôle est devenu prépondérant depuis les retours précoces à la maison ; cependant il reste difficile d’atteindre les femmes dont les nourrissons sont suivis par un pédiatre et qui ne consultent que rarement pour ellesmêmes.

374

En ce qui concerne les femmes allaitantes, nous avons vu que la contraception microprogestative type Microval® était jugée peu pratique et qu’une partie d’entre elles ne suivait aucune contraception ; pour ces femmes, le médecin généraliste peut proposer l’utilisation de méthodes barrières ou de la MAMA. Notons enfin que le DIU peut être une bonne alternative, compte tenu de son efficacité et de son aspect pratique.

Conclusion Dans notre étude, les pratiques analysées sont globalement en accord avec les recommandations de l’Anaes sur la contraception du post-partum ; elles nous amènent cependant à proposer une formation spécifique des soignants, car certaines méthodes semblent totalement ignorées ou du moins non transmises. Si le séjour en suite de couches n’apparaît pas adapté à une bonne transmission de l’information sur la contraception, c’est sans doute au médecin traitant de prendre rapidement le relais de celle-ci ; cette prise en charge précoce devrait aussi permettre de réduire les oublis en adaptant les moyens proposés : une prescription postcoïtale d’urgence, en cas d’oubli du contraceptif, pourrait de même être proposée. Les recommandations récentes insistent sur la nécessité d’être vigilant à la pratique réelle de la contraception et d’obtenir le consentement éclairé des femmes.

S. Fanello et al.

Références [1] Forveille F, Pierre F. Impact Internat Gynécologie-obstétrique : Post partum 1997 ; 18: 95 p. [2] Dreyfus R. Post-partum. In: Serfaty D, editor. Abrégé contraception. 2e édition. Paris: Masson; 2002. p. 298–301. [3] Brideron JM. Contraception du post-partum. 16-02-2002. Accessible sur le site http://www.Gyneweb.fr. [4] HAS. Anaes. Recommandations pour la pratique clinique. Allaitement maternel. Mise en œuvre dans les six premiers mois de la vie de l’enfant. Mai 2002 : 162 p : 37–162. Accessible sur le site http://www.anaes.fr rubrique « publications ». [5] Black A, Francoeur D, Rowe M, et al., SOGC. Consensus canadien sur la contraception – Canada: troisième partie. 2004 (143) : 349– 436. Accessible sur le site http://www.sogc.org. [6] HAS. Anaes. Recommandations pour la pratique clinique. Stratégie de choix des méthodes contraceptives chez la femme. Décembre 2004; 234 p : 16–189. Accessible sur le site http://www.hassanté.fr rubrique « Anaes/publications ». [7] Unité de recherche épidémiologique en santé périnatale et santé des femmes. Inserm. Enquête nationale périnatale. Rapport d’activité 2003. Accessible sur le site http://www.ladocumentationfrançaise.fr. [8] Institut de veille sanitaire. Inserm. Surveillance dans les domaines de la reproduction et de la périnatalité. 83 p : 16–52. Accessible sur le site http://www.invs.fr rubrique « publications ». [9] Black A, Francoeur D, Rowe M, et al., SOGC. Consensus canadien sur la contraception – Canada; deuxième partie. 2004; 143 : 256– 296. Accessible sur le site http://www.sogc.org.