Petite histoire illustrée de la tuberculose

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SCIENCE ~__~DIRECT ~ ELSEVIER

Archives de p6diatrie 12 (2005) $88-$95 http://france.elsevier.com/direct/ARCPED/

Petite histoire illustrde de la tuberculose The history of tuberculosis G. Dutau 9, ~ e Maurice-AIete, 31400 Toulouse, France

Rdsum6

L'histoire de la tuberculose a suscit6 un grand nombre de publications. Le but de cette revue est de ddcrire les principales 6tapes, grandes ou petites, qui ont j alonn6 cette histoire depuis l'antiquit6 jusqu'h nos j ours. Une lutte antituberculeuse sans rel~che a 6t6 finalement couronn6e de succbs, mSme si raffection reste pr6occupante darts de nombreux pays du monde en proie 7tde graves difficult6s 6conomiques. Elle a servi de module h la prise en charge actuelle des maladies chroniques comme le diab~te, l'asthme, les allergies. © 2005 Elsevier SAS. Tous droits r6serv6s. Abstract

The history of tuberculosis has given rise to a great number of publications. The aim of this review is to describe the main steps of this history from Antiquity to our time. The permanent fight against tuberculosis has eventually been won, even though the disease remains worrying in many countries of the world affected by serious economical difficulties. This fight has served as a model for the present management of chronic diseases like diabetes mellitus, asthma or allergies. © 2005 Elsevier SAS. Tous droits rdservds. Mots clgs : Tuberculose ; Maladies chroniques ; Histoire de la m6decine Keywords: Paediatrics; Tuberculosis; Chronic diseases; History of medicine

I1 faudrait plusieurs livres (et peut-~tre que cela ne serait pas suffisant) pour raconter l'histoire, grande et petite, de la tuberculose. Une approche remarquable du sujet est n6anmoins disponible ~ laquelle nous renvoyons le lecteur intdress6 [1,2]. Une affiche r6aliste de la <>datde de 1902 illustre ~ la perfection la situation du d6but du XX e sibcle (Fig. 1). La scbne se passe sur un champ de course. La mort, monocle en main, sablier pos6 sur la balustrade sur laquelle elle s'appuie, regarde l'arrivde d'une course hippique bien particulibre. Avec 150 000 morts par an, le cheval <> devance d'une courte tSte le cheval <~syphilis >> (140 000 morts). A cette 6poque, avec 40 000 morts annuels, le cheval <>6tait largement distanc6 : il figure tout juste sur l'affiche ! La situation a bien chang& La tuberculose 6tait nagu6re une maladie mortelle dans les pays dits industrialis6s. Elle le reste d'ailleurs dans de nombreux pays du monde 1. Nous sommes ici tr~s loin des Adresse e-mail ." [email protected] (G. Dutau).

© 2005 Elsevier SAS. Tous droits r6servds.

nombreux t6moignages qui confbrent aux patients atteints de tuberculose une sorte d'61an cr6ateur. Jacques Chrdtien ddcrit remarquablement les parcours de ces tuberculeux c61bbres, artistes et surtout 6crivains, pour lesquels la tuberculose semble avoir 6t6 une source d'inspiration : John Keats, Edgar Poe, les s~eurs Bront~, Kafka (etc.) [3]. Toutelois, la tuberculose n'est pas la seule affection qui possbde ce caractbre romantique. Avec l'exemple classique de Marcel Proust, l'asthme vient en premier lieu h l'esprit, probablement parce qu'il est une maladie chronique [4]. Plus gdndralement, on pourrait d6celer cette connotation romantique dans toutes les maladies (et elles sont nombreuses) qui creusent le visage et enfi~vrent le regard. I1 n'emp~che qu'une

1Chr6tien J. La Tuberculose. Parcours imag6. Tome 1. Propos. Hauts-de-France, I~dit., Auchel, 1995, 1 vol. (159 pages). <>.

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Fig. 1. Affiche : la mort au champ de courses (1901). crdation littdraire ou scientifique f6conde, e x i g e aussi une sant6 vigoureuse. U n e sant6 v i g o u r e u s e p e r m e t 6 g a l e m e n t de lutter v i c t o r i e u s e m e n t c o m m e maints e x e m p l e s l'ont prouv6, en particulier celui d ' A l p h o n s e B o u d a r d 2 [5]. L a tuberculose a toujours exist6, dbs la pr6histoire. En tout cas, p o u r citer l'une des civilisations les plus prestigieuses, on sait qu'elle n'a 6pargn6 n i l e petit peuple de l'ancienne l~gypte, ni les pratres, ni m 6 m e le Pharaon. Des signes 6vidents de tuberculose osseuse sont visibles sur des m o m i e s 6gyptiennes. Des s y m p t 6 m e s d'atteinte pleurale ou parenc h y m a t e u s e out 6t6 d6tectds sur les p o u m o n s prdlev6s avant les opdrations de m o m i f i c a t i o n et conserv6s dans des vases canope. A m 6 n o p h i s IV (Akh6naton) et son 6pouse, N6fertiti,

furent atteints de tuberculose [6]. Les diverses repr6sentations disponibles, en particulier l'6troitesse du thorax et surtout le visage 6maci6 du Pharaon pourraient traduire l'affection 3 (Fig. 2). Pendant les sibcles suivants, la tuberculose s6vira sans discontinuer, de la Grbce antique h la Renaissance o/1, ~ l'instar de la syphilis, J6r6me Frascator en soulignera la contagiosit64.

2 Boudard A. L'h@ital. Gallimard t~d., Paris, 1974. Dans plusieurs de ses livres, l'6crivain, qui fut lui-m~me atteint de tuberculose pulmouaire et plusieurs fois hospitalis6, d6crit l'ambiance des salles communes des h6pitaux parisiens et des sanatoriums de l'Assistance publique. ~ L'hosto, quand on y a sdjournd longtemps et qu'on a failli y clapser, on y reste toujours un peu. Il vousfascine, vous obskde.., on se dit qu'on y reviendra... ~.

3 http://www.insecula.com. ~ Insecula. L'encyclop6die des arts et de l'architecture~. Musde 6gyptien du Caire. Salle Am6nophis IV (Akh6naton). ~ partir de ran 4 de son r~gne, Am6nophis IV impose un culte monoth6iste, celui d'Aton (le Dieu Solaire), au ddtriment d'Amon (Maitre de rAir et Dieu de la f6condit6), Ie roi des Dieux (Amon-R~). Akh6naton est repr6sent6 amaigri, les traits tir6s, mais ce nouveau style (thorax r~tr6ci et abdomen pro6minent) est aussi la marque du nouvel art amarnien (de Tell-Amama, la nouvelle capitale du Pharaon). 4 Girolamo Frascatoro (1478-1553). Auteur de ~ Naugerius ~ (1540) et de ~ De contagio et contagiosis morbis ~ dans lequel iI consid~re que certaines des grandes maladies de l'6poque, en particulier la syphilis et la tuberculose, sont dues ~t des organismes invisibles (,~ contagium vivum ~) qui se transmettent par voie a6rienne et par contact interhumain. Un visionnaire que l'on peut consid6rer comme un pr6curseur de la bact6riologie, mais qui eut fort peu d'61~ves...

Fig. 2. Am6nophis IV (Akh6naton).

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Pour un mddecin d'aujourd'hui la consultation des descriptions anciennes pourrait prSter ~t sourire. Mais il faut bien se garder de rdagir ainsi. B ayle (1774-1816) distingue 6 formes de phtisie pulmonaire : tuberculose (pour tubercule), granuleuse (miliaire ?), mdlanoanthrosique, ulcdreuse, calculeuse et cancEreuse. A l'Evidence, la phfsie dEsigne alors un syndrome tr~s disparate oh la tuberculose (la vraie) voisine avec d'autres affections. La <>peut siEger sur le larynx, le pEritoine, le foie, le rein, la vessie, les ganglions mEsentEriques. C'est ?~ Rend LaEnnec (1781-1826), principal <>de la mEthode anatomoclinique, que l'on doit d'avoir propose une conception uniciste de la tuberculose, une maladie autonome dont la lesion anatomique de base (le tubercule) passe par diffErents stades : miliaire, cru et enkyst6 [7]. Plus tard, cette conception sera vivement combattue par r anatomiste allemand Rudolf Virchov (1821-1902) pour qui le tubercule et le casdum 6taient de nature diffErente, le casEum n'Etant pas particulier ~t la tuberculose, mais pouvant se ddvelopper au cours d'autres processus infectieux ou inflammatoires [7]. En pEdiatrie, il faut retenir les noms de Rilliet et Barthez 5. Partisans de la mEthode anatomoclinique, mais conscients de ses limites, ils ont vivement soutenu l'unicitE de la tuberculose dont ils dEcrivirent les 2 principales forrues, pulmonaire et pleurale. REtrospectivement, on se rend compte qu'avec des moyens assez ddrisoires (la percussion et l'auscultation) ils se sont aperqus que les enfants tuberculeux dont la respiration 6tait rauque Etaient probablement atteints de compressions trachEobronchiques. Ils ont montr6 l'importance et la frEquence de l'atteinte des ganglions bronchiques, souvent associEes ?~une atteinte du parenchyme (ce qui prefigure le complexe primaire de Koch).

5 Rilliet et Barthez sont les auteurs du <>(1. Phlegmasies, hypErEmies, ramollissements, hypertrophies, bydropisies, hdmorragies, gangrenes. - 2. NEvroses, fi~vres continues, tuberculisations, entozoaires, appendice). JanssensDefoss6 et Quin, Toumai, 1840 (2 volumes). 6 http://www.voltaire-integral.com. Les 6crouelles. Le Dictionnaire Philosophique, Voltaire. <, l~crouelles, scrofules, appelEes humeurs froides, quoiqu'elles soient tr~s caustiques ; l'une de ces maladies presque incurables qui dEfigurent la nature humaine, et qui m~nent ~t une mort prEmatur~e par les douleurs et l'iufection. On pretend que cette maladie fut traitEe de faqon divine, parce qu'il n'Etait pas du pouvoir humain de la guErir. Peut-atre quelques moines imagin~rent que des rois, en qualit6 d'images de la Divinit& pouvaient avoir le droit d'opErer la cure des scrofuleux, en les touchant de Ieurs mains qui avaient Et6 ointes. Mais pourquoi ne pas attribuer, ~t plus forte raison, ce priviI~ge aux empereurs, qui avaient une dignit6 supErieure ~tcelle des rois ? Pourquoi ne pas la donner aux papes, qui se disaient les maitres des empereurs, et qui 6taient bien autre chose que de simples images de Dieu, puisqu'ils en 6taient les vicaires ? I1 y a quelque apparence que quelque songe-creux de Normandie, pour rendre rusurpation de Guillaume le Bfttard plus respectable, lui, concEda, de la part de Dieu, la facult6 de guErir les ~crouelles avec le bout du doigt. C'est quelque temps aprbs Guillaume qu'on trouve cet usage tout 6tabli. On ne pouvait gratifier les rois d'Angleterre de ce don miraculeux, et Ie refuser aux rois de France leurs suzerains. C'efit 6t6 blesser le respect dfi aux lois fEodales. Enfin, on fit remonter ce droit ~t Saint t~douard en Angleterre et ~ Clovis en France ... >>.

Ils ont aussi constatE que, contrairement 5 ce qui se passait chez les adultes, les hEmoptysies Etaient plutEt rares chez les enfants. Rilliet et Barthez ont Egalement distingue la pleurdsie tuberculeuse des pleurEsies chroniques non tuberculeuses [7]. Dans l'ancienne Europe, la tuberculose a ErE si frEquente que beaucoup de symptEmes et affections lui furent attribuEs. Dans les <>,la moindre toux, une fatigue, des douleurs thoraciques (etc.) Etaient gEnEratrices dune an~olsse Nen comprehensible. Des anomalies aussi frEquentes que les adEnopathies cervicales ont suscitd une peur ancestrale et des croyances multiples. Les Ecrouelles 6 que les rois d'Angleterre (h partir de Guillaume 1er le ConquErant dit Le B~tard, 1028-1087) et de France (~ partir de Louis IX ou Saint-Louis 1214-1270) Etaient censEs pouvoir guErir en les touchant, il est vrai avec l'aide de Dieu (<>),constituaient en fait un syndrome multifactoriel : dermatoses suintantes et surinfectees avec adEnopathies satellites, adEnophlegmons, affections thyrol'diennes (goitres)... et adEnopathies tuberculeuses fistulisEes. Avant le 24 mars 1882, date de la dEcouverte par Robert Koch (1843-1910) du bacille (BK) qui portera ddsormais son nom, le mdcanisme de la tuberculose est le sujet d'gpres controverses. L'existence de nombreux cas familiaux fait 6voquer une predisposition hdrdditaire. Toutefois plusieurs auteurs mettent l'accent sur des facteurs favorisants : carences alimentaires, alimentation artificielle, excEs de farines, hygiene dEfectueuse, maladies infectieuses intercurrentes, coqueluche et surtout rougeole (etc.). Mais, curieusement, une contribution qui aurait pu 8tre decisive - - c e l l e de Jean-Antoine Villemin ( 1 8 2 7 - 1 8 9 2 ) - - est tombEe dans l'oubli, mSme si de nombreuses salles de pneumophtisiologie ont porte le nom de ce grand mEdecin. En effet, au cours d'une seance de l'AcadEmie nationale de mEdecine (5 ddcembre 1865), Villemin montra que la tuberculose 6tait une maladie infectieuse, contagieuse et inoculable, donc 6vitable 7. Mais Villemin dut combattre le lobby puissant des <> qui alla jusqu'~ exiger qu'il rEpUte ses experiences dans son petit laboratoire du Val-de-GrSce (Figs. 2,3,4). La conception officielle (<>) devait s'effondrer c o m m e un chateau de cartes avec la dEcouverte du bacille acidoalcoolorEsistant par Koch, ce qui lui valut le prix Nobel de mEdecine en 1905. 7<>. Au cours de la seance de l'Acaddmie de mEdecine du 5 ddcembre 1865, Villemin fit la lecture d'une note intitulEe <>qui, par la mEthode expErimentale, prouva que la maladie 6tait transmissible, contagieuse et 6vitable, due 5 un microbe invisible avec les moyens technique de l'Epoque. Fils de simples paysans du village de Prey (Vosges), trop pauvres pour lui payer les Etudes nEcessaires, JeanAntoineVillemin entra au Service de sant6 des ArmEes oh il fit une brillante carri~re, devenant professeur de mEdecine, puis directeur du Val-de-Grfice, et enfin membre de l'AcadEmie de mEdecine dont il fur le Vice-prEsident, puis le PrEsident en 1893.

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Fig. 3. Camet de timbres antituberculeux de la 2 le campagnenationale : Villemin (1951).

Fig. 4. Intdrieur du carnet : ~(1951).

Mais d'autres mddecins avaient dEj~ perqu l'importance de la detection et de la prise en charge prEcoce de la maladie avec les moyens de l'Epoque : alimentation (et m~me suralimentation), et surtout isolement du patient que l'on soustrait leur famille ... autant pour le protEger que pour la protEger. C'est Sir Robert William Philip qui crEa le premier dispensaire antituberculeux h Edimbourg en 1887. Bien d'autres suivirent avec pour principale mission la detection prEcoce des malades, puis leur surveillance rEgulibre lorsqu'il y eut des traitements efficaces. 1882 : plus de la moiti6 des mEdecins ne croit pas g la contagiosit6 de la tuberculose [8]. Le fair que l'on trouve des BK darts le sperme ou que des contaminations transplacentaires soient possibles est vers6 au dossier de la tuberculose ~[9]. Les enfants qui deviendront tuberculeux, issus de familles ~ risque ne sont-ils pas trEs souvent pfiles, frales, longilignes, blonds et h peau fine ! Mais, la notion de contagiosit6 6tant admise, c'est le mode de contamination qui va ~tre discut6, digestif ou interhumain ? Le r61e du BK bovin fut envisage jusqu'fi ce que Robert Debr6 et Marcel Lelong montrent que l'Ebullition du lait de vache ne faisait aucunement baisser la frdquence de la tuberculose, constatation qui dolt representer l'une des premitres acquisitions de ce qui allait devenir (beaucoup plus tard) l'Epiddmiologie, mais qui n'emp~chera pas la creation de nombreux dessins humoristiques hostiles au lait de vache ! Parall~lement, il est dEmontr6 que l'inhalation de BK est la meilleure facon de tuberculiser les animaux d'expErience, en particulier les cobayes. Parrot (1876) et Kiiss (1898), dans la loi qui porte leurs hOrns, 6tablissent que Fatteinte alvdolaire (chancre d'inoculation) prdc6de toujours

l'adEnopathie satellite. C'est le complexe primaire pour Ghon (1912) [7]. la fin du XIX e et au debut du XX e si~cles, les dEcouvertes vont se succdder ~ un rythme accdldr6 : 1891 : ddcouverte du ph~nom~ne de Koch (l'inoculation de BK au cobaye ddj?a tuberculis6 entraine une reaction locale nEcrotique due ~ la tuberculine sEcrdtde par le BK) ; 1907 : application par Von Pirquet du ph~nom~ne de Koch au diagnostic de la tuberculose (c'est l'intradermor~action ~ la tuberculine) ; 1908-1910: perfectionnement des techniques avec I'IDR de Mantoux et la percutirEaction ou timbre tuberculinique de Moro. Autour des annEes 1950, il est possible de ddfinir une histoire naturelle de la tuberculose et de se rdfdrer ~ un glossaire prdcis 8. • La contamination, le plus souvent respiratoire et d'origine humaine, d'un enfant jusque-lg indemne est suivie par une phase d'incubation : c'est la phase antdallergique dEcrite par Debr~ et Jacquet. • La primo-infection est marqude par le dEveloppement d'un chancre d'inoculation (le plus souvent peu visible ou non visible) et d'une (ou de plusieurs) adEnopathies satellites : c'est le complexe primaire de Gh6n et Rfinke. • L'infection tuberculeuse entraine le dEveloppement d'une immunit6 cellulaire qui, apparaissant en une quin-

8 Gerbeaux J. Primary tuberculosis in childhood. CC Thomas Edit., Springfield, Ill., 1970, 1 vol (339 p.). Ce livre existe aussi en langue francaise publi6 par Masson. I1 a servi de iivre de chevet ~ quelques internes qui, au debut des annEes 1970, se destinaient ~ la pnemnologiepEdiatrique.

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zaine de jours, est detectable par le virage des reactions cutanEes/t la tuberculine. L'expression de la primo-infection tuberculeuse va de la latence compl6te jusqu'~ des signes gEnEraux avec une alteration de l'Etat gEnEral, des sueurs et de la fibvre qui peut ~tre importante (typhobacillose de Landouzy). • La tuberculose initiale est le plus souvent latente (simple virage des tests tuberculiniques). Elle est dEnommEe patente s'il existe des sympt6mes gEnEraux, et/ou radiologiques, et/ou bactEriologiques. • La tuberculose dite tertiaire est due ~t une reinfection endog~ne, ce qui souligne l'importance du traitement de toutes les primo-infections latentes (chimioprophylaxie) [10]. Ces notions sont bien illustrEes par les aphorismes de Pidoux (<~ la phtisie n'est pas une maladie qui commence mais une maladie qui finit ~, 1878) et de Von Behring (<~ la tuberculose de l'adulte est la fin d'une longue histoire commencde dans l'enfance ~, 1904) [11]. Jusqu'~t la grande guerre, on peut dire que la tuberculose Etait une maladie incurable malgrE un grand hombre de tentatives thErapeutiques dont l'essentiel est rEsumE sur le (Tableau 1). Les mesures indiquEes en italique ont donne de rEsultats probants car elles associaient le repos et des apports EnergEtiques suffisants, tout en soustrayant le patient ?~des conditions socioEconomiques prEcaires et ?~ un risque de reinfection exogbne, en particulier familial Le placement familial avait le m6me but chez les touts petits places dans un milieu familial et chaleureux 9. Aprbs des espoirs dEcus (1890-1912), tout le XX e si6cle aura vu se succEder des mesures preventives et curatives de plus en plus efficaces dont l'essentiel est rEsumE sur le (Tableau 2). Un dEpistage radiologique de masse est mis en ~euvre apr6s la guerre de 1939-1945, fixe (dans les dispensaires antituberculeux) et mobile (~t l'aide de camions radiophotographiques vers 1960) l°. Les moyens actuels permettent de vaincre la tuberculose. Encore faudrait-il qu'ils soient dispo-

9 Crd6e par Grancher en 1903, l'~euvre Grancher, soutenue par les grands m6decins que furent Robert Debr~ (pour la p6diatrie) et L~on Bernard (pour la pneumologie d'adultes) avait pour objet de placer les jeunes enfants de parents tuberculeux darts des familles d'accueil en Sologne (Romorantin, Mennetou-sur-Cher, Neung-sur-Beuvron). Le centenaire de I'ceuvre a donn6 lieu une exposition en 2003 ~ Paris. Elle est visible au mus6e de ~ l'~euvre Grancher ~, g RomorantinLanthenay. Voir : ~
Tableau 1 La tuberculose maladie incurable M6dicaments

Digitale (1810) Solution de lugol (1829) Goudrons et cr6osote (1832) Ars6niate de soude (1840) Huile de foie de morue (1849) Calcithfirapie (1860)

Mesures di6t6tiques

Lait d'~nesse

Physioth6rapie

I~quitation

Suralimentation

Gymnastique Climatothdrapie

H61ioth~rapie (UV) Cures d'air pur Climatothdrapie d'altitude

Tableau 2 Des espoirs d6qus aux traitements actifs Collapsoth~rapie (Foflanini et Murphy, 1894-1898) Tuberculinoth6rapie (Koch, 1890) Sdroth6rapie (Ch. Richet, 1892) Essais de vaccinations (Bruschettini, 1909) BCB (Calmette et Gu~rin, 1927) Chirurgie : segmentectomie (Friedlander, 1935), pneumonectomie (Bmner et Nissen, 1929-1931) Streptomycine (Waksman, 1944) Acide para amino salicylique ou PAS (Lehman, 1946) Hydrazide de l'acide nicotinique ou INH (Chorine, 1945) l~thionamide (Grumbach, 1956) Kanamycine (Umezawa, 1957) l~thambutol (Wilkinson, 1961) Prothiomamide (Grumbach, 1956) Rifampicine (Sensi, 1966)

nibles partout (et immddiatement) ce qui est trbs loin d'atre le cas, marne dans les pays dits dEveloppEs. La lutte contre la tuberculose a suscitE un nombre considerable de publicitEs qui visaient g promouvoir les outils therapeutiques de l'Epoque et, surtout, h dElivrer des messages sanitaires dont la pertinence demeure souvent intacte. La carte postale a constituE l'un des meilleurs supports de ces messages dont beaucoup restent toujours valables ~ une @oque moderne o~, paradoxalement, les gestes simples de l'hygiane corporelle (se laver les mains) ont EtE oubliEs ! Les 11 Voisin C. (Op. cit6 pp. 88-114). Le Comit6 National de D6fense contre la Tuberculose fut cr66 le 4 aofit 1919 par transformation du Comit6 national d'Assistance aux Anciens Militaires tuberculeux. Entre autres actions, Ia plus connue qui ddbnte en i925, est la ~ Campagne du timbre antituberculeux ~. Chaque ann6e, elle devait diffuser des messages ~ducatifs partant du constat ~ rargent c'est bien, mais l'Mucation antituberculeuse est bien supdrieure, c'est la t~che essentielle ~ (L. Viborel). La guerre fit renoncer ~t la campagne de 1940. Elle ne devait reprendre qu'en 1944 avec le slogan ~(Combattre la tuberculose c'est servir le pays ,~et surtout, en 1945, avec le superbe timbre dessin6 par Delrieu (6galement dessinateur et graveur de timbres-poste) ~ Rena~tre ~.

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Fig. 5. Intdrieur du carnet : les timbres (1951 ) Noter les publicit~s attenantes, ici celle du dentifrice Gibbs (firme parmi d'autres qui ont supports les campagnes).

Fig. 6. Carnet antituberculeux (1932) : ~ Non Monsieur les lettres n'arrivent pas plus vite ... mais, la mort vient plus lentement ! ~

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Fig. 7. Carnet antituberculeux (i938) : <,NETETPROPRE avec l'eau chez soi ~ j o u r n a u x s a t y r i q u e s f r o n t pas 6td e n reste s t i g m a t i s a n t p~lem~le la poussibre, le lait de v a c h e , les c h i r u r g i e n s (etc.). C h a q u e ann6e, la c a m p a g n e d u t i m b r e a n t i t u b e r c u l e u x 6tait l ' o c c a s i o n de d i f f u s e r des c o n s e i l s sanitaires et d e r d c o l t e r u n f i n a n c e m e n t v i a la v e n t e p a r les 6colibres et les 6coliers des c a r n e t s de t i m b r e s et de v i g n e t t e s qui d d c l i n a i e n t des m e s s a g e s s i m p l e s 11 • ~ Gudri ... j e travaille ~ (1947), ~ Le B C G p r o t k g e ~ (1948), ~< T6t ddpistd, vite g u d r i ~ (1949), ~ S a n s r e p o s p a s de g u d r i s o n >> (1950), <
12 Dutau G. ,~ La correspondance des Tuberculeux. Les sanatoriums de Pennsylvanie ~. L'I~cho de ]a Timbrologie 2001; 1746: 36-39. Le premier m6decin-chef du sanatorium de Mont Alto, le Dr A.M. Rohtrock partant du principe que si les crachats d'un tuberculeux pouvaient atre bacillif~res sa salive pouvait l'~tre aussi, pensa que les lettres pouvaient ~tre contamin6es en humectant la colle des rabats ou ceIle des timbres-poste. I1 fit ainsi d6sinfecter les lettres et les cartes postales ~ Mont Alto, de 1909 ~t 1924, ~ raide de formaline. On trouve aussi des correspondances d6sinfect6es clans les sanatoriums voisins de Cresson (1913-1914) et de Hamburg (1915-1916). En 1923 Ie Dr R.H. McCutcheon qui lui succ~da fit cesser cette pratique jug6e abusive...

Fig. 8. Carnet antituberculeux (1945) : <
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Fig. 9. Carte postale provenant du sanatorium de Mont Alto, Pennsylvanie (24 juin 1909). La carte a 6t6 d4sinfect4e au formol au sanatorium (ou la griffe violette ~(DISINFECTED >)a 6t6 appos6e) avant d'Stre remise ~ la Poste. ont m S m e 6t6 d6sinfect6es au f o r m o l dans plusieurs sanatoriums de P e n n s y l v a n i e (Fig. 9) 12. Cet aper~u de l'histoire de la t u b e r c u l o s e est par ddfinition trop rapide et trSs i n c o m p l e t tant sont n o m b r e u x , m6ritants et illustres, c e u x qui consacrSrent leur vie ~t la lutte contre ce fl6au. Les n o m s et les travaux de L o w e n s t e i n , D u b o s , R o u x , Ktiss, L o b s t e i n (et b i e n d'autres) auraient pu 8tre cit6s. Plus g6n6ralement, la lutte a n t i t u b e r c u l e u s e a servi de m o d u l e p o u r ce qui sera plus tard l ' a u t o g e s t i o n des m a l a d i e s c h r o n i q u e s c o m m e le diabbte, l'asthme, les allergies (en p a r t i c u l i e r alimentaires). L ' a m a t e u r d'histoire ret r o u v e dans les th~mes (et parfois les termes) de la <~n o u v e l l e 6ducation sanitaire )> celles de l'ancienne, l'6ducation antituberculeuse, une certaine po6sie (en moins), une sensation de n o s t a l g i e et une t e r m i n o l o g i e s o u v e n t herm d t i q u e (en plus) !

R6f6rences [ 1]

ChrdtienJ. La Tuberculose. Parcours imag6. Tome 1. Propos. Hauts-deFrance, t~dit., Auchel, 1995, 1 vol. (159 pages). [2] Voisin C. La Tuberculose. Parcours imagE. Tome 2. Regards. Hauts-deFrance, t~dit., Auchel, 1995, 1 vol. (170 pages). [3] Chr4tienJ. (Op. cite p. 38-62). [4] Michel FB. Le souffle coup6. Respirer et 6crire. Gallimard l~dit., Paris, 1989. [5] Boudard A. L'h6pital. Gallimard t~dit., Paris, 1974. [6] Chr4tienJ. (Op. cit4 p. 15). [7] Huard P, Laplane R. < La Tuberculose ~>.In : ~ Histoire Illustr4e de la p4diatrie ,. Tome I. l~ditions Roger Dacosta, Paris, 1981 : pp. 179-90. [8] Huard P, Laplane R (Op. cit4, p. 184). [9] Huard P, Laplane R (Op. cit6, pp. 184--5). [10] Gerbeaux J. Primary tuberculosis in childhood. CC Thomas Edit., Springfield, Ill., 1970, 1 vol (339 p.). [11] Huard P, Laplane R (Op. cit6, p. 188).