Réflexion sur les tests d’évaluation clinique de la proprioception à partir d’une revue de la littérature

Réflexion sur les tests d’évaluation clinique de la proprioception à partir d’une revue de la littérature

Kinesither Rev 2013;13(143):36–44 Savoirs / Mise au point Réflexion sur les tests d'évaluation clinique de la proprioception à partir d'une revue de ...

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Kinesither Rev 2013;13(143):36–44

Savoirs / Mise au point

Réflexion sur les tests d'évaluation clinique de la proprioception à partir d'une revue de la littérature Reflections on clinical assessment tests for proprioception, based on a review of the literature Anne-Violette Bruyneel

IFMK Vichy, centre hospitalier de Vichy, boulevard Denière, 03200 Vichy, France

Reçu le 7 décembre 2012 ; reçu sous la forme révisée le 17 avril 2013 ; accepté le 18 avril 2013

RÉSUMÉ Cet article a pour objectif de décrire, à partir d'une revue de la littérature, l'approche quantifiée du bilan proprioceptif. Ainsi, un bilan de l'aspect cutané, des capteurs musculaires et articulaires et un test fonctionnel sont présentés. La veille bibliographique a été réalisée sur Pubmed et Biomedcentral à partir des mots clés suivants : « graphesthesia », « pressure perception », « joint position sense », « kinesthesia » et « star excursion balance test ». Quarante-six études ont été sélectionnées en fonction de leur qualité méthodologique, de leur accessibilité et de la date de publication. Certaines présentations issues de congrès ont été également sélectionnées. Suite à la lecture attentive et critique des articles, trois tests de bilans cutanés sont présentés, trois tests statesthésiques, un test de reproduction de force, deux tests kinesthésiques et un test d'évaluation fonctionnelle. Le choix des tests a été déterminé par la facilité d'application en pratique clinique et par la qualité de la validité des tests. Certaines propositions d'adaptation des tests sont évoquées. Niveau de preuve. – Non adapté. © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots clés Bilans cliniques Posture Proprioception Sens positionnel Seuil de détection de mouvement

Keywords Clinical assessment Posture Proprioception Position sense Motion detection threshold

SUMMARY Based on a review of the literature, the present study describes the quantitative approach to proprioception assessment. Assessment of skin aspect, of muscle and joint receptors and a functional test are presented. A literature search was performed on PubMed and BioMed Central using the following search terms: graphesthesia, pressure perception, joint position sense, kinesthesia and Star Excursion Balance Test. Forty-six studies were selected for their methodological quality, accessibility and date of publication. Certain congress presentations were also selected. After a careful and critical review of the articles, three skin assessments are presented, three position sense tests, one strength reproduction test, two kinesthetic tests and one functional test. Tests were selected for ease of application in clinical practice and for the quality of their validation. Certain suggestions for adapting the tests are made. Level of evidence. – Not applicable. © 2013 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

INTRODUCTION La proprioception est un flux sensoriel continu et habituellement inconscient qui provient des muscles, des tendons, des articulations et de

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la peau grâce auquel la tension musculaire, l'équilibre et le mouvement sont contrôlés [1]. La proprioception comprend deux composantes principales, d'une part, la

Adresse e-mail : violette.bruyneel@laposte. net

© 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. http://dx.doi.org/10.1016/j.kine.2013.04.009

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capacité à percevoir la position d'un segment dans l'espace et, d'autre part, la capacité à détecter un mouvement. Les informations viennent prioritairement des fuseaux neuro-musculaires (FNM), mais aussi des organes tendineux de Golgi, des capteurs cutanés et des mécanorécepteurs capsulaires [2]. Les FNM ont un rôle dynamique de détection de la vitesse du mouvement et un rôle statique d'identification de la longueur du muscle [1]. Le nombre de FNM par muscle oscille entre 5 FNM par gramme de muscle et 70 FNM par gramme de muscle (exemple : paravertébraux). Les afférences cutanées semblent avoir un rôle déterminant dans la proprioception [1], en contribuant aux données associées au sens et à la direction de mouvement [2]. Ainsi, l'anesthésie de la sole plantaire induit une importante perturbation posturale et modifie les stratégies posturo-dynamiques lors de la marche [3]. Afin d'établir une stratégie de rééducation proprioceptive efficace et adaptée à chaque patient, il est nécessaire de mettre en place des bilans fiables et reproductibles. Alors que les premiers tests proprioceptifs précis ont été établis dès 1889 par une publication de Goldschieder et al. [4], un travail récent réalisé chez différents acteurs de santé en rééducation (MPR, kinésithérapeutes) montre une très grande disparité et de nombreuses imprécisions dans l'approche proprioceptive des bilans en France [5]. Pourtant, lorsque nous analysons la littérature, il est remarquable d'observer d'une part, l'évolution constante des connaissances fondamentales liées à la proprioception, et d'autre part, un nombre conséquent d'études traitant de l'évaluation proprioceptive depuis 40 ans. Il est aujourd'hui regrettable de constater que ces approches cliniques du bilan sont relativement peu connues alors qu'elles constituent un atout important pour le kinésithérapeute souhaitant évaluer la proprioception de manière fiable et reproductible. Selon Forestier et al. [6], l'évaluation proprioceptive doit être envisagée selon quatre niveaux : histologique, neurophysiologique (seuils, vitesse de transmission et intégration), clinique, et fonctionnel. Cela revient successivement à tester les capteurs, les voies, les sensations et le mouvement. Les deux premiers niveaux sont peu accessibles cliniquement au kinésithérapeute, en revanche, nous pouvons tester l'aspect clinique (justesse de la réponse des capteurs) et l'aspect fonctionnel (posture, équilibre, mouvement). Dans cet article, l'aspect fonctionnel sera peu abordé : en effet, il nous a semblé plus pertinent d'évoquer prioritairement les techniques de bilans cliniques qui sont moins connues des kinésithérapeutes. L'objectif de cet article est donc de réaliser une synthèse des différents bilans proprioceptifs basés sur une revue de la littérature internationale et pouvant être appliqués dans la pratique quotidienne des kinésithérapeutes. Un tableau (Tableau I) regroupe la synthèse des différents tests présentés dans cet article.

BILANS CUTANÉS Alors que la littérature apporte de nombreuses réponses pour les tests du seuil de détection de mouvement et du sens

Savoirs / Mise au point positionnel, elle est bien plus vague pour les techniques de bilans cutanés permettant d'évaluer la justesse sensitive. Or, cet aspect cutané est fortement lié à la proprioception et doit donc être évalué, d'autant plus lorsque le patient a une pathologie qui entraîne des perturbations de la sensibilité cutanée [7,8]. Les techniques proposées sont donc des approches qui devront être testées à l'avenir sur de plus larges cohortes de patients afin de définir des seuils de réponses et la qualité de la reproductibilité.

Évaluation graphesthésique La graphesthésie est le plus souvent testée dans le cadre de bilans nociceptifs ou psychiatriques [9,10] alors que l'intégration de cet aspect dans un bilan proprioceptif suite à une entorse semble apporter une réelle contribution à la compréhension des troubles du patient [7]. Lors de ce test, le patient doit être capable de discriminer une forme qui est dessinée sur une partie de son corps, de reconnaître une zone géographique ou encore la distance entre deux points [9]. La reconnaissance d'une forme est souvent pratiquée, mais, même si ce test est ludique chez les enfants, il a le défaut d'être peu reproductible. Nous proposons donc une méthodologie adaptée afin d'améliorer ce défaut. Pour le rachis, le patient est en décubitus ventral, confortablement installé. Le kinésithérapeute dessine sur son dos, au crayon dermographique, 4 zones distinctes de 4 carrés (5 cm  5 cm), de part et d'autre de l'axe de la colonne vertébrale (Fig. 1). Ensuite, par zone, nous délimitons, à l'aide d'un doigt, chaque carré à vitesse lente afin que le patient puisse prendre conscience des différentes parties. Ensuite, il faut toucher un carré (de manière aléatoire) et demander au patient de nommer l'endroit (haut gauche, haut droit, bas gauche, bas droit). Dix essais sont réalisés, aléatoirement sur les 4 carrés, avec un repos de 30 secondes entre chaque essai [9]. Le nombre d'erreurs est noté. Ce test est réalisé ensuite successivement pour les 3 autres zones, avec donc un total de 40 essais successifs. Nous obtenons donc 4 résultats oscillant entre 0 et 10 pour les 4 zones testées. Une étude sur la région lombaire que nous avons réalisée sur 40 sujets jeunes asymptomatiques nous a permis d'observer un résultat moyen de 6,4/10 par zone (étude non publiée). Pour les autres articulations (cheville en particulier), nous n'avons aucune méthodologie précise identifiée dans la littérature. De futures recherches devraient nous éclairer sur cet aspect.

Évaluation baresthésique La baresthésie, c'est la sensibilité tactile profonde au poids ou à la pression [11]. Ce sont principalement les corpuscules de Paccini et les corpuscules de Golgi-Mazzoni qui sont à l'origine de cette perception. Certaines études proposent de tester cette capacité baresthésique grâce à l'application de microfilaments de différents diamètres [7]. Cependant, cette approche est incomplète car seule la pression est testée. C'est pourquoi, un test de discrimination de poids semble également intéressant. Pour ce test baresthésique, le patient est en décubitus ventral. Pour chaque zone préalablement dessinée (voir test précédent), le patient doit reconnaître 3 poids différents (e.g., 10 g, 30 g, 50 g). Pour obtenir des poids de 10, 20, 30 g, nous

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Savoirs / Mise au point Tableau 1. Récapitulatif de l'ensemble des tests proprioceptifs « NT » signifie un élément non testé. Catégories

Type de test

Résultats sujets témoins

Reproductibilité intra-évaluateur

Reproductibilité inter-évaluateurs

Références

Bilans cutanés

Graphesthésique

6,4/10 par zone

NT

NT

Baresthésique

4,2/10 par zone

NT

NT

Reproduction d'une force CSII

Erreur de 8 à 10 N (épaule) Sujets < 50 ans : résultat < à 1/8 Sujets > 80 ans : résultats > à 3/8 Erreur (rachis) = 4 mm Erreur (genou) < 40 ans = < 58 80 ans = 108

ICC = 0,98

NT

NT

NT

Morch 2010, Bruyneel 2010 (non publié) Deshpande 2010, Bruyneel 2010 (non publié) Dover et Powers 2003, Myers 1999 Deshpande 2010

ICC = 0,90 (rachis) ICC = 0,96 (genou) ICC = 0,58 (doigt) ICC = 0,72 (cheville) ICC = 0,56

ICC = 0,58 à 0,93

Enoch 2011, Ribeiro 2011, Barret 1991, Ghaffarinedjad 2007, Khamwong 2010, Smith 2012

NT

Goble 2010, Smith 2012

NT

NT

Safran 1999

ICC entre 0,59 et 0,86

NT

Corrigan 1992, Beynnon 2002, Ageberg 2007, Boerboom 2008, Dover 2003 Munro et Herrington 2010, Kivlan et Martin 2012, Gribble et Hertel 2003 Plisky 2009

Statesthésie

Sens positionnel rachidien

Reproduction d'une angulation cible

Kinésthésie

Tests proprioceptifs fonctionnels

Évaluation manuelle Évaluation « mécanique »

Erreurs Membre homolatéral 28 Membre controlatéral 38 Mémoire 58 Mouvement détecté vers 48 Mouvement détecté entre 1,178 et 2,578

Star excursion balance test

Distance entre 65 et 87 cm en moyenne

ICC > 0,84

ICC > 0,35

Évaluation en « Y »

Distance entre 70 et 112 cm en moyenne

ICC > 0,85

ICC > 0,97

utilisons des poids de balance ancienne préalablement calibrés. L'avantage étant d'avoir strictement la même forme à apposer sur le dos du patient. Dans un premier temps, chaque poids nommé (lourd, moyen, léger) est déposé 10 secondes sur le patient afin d'observer un temps de reconnaissance. Ensuite, pour chaque zone, le kinésithérapeute va aléatoirement déposer un poids que le patient doit à chaque fois nommer (Fig. 2). Dix essais sont réalisés par zone et les erreurs sont notées. Le résultat du test comprend donc 4 notes sur 10 points. Un repos de 30 secondes est respecté entre chaque essai [9]. Notre étude réalisée sur 40 sujets asymptomatiques a montré une note moyenne de 4,2/10 par zone au niveau lombaire.

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D'autres auteurs [12] proposent l'évaluation de la reconnaissance d'une force isométrique développée (reconnaissance de la tension). Le kinésithérapeute demande au patient de résister jusqu'à une certaine intensité de force pré-établie en pourcentage de la résistance maximale (RM) qui pourra être préalablement calculée de manière non traumatique grâce aux équations prévisionnelles de Brzycki ou Epley [13]. Ensuite, le patient doit reproduire, les yeux fermés, cette même force. Cet exercice peut être réalisé de manière homolatérale ou controlatérale. Le nombre d'essai préconisé varie de 2 à 6 selon les auteurs [12,14], mais il semble que ce choix méthodologique soit avant tout dépendant des effets de fatigue et d'apprentissage lors du test. L'erreur obtenue oscille au niveau de l'épaule

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Figure 2. Test baresthésique.

graphesthésique. La pression est évaluée au moyen d'un monofilament de Weinstein (4,31–2,04 g et 4,56–3,63 g) sur la malléole externe. Trois niveaux de perception sont identifiés : « 0 » correspond à une sensibilité normale, « 1 » correspond à une sensibilité réduite (un filament sur deux est ressentit) et « 2 » correspond à une sensibilité absente. Dans cet index, le sens positionnel est testé à 108 de dorsiflexion et 208 de flexion plantaire. Le résultat est évalué entre « 0 » (pas de trouble) et « 2 » (erreur supérieure à 58). La vibration est réalisée grâce à un diapason avec une fréquence de 128 Hz sur la proéminence du premier métatarsien. Le paramètre testé est la durée de perception de la vibration. Le test est normal si la vibration est ressentie plus de 10 secondes (= 0), réduit si la perception est entre 1 et 9 secondes (= 1) et absente si le patient ne ressent rien (= 2). La graphesthésie est évaluée grâce à la reconnaissance de 3 symboles (ligne, cercle, signe +) sur la peau. Un « 0 » est attribué lorsque les 3 signes sont reconnus, un « 1 » pour une erreur et un « 2 » pour au moins deux erreurs. Le score obtenu oscille entre « 0 » et « 8 ». Une étude récente [7], réalisée sur 960 patients montre que cet indice, relativement simple, est cliniquement pertinent pour identifier des perturbations proprioceptives liées à l'âge et à la pathologie. Ainsi, les sujets de moins de 50 ans obtiennent un résultat inférieur à 1/8, alors que le résultat est supérieur à 3/ 8 à 80 ans [7]. De plus, le CSII semble être pertinent pour prédire les risques de dégradation de la marche et les chutes chez les personnes âgées. Des études complémentaires, sur des patients présentant des entorses, devraient nous permettre d'identifier les scores obtenus en cas d'instabilité spécifique d'une articulation et éventuellement d'évaluer l'aspect prédictif de cette analyse sur le risque de chronicité. Figure 1. Test graphesthésique. Identification des 4 zones de 4 carrés.

entre 8 et 11 N. La reproductibilité de ce test est de 0,98 en intra-observateur au niveau de l'épaule [12].

Cumulative somatosensory impairment index – CSII Un indice somatosensoriel proposé récemment pour les personnes âgées inclut l'aspect cutané dans son approche. Ce bilan semble intéressant car il comprend une démarche globale intégrant un test de pression, de sensibilité à la vibration, de proprioception et de graphesthésie [7]. Ce test comprend donc deux tests extéroceptifs : le test de pression et le test

SENS POSITIONNEL (STATESTHÉSIE) Le test de sens positionnel est lié à la statesthésie, c'est-à-dire la capacité à percevoir la position d'un segment dans l'espace. Ces tests ont été proposés de manière systématique pour évaluer la proprioception par Gandevia et al. suite à une étude très précise sur les doigts de la main [4]. Depuis, de nombreuses études ont affiné la méthodologie de test tout en évaluant la reproductibilité des bilans et les paramètres influençant les erreurs positionnelles [12,15–18]. Afin d'éclaircir les méthodologies des tests, deux approches de bilans sont proposées dans cet article, d'une part, au niveau

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Figure 3. Méthode pour le test de sens positionnel rachidien.

du dos et, d'autre part, au niveau du genou. Même si les principes sont globalement identiques, les outils utilisés varient en fonction des articulations.

Test de sens positionnel au niveau du dos Les tests de sens positionnel au niveau du rachis sont proposés depuis relativement peu de temps dans la littérature [18–20], mais, la qualité des études laisse entrevoir de belles possibilités pour l'évaluation proprioceptive du rachis. Enoch et al. ont testé une méthode sur des sujets asymptomatiques et des patients lombalgiques [18]. Le patient est en position assise sthénique. Dans cette même position, le kinésithérapeute repère une vertèbre épineuse au choix (selon la région intéressante pour le bilan) et il marque au crayon dermographique cette vertèbre par une croix. Ensuite, un pointeur laser est ajusté de telle manière qu'il soit en regard du centre de la croix. Le patient réalise ensuite 5 flexions/ extensions successives au niveau du dos avant de se repositionner dans la position initiale « neutre ». L'écart est ensuite mesuré entre la projection du laser et le centre de la croix sur l'épineuse (Fig. 3). Le test est réalisé 3 fois et c'est la moyenne des 3 mesures qui est considérée [12]. La méthode initialement proposée par Petersen en 2008 est un peu moins précise par les outils utilisés (règles) mais, elle permet de mesurer l'erreur du sujet en x et en y. Le kinésithérapeute mesure la distance horizontale entre l'épineuse et la toise ainsi que la distance verticale entre l'épineuse et le plan d'assise du patient [19]. Ces deux propositions sont dans le plan sagittal. Les travaux de Silfies et al. (en 2007) proposent un test de sens positionnel en rotation, cependant cette méthodologie nécessite un peu plus de matériel car il faut un siège rotatoire gradué et motorisé [20]. En revanche, cette approche a l'avantage de permettre un repositionnement passif et actif.

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Test de sens positionnel au niveau du genou Différentes études ont proposé des tests au niveau du genou avec des outils mécaniques permettant d'améliorer la précision des valeurs et de réaliser facilement les tests en passif et actif [21,22]. Cependant, il est très facile cliniquement de réaliser des tests précis avec peu de moyens [23]. Ainsi, le patient est positionné en décubitus dorsal, jambes pendantes, yeux fermés. Le kinésithérapeute positionne l'inclinomètre juste sous la tubérosité tibiale antérieure, dans l'alignement vertical de la jambe. Il met ensuite l'inclinomètre à « 0 » et fait attention à ne plus mobiliser les mains afin de ne pas perturber les informations données au patient. Ensuite, le kinésithérapeute amène passivement le segment jambier à une angulation arbitraire (par exemple : 208). Afin de laisser le temps au patient d'intégrer cette position, les auteurs recommandent de rester entre 3 secondes [12] et 5 secondes [22]. Ensuite, le segment jambier est replacé passivement en position neutre. Le kinésithérapeute re-déplace lentement le segment et le patient doit signaler lorsque le segment est dans la position initialement proposée. L'erreur est mesurée grâce à l'inclinomètre. Le test est réalisé 3 fois et c'est la moyenne des 3 mesures qui est prise en considération [12]. Toutefois, une autre étude sur la cheville propose plutôt d'évaluer l'écart-type des valeurs obtenues sur 10 essais successifs à 3 angles différents [24]. Trente secondes de repos sont recommandées entre les essais [23].

Reproductibilité des tests de sens positionnel Pour le rachis, le test montre une bonne reproductibilité entre 2 évaluateurs avec un indice de corrélation intra-classes (ICC) = 0,90 avec une différence entre les 2 évaluateurs de moins de 0,2 cm. Toutefois, la reproductibilité est un peu moins satisfaisante pour des sujets lombalgiques que pour des sujets asymptomatiques [18].

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Tous les tests de sens positionnel peuvent être réalisés de manière active ou passive. Cependant, l'erreur obtenue est moins importante pour les tests passifs [20,25,26]. Concernant la reproductibilité de cette approche, une méta-analyse [26], réalisée sur le genou et reprenant 18 études, montre une bonne reproductibilité des mesures intra-évaluateurs et une moins bonne reproductibilité pour les mesures inter-évaluateurs. La reproductibilité semblerait être meilleure pour les articulations proximales que distales [25]. Ainsi, pour le poignet, la reproductibilité intra-évaluateur (test – retest) du bilan de sens positionnel est de 0,58 [23], pour la cheville de 0,72 [7] alors que pour le dos on s'approche de 0,90 [18]. L'utilisation d'un goniomètre électronique améliore la reproductibilité [25] et permet d'éviter que l'erreur intrinsèque des mesures par inclinomètre dépasse l'erreur de sens positionnel.

Savoirs / Mise au point revanche, la cryothérapie n'influence pas l'erreur observée au niveau de la cheville [34].

Reproduction d'une angulation cible Différentes études proposent également la reproduction d'un angle articulaire à partir d'une image avec une bonne reproductibilité des mesures [26]. Les travaux de Goble [35] montre une erreur absolue du patient, progressive en fonction de la méthodologie du test. En effet, la reproduction par le membre homolatéral (28 d'erreur absolue) est beaucoup plus précise que par le membre controlatéral (3,58 d'erreur absolue) ou encore en faisant appel à la mémoire (58 d'erreur absolue). De plus, cette étude montre que les erreurs obtenues sont liées à l'âge et que les adolescents, les enfants et les personnes âgées obtiennent les moins bons résultats. Ce test a l'avantage d'être extrêmement simple à réaliser.

Les erreurs observées pour le sens positionnel Pour les erreurs observées, il faut distinguer le degré d'erreur asymptomatique, de l'erreur issue d'une pathologie ou encore des paramètres extrinsèques ou intrinsèques influençant l'erreur obtenue. Pour éviter ces biais, certains auteurs proposent le calcul de l'erreur absolue. Pour les erreurs chez des sujets asymptomatiques, aucune différence significative n'a pu être montrée entre les hommes et les femmes [17,20,27]. Les niveaux d'erreur sont relativement faibles. Ainsi, pour des sujets asymptomatiques, l'erreur moyenne entre les 2 genoux est de 2,48 [28,29] et de 38 pour la cheville [17,30,31]. Au niveau du genou, l'arthrose induit une augmentation de l'erreur positionnelle de 38 en moyenne par rapport à des sujets asymptomatiques, quel que soit l'âge des patients [21]. Ainsi, chez la personne âgée, il faut ajouter l'erreur secondaire à la pathologie à l'erreur positionnelle liée à l'âge. Chez un sujet pathologique de 80 ans, une erreur de 108 est obtenue en moyenne, alors qu'à 40 ans, l'erreur est d'environ 58. La prothèse de genou permet de diminuer l'erreur [21]. Pour les pathologies d'instabilité, l'augmentation de l'erreur est de 48 [32] et de 28 pour la cheville [30]. Certains facteurs extrinsèques ou intrinsèques influencent les valeurs obtenues. Ainsi, le port d'un bandage et l'étirement diminuent l'erreur au niveau du genou [21,22], alors que la fatigue augmente l'erreur [33]. Pour la cheville, le renforcement musculaire améliore significativement le sens positionnel des patients, excepté pour le mouvement d'éversion [16]. En

SEUIL DE DÉTECTION DE MOUVEMENT (KINESTHÉSIE) L'évaluation du seuil de détection de mouvement fait appel au sens kinesthésique. Le terme « kinesthésie » a été proposé dès 1888 par Bastian et al. et réfère à la capacité de détection du mouvement du segment [36]. L'acuité kinésthésique est principalement assurée par les FNM et les organes tendineux de Golgi [2]. L'évaluation de la détection de mouvement peut être évaluée soit manuellement au moyen d'un inclinomètre, soit grâce à des outils mécaniques ou numériques [20,37]. La deuxième solution est bien plus précise car elle limite fortement les biais liés à l'évaluateur [16,35], mais elle nécessite du matériel spécifique pour chaque articulation, ce qui rend plus difficile l'utilisation en pratique clinique.

Évaluation manuelle du seuil de détection de mouvement Pour l'évaluation du genou, le patient est positionné en décubitus dorsal, jambes pendantes et yeux fermés (Fig. 4). Le kinésithérapeute positionne l'inclinomètre verticalement au-dessous de la TTA. Il est important que la position des mains de l'évaluateur ne soit ensuite plus modifiée afin de ne pas modifier les informations cutanées lors du test. Le kinésithérapeute modifie passivement le

Figure 4. Exemple de test de seuil de détection de mouvement manuel.

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Figure 5. Schéma de la direction de mouvement du membre oscillant dans le « Star excursion balance test » et le « test en Y ».

segment jusqu'à une angulation arbitraire et l'inclinomètre est positionné sur « 08 ». Dans la littérature, des angulations de 458 et de 1108 de flexion [38] ou de 208 et 408 de flexion sont proposées [37]. Ensuite, le segment est stabilisé pendant une durée aléatoire, puis le kinésithérapeute va initier un mouvement lent (vers la flexion ou vers l'extension) et le patient devra signaler lorsqu'il sent le mouvement [37]. L'angulation donnée par l'inclinomètre est alors relevée. Elle correspond à l'angle nécessaire pour que le patient détecte le mouvement à partir de la position stabilisée. La mesure est réalisée 3 fois et c'est la moyenne des 3 valeurs qui sert de référence. Pour obtenir un test valide, il faut appliquer une vitesse de mouvement inférieur à 18/seconde [24,39]. Cette vitesse lente est choisie afin de tester prioritairement les récepteurs articulaires en limitant l'implication des récepteurs musculaires [37].

Évaluation « mécanique » du seuil de détection de mouvement Cette évaluation peut se réaliser grâce à un arthromoteur. Après un positionnement précis du patient, on va régler

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l'arthromoteur dans une angulation cible statique [37]. Ensuite, le mouvement sera initié et le patient devra signaler lorsqu'il ressent le segment bougé. Le test sera réalisé 3 fois et c'est la moyenne des 3 mesures qui sera considérée. Certains auteurs suggèrent d'utiliser un électro-goniomètre pour améliorer la fiabilité des mesures [16,22] alors que d'autres auteurs ont élaboré des dispositifs motorisés pour réaliser les tests au niveau de la cheville [24], du genou [37], du dos [20] ou des doigts de la main [36].

Validité et reproductibilité des tests Il est souvent considéré dans la littérature que le test de seuil de détection de mouvement est plus reproductible que le sens positionnel [37]. Cependant, la plupart des études n'a pas utilisé d'évaluation manuelle et la reproductibilité intra- et inter-évaluateur(s) reste peu étudiée. Toutefois, une étude montre une bonne validité et reproductibilité de ce test chez des sujets asymptomatiques au niveau du genou [40]. Pour cette même articulation, les travaux de Ageberg montre une

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reproductibilité inter-tests meilleure à 208 de flexion qu'à 408 [37].

Les erreurs observées pour le seuil de détection de mouvement Pour les sujets asymptomatiques, les valeurs obtenues pour le seuil de détection de mouvement varient selon les auteurs. Les valeurs oscillent entre 1,178 et 2,578 [32,41,42]. Les sujets pathologiques obtiennent des valeurs augmentées du côté atteint, mais également du côté asymptomatique. Pour le genou, l'angle augmente de 2,628 chez les sujets pathologiques [32] alors que d'autres auteurs trouvent 3,538 [42]. Pour la cheville, le seuil de détection de mouvement est augmenté de plus de 28 en cas de pathologie [24,41]. L'influence du taping sur le sens kinesthésique est très controversée [24].

TESTS PROPRIOCEPTIFS FONCTIONNELS Les tests proprioceptifs comprennent l'évaluation de l'équilibre, de la posture et du mouvement. Seul le test « star excursion balance test » sera évoqué dans cet article car il est très facile à réaliser en pratique clinique et il est relativement peu connu des kinésithérapeutes. Sur le sol, 4 lignes se croisant au centre sont apposées. Le patient a le membre inférieur pathologique positionné au centre de la croix et il doit avec le membre libre toucher les 8 lignes graduées dans 8 directions différentes tout en maintenant son équilibre (Fig. 5) [43,44]. L'objectif est d'aller le plus loin possible, car en effet, la distance est corrélée avec la qualité de la stabilité du sujet [45]. Ce test requiert des qualités de force, de souplesse et de proprioception [46]. Il est le plus souvent utilisé lorsque le patient présente une pathologie du membre inférieur, mais, il est également utilisé afin d'évaluer le risque de pathologies pour les athlètes [43]. Le but de ce test est d'arriver à contrôler le membre inférieur d'appui stable alors que des mouvements successifs sont réalisés avec l'autre membre. Chez des sujets asymptomatiques, la distance parcourue varie en moyenne de 65 cm à 87 cm [45]. Les sujets vont plus loin vers l'arrière que vers l'avant. Les femmes vont significativement moins loin que les hommes, cependant lorsque les valeurs sont normalisées avec la longueur de la jambe, les résultats sont pratiquement similaires. La reproductibilité intra-test et intra-évaluateur est considérée comme moyenne à bonne [43]. C'est pourquoi une étude récente [46] adapte quelque peu ce test en proposant une évaluation « Y » avec 3 directions de mouvement et 3 essais par direction de mouvement (Fig. 5). Effectivement, pour ce test adapté, la reproductibilité semble être de bien meilleure qualité (ICC > 0,85).

CONCLUSION Dans de nombreuses situations pathologiques, il est indispensable d'évaluer la proprioception de manière très précise afin de déceler les perturbations du patient et de tester l'efficacité de notre approche thérapeutique. De nombreux tests, réalisables en pratique clinique, ont bénéficié d'études de validité et de reproductibilité de qualité. Dès lors, il est aujourd'hui possible d'utiliser des outils fiables de bilans proprioceptifs auprès

Savoirs / Mise au point des patients. Certaines études sont encore nécessaires auprès de différents groupes de patients pathologiques afin d'améliorer l'interprétation de ces tests et la qualité méthodologique pour certaines articulations. Déclaration d'intérêts L'auteur déclare ne pas avoir de conflits d'intérêts en relation avec cet article.

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