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ARTICLE IN PRESS La Revue de médecine interne xxx (2017) xxx–xxx
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Communication brève
Végétation tricuspidienne au cours d’une maladie de Still, une manifestation non infectieuse rare de lésion intracardiaque Intra-cardiac manifestation during adult-onset Still’s disease’s, a tricuspid vegetation as a rare expression of systemic disease Q. Quelven a,∗ , B. Cador a , M. Poinot b , E. Fletcher c , E. Le Mouel a , P. Jego a,d a
Service de médecine interne, centre hospitalier universitaire de Rennes, hôpital Sud, 16, boulevard de Bulgarie, 35203 Rennes cedex, France Service des maladies infectieuses, centre Hospitalier universitaire de Rennes, Pontchaillou, 2, rue Henri le Guilloux, 35203 Rennes cedex, France c Service de chirurgie thoracique et cardiovasculaire, centre hospitalier universitaire de Rennes, Pontchaillou, 2, rue Henri le Guilloux, 35203 Rennes cedex, France d UMR Inserm U1085, université de Rennes 1, Institut de recherche sur la santé, l’environnement et le travail (IRSET), 35000 Rennes, France b
i n f o
a r t i c l e
Historique de l’article : Disponible sur Internet le xxx Mots clés : Maladie de Still de l’adulte Endocardite non infectieuse Maladie auto-inflammatoire Végétation tricuspidienne Corticothérapie
r é s u m é Introduction. – La maladie de Still de l’adulte est une pathologie inflammatoire rare dont la triade diagnostique associe une fièvre hectique, un érythème maculo-papuleux et des arthralgies inflammatoires. Observation. – Nous présentons l’observation d’un patient âgé de 33 ans chez qui a été diagnostiquée une maladie de Still dans un contexte de fièvre, d’arthralgies de rythme inflammatoire et de manifestations oro-pharyngées. Lors du bilan, il a été retrouvé une végétation tricuspidienne rapidement progressive nécessitant une prise en charge chirurgicale en urgence associée à une corticothérapie systémique. L’analyse histologique conclut à une lésion fibrino-cruorique non infectieuse. Conclusion. – L’apparition d’une végétation tricuspidienne est une manifestation cardiaque rare de la maladie de Still de l’adulte. Il s’agit d’un diagnostic d’élimination avec nécessité d’éliminer une cause infectieuse notamment. ´ e´ Nationale Franc¸aise de Medecine ´ Interne (SNFMI). Publie´ par Elsevier Masson SAS. © 2018 Societ ´ ´ Tous droits reserv es.
a b s t r a c t Keywords: Adult-onset Still’s Disease (AODS) Endocarditis Systemic auto-inflammatory disease Corticoid Tricuspid vegetation
Introduction. – Adult-onset Still’s Disease is a rare multisystemic inflammatory disease characterized by fever, maculo-papular erythematous rash and arthralgia. Adult-onset Still’s disease is a diagnosis of exclusion. Case report. – We report the case of a 33 years old man, hospitalized for fever, arthralgia and throat manifestations, leading to Adult-onset Stills’s Disease diagnosis. Cardiac ultrasound revealed tricuspid vegetation. Once infectious causes were ruled out, the vegetation was related to Adult-onset Still’s Disease according to Fautrel and Yamaguchi criteria. The patient was treated with systemic high doses corticosteroid and cardiac surgery. Histological examination excluded infection and neoplasia, and showed cruoric and fibrinous vegetation. Conclusion. – Non-infectious endocarditis, with a vegetation made of cruoric and fibrinous material, is a rare complication of Adult-onset Still’s disease. ´ e´ Nationale Franc¸aise de Medecine ´ Interne (SNFMI). Published by Elsevier Masson SAS. © 2018 Societ All rights reserved.
∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (Q. Quelven). https://doi.org/10.1016/j.revmed.2018.04.016 ´ e´ Nationale Franc¸aise de Medecine ´ ´ ´ 0248-8663/© 2018 Societ Interne (SNFMI). Publie´ par Elsevier Masson SAS. Tous droits reserv es.
Pour citer cet article : Quelven Q, et al. Végétation tricuspidienne au cours d’une maladie de Still, une manifestation non infectieuse rare de lésion intracardiaque. Rev Med Interne (2017), https://doi.org/10.1016/j.revmed.2018.04.016
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1. Introduction La maladie de Still de l’adulte (MSA) est une pathologie systémique de diagnostic difficile et de cause inconnue, décrite pour la première fois en 1897 par Still. L’incidence de cette pathologie est évaluée entre 0,16 et 1 pour 100 000 habitants par an. La pathogénie semble associer une composante auto-inflammatoire et une activation lymphohistiocytaire. Les manifestations cliniques sont principalement une fièvre prolongée, des poly-arthralgies d’horaire inflammatoire, des lésions cutanées et des atteintes ORL à type de pharyngite [1]. Les manifestations cardiologiques sont classiquement une péricardite, voire une authentique myopéricardite. Cependant, quelques cas de lésions intracardiaques s’inscrivant dans le cadre d’une maladie de Still ont été décrits. Nous rapportons le cas d’un patient ayant présenté une lésion appendue à la valve tricuspide dans un contexte de maladie de Still de l’adulte. Une revue de la littérature a été réalisée. 2. Observation Un homme de 33 ans d’origine sénégalaise, vivant en France depuis 8 mois était admis en service de médecine interne d’un hôpital général pour l’apparition d’épisodes fébriles associés à des poly-arthralgies d’horaire inflammatoire et une odynophagie évoluant depuis six mois. Il avait pour seul antécédent une hépatite B chronique traitée par entecavir. Il n’existait pas d’intoxication alcoolo-tabagique, pas de prise de toxique intra-veineuse, ni de facteur de risque cardiovasculaire. L’examen clinique initial retrouvait une altération de l’état général avec une dénutrition, un indice de masse corporelle à 16, une perte de poids de 10 kg en 6 mois soit une baisse de 14 % du poids initial. Le patient était fébrile avec des arthromyalgies diffuses d’horaire inflammatoire. Il se plaignait d’une odynophagie associée à une pharyngite modérée. L’examen cardiorespiratoire était dans les limites de la normale, sans souffle cardiaque à l’auscultation. Il n’était pas noté de signe d’arthrite ou de synovite. Il n’existait pas d’aphtose buccale ou génitale, pas d’atteinte ophtalmologique. Les examens paracliniques initiaux mettaient en évidence un syndrome inflammatoire biologique avec une protéine C réactive (CRP) à 193 mg/L et un fibrinogène à 7,89 G/L, une leucocytose à 24 G/L avec 92 % de polynucléaires neutrophiles, et une ferritinémie à 15 655 g/L avec une ferritine glycosylée à 38 %. Les hémocultures revenaient négatives. Il n’y avait pas d’argument pour une pathologie infectieuse, néoplasique ou systémique alternative (Tableau 1). Un premier scanner thoraco-abomino-pelvien était réalisé et ne retrouvait pas d’anomalie, il n’était notamment pas objectivé d’adénopathie ou de foyer infectieux profond. L’échocardiographie cardiaque ne montrait pas d’anomalie particulière. Finalement, le diagnostic de maladie de Still était retenu, sur la base des critères de Fautrel et Yamaguchi (Tableau 2 et Tableau 3). Une corticothérapie par voie orale à la dose de un milligramme par kilogramme par jour (soit 60 mg/j) était introduite. Un déparasitage par Ivermectine était réalisé. Un mois plus tard, l’évolution favorable permettait la décroissance de la corticothérapie pour atteindre une posologie de 15 mg/j au troisième mois. La symptomatologie initiale réapparaissait alors. Devant cette corticodépendance, des bolus de corticoïdes étaient réalisés avec une efficacité sur la fièvre, mais persistance pas sur le syndrome inflammatoire biologique (CRP à 240 mg/L). Dans ce contexte de maladie de Still d’évolution non favorable sous corticoïdes, le patient était donc transféré au centre hospitalier universitaire de Rennes. Cliniquement, le patient était apyrétique, il n’était pas retrouvé de syndrome tumoral. L’examen cardiologique était sans
Tableau 1 Caractéristiques biologiques initiales pour la recherche de diagnostics différentiels. Paramètre biologique
Bilan initial
Normale
Leucocytes, (G/L) Polynucléaires neutrophiles, (G/L) Polynucléaire éosinophiles, (G/L) Lymphocytes, (G/L) Hémoglobine, (G/dL) Plaquettes, (G/L) CRP, (mg/dL) Fibrinogène, (g/L) Ferritinémie, (g/L) Ferritine glycosilée Créatininémie, (mol/L) CKD EPI, (mL/min) ASAT, (UI/L) ALAT, (UI/L) Gamma-GT, (UI/L) Phosphatase alcaline, (UI/L) LDH, (UI/L) Myélogramme ANCA FAN CH 50 Facteur rhumatoïde Anticorps anti-CCP TP, (%) TCA, (sec) Rapport TCA/témoin DRVVT, (dépistage/confirmation) Indice de Rosner, (%) Anticoagulant circulant Anti-phospholipide Électrophorèse des protéines plasmatiques Sérologie chlamydia trachomatis Sérologie mycoplasme Sérologie brucellose Sérologie coxiella Sérologie bartonelle Sérologie VIH Sérologie VHC Sérologie VHB Quantification de l’ADN du VHB Titre, (UI/mL) TPHA/VDRL Test Quantiféron BK tubage, (3 jours de suite) PCR Whipple Hémoculture TPHA/VDRL Test Quantiféron BK tubage, (3 jours de suite) PCR Whipple Hémoculture
24 22,7 0 0,77 15,6 358 193 7,89 15 655 38 88 99,8 25 30 25 90 273 Absence d’anomalie Négatif Négatif 58,3 Négatif Négatif 56 33 0,97 1,16 9 Négatif Négatif Hypergammaglobulinémie polyclonale Négative Négative Négative Négative Négative Négative Négative Infection chronique Détecté < 10 Négatif Négatif Négatifs Négative Négatives Négatif Négatif Négatifs Négative Négatives
4 à 10 1,8 à 7,5 0 à 0,8 1à4 13 à 17 150 à 400 <5 1,5 à 4 55 à 345 67 à 88 59 à 104 > 60 0 à 35 0 à 45 11 à 55 40 à 130 135 à 225
70 à 130 34 1 < 1,2
CRP : protéine C réactive ; CKD EPI : Chronic Kidney Disease – Epidemiology Collaboration ; ASAT : Aspartate amino transférase ; ALAT : Alanine amino transférase ; LDH : lactate déshydrogénase ; ANCA : anticorps anti-cytoplasme des polynucléaires neutrophiles ; FAN : facteur antinucléaire ; CH50 : complément hémolytique 50 ; anticorps anti-CCP : anticorps anti-peptides cycliques citrullinés ; TP : taux de prothrombine ; TCA : temps de céphaline activée ; DRVVT : temps de venin de vipère Russell dilué ; VIH : virus de l’immunodéficience humaine ; VHB : virus de l’hépatite B ; VHC : virus de l’hépatite C ; TPHA/VDRL : Treponema Pallidum Hemagglutinations Assay/Venereal Disease Research Laboratory ; BK : bacille de Koch ; PCR : polymerase chain reaction.
particularité, avec une auscultation non pathologique, sans souffle retrouvé. L’examen endobuccal ne retrouvait pas d’anomalie, il n’existait pas de signe d’arthrite. Il n’existait pas d’argument clinique en faveur d’une pathologie néoplasique ni d’argument évocateur d’une vascularite, notamment pas de neuropathie périphérique ni de lésion purpurique, pas d’anomalie du sédiment urinaire.
Pour citer cet article : Quelven Q, et al. Végétation tricuspidienne au cours d’une maladie de Still, une manifestation non infectieuse rare de lésion intracardiaque. Rev Med Interne (2017), https://doi.org/10.1016/j.revmed.2018.04.016
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Tableau 2 Critères de classification de la maladie de Still de l’adulte selon Fautrel et al. (2002) [2]. Critères majeurs Fièvre hectique > 39 ◦ C Arthralgies Érythème fugace Pharyngite Polynucléose neutrophile > 80 % Ferritine glycosylée < 20 % Critères mineurs Rash maculo-papuleux Leucocytose > 10G/L Maladie de Still de l’adulte si ≥ 4 critères majeurs ou 3 critères majeurs et 2 critères mineurs. Tableau 3 Critères de classification de la maladie de Still de l’adulte selon Yamaguchi et al. (1992) [3]. Critères majeurs Fièvre > 39 ◦ C pendant plus d’une semaine Arthralgies depuis plus de 2 semaines Éruption cutanée typique Leucocytose > 10 G/L avec > 80 % de polynucléaires neutrophiles Critères mineurs Douleurs pharyngées Adénopathie et/ou splénomégalie Absence d’anticorps antinucléaires et de facteur rhumatoïde Perturbations du bilan hépatique Critères d’exclusions Infections (sepsis, infection par le Virus d’Epstein–Barr) Néoplasie (lymphomes. . .) Maladie de système (PAN, PR. . .) Maladie de Still si ≥ 5 critères, dont ≥ 2 majeurs, en l’absence de critère d’exclusion. PAN : périartérite noueuse ; PR : polyarthrite rhumatoïde.
Fig. 1. Image échocardiographie d’une lésion intracardiaque appendue à la valve tricuspide.
Un nouveau bilan infectieux exhaustif ne retrouvait qu’une hépatite B chronique connue traitée par entecavir au long cours, avec une quantification de l’ADN du VHB inférieure à 10 UI/mL (< 1 log). Le dosage des polynucléaires éosinophiles était alors à 0 G/L, peu en faveur d’une helminthiase. Une nouvelle échocardiographie trans-thoracique était alors réalisée, mettant en évidence une lésion arrondie de 8 × 7 mm appendue à un cordage de la valve tricuspide. Le contrôle réalisé une semaine plus tard montrait une nette majoration de la taille de la végétation, mesurée de 29 mm de long et 12 mm d’épaisseur (Fig. 1). Le bilan infectieux était négatif, notamment des hémocultures répétées à culture prolongée. Les sérologies Antistreptolysine O (ASLO) et Anti-streptodornase B (ASDOR) n’ont pas été réalisées devant l’absence d’antécédent d’infection récente, une symptomatologie prolongée et des explorations cardiaques peu en faveur d’une atteinte cardiologique d’un rhumatisme articulaire aigu. Il n’y avait pas d’argument échocardiographique pour une myocardite associée.
Fig. 2. Photo de la lésion intracardiaque après exérèse chirurgicale. L’aspect des prélèvements est superposable et correspond à du matériel fibrino-cruorique, orientant vers un thrombus fibrino-cruorique. Absence de composante tumorale.
Un bilan morphologique avec un scanner corps entier et une tomographie par émission de positons (TEP-Scan) ne retrouvait pas d’autre anomalie, hormis une discrète fixation médullaire en rapport avec le syndrome inflammatoire. Le patient n’avait pas rec¸u d’antibiothérapie jusqu’à présent et après avis pris auprès du service d’infectiologie, il était décidé de ne pas introduire d’antibiothérapie probabiliste. La corticothérapie était suspendue et une prévention de l’insuffisance surrénale aiguë était instaurée. Une chirurgie d’exérèse avec conservation de la valve tricuspidienne était décidée. L’analyse anatomo-pathologique de la végétation confirmait sa nature fibrino-cruorique, orientant vers un thrombus, sans composante tumorale (Fig. 2). Les PCR Mycobacterium Tuberculosis, Tropheryma Whipplei et Bartonella Henselae effectuées sur la végétation revenaient négatives, ainsi que la recherche d’ARN 16 S. Il n’était pas retrouvé d’ADN fongique par ailleurs. Dans ce contexte de lésion de nature fibrino-cruorique, il était introduit une anticoagulation curative par héparine de bas poids moléculaire, secondairement relayée par un anticoagulant oral direct. Devant l’absence d’histoire thromboembolique familiale, les analyses paracliniques à la recherche d’une thrombophilie constitutionnelle n’ont pas été réalisées. L’évolution se compliquait malheureusement d’une insuffisance tricuspidienne majeure nécessitant un remplacement valvulaire par bioprothèse à deux semaines de la première chirurgie. Les suites ont été simples avec décision de reprendre une corticothérapie systémique à la dose de un milligramme par kilogramme et par jour. Il s’ensuivait une amélioration clinique avec disparition des arthralgies, maintien de l’apyrexie et amélioration de l’état général. Sur le plan biologique, le syndrome inflammatoire régressait avec une CRP < 5 mg/L à la sortie. À un an, la décroissance des corticoïdes est toujours en cours chez un patient dont l’évolution est tout à fait satisfaisante sur le plan clinique, biologique et cardiologique. 3. Discussion La MSA reste un diagnostic d’exclusion après élimination de nombreuses pathologies infectieuses, néoplasiques ou systémiques. Les critères de classification toujours en vigueur sont ceux de Fautrel et al. [2] ou ceux de Yamaguchi et al. [3]. Ici, les critères étaient suffisants pour retenir le diagnostic de maladie de Still (Tableaux 2–3). Cette maladie auto-inflammatoire complexe entre dans le cadre des inflammasomopathies (par l’intermédiaire de la voie IL-1) avec une efficacité importante des thérapies anti-IL1 [4]. L’atteinte cardiaque au cours de la MSA est, le plus souvent une péricardite, avec ou sans myocardite associée [5]. Quelques cas de végétations non infectieuses ont été décrits, notamment au
Pour citer cet article : Quelven Q, et al. Végétation tricuspidienne au cours d’une maladie de Still, une manifestation non infectieuse rare de lésion intracardiaque. Rev Med Interne (2017), https://doi.org/10.1016/j.revmed.2018.04.016
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niveau aortique et mitral [6–9]. Le cas décrit par Bulent M. et al. mentionnait une végétation aortique d’évolution défavorable après plusieurs lignes d’antibiotiques, traitée secondairement par corticothérapie systémique [6]. En 2005, l’équipe du Dr Jae Seung Lee décrivait le cas d’une patiente de 55 ans chez qui le diagnostic de MSA était retenu, avec présence d’un prolapsus mitral ayant nécessité un remplacement valvulaire [7]. En 1989, Taillan B. et al. présentaient le cas d’une femme de 39 ans qui présentait une insuffisance mitrale sévère ayant nécessité un remplacement valvulaire [8]. L’analyse histologique de la valve retrouvait une nécrose fibrinoïde avec infiltrat lymphohistiocytaire. Enfin, en 1995, le cas d’une patiente de 38 ans présentant une végétation aortique dans le cadre d’une MSA était décrit par le Dr Zenagui et son équipe [9]. L’évolution était favorable avec une corticothérapie sans traitement chirurgical. L’atteinte du cœur droit, comme celle rapportée ici, n’a été décrite qu’une seule fois à notre connaissance. Il s’agissait d’un patient de 17 ans, chez qui la découverte d’une végétation tricuspidienne dans un contexte de MSA avait fait introduire une corticothérapie systémique, l’évolution avait alors été favorable sans prise en charge chirurgicale [10]. Ici, aucune antibiothérapie probabiliste n’a été administrée. Cependant, devant l’évolution rapidement progressive de la lésion, une chirurgie d’exérèse a dû être réalisée, permettant par la même occasion d’obtenir une analyse anatomo-pathologique. Ces données histologiques n’ont, jusqu’à présent, jamais été rapportées. La nature fibrino-cruorique de ce thrombus évoque un phénomène pro-coagulant lors d’un état inflammatoire systémique majeur. Plusieurs pathologies systémiques peuvent être responsables de manifestations intracardiaques, notamment sous forme de végétations mimant une véritable endocardite infectieuse [11]. Les plus connues restent le syndrome des anticorps anti-phospholipides (SAPL) associé ou non à un lupus systémique (LS) et la maladie de Behc¸et. L’apparition d’un SAPL au cours d’un LS peut être responsable de ce type de thrombus et d’atteinte valvulaire, connus historiquement sous le nom d’endocardite de Libman–Sacks. La maladie de Behc¸et est une vascularite artérielle et veineuse qui peut présenter un tableau d’endocardite aiguë ou subaiguë, très rarement responsable d’emboles distaux. L’évolution est alors, le plus souvent, favorable sous anticoagulants efficaces associés à une immunosuppression.
4. Conclusion Le cas rapporté ici suggère que la découverte d’une végétation intracardiaque peut s’intégrer au tableau de la MSA. Néanmoins, dans un premier temps, une origine infectieuse doit être éliminée, d’autant plus que le patient est immunodéprimé. L’évolution favorable sous corticothérapie systémique après chirurgie d’exérèse, lorsqu’elle est nécessaire, est un argument en faveur de ce diagnostic. Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. Références [1] Gerfaud-Valentin M, Sève P, Hot A, Broussolle C, Jamilloux Y. Données actualisées sur la physiopathologie, les phénotypes et les traitements de la maladie de Still. Rev Med Interne 2015;36:319–27. [2] Fautrel B, Zing E, Golmard JL, Le Moel G, Bissery A, Rioux C, et al. Proposal for a new set of classification criteria for adult-onset Still disease. Medicine 2002;81(3):194–200. [3] Yamaguchi M, Ohta A, Tsunematsu T, Kasukawa R, Mizushima Y, Kashiwagi H, et al. Preliminary criteria for classification of adult Still’s disease. J Rheumatol 1992;19(3):424–30. [4] Jamilloux Y, Bourdonnay E, Gerfaud-Valentin M, Py BF, Lefeuvre L, Barba T, et al. Interleukine-1, inflammasome et maladies auto-inflammatoires. Rev Med Interne 2018;39:233–9. [5] Drouot MH, Hachulla E, Houvenagel E, Hatron PY, Flipo RM, Goullard L, et al. Complications cardiaques de la maladie de Still de l’adulte : de la péricardite à la tamponade parfois révélatrice. Rev Med Interne 1994;15: 740–3. [6] Bulent Ertugrul M, Guliz U, Serhan S. A rare presentation of endocarditis in Adult-onset Still’s disease in diagnosis of fever of unknown origin. J Rheumatol 2012;39(1):198–9. [7] Lee JS, Do IN, Kang DH, Joo SJ, Yoo B, Moon HB, et al. Adult onset Still’s disease as a cause of acute severe mitral and aortic regurgitation. Korean J Intern Med 2005;20(3):264–7. [8] Taillan B, Fuzibet JG, Vinti H, Castela J, Pesce A, Meyer P, et al. Adult onset Still’s disease complicated by endocarditis with fatal evolution. Clin Rheumatol 1989;8:541. [9] Zenagui D, De Coninck JP. Atypical presentation of adult Still’s disease mimicking acute bacterial endocarditis. Eur Heart J 1995;16:1448–50. [10] Saraux A, Binard A, Dechauvelle-Pensec V, Jobic Y, Jousse-Joulin S. Rightsided native endocarditis revealing AOSD. Ann Intern Med 2008;149(7): 517–9. [11] Chapelon Abric C. Manifestations cardiaques des maladies auto-immunes et vascularites. EMC – Cardiologie 2016;11(2):1–12.
Pour citer cet article : Quelven Q, et al. Végétation tricuspidienne au cours d’une maladie de Still, une manifestation non infectieuse rare de lésion intracardiaque. Rev Med Interne (2017), https://doi.org/10.1016/j.revmed.2018.04.016