Soins palliatifs et ventilation mécanique dans la sclérose latérale amyotrophique (SLA)

Soins palliatifs et ventilation mécanique dans la sclérose latérale amyotrophique (SLA)

Médecine palliative — Soins de support — Accompagnement — Éthique (2010) 9, 309—317 ÉTUDE ORIGINALE Soins palliatifs et ventilation mécanique dans l...

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Médecine palliative — Soins de support — Accompagnement — Éthique (2010) 9, 309—317

ÉTUDE ORIGINALE

Soins palliatifs et ventilation mécanique dans la sclérose latérale amyotrophique (SLA) Ventilatory support and palliative care in amyotrophic lateral sclerosis (ALS) Jésus Gonzalez-Bermejo a,∗,b,1, Amélie Hurbault a,2, Christophe Coupé b,3, Vincent Meininger b,4, Thomas Similowski a,5 a

Unité d’appareillage respiratoire de domicile, service de pneumologie et réanimation, groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, 47-83, boulevard de l’Hôpital, 75651 Paris cedex 13, France b Service de neurologie, centre de référence pour la sclérose latérale amyotrophique Île-de-France, groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, 47-83, boulevard de l’Hôpital, 75651 Paris cedex 13, France Rec ¸u le 19 mars 2010 ; accepté le 19 mars 2010 Disponible sur Internet le 29 octobre 2010

MOTS CLÉS SLA ; Ventilation mécanique ; Soins palliatifs ; Trachéotomie

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Résumé L’assistance ventilatoire au cours de la sclérose latérale amyotrophique (SLA) est une modalité thérapeutique dont le statut est hybride et varie au cours de l’évolution de la maladie. Elle peut prolonger la vie, mais elle a aussi et peut-être surtout pour effet de soulager la dyspnée. Elle doit ainsi être inscrite dès le début dans un projet palliatif. Malgré tout, les discussions sont parfois difficiles en fin de vie, car malgré une évolution connue de la maladie, les directives anticipées sont rares et les décisions doivent être prises en urgence, en décompensation. Sinon, comme pour de nombreuses pathologies chroniques de pronostic fatal, la prise en charge palliative de la SLA ne peut qu’être le fait de la réflexion commune et de l’action concertée d’intervenants multiples, dont le médecin et le patient ne sont que deux des représentants. Ce texte fournit des outils de pratique et de réflexion pour la prise en charge des soins palliatifs d’un malade atteint de SLA sous ventilation mécanique. © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (J. Gonzalez-Bermejo). Pneumologue. Psyschologue. Psychologue. Neurologue. Pneumologue.

1636-6522/$ — see front matter © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.medpal.2010.09.008

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J. Gonzalez-Bermejo et al.

KEYWORDS Amyotrophic lateral sclerosis; Palliative care; Respiration artificial; Tracheostomy

Summary Assisted ventilation in amyotrophic lateral sclerosis (ALS) is a hybrid treatment concept which varies during disease progression. It can prolong life, but also has the effect, possibly its main one, of relieving dyspnoea. Despite having a predictable disease course, many patients with ALS defer decision-making until a crisis and arrive in emergency. Nevertheless, decision-making in end of life is complex in these circumstances and effective communication is the only recipe that will yield success. Sometimes, it can also be included in a palliative care protocol, which should not be limited to ventilation. As in many chronic diseases with fatal outcomes, management of palliative care in ALS can only result from group reflection and multidisciplinary teamwork; the doctor and the patient are just two members of this team. This text will give tools to manage ALS patients under mechanical ventilation. © 2010 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Histoire naturelle de la sclérose latérale amyotrophique (SLA), mortalité et fin de vie Épidémiologie La SLA est une maladie dégénérative du groupe des maladies du motoneurone. Son incidence annuelle est de 1,5 à 2,5 cas sur 100 000 avec une prévalence de six à huit sur 100 000, notamment après 40 ans. La médiane de survie est de 30 mois à partir du diagnostic, et moins de six mois après la découverte de l’atteinte diaphragmatique en l’absence de traitement [1].

Causes de décès

Les causes de décès dans la SLA sont quasiment toujours respiratoires. On retrouve pour 60 % des cas une insuffisance respiratoire chronique progressive avec dysfonction des muscles respiratoires et dans 35 % des cas une insuffisance respiratoire aiguë secondaire à une suppuration bronchique avec encombrement. Corcia et al. retrouvent sur des données autopsiques de 100 malades 74 % de décès de causes respiratoires, auxquelles s’ajoutent 6 % d’embolies pulmonaires [2].

Symptômes de fin de vie La période de la fin de vie est accompagnée de nombreux symptômes : dyspnée, asthénie, fatigue physique, réduction de l’activité, fatigue psychologique, manque de motivation [3]. Souffrance et douleurs sont très présents dans le dernier mois de vie et sous-traitées dans une étude de Ganzini et al. en 2002 [4]. Chez 50 malades atteints de SLA, une enquête sur le dernier mois de vie a montré que 62 % des malades se sont plaints de difficultés de communication, 48 % de douleurs et surtout 56 % et 42 % se plaignaient respectivement de dyspnée et de troubles du sommeil. Une majorité de malades étaient insatisfaits de la prise en charge de leur dyspnée.

L’importance des symptômes respiratoires en fin de vie et le poids de l’atteinte respiratoire dans la mortalité ont conduit, à partir des constats effectués au début des années 2000, à faire de l’assistance ventilatoire un traitement symptomatique de référence [5].

Critères d’indication de mise en route d’une assistance respiratoire chez un malade atteint de SLA Selon les recommandations de 1999 [6], reprises par une conférence de consensus en France [7], les critères de mise en route d’une assistance respiratoire sont la présence de symptômes liés à l’insuffisance respiratoire associés à l’un des critères objectifs suivants : • PaCO2 supérieure à 45 mm d’Hg et/ou ; • capacité vitale inférieure à 50 % de la normale et/ou ; • pression inspiratoire nasale maximale et pression en sniff inférieure à 60 % de la normale et/ou ; • désaturations nocturnes en SpO2 plus de 5 % du temps en dessous de 90 %.

L’assistance ventilatoire dans la SLA est-elle un soin palliatif ou un soin de maintien de la vie ? Définitions des soins palliatifs et des soins de soutien La société franc ¸aise d’accompagnement et de soins palliatifs définit les soins palliatifs de la fac ¸on suivante : « Les soins palliatifs sont des soins actifs délivrés dans une approche globale de la personne atteinte d’une maladie grave, évolutive ou terminale. L’objectif des soins palliatifs est de soulager les douleurs physiques et les autres symptômes, mais aussi de prendre en compte la souffrance psychologique, sociale et spirituelle ». « Les soins palliatifs et l’accompagnement sont interdisciplinaires ». « Ils s’adressent au malade en tant que personne, à sa famille et à ses proches, à domicile ou en institution [...]. Les soins palliatifs et l’accompagnement considèrent le malade comme un être vivant et la mort comme un processus naturel ».

Soins palliatifs et ventilation mécanique dans la SLA « Ceux qui les dispensent cherchent à éviter les investigations et les traitements déraisonnables ». « Ils se refusent à provoquer intentionnellement la mort ». « Ils s’efforcent de préserver la meilleure qualité de vie possible jusqu’au décès et proposent un soutien aux proches en deuil ». Des « soins de soutien » sont des soins médicaux, non invasifs, non déraisonnables, destinés à soulager les signes d’inconfort chez les patients pris en charge pour des soins palliatifs. Tous ces éléments ne sont pas contradictoires, au contraire, avec la mise en place de traitements destinés audelà de la prise en charge des symptômes, à prolonger la vie. L’approche palliative n’annule pas non plus tout espoir. Il ne s’agit pas alors d’espoir de survie, mais d’espoir de trouver un sens à sa vie et de réaliser un certain nombre de projets et de désirs.

Définition et résultats de l’assistance ventilatoire dans la SLA Description L’assistance ventilatoire permet de suppléer l’atteinte de la pompe ventilatoire interne défaillante. Il s’agit d’une « pompe » ventilatoire externe qui va soutenir, voire remplacer complètement l’appareil ventilatoire du malade atteint par la maladie neuromusculaire.

Définitions Elle est appelée ventilation « non invasive » (VNI) lorsqu’elle est administrée sans recours à une sonde ou canule endotrachéale, elle est appelée « invasive » lorsqu’elle est administrée par une canule de ventilation.

Résultats de l’assistance ventilatoire dans la SLA

La VNI dans la SLA répond à plusieurs critères de définition de soins palliatifs, en effet elle améliore les symptômes respiratoires, la fatigue, les troubles du sommeil et le nombre de séjours hospitaliers. À ce titre elle « soulage les douleurs physiques et les autres symptômes de la SLA [8], elle se réalise au sein d’équipes multidisciplinaires [9] » et les soins proposés par l’assistance ventilatoire « s’efforcent de préserver la meilleure qualité de vie possible jusqu’au décès ». Enfin, jusqu’à un certain point, la VNI peut être considérée comme un traitement de support car elle consiste en « des soins médicaux, non invasifs ».

La VNI dans la SLA est à la fois un soin palliatif et un soin de maintien de la vie. Il a été montré, avec un niveau de preuve élevé, une prolongation de la vie par la ventilation non invasive [8]. Des survies prolongées de plus de cinq ans sont retrouvées

311 chez certains de nos malades sous VNI, et de plus de dix ans sous trachéotomie. L’assistance ventilatoire par trachéotomie améliore aussi tous ces symptômes et permet en plus d’évacuer les sécrétions pulmonaires plus facilement et d’éviter les inhalations répétées en cas d’hypersalivation ou de syndrome bulbaire. La trachéotomie est considérée comme invasive et dans ce sens ne rentrerait pas dans la définition d’un soin de support. Malgré tout, une trachéotomie amène parfois un soulagement important. Par exemple, pour un malade qui nécessite un masque de VNI posé sur le visage 24 heures sur 24, la trachéotomie évite les escarres de visage, les inhalations, elle libère le visage, elle permet de remettre des lunettes, etc. . . La trachéotomie peut donc être parfois considérée comme moins agressive qu’une ventilation dite non invasive, et à ce titre être considérée aussi comme un soin palliatif dans certains cas. L’assistance ventilatoire au cours de la sclérose latérale amyotrophique (SLA) peut donc être vue positivement comme une mesure capable de prolonger la vie et comme un élément d’une démarche palliative. Néanmoins, dans certaines situations, elle peut être à double tranchant si elle entraîne des effets pervers comme : • la prolongation d’une vie non désirée ; • la suppression de la phonation et de la communication ; • l’impossibilité de s’alimenter (à cause d’un masque sur le visage) ; • la survenue de complications (escarres) ou l’induction de désagréments ou de douleurs ; • l’augmentation de la dépendance à des tiers ; • la diminution de la qualité de vie des proches. Une vision globale du malade dans son entourage est effectivement nécessaire. L’amélioration amenée au patient (en termes de qualité de vie) peut être contrebalancée par la dégradation de la qualité de vie des proches [10].

Comment présenter l’assistance ventilatoire à un malade atteint de SLA ? Comment annoncer la nécessité d’une assistance ventilatoire à un malade atteint de SLA ?

Il est recommandé d’axer la proposition de VNI sur le thème de l’amélioration du confort de vie. Mitsumoto et Rabkin [11] proposent par exemple : « Many assistive devices can greatly help your breathing, which left unassisted may decrease your energy levels and impede your sleep at night. One such device is a noninvasive positive pressure ventilator. It includes an easy-to-use mask that fits on your face. It should increase energy and provide better sleep ». On rajoutera « cela soulagera aussi votre essoufflement, certes quand vous serez sous assistance ventilatoire, mais probablement aussi quand vous respirerez seul ».

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Doit-on parler de l’assistance ventilatoire comme d’un « soin palliatif » à un malade souffrant d’une SLA ? L’expérience clinique montre que le terme « soins palliatifs » peut être parfois difficilement entendu par le patient. Celuici peut le vivre comme : • un abandon de tout espoir pour lui : « le médecin ou l’équipe soignante ne croit plus en moi... je symbolise son échec ... je le déc ¸ois » ; • un rejet : « on ne veut plus me voir dans le service... on m’envoie dans un mouroir » ; • une injonction à mourir : « le médecin m’a parlé de soins palliatifs... c’est terminé pour moi... Il n’y a plus rien à faire ». Quelques recommandations peuvent être faites afin de limiter ce sentiment d’abandon : • les termes « soins palliatifs » ne doivent pas être mentionnés de fac ¸on obligatoire au patient et à ses proches. L’accent peut être porté sur la notion de soins de confort et d’accompagnement ; • si ce terme est évoqué par le patient ou son entourage, il est important de le reprendre en demandant au patient ce que ce terme évoque pour lui. Dans ce contexte, la formulation suivante peut être proposée : « Patient : Vous êtes en train de me parler de soins palliatifs docteur ? Médecin : Oui, ils peuvent être nommés comme tels. Ce terme peut-être entendu de différentes fac ¸ons. J’aimerais que vous me disiez ce que ce mot évoque pour vous... » Le médecin pourra alors repréciser par la suite ce que sont les soins palliatifs et ce qu’ils ne sont pas ; • il est aussi important de garder en mémoire que le neurologue doit rester le médecin référent du malade et qu’il faut privilégier le maintien des entrevues de neurologie même si la situation respiratoire les rend difficile (malade dépendant d’un ventilateur, malade en réanimation, malade en soins de suites, etc.) ; • enfin et surtout, l’hétérogénéité des malades fait que la notion de « palliatif » pour l’assistance ventilatoire ne doit pas être mise en avant dans certaines situations, notamment quand l’assistance ventilatoire est proposée après une longue période de surveillance respiratoire systématique, où le malade a été informé des risques respiratoires et des thérapeutiques disponibles très en amont.

Quand et comment parler de l’assistance ventilatoire au malade ? Comment ? Il s’agit d’une démarche décisionnelle collégiale. La question de l’assistance ventilatoire doit s’inscrire dans le cadre d’une démarche décisionnelle « collégiale » car : • le médecin ne dispose pas de tous les éléments pour prendre cette décision ; • le médecin ne doit pas porter seul cette décision (la responsabilité doit être partagée afin de protéger le médecin d’une position omnisciente) ;

J. Gonzalez-Bermejo et al. • cette démarche peut être appliquée à différents stades de la maladie. Elle reste susceptible d’être révisée. Il est recommandé, avant de proposer une assistance ventilatoire, d’aborder systématiquement plusieurs points [12] : • appréciation du handicap occasionné par la SLA et de la rapidité de l’évolution ; • appréciation du confort du patient en lien avec son entourage et dans son lieu de vie ; • consultation du dossier partagé et recherche des orientations thérapeutiques dont une éventuelle notification d’abstention de certaines thérapeutiques ; • évaluation des souhaits du patient dans sa situation présente, après information complète et anticipation des éventuelles complications, notamment de la survenue d’une éventuelle insuffisance respiratoire ; • recherche dans le passé de souhaits, de décisions ou d’éléments psychiques de la part du patient qui pourraient traduire son vécu de maladie ; • consultation des intervenants et soignants au domicile, du médecin traitant, du médecin référent, du psychologue clinicien, etc. ; • consultation de la personne de confiance et recherche des directives anticipées ; • consultation de l’entourage du patient en étant particulièrement attentif à sa vulnérabilité psychique. Dans certains pays, se posera en plus la vérification de la faisabilité technique et financière avec une appréciation de la possibilité de retour sur le lieu de vie après mise en place. À titre d’exemple une trachéotomie avec assistance ventilatoire est prise en charge complètement au Japon, où il existe un taux de trachéotomie de 27 %, partiellement en France, avec un taux de malades trachéotomisés de 5 %, et pratiquement pas aux États-Unis avec un taux de 3 % et pas du tout au Royaume-Uni car il n’y existe pas de remboursement [11].

Si un des points précédents pose problème, la mise sous assistance ventilatoire doit être rediscutée en équipe et peut parfois ne pas être proposée du tout au malade.

Les éléments de cette démarche collégiale devront être notés dans le dossier du patient. La famille du patient doit être consultée mais ne doit pas avoir à porter le poids de la décision. Toutefois, dans cette démarche collégiale très « rigide », le médecin et les autres soignants ne savent pas ce qui est « bon » ou « bien » pour le malade. C’est une incertitude fondamentale. Dans une posture d’accompagnant, ils cherchent à aider dans un processus de délibération et de discernement où le patient pourrait parvenir à énoncer ce qu’il jugerait bon, bien ou moins mauvais pour lui. Ce choix n’est pas un impératif. Cette posture n’est pas l’exercice d’un pouvoir sur l’autre. Elle n’est pas non plus indifférence envers autrui.

Soins palliatifs et ventilation mécanique dans la SLA

Quand parler de la nécessité d’une ventilation, voire d’une trachéotomie ? En anticipation

313 Elle nécessite donc une concertation ou un partage de l’information entre les intervenants pour ne pas avoir de discours différents.

Après la mise en place d’une assistance respiratoire Une information anticipée, aussi en amont que possible, serait idéale, en pratique elle s’avère parfois non réalisable : Une étude faite par le Centre SLA de Lille révèle que 50 % des malades refusent l’information sur les complications vitales de leur maladie, restent indécis ou ne donnent aucune directive anticipée sur le traitement de la phase terminale de leur maladie. Il existe donc des personnes conscientes et non démentes mais qui sont, du fait de la maladie ou de ses conséquences psychiques ou de convictions personnelles, dans l’incapacité ou le refus de donner des directives anticipées (données personnelles Dr Danel Bruneau). Il est souvent difficile voire impossible pour le patient et son entourage de se représenter la vie avec une assistance respiratoire et a fortiori avec une trachéotomie. Les mécanismes de défense du patient peuvent entraver la communication entre lui et le médecin, sur cette question source d’angoisse. Ainsi, lorsque le patient nie la réalité ou exprime le refus de ce qui est annoncé, il signifie qu’il est dans l’impossibilité d’anticiper la situation et de donner son point de vue sur la fac ¸on dont il souhaite être soigné. Le niveau de réflexion nécessaire pour effectuer des choix thérapeutiques et adhérer à ceux-ci une fois décidés, peut être alors compromis. La mise en place des thérapeutiques de suppléance ne peut être anticipée avec le patient que si ses mécanismes d’adaptation à la maladie le lui permettent. Le suivi psychologique peut y contribuer et offrir au médecin des éléments d’évaluation concernant la capacité du patient à intégrer ces prises de décisions. Cependant, quelle que soit la fac ¸on de l’aborder, certaines questions, comme la décision d’une trachéotomie, placent le patient devant un choix très complexe. Toutefois, depuis les recommandations internationales d’utilisation de la VNI dans la SLA [5] et la réalisation systématique trimestrielle d’examens respiratoires de surveillance [7], il est plus simple de parler de l’assistance respiratoire très en amont.

Au moment de l’insuffisance respiratoire Si la discussion n’a pas été anticipée, l’assistance ventilatoire peut être présentée lors de la découverte d’une insuffisance respiratoire débutante. Cette situation est de plus en plus fréquente en raison des examens de suivi systématiques. Cet entretien doit être précédé de la démarche collégiale explicitée ci-dessus. Celle-ci pourra notamment permettre de prendre en compte les conditions de vie actuelle et future du patient avant de lui parler aussi de l’évolution de l’assistance respiratoire (VNI nocturne, puis diurne intermittente, puis quasi permanente) et de la trachéotomie. Il semble important que cet entretien soit mené par, ou avec, le médecin référent du malade. Cette discussion ne doit pas être menée exclusivement par le pneumologue ou le réanimateur qui va installer l’assistance ventilatoire.

Des malades peuvent présenter une insuffisance respiratoire aiguë sans que le sujet ait été discuté et anticipé. Plusieurs causes peuvent aboutir à cette situation : • le refus par le malade de discuter de l’avenir ; • l’entrée dans la maladie par une insuffisance respiratoire aigue ; • une évolution très rapide de la maladie n’ayant pas laissé le temps de discuter du sujet ; • l’impossibilité pour le médecin urgentiste ou réanimateur d’accéder aux données anticipées. Dans cette situation, un malade atteint de SLA peut être dépendant d’une assistance respiratoire invasive sans préparation, au sein d’une structure d’urgence non expérimentée. Cette situation difficile ne doit pas être systématiquement considérée comme catastrophique. Il est recommandé de : • récupérer les informations dont la liste a été exposée plus haut (informations anticipées) ; • discuter systématiquement une tentative de VNI précoce impliquant souvent l’extubation du patient alors que les critères classiques de cette décision ne sont pas réunis (en sachant qu’ils peuvent ne jamais l’être). Cela implique une expérience et une logistique particulière [13]. Si cette démarche débouche sur une impasse, c’est-àdire que le patient ne souhaite pas le recours à la VNI ou à une trachéotomie au décours de l’épisode aigu ayant conduit à l’intubation ou si une tentative de relais par VNI échoue, la situation devient complexe. Doit alors se discuter de fac ¸on collégiale et avec l’entourage une extubation non suivie de ventilation mais de traitements médicamenteux de la dyspnée et de l’hypersécrétion, en sachant que cette attitude peut conduire au décès. L’encadrement d’une extubation suivie de traitement symptomatique est très différent selon les situations ou les coutumes locales, les pays concernés, l’expérience de l’équipe. Cet encadrement peut se faire au sein de l’unité de soins intensifs, mais des difficultés peuvent alors survenir au sein d’un milieu dont la culture est d’une nature différente. Il peut aussi avoir lieu dans des structures d’aval (soins palliatifs, salles de pneumologie ou de neurologie), mais alors les problèmes tiennent au manque de formation à la gestion de l’insuffisance respiratoire avec la possibilité d’un phénomène de rejet possible ressenti par la malade.

Particularités de la trachéotomie Le recours à la trachéotomie au cours de la SLA pose principalement le problème du maintien de la vie alors que le handicap et la dépendance physique progressent inexorablement, pour atteindre à l’extrême des situations de « locked-in syndrome ».

314 Cela peut conduire à de véritables drames familiaux et à des situations inextricables. Certains patients, et leur entourage, souhaitent malgré tout le recours à cette technique de soins, et il est alors nécessaire que leur information soit aussi complète que possible sur ce qui peut et va arriver. Cette information doit idéalement être faite aussi en amont que possible, et il est capital d’éviter à tout prix que la trachéotomie ne soit proposée et discutée dans une situation aiguë sans qu’il ait pu y avoir de réflexion préalable. De fac ¸on synthétique, Mitsumoto et Rabkin [11] ont proposé un exemple de discours qu’il est envisageable de tenir à propos de la trachéotomie. « Eventually, you may need more assistance with your breathing. You could consider undergoing a tracheostomy and receiving long term mechanical ventilation (LTMV), a decision that will involve your whole family and that requires thoughtful evaluation ». « With tracheostomy and LTMV breathing becomes easier, aspiration pneumonia becomes less likely, and survival is prolonged (which may be important for those with specific lifetime goals). As your disease progresses, you may reach a locked-in state, making communication impossible. Some patients who can speak before the procedure are not affected, but others can’t speak after tracheostomy. Frequent mechanical suctioning is needed to remove secretions. This essential procedure causes transient gag and discomfort. Very few patients have infection or bleeding. For those who use a high-pressure cuff on the airway, tissue damage of the trachea may rarely occur. The costs for home care and equipment not covered by insurance are high (but this is very different between countries). Handling the necessary equipment and performing procedures require a lot from caregivers. The equipment requires permanent placement of a tube, which is continuously connected to a machine, in the upper airway at your neck. Portable machines are available so that patients may go out. This is a decision that is best made long before you might suddenly need it so that your family knows your wishes. We can give you a lot of information and lend you a video to give you a better idea of what the experience might be like. If you find that living with an LTMV is not acceptable, you have the legal right to discontinue it. You should have an advance directive informing us of the circumstances under which you don’t wish to continue on the machine ». La rencontre des patients et de leurs familles avec d’autres patients, ainsi que l’accès à des documents d’éducation (brochures ou vidéos) spécifiques, devraient probablement être développés dans le contexte de la trachéotomie au cours de la SLA.

Comment ne pas proposer d’assistance ventilatoire dans la SLA ? En cas d’impossibilité évidente de mettre en place une assistance ventilatoire, celle ci ne doit pas être rediscutée avec le malade. Cela risque d’entraîner une angoisse supplémentaire inutile.

J. Gonzalez-Bermejo et al. Dans ce cas, les traitements médicamenteux des symptômes respiratoires seront utilisés. L’oxygène n’est pas d’un grand apport, il n’a jamais démontré pouvoir améliorer la dyspnée dans la SLA et peut par contre aggraver l’hypoventilation alvéolaire, l’hypercapnie et les symptômes l’accompagnant. Toutefois la prescription d’oxygène peut rassurer le malade, sa famille et les soignants. Il peut par ailleurs participer à l’instauration d’une diminution de la vigilance. Cet effet n’est pas prévisible, et l’O2 ne peut donc pas être recommandé systématiquement.

Outils d’arrêt de la ventilation Si l’assistance ventilatoire maintient la vie d’une manière qui est ou est perc ¸ue comme déraisonnable, il est licite d’en envisager l’interruption. Il faut avoir conscience que celleci s’accompagnera inévitablement de symptômes intenses, voire d’une véritable détresse respiratoire aiguë. Il est crucial d’anticiper cette situation, ce qui impose une gestion rigoureuse et évaluée du traitement médicamenteux approprié. Comme au cours de toute dyspnée de fin de vie [14], les morphiniques et les benzodiazépines, associés ou non à l’administration d’oxygène, sont efficaces pour soulager les symptômes provoqués par l’arrêt de l’assistance respiratoire. Le bon sens indique que leur administration doit être entamée avant l’arrêt de cette assistance, qu’il peut être licite de réintroduire temporairement si les doses administrées s’avèrent insuffisantes pour obtenir calme et confort. Il est important de maintenir une présence médicale ou infirmière continue dans la chambre du patient au moment de l’arrêt de l’assistance respiratoire, à la fois pour permettre une réaction rapide en cas de nécessité d’augmentation des doses, et à la fois parce que le décès est alors souvent imminent. Cela permet en particulier de rassurer la famille sur la signification d’éventuelles pauses respiratoires ou de gasps agoniques, qui ne doivent pas malgré leur caractère spectaculaire être interprétés comme des signes de souffrance. Si le décès ne survient pas à très court terme, il est important d’assurer des passages fréquents dans la chambre du patient, et parfois un relais par une présence permanente.

Désencombrement en fin de vie Un malade peut présenter un encombrement bronchique en fin de vie. Cet encombrement bronchique est très inconfortable en l’absence de toux efficace. Les techniques d’aide à la toux, notamment par appareillages type Cough assistTM n’ont jamais montré leur intérêt en fin de vie. Il ne semble donc pas raisonnable d’en prôner l’utilisation systématique dans cette situation. Les aspirations transglottiques sont invasives, douloureuses et efficaces très temporairement. Elles ne doivent pas être utilisées en toute fin de vie. Des solutions médicamenteuses peuvent être utilisées pour diminuer les sécrétions : atropiniques, scopolamine en gouttes, patchs ou injections.

Soins palliatifs et ventilation mécanique dans la SLA

Soins palliatifs de l’insuffisance respiratoire de la SLA hors ventilation et médicaments. L’efficacité de la ventilation mécanique dans le cadre de soins palliatifs respiratoires doit s’accompagner d’un soutien social et psychologique.

Soutien social

Toutes les aides humaines, matérielles et financières doivent être mises en place pour soulager la famille dans son rôle de soignant, et lui permettre de reprendre son rôle initial. Devant l’évolutivité rapide de SLA, ces aides doivent êtres mises en place en urgence.

Soutien psychologique Il semble important de privilégier, dès le début, la disponibilité de l’ensemble des professionnels pour le patient et sa famille. Concrètement, il s’agit d’évaluer régulièrement l’état physique et psychologique du patient et de ses proches afin de pouvoir cerner rapidement les difficultés naissantes et proposer des solutions appropriées, dans une limite de temps raisonnable. La clarté de l’information délivrée et la cohérence des soins proposés au patient vont dépendre, en grande partie, de la qualité de la communication entre les différents professionnels intervenant dans la prise en charge.

Prise en charge psychologique du patient et de son entourage au cours de la maladie Le patient Selon les recommandations de la haute Autorité de Santé (HAS) [12] : « Plusieurs aspects de la dynamique interne du patient justifient un suivi psychologique, dont le principal reste l’expression d’une souffrance psychique tout au long de la maladie et de son évolution, dont l’intensité est plus ou moins soulignée selon les études. Néanmoins, lorsque la souffrance est peu exprimée par les patients, il est plutôt supposé qu’elle est masquée par des mécanismes de défense tels que le déni, plutôt qu’absente ». La prise en charge de cette souffrance s’inscrit tout à fait dans le champ d’intervention du psychologue clinicien. Il peut également aider le patient à faciliter son travail d’adaptation à la maladie et lui permettre de se reconstruire psychiquement.

La famille Les mécanismes de défense du patient, nécessaires à la protection psychique de celui-ci, peuvent être difficiles à gérer pour l’entourage. Réduit à une dépendance physique qui évolue de fac ¸on extrême, le patient peut, par exemple, manifester un comportement de maîtrise tant vis-à-vis de

315 lui-même que de son entourage. Le soutien psychologique pour les proches du patient prend alors ici tout son sens.

Les modalités Lorsque le patient et ses proches bénéficient d’un suivi psychologique, celui-ci doit être bien distinct. Il est préférable que le soutien psychologique du patient et celui des proches ne soient pas effectués par le même psychologue. Le patient comme ses proches pourront alors s’exprimer, en toute confiance, dans un espace de parole qui leur est propre. L’écoute neutre et bienveillante du psychologue visà-vis de son patient sera ainsi préservée.

Afin d’optimiser la prise en charge psychologique du patient et de ses proches, il semble possible de recommander : • d’établir une bonne communication et une bonne coordination entre les différentes personnes intervenant auprès du patient, à l’hôpital comme au domicile ; • de proposer des rencontres régulières pour évaluer l’état psychologique du patient et de sa famille ; • de prendre en compte de manière réactive les problèmes posés par le patient et/ou sa famille ; • de rassurer le conjoint sur son attitude et la qualité des soins prodigués à son proche ; • de déculpabiliser les proches sur leur éventuel « ras le bol » en raison de leur fatigue. Les encourager à aménager des espaces ressources pour « recharger leur batterie » ; • de proposer au patient et à sa famille des séjours de répit dans des structures acceptant de prendre en charge le malade de fac ¸on temporaire. L’objectif de ces séjours est de permettre à la famille du patient de se reposer et de se ressourcer. La difficulté de mettre ce type de séjour en place est double : le patient acceptant souvent difficilement la séparation avec ses proches dont il est si dépendant et la famille culpabilisant à l’idée de le laisser. Ces séjours doivent donc être discutés en amont avec le patient et sa famille ; • d’accompagner le patient et les proches durant les phases d’aggravation entraînant la prise de décision thérapeutique (gastrostomie, VNI, trachéotomie. . .) ; • en cas de nécessité, proposer un soutien psychologique à la personne en difficulté.

Prise en charge psychologique du patient en fin de vie et de ses proches

La prise en charge psychologique du patient et de ses proches se trouve facilitée lorsque celle-ci est instaurée au préalable, en amont de cette difficile et ultime étape. Elle peut néanmoins être entreprise lors des dernières semaines, voire des derniers jours de fin de vie, à la condition que le patient et/ou ses proches y trouvent un sens.

Angoisse du patient Souvent, on perc ¸oit le moment de la mort comme dénué de sens, en particulier lorsqu’elle est consécutive à une mala-

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J. Gonzalez-Bermejo et al.

die telle que la SLA pour laquelle il n’y a pas d’espoir de guérison. Pourtant, l’approche de la mort correspond à un temps fort, unique, où la dynamique relationnelle est essentielle pour celui qui va mourir et pour ceux qui restent et qui auront à faire le travail de deuil. Ce moment permet les derniers échanges et de mettre les choses en ordre avant le décès. L’angoisse des personnes en fin de vie semble en lien avec le déni de la mort dans leur entourage. Celui qui va mourir attend de la part de l’équipe soignante un engagement à ne pas être abandonné seul face à la mort. La peur de souffrir, les fantasmes autour d’une terrible agonie, d’un étouffement traduisent cette demande d’engagement du patient envers le médecin. La question de la mort évoque la souffrance, l’angoisse et la douleur. Nous retrouvons ici des éléments cliniques du sujet réanimé soulignés par J.-C.Colombel : « Vivre l’effondrement de ses fonctions vitales équivaut à se voir basculé dans l’évidence du mourir [...] et projette le sujet devant l’effondrement de ses illusions d’en réchapper [...]. Le sujet n’a plus d’écart entre lui et sa douleur, il est douleur » [15]. L’anticipation de cet effondrement est particulièrement angoissante pour le patient atteint de cette maladie évolutive. À l’impuissance motrice et à l’incapacité de parler, vient s’ajouter l’impossibilité de respirer. On ne se représente pas la fin de vie comme un temps fort de l’existence d’un être humain, un temps précieux que l’on peut enrichir de paroles, de gestes ou tout simplement d’écoute, « être là » pour l’Autre. La mort aussi est un processus de séparation que l’on peut accompagner et qui comporte sa part de mystère. En effet, qu’y-a-t-il après ? Ainsi, les personnes croyantes, quelle que soit leur religion, affirment que leurs convictions religieuses les aident à accepter l’idée de la mort. La charge émotionnelle et la souffrance psychique qui peuvent caractériser certaines fins de vie nécessitent l’intervention d’un psychologue clinicien formé à l’accompagnement et aux soins palliatifs.

Angoisse des proches

L’angoisse est aussi présente chez l’entourage du patient : par des mécanismes de projection et d’identification complexes, l’angoisse du patient est souvent corrélée à celle de ses proches. Hélène Brocq écrit à ce sujet : « Propulsé dans le vide et dans l’angoisse, le malade peut y entraîner sa famille, car la maladie de l’un renvoie à la maladie de l’autre, mais aussi et surtout à la peur de le perdre. Le malade sait qu’il risque de perdre la vie, sa famille un être cher, autant de facteurs qui engendrent une souffrance singulière qu’il convient d’écouter et prendre en charge de manière précoce et adaptée » [16]. Il est alors particulièrement important de reconnaître et identifier les besoins psychoaffectifs de la famille (phases

d’épuisement, phase de rupture, phase de pré-deuil et de deuil, repérage de sentiments ambivalents, souvent accompagnés de culpabilité) en proposant un soutien psychologique.

Soutien des proches après le décès du patient Avec la perte de l’être cher commence le temps du deuil. Le deuil représente le cheminement que connaît la personne exposée à cette perte jusqu’à ce qu’elle réapprenne à vivre en l’absence de « l’objet perdu ». Le deuil est un processus normal et universel auquel chacun sera confronté un jour. D’après E. Kübler-Ross, la résolution du deuil se fait par étapes successives : le déni, la colère, le marchandage, la dépression, puis enfin l’acceptation. Cependant, chaque personne a son propre rythme et possède des ressources personnelles différentes sur lesquelles elle peut s’appuyer. Le psychologue clinicien peut faciliter ce travail de deuil. Il peut proposer son soutien par le biais d’entretiens, mais il est fréquent que la personne endeuillée préfère dans un premier temps faire le chemin seule. Dans ce cas, il est important de signifier qu’il sera toujours possible d’organiser une rencontre ultérieurement et éventuellement de mettre en place un suivi à l’hôpital ou par l’intermédiaire d’un psychologue en ville vers lequel nous pourrons orienter le patient.

Le psychologue peut bien sûr prendre l’initiative de recontacter la personne quelques mois plus tard pour prendre des nouvelles ; cette démarche est souvent très bien accueillie. Le travail de deuil chez l’enfant qui vient de perdre ses parents est bien particulier. Son avenir dépendra en grande partie de la capacité du parent survivant à faire son propre deuil et à accompagner celui de son enfant. C’est donc avant tout en soutenant le parent restant, en lui permettant de trouver les mots pour communiquer avec son enfant au sujet de cette perte douloureuse, que l’on pourra aider l’enfant. Le recours à une aide psychologique professionnelle auprès de l’enfant peut cependant s’avérer nécessaire, notamment en cas de changements inhabituels dans le comportement de celui-ci : repli sur soi, désinvestissement de ses activités favorites, troubles scolaires, manifestations anxieuses importantes, troubles de l’alimentation ou du sommeil, plaintes de douleur physique...

Souffrance des équipes qui prennent en charge des patients atteints de SLA en insuffisance respiratoire

Face à l’extrême dépendance physique et à la souffrance psychologique des patients atteints de cette pathologie, les professionnels de santé sont aussi confrontés à leurs propres questionnements et difficultés, notamment par rapport à la mort.

Soins palliatifs et ventilation mécanique dans la SLA La conscience de ne pas pouvoir guérir et de voir souffrir peuvent être source de culpabilité, de désarroi et d’angoisse. La dépendance à une ventilation mécanique rajoute de l’angoisse à l’équipe soignante qui maîtrise peu ces outils. Entre l’indifférence et le surinvestissement affectif (qui n’aide ni le patient ni le soignant), la position thérapeutique idéale est difficile à trouver. Le groupe de parole ou de réflexion sur la pratique clinique peut permettre aux professionnels : • de mieux comprendre et de mieux accompagner le patient et sa famille à partir de l’analyse et de la mise en mots de leur relation avec ces derniers ; • de partager des expériences professionnelles au cours d’un temps propre à la réflexion, propre à rétablir la communication, souvent mise à mal lorsque l’on est confronté à une telle souffrance. D’après H. Brocq, il s’agit ainsi d’offrir la possibilité aux équipes de continuer à « travailler dans la difficulté quotidienne, dans la mouvance de l’angoisse et du désespoir des malades et de leurs familles, tout en conservant autant que faire se peut une dynamique de groupe positive » [16].

Conclusion L’assistance ventilatoire au cours de la SLA est une modalité thérapeutique dont le statut est hybride et varie au cours de l’évolution de la maladie. Elle peut prolonger la vie, mais elle a aussi et peut-être surtout pour effet de soulager la dyspnée. Elle doit ainsi être inscrite dans un projet palliatif qui ne saurait s’y limiter. Comme pour de nombreuses pathologies chroniques de pronostic fatal, la prise en charge palliative de la SLA ne peut qu’être le fait de la réflexion commune et de l’action concertée d’intervenants multiples, dont le médecin et le patient ne sont que deux des représentants.

Conflit d’intérêt Les auteurs n’ont aucun conflit d’intérêt à déclarer avec le sujet.

Remerciements Pour la relecture du texte : Groupe SLA de la SPLF.

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