Point de vue médico-psychologique sur l’innocence et la culpabilité : une introduction

Point de vue médico-psychologique sur l’innocence et la culpabilité : une introduction

Annales Me´dico-Psychologiques 171 (2013) 437–439 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com Communication Point de vue me´dico-psychologique s...

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Annales Me´dico-Psychologiques 171 (2013) 437–439

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

Communication

Point de vue me´dico-psychologique sur l’innocence et la culpabilite´ : une introduction Psychopathological viewpoint on innocence and guilt: An introduction Michel Be´ne´zech 266, rue Judaı¨que, 33000 Bordeaux, France

I N F O A R T I C L E

R E´ S U M E´

Mots cle´s : Aveu Cre´dibilite´ Culpabilite´ De´ne´gation Enqueˆte judiciaire Innocence Jugement Justice

De nombreux facteurs psychiatriques, cognitifs et affectifs sont susceptibles de perturber gravement la qualite´ et la ve´racite´ des de´positions, des aveux, ainsi que l’attitude des justiciables et des te´moins devant les enqueˆteurs et les magistrats. De meˆme, les sentiments subjectifs d’innocence ou de culpabilite´ ne refle`tent pas obligatoirement la re´alite´ objective du comportement. La psychologie normale et pathologique de l’enqueˆte judiciaire et du jugement doit eˆtre au centre des relations entre les magistrats et les professionnels de la sante´ mentale. ß 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s. A B S T R A C T

Keywords: Confession Credibility Denial Guilt Innocence Inquiry Justice Trial

Several psychiatric, cognitive and affective factors may have a serious impact on the quality and truth of statements and confessions, as also the attitude adopted by those likely to come before the courts and by witnesses when confronted with investigators and magistrates. Furthermore, the subjective feelings of innocence and guilt do not necessarily reflect the objective reality of a persons’ behavior. The normal and pathologic psychology of the judicial inquiry and the judgement should lie at the heart of relations between magistrates and mental health professionals. ß 2013 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Soixante-deux mille quatre cents re´pe´titions font une ve´rite´. . . Aldous Huxley, Le Meilleur des mondes

1. Introduction Les dictionnaires de la langue franc¸aise nous rappellent que le nom fe´minin « innocence » a trois significations essentielles :  l’e´tat de purete´ d’une personne qui est sans malice, naı¨ve, ignore le mal, n’est pas souille´e par le pe´che´ ;  l’e´tat de ce qui ne nuit pas, n’est pas malfaisant, n’est pas blaˆmable, ne vient point d’une mauvaise intention ;

Adresse e-mail : [email protected] 0003-4487/$ – see front matter ß 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s. http://dx.doi.org/10.1016/j.amp.2013.05.006

 l’e´tat d’une personne qui n’est pas coupable, dans un cas donne´, de ce dont on la soupc¸onne. Les quelques propos qui suivent s’en tiendront a` une approche psychiatrique et me´dico-le´gale de l’innocence et de la culpabilite´, laissant aux moralistes et aux philosophes le soin de de´battre des autres aspects de ces e´tats et re´alite´s. A` ce sujet, comment ne pas mentionner ici les confe´rences de Paul Ricœur [9], le Traite´ des vertus de Vladimir Janke´le´vitch, dont la troisie`me partie est pre´cise´ment intitule´e L’innocence et la me´chancete´ [7], ou encore les lec¸ons de Michel Foucault a` Louvain en 1981 [6]. 2. Sentiment d’innocence et de culpabilite´ « Tout homme e´tant pre´sume´ innocent jusqu’a` ce qu’il ait e´te´ de´clare´ coupable. . . » dispose l’article 9 de la De´claration des Droits

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ˆ t 1789, principe pre´alable de de l’Homme et du Citoyen du 26 aou non-culpabilite´ inscrit maintenant dans l’article 9-1 du Code civil : « Chacun a droit au respect de la pre´somption d’innocence. » Si sur le plan juridique, on est soit innocent soit coupable d’une meˆme infraction, apre`s e´puisement de toutes les voies de recours, le sentiment d’innocence ou de culpabilite´ que peut ressentir profonde´ment une personne n’est pas obligatoirement en relation directe avec son innocence ou sa faute du point de vue pe´nal. Il n’est pas rare chez certaines personnes d’avoir la conscience tranquille (ou pas de conscience morale du tout chez le psychopathe ou le pervers) alors que l’on est l’auteur d’actes re´pre´hensibles graves : de´linquants demeurant psychiquement innocents ou s’auto-justifiant tout en e´tant le´galement coupables [2]. A` l’inverse, il est possible d’e´prouver un fort ve´cu de culpabilite´, et se comporter comme tel, pour des infractions tre`s mineures (sentiment disproportionne´) ou sans eˆtre en rien implique´ dans une action criminelle : faits circonstanciels ou inexistants, imagine´s ou par croyance de´lirante [3]. Ce hiatus e´ventuel entre la re´alite´ objective ou l’hypothe`se d’un comportement interdit punissable et la re´alite´ subjective de son auteur ou d’un innocent qui se sent coupable a e´te´ depuis longtemps observe´ par les policiers, les magistrats, les alie´nistes et les psychanalystes. Il existe en effet une innocence et une culpabilite´ pathologiques qui rele`vent de la me´decine psychiatrique et qui s’expriment dans la pratique judiciaire sous forme de faux souvenirs, fausses de´nonciations, faux aveux, fausses auto-critiques et fausses auto-le´gitimations, fausses de´ne´gations et re´tractations [4]. Aux troubles de nature psychopathologique en cause, il faut ajouter les possibles pressions physiques ou psychologiques de la part d’enqueˆteurs convaincus de la culpabilite´, manœuvres qui risquent de perturber la conscience du suspect somatiquement ou mentalement fragile, immature, e´motif, peu intelligent, fatigue´, infe´riorise´ et de´personnalise´ par la situation d’audition (garde a` vue, interrogatoire d’instruction), et de lui faire avouer une faute inexistante. Quoique ces pratiques aient beaucoup diminue´ dans notre pays, citons pour me´moire : harce`lement, intimidation, suggestion, manipulation mentale, mensonge, chantage, menace, privation de repos, de sommeil et/ou d’aliments, voire maltraitance physique directe. Les interactions dynamiques entre les interrogateurs et les interroge´s permettent de comprendre certains me´canismes de l’apparition de l’aveu ainsi que certaines de ses conse´quences. A` travers l’expe´rience des temps passe´s, on pourrait e´crire un e´norme traite´ consacre´ a` l’art et la manie`re de faire avouer les innocents ! 3. Victime innocente et victime coupable Et la victime vivante, re´elle ou suppose´e, alors ! Que peuvent dire le psychologue ou le psychiatre experts sur ses de´clarations dans la gene`se et le de´roulement des faits ? Innocence pre´sume´e du jeune enfant, victime pure par excellence, mais dont le te´moignage est sujet a` caution, innocence douteuse de l’adulte en cas de participation peu ou prou volontaire a` l’acte condamnable. S’il n’existe pas de relation ante´rieure avec le criminel, ce peut eˆtre la simple ne´gligence, l’imprudence, la naı¨vete´, la distraction ou le comportement a` risque de la victime (montrer son argent, faire confiance a priori, partir en voiture avec un inconnu, fre´quenter des lieux dangereux) qui attirent l’attention de l’agresseur, dirigent son choix sur cette cible. Souvent cependant, la relation victime-auteur est de´ja` constitue´e, la victime e´tant connue de l’auteur et des facteurs inter-relationnels plus ou moins intimes et conflictuels e´tant pre´ce´demment e´tablis, comme par exemple, l’emprise psychologique, la passion amoureuse, l’inte´reˆt mate´riel. L’e´tude de la dynamique du couple criminel-victime met alors parfois en e´vidence l’attitude ambigue¨, ambivalente et suspecte de la victime : provocation, manipulation, incitation et complicite´

morales, cupidite´, hostilite´, relation sadomasochiste. Enfin, la victime peut participer de fac¸on de´terminante a` l’acte criminel : victime automutilatrice, simulatrice ou imaginaire qui invente l’infraction qu’elle de´nonce, victime-agresseur qui, en re´action imme´diate aux violences qu’elle a initie´es, devient successivement auteur puis victime. Pour pasticher le docteur Knock de Jules Romains (« la sante´ est un e´tat pre´caire qui ne pre´sage rien de bon »), on pourrait dire, sur le plan victimologique, que « l’innocence est un e´tat pre´caire dont l’avenir est incertain ». Dans toutes ces situations concernant l’auteur, la victime ou le duo coupable-innocent, des e´le´ments franchement pathologiques peuvent intervenir, comme par exemple le retard mental, le masochisme moral avec les sentiments inconscients de culpabilite´ et la recherche du chaˆtiment (Le besoin d’avouer de Theodor Reik) [8], les e´tats factices (Mu¨nchausen par procuration), dissociatifs, hyste´riques, obsessionnels et mythomaniaques, le comportement psychopathique ou sadique, la de´pression, l’alcoolisme et les autres addictions, l’hypere´motivite´, les troubles bipolaires, les conduites sexuelles de´viantes, les de´lires d’innocence, d’autoaccusation me´lancolique et d’auto- ou he´te´ro-accusation paranoı¨aque (perse´cutive, jalouse ou e´rotomaniaque), l’affaiblissement de´mentiel. . . En effet, de nombreux facteurs morbides cognitifs et affectifs sont susceptibles de perturber gravement la qualite´ et la ve´racite´ des de´positions, des aveux et de leur re´tractation, ainsi que l’attitude des coupables et des innocents devant les enqueˆteurs et les magistrats. On pourrait y ajouter la simulation ou la sursimulation volontaire et utilitaire par le justiciable de troubles mentaux ou organiques, l’exceptionnel de´ni de grossesse qui fait flore`s de nos jours et le mythe de la personnalite´ multiple. 4. Visage et attitude en justice (« attrayance ») L’apparence que donne l’auteur, la victime ou le te´moin aux professionnels de la justice est encore un e´le´ment sensible qui joue en faveur ou en de´faveur de leur cre´dibilite´, de leur authenticite´, de leur honneˆtete´ et finalement qui influence l’opinion du magistrat. Si en psychiatrie la « pre´sentation » d’une personne, son habitus, son style, sa fac¸on d’eˆtre sont importants dans le diagnostic, qu’en est-il en matie`re de justice ? Bien que l’habit ne fasse pas le moine, quelle impression ressentent le substitut, le magistrat instructeur, le juge des liberte´s et de la de´tention, celui du tribunal correctionnel ou de la cour d’assises devant un individu peu soigneux de sa personne, hors des conventions habituelles, a` la posture agressive, aux traits dysharmoniques, a` l’expression cole´reuse, s’exprimant avec difficulte´, re´ticence ou agressivite´, paraissant retors, faux, e´vitant le regard ou regardant par terre (« ne baissez pas les yeux, c¸a vous donne l’air coupable » recommande l’avocat), pre´sentant en somme une apparence douteuse, peu fiable. S’il s’agit du suspect, son aspect peut a` l’extreˆme e´voquer le portrait-robot populaire, le ste´re´otype de la « teˆte d’assassin », de la « gueule de l’emploi » pour certaines infractions contre les biens ou les personnes ? Le « de´lit de sale gueule », le profilage au « facie`s » qui entraıˆne quelquefois, a` tort ou a` raison, le controˆle d’identite´ par le policier de terrain, l’impression ne´gative recueillie jouent-ils aussi dans la de´cision du juge en salle d’audience ? A` l’oppose´, une pre´sentation agre´able du te´moin ou du justiciable, une allure calme et sympathique, de l’e´le´gance, du charisme, des propos solides et droits, une humeur grave et sereine, de la sobrie´te´, du respect, un air d’honorabilite´ produisent un effet favorable sur le policier ou le magistrat et peuvent eˆtre tout aussi trompeurs, causes d’erreur dans la recherche de la ve´rite´. Les indices retire´s de l’examen de la physionomie, du de´cryptage des mimiques, de la gestuelle, des attitudes sont donc a` interpre´ter avec pre´caution, l’apparence pouvant eˆtre simule´e, contrefaite ou tout simplement naturelle et sans rapport avec le degre´ de since´rite´ ou de culpabilite´.

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Bien peu de gens ressemblent a` ce qu’ils sont : secrets du cœur, secrets d’alcoˆves, secrets de famille, l’Homme est ce qu’il fait mais aussi ce qu’il cache. N’oublions pas que dans les processus neuropsychologiques de la de´cision, du jugement moral, les re´actions affectives jouent un roˆle aussi important que les me´canismes cognitifs. On ne raisonne pas qu’avec son intelligence, on raisonne aussi avec ses impressions, ses sentiments, ses e´motions devant les grimaces, les soupirs, les sanglots, les haussements d’e´paules, le regard vers le ciel, le froncement des sourcils, le sourire e´panoui ou contraint, tout le langage corporel. Il est admis que dans certaines infractions, le juge s’identifie a` la victime et dans d’autres cas au de´linquant. Cette identification est psychologiquement normale et a tendance a` se faire selon la hie´rarchie des valeurs de la classe sociale a` laquelle le magistrat appartient. Cette e´valuation a` l’estime, « au juge´ » du justiciable, de la victime ou du te´moin est bien entendu contrebalance´e par l’examen des pie`ces du dossier et des divers autres te´moignages, mais est-elle pour autant ne´gligeable dans les comparutions imme´diates ou` celui qui doit condamner ou disculper n’a pas le temps d’observer et d’entendre longuement l’inte´resse´ et ne dispose pas force´ment de renseignements de´taille´s et pre´cis le concernant ? La visioconfe´rence, dont l’usage se re´pand, empeˆche en particulier le magistrat de regarder la fac¸on dont s’exprime l’ensemble du corps dans une salle d’audience, surtout quand les mots ne viennent pas. Lorsqu’il n’y a pas d’indices ou de preuves convaincants, que seule existe la parole accusatrice de l’un contre la parole de´ne´gatoire de l’autre, que le doute habite le magistrat, comment juger, au pe´nal comme au civil, si ce n’est parfois en se fiant a` sa propre impression, baptise´e en la matie`re « intime conviction ». Les effets de l’attrayance sur les de´cisions judiciaires me´riteraient bien des e´tudes. 5. La recherche de la ve´rite´ psychologique Rappelons que se contredire, mentir, se taire (il existe des mutismes pathologiques), pre´senter des signes d’anxie´te´ ne pre´juge pas force´ment de la faute, de la responsabilite´. De plus, la ve´rite´ officielle n’est parfois qu’un mensonge qui n’a pas e´te´ de´couvert. Aragon a e´crit : « Que me caches-tu sous chaque chose que tu dis ? » et l’illustre Beccaria observait de´ja` en son temps : « La gravite´ du pe´che´ de´pend de l’insondable malice du cœur, et les eˆtres finis ne peuvent la connaıˆtre. . . » Il re´sulte de tout cela que l’innocence ou la culpabilite´ ne peut eˆtre de´cide´e uniquement sur des e´le´ments psychologiques ou psychiatriques [5]. La preuve formelle se base obligatoirement sur des constatations objectives mate´rielles mais il semble que, dans un avenir proche, les neurosciences soient a` meˆme de nous aider a` de´couvrir le degre´ de since´rite´ et de cre´dibilite´ du justiciable [5].

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Parmi les diverses conceptions juridiques internationales de la responsabilite´ criminelle, celle qui nous paraıˆt la plus inte´ressante sur le plan me´dico-psychologique est indiscutablement la conception anglo-saxonne base´e sur la tradition de la Common Law. Cette conception s’exprime par la maxime : « Actus non facit reum nisi mens sit rea » (« L’acte ne fait pas le coupable s’il n’y a pas volonte´ criminelle ») qui pose la ne´cessite´ de la concomitance d’un e´le´ment mate´riel, l’actus reus (acte coupable ou criminel) et d’un e´le´ment moral, la mens rea (volonte´ coupable) pour que le crime soit constitue´. La mens rea, qui correspond globalement a` notre e´le´ment moral de l’infraction, suppose un auteur capable, conscient et blaˆmable (intention coupable) au moment de la perpe´tration de l’infraction, c’est-a`-dire posse´dant une certaine capacite´ pe´nale. C’est ainsi que les re`gles de Mc’Naghten (1843) reconnaissent pe´nalement responsable l’alie´ne´ qui reste conscient que son acte est nuisible et re´pre´hensible (wrong) vis-a`-vis de la loi et de la morale (de´lirant paranoı¨aque par exemple). Parmi les causes de non-culpabilite´, le droit anglo-saxon, contrairement au noˆtre, a de´veloppe´ une re´flexion et une jurisprudence originales sur d’autres aspects des troubles mentaux. C’est le cas des automatismes pathologiques : impulsions irre´sistibles conscientes et actes physiques involontaires inconscients, comme les passages a` l’acte criminels au cours du sommeil [1]. 7. Conclusion Voici, en quelques lignes, ce que nous voulions vous dire en introduction de cette journe´e qui, nous l’espe´rons, connaıˆtra un succe`s e´gal a` celle du 24 octobre 2011 a` Bordeaux. La confrontation pluridisciplinaire des conceptions juridiques, criminologiques, psychiatriques et neuropsychologiques sur l’innocence, le de´ni, l’aveu et la culpabilite´ est a` meˆme d’enrichir et d’approfondir la qualite´ des relations entre magistrats et professionnels de la sante´ mentale. Mais les rapports entre le droit et la psychiatrie ne se limitent pas a` la justice pe´nale qui occupe l’essentiel des pre´sents travaux. La justice civile et la justice administrative font appel, elles aussi, aux experts « psy » pour les aider dans leurs de´cisions. Quoi qu’il en soit, le vrai reste insaisissable : « La ve´rite´ est quelque chose d’invraisemblable. C’est l’image que l’on donne des choses impalpables » nous a enseigne´ Masud Khan. Ce sera notre dernier mot. De´claration d’inte´reˆts L’auteur de´clare ne pas avoir de conflits d’inte´reˆts en relation avec cet article.

6. Volonte´ libre et criminelle

Re´fe´rences

Nous avons vu pre´ce´demment qu’il peut y avoir des culpabilite´s sans coupable (Dostoı¨evski e´crit dans Les fre`res Karamazov : « Chacun de nous est coupable devant tous, pour tous et pour tout, et moi plus que les autres ») et des coupables sans culpabilite´, les pe´nalistes situant abstraitement les me´canismes de la culpabilite´ dans la zone des ope´rations intellectuelles alors que criminologues et psychiatres la placent au centre des activite´s psychiques conscientes et inconscientes. La culpabilite´ individuelle et intentionnelle comprend classiquement en droit franc¸ais deux e´le´ments fondamentaux : un comportement non conforme a` la norme et reprochable (e´le´ment mate´riel), un sentiment d’agir librement, lucidement et volontairement, c’est-a`-dire la capacite´ de comprendre et de vouloir ce que l’on fait (e´le´ment moral), ve´cu intime qui varie selon les individus et qui doit eˆtre en lien de causalite´, en relation directe avec l’infraction.

[1] Addad M, Be´ne´zech M. L’irresponsabilite´ pe´nale des handicape´s mentaux en droit franc¸ais et anglo-saxon (le´gislation franc¸aise, anglaise, israe´lienne et des USA). Paris: Libraires Techniques (LITEC) de la Cour de cassation; 1978. [2] Assoun PL. Le symptoˆme d’innocence. Syntaxe du pre´judice. Lett Enfance Adolesc 2002;1(47):25–34. [3] Baruk H. La culpabilite´, la conscience morale, les haines et les de´lires de la perse´cution. In: La culpabilite´. Toulouse: Annales de l’Universite´ des Sciences sociales de Toulouse; 1976. p. 191–206. [4] Be´ne´zech M. Splendeur et mise`re de l’aveu criminel. Esquisse me´dico-le´gale et psychopathologique. In: La garde a` vue en questions. Paris: Document ACAT; 1995. p. 63–80. [5] Be´ne´zech M. Ve´rite´ et mensonge : l’e´valuation de la cre´dibilite´ en psychiatrie le´gale et en pratique judiciaire. Ann Med Psychol 2007;165:351–64. [6] Foucault M. Mal faire, dire vrai. In: Fonction de l’aveu en justice. Louvain: Presses universitaires de Louvain/University of Chicago Press; 2012. [7] Janke´le´vitch V. L’innocence et la me´chancete´. Traite´ des vertus III. Paris: Flammarion; 1986. [8] Reik T. Le besoin d’avouer. Psychanalyse du crime et du chaˆtiment. Paris: Payot; 1973. [9] Ricœur P. Le juste. Paris: Esprit; 1995.