Accidents thromboemboliques et voyages aériens

Accidents thromboemboliques et voyages aériens

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La Revue de médecine interne 32S (2011) S231–S232

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

Accidents thromboemboliques et voyages aériens Thrombo-embolic events and air travel F. Lapostolle ∗ , M. Grave , F. Adnet Samu 93, hôpital Avicenne, 125, rue de Stalingrad, 93009 Bobigny, France

i n f o

a r t i c l e

Historique de l’article : Disponible sur Internet le 22 octobre 2011

La question de la prophylaxie des accidents thromboemboliques liés aux voyages aériens est une véritable question de santé publique. Plus de deux milliards de personnes ont voyagé en avion dans le monde en 2006. La relation entre accidents thromboemboliques et voyages aériens a été longtemps discutée [1]. Cette relation repose en premier lieu sur des arguments physiopathologiques. Les éléments de la triade de Virshow : lésions endothéliales, stase veineuse et modifications sanguines qui sont à l’origine des accidents thromboemboliques semblent favorisés lors des voyages en avion [2]. Plusieurs études ont confirmé cette relation. Sur plus de 135 millions de passagers provenant de plus de cent pays, nous avons rapporté 56 embolies pulmonaires graves [3]. La fréquence était de 0,4 cas par million de passagers. Ces résultats ont été confirmés par une étude espagnole de méthodologie similaire [4]. La fréquence atteignait 4,8 cas par million pour les vols de plus de 10 000 km [3]. L’incidence réelle des événements est sous-estimée : les patients avec une thrombose veineuse profonde ou une embolie pulmonaire non grave, un événement survenant secondairement ou un arrêt cardiaque n’étant pas considérés. Si le risque lié à la durée du voyage est clairement établi, le rôle des autres facteurs de risque demeure incertain. Le risque semble augmenté chez les femmes [5]. Le rôle de la classe du voyage, des anomalies de l’hémostase ou de l’hypoxie-hypobarie lié à l’avion n’est pas connu [6,7]. La stratégie prophylactique repose sur trois types de mesures. Toutes n’ont pas été solidement validées. Les mesures comportementales (niveau 1) reposent sur une bonne hydratation, l’abstinence de consommation de sédatif, d’alcool et de tabac, le port de vêtements ne gênant pas la circulation sanguine, les mouvements réguliers des membres inférieurs et la déambulation régulière dans l’avion [8]. Le bénéfice réel de ces mesures n’a pas été démontré. Néanmoins, ces mesures qui ne sont

pas dispendieuses et ne présentent aucun risque sont largement recommandées [8]. Les mesures physiques (niveau 2) reposent sur le port de chaussettes de contention (compression de 10–20 mm Hg et 20–40 mm Hg en cas d’antécédent d’insuffisance veineuse). Il s’agit de la seule méthode prophylactique dont l’intérêt soit établi. Cette méthode de prévention étant d’un coût limité et sans risque, elle est largement recommandée. La question du recours aux mesures pharmacologiques (niveau 3) reste posée. Les preuves de l’intérêt du recours à un traitement prophylactique par héparine de bas poids moléculaire semblent insuffisantes pour en recommander un usage autrement qu’au cas par cas. L’étude de la balance bénéfice-risque prend ici tout son sens. Ces mesures sont recommandées pour les patients ayant des facteurs de risque. Néanmoins, il nous semble que les recommandations ne prennent pas suffisamment en considération le voyage lui-même [8]. Pourtant, le risque lié au voyage par lui-même doit inciter à élargir les indications de la prophylaxie au risque lié au voyage luimême. Aussi, proposons-nous une combinaison des deux sources de risque. . Patient Prophylaxie Voyage < 5000 km 5000 à 7500 km > 7500 km

Risque faible

Risque modéré

Risque élevé

Niveau 1 Niveau 1 Niveau 2 Niveau 2

Niveau 2 Niveau 2 Niveau 3 Niveau 3

Niveau 3 Niveau 3 Niveau 3

Déclaration d’intérêts ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (F. Lapostolle).

Les auteurs n’ont pas transmis de déclaration de conflits d’intérêts.

0248-8663/$ – see front matter © 2011 Société nationale française de médecine interne (SNFMI). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.revmed.2011.09.009

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F. Lapostolle et al. / La Revue de médecine interne 32S (2011) S231–S232

Références [1] Davis RM. Air travel and risk of venous thromboembolism. Pulmonary embolism after air travel may occur by chance alone. BMJ 2001;322:1184. [2] Virchow R. Gesammelte Abhandlungen zur wissenschaftlischen. Frankfurt: Meidinger ; 1856. p. 227. [3] Lapostolle F, Surget V, Borron SW, et al. Severe pulmonary embolism associated with air travel. N Engl J Med 2001;345:779–83. [4] Perez-Rodriguez E, Jimenez D, Diaz G, et al. Incidence of air travelrelated pulmonary embolism at the Madrid-Barajas airport. Arch Intern Med 2003;163:2766–70.

[5] Lapostolle F, Le Toumelin P, Chassery C, et al. Gender as a risk factor for pulmonary embolism after air travel. Thromb Haemost 2009;102:1165–8. [6] Toff WD, Jones CI, Ford I, et al. Effect of hypobaric hypoxia, simulating conditions during long-haul air travel, on coagulation, fibrinolysis, platelet function, and endothelial activation. JAMA 2006;295:2251–61. [7] Aryal KR, Al-Khaffaf H. Venous thromboembolic complications following air travel: what’s the quantitative risk? A literature review. Eur J Vasc Endovasc Surg 2006;31:187–99. [8] Schobersberger W, Toff WD, Eklof B, et al. Traveller’s thrombosis: international consensus statement. Vasa 2008;37:311–7.