Analyse des indicateurs de procédure lors des accidents de la voie publique à victimes multiples (AVM) en milieu urbain

Analyse des indicateurs de procédure lors des accidents de la voie publique à victimes multiples (AVM) en milieu urbain

Journal Europe ´en des Urgences (2010) 23, 38—42 ARTICLE ORIGINAL ´dure lors des Analyse des indicateurs de proce accidents de la voie publique ` a ...

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Journal Europe ´en des Urgences (2010) 23, 38—42

ARTICLE ORIGINAL

´dure lors des Analyse des indicateurs de proce accidents de la voie publique ` a victimes multiples (AVM) en milieu urbain Analyse of procedure indicators in the accidents with multiple victims in urban area M. Daghfous *, A. Zouari, C. Ghanem, A. Jaafar, S. Jedidi, H. Belakhdar, S. Abdelmoumen, S. Dridi Samu 01, Tunis, Tunisie Accepte´ le 20 mai 2010

KEYWORDS Prehospital care; Mass casualties; Quality of care

Summary The aim of our study was to determine the epidemiological profile of accidents with multiple victims during the year 2007 and pick up the dysfunctions of the organization of intervention and the victim’s management. Patients and method. — It is a cohort prospective study that deals with mass casualty accidents managed by the SMUR teams of the SAMU 01 of Tunis during the year 2007. Data have been provided by the regulation notes of the SAMU 01. We define a multiple victim’s accident as an accident leading to five victims or more. At the SAMU 01, we have established an adapted a simplified procedure of alert and response that is carried out in case of multiple casualties accident. Procedure dysfunctions are systematically analyzed after each accident. Results. — We have managed 43 accidents with multiple victims between January the first and December the 31st 2007. The total number of victims was 419 (average = 9.74 per accident) and 28 deaths recorded on the scene of accidents. After the analysis of the data related to these interventions, the quality committee identified the following dysfunctions: Delayed alert from fire- man operating center. Absence of a referent physician or specific phone number in the emergency services in order to receive the first call from the regulation centre (CRRA). That results in delayed information of an imminent massive affluence of many victims to the emergency services. Delayed access to the accident scene by the SMUR teams because of the road traffic. Different attitudes are being established in order to correct all these dysfunctions especially by elaborating an immediate alert system involving paramedics and radio-communication means with emergency services.

* Auteur correspondant. Centre d’assistance me ´dicale urgente, 10, rue Aboulkacem Echabbi, Montfleury 1008, Tunisie. Adresse e-mail : [email protected] (M. Daghfous). 0993-9857/$ — see front matter # 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve ´s. doi:10.1016/j.jeur.2010.05.006

Analyse des indicateurs de proce ´dure lors des accidents de la voie publique

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Conclusion. — Accidents with multiple victims need a permanent follow-up of procedure indicators in order to enhance the medical care quality and consequently the management of the casualties. # 2010 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

´S MOTS CLE Soins pre ´hospitaliers ; Victimes multiples ; Qualite ´ des soins

´sume ´ Les accidents a Re ` victimes multiples (AVM) sont des accidents ayant pour conse ´quence un nombre de victimes tel qu’il perturbe le fonctionnement normal des structures de sante ´. Des proce ˆtre mises en place pour optimiser la prise en ´dures pre ´cises et reproductibles doivent e charge des victimes. Le but de notre e ´tude a e ´te ´ de de ´terminer le profil e ´pide ´miologique des accidents de la voie publique (AVP) a ` victimes multiples survenus au cours de l’anne ´e 2007 et de de ´terminer les dysfonctionnements de l’organisation de l’intervention et de la prise en charge des victimes. ´thode. — Il s’agit d’une e Patients et me ´tude prospective descriptive a ` partir des fiches de re a victimes multiples au cours de l’anne ´gulation du Samu 01 qui a porte ´ sur les AVP ` ´e 2007 qui ont e ´te ´ pris en charge par les e ´quipes SMUR du Samu 01. Nous avons de ´fini un AVP a ` victimes multiples un accident enregistrant cinq victimes et plus. Au Samu 01, nous avons e ´labore ´ une proce ´dure simplifie ´e d’alerte et de re ´ponse adapte ´e aux AVM. Cette proce ´dure est mise en œuvre lors de chaque AVM. Les dysfonctionnements et les e ´carts de proce ´dure sont syste ´matiquement analyse ´s apre `s chaque AVM. ´sultats. — Nous avons pris en charge 43 AVP a Re ´cembre ` victimes multiples du 1er janvier au 31 de 2007. Le nombre total de victimes a e ´te ´ de 419 blesse ´s (moy = 9,74/accident) et 28 de ´ce `s constate ´s sur les lieux de l’accident. L’analyse par le comite ´ qualite ´ du service des donne ´es relatives a ` ces interventions a identifie ´ les dysfonctionnements suivants : alerte retarde ´e de la part de la Protection Civile ; absence d’un me ´decin re ´fe ´rent identifie ´ et d’un nume ´ro de te ´le ´phone pre ´cise ´a ` l’avance aux services d’accueil des urgences pour recevoir l’appel initial du CRRA ce qui se traduit par un retard d’information des SAU concernant l’e ´ventualite ´ d’un afflux imminent de nombreux blesse ´s ; retard d’acce `s au site de l’accident des moyens SMUR envoye ´s en renfort du fait des difficulte ´s de circulation aux abords du site ; des mesures correctrices sont en train d’e ˆtre mis en œuvre pour corriger ces dysfonctionnements notamment la mise en place d’un syste `me d’alerte imme ´diat et re ´ciproque avec la Protection Civile et de moyens de communications radio avec les SAU. Conclusion. — Les AVM ne ´cessitent un suivi permanent des indicateurs de proce ´dure pour ame ´liorer de fac¸on permanente la qualite ´ des soins et optimiser ainsi la prise en charge des victimes. # 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s.

1. Introduction Les accidents a ` victimes multiples (AVM) sont des accidents ayant pour conse ´quence un nombre de victimes tel qu’il perturbe le fonctionnement normal des structures de sante ´ [1]. Il s’agit d’accidents apparente ´s a ` des catastrophes a ` effets limite ´s [2]. En effet, le terme de « catastrophe » est impropre pour de ` l’acce ´signer ce type d’accident dans la mesure ou `s au site n’est pas compromis et les structures de secours et le syste `me de sante ´ sont imme ´diatement fonctionnels quoique pouvant e ˆtre de ´passe ´s par le nombre de victimes. La gestion me ´dicale pre ´hospitalie `re des victimes d’AVM impose une organisation rigoureuse et une coordination entre les diffe ´rentes structures de secours et de soins. Ainsi, l’absence de proce ´dure spe ´cifique pour les AVM va retentir aussi bien sur les soins en pre ´hospitalier (sous-me ´dicalisation et retard de soins) que sur la prise en charge hospitalie `re des blesse ´s (mauvaise orientation et inade ´quation du plateau technique). Des proce ˆtre ´dures pre ´cises et reproductibles doivent e mises en place pour optimiser la prise en charge des victimes. Le but de cette e ´tude a e ´te ´ de de ´terminer le profil e ´pide ´miologique des accidents de la voie publique (AVP) a ` victimes multiples survenus au cours de l’anne ´e 2007 et de

de ´terminer les dysfonctionnements de l’organisation de l’intervention et de la prise en charge des victimes par les e ´quipes SMUR du Samu 01 de Tunis.

´thodes 2. Patient et me Il s’agit d’une e ´tude prospective descriptive a ` partir des fiches de re ´gulation du Samu 01 de Tunis qui a porte ´ sur les AVP a ` victimes multiples au cours de l’anne ´e 2007 qui ont e ´te ´ pris en charge par les e ´quipes SMUR du Samu 01. Nous avons de a victimes multiples un accident ´fini un AVP ` enregistrant cinq victimes et plus puisque notre capacite ´ de re ´ponse est actuellement de quatre unite ´s mobiles de re ´animation re ´parties sur trois SMUR dans le grand Tunis (environ quatre millions d’habitants). Nous avons e ´labore ´ une proce ´dure simplifie ´e d’alerte et de re ´ponse adapte ´e aux AVM. Cette proce ´dure est mise en œuvre lors de chaque AVM. Les dysfonctionnements et les e ´carts de proce ´dure sont syste ´matiquement analyse ´s apre `s chaque AVM lors du staff du matin au lendemain de l’accident. Cette proce ´dure est affiche ´e de fac¸on visible dans le Centre de re ´ception et de re ´gulation des appels (CRRA) du Samu 01. Cette proce ´dure concerne aussi bien l’alerte avec sa re ´percussion au niveau re ´gional, la gestion des victimes sur

40 les lieux de l’accident et le transfert des victimes aux diffe ˆpitaux. ´rents ho

2.1. Alerte La proce ´dure de l’alerte suit les e ´tapes suivantes :  re ´ception de l’appel pour un accident a ` victimes multiples ;  ve ´rification aupre `s de la salle d’ope ´ration de la protection civile ;  envoi du SMUR le plus proche et du ve ´hicule le ´ger du SMUR de Tunis avec a ` bord un me ´decin rompu a ` ce genre de situation ayant a ` sa disposition dans le ve ´hicule des « fiches d’examen et d’orientation des blesse ´s en situation d’exception » et un dossard distinctif. Ce me ´decin aura la charge de diriger les « soins me ´dicaux » sur les lieux de l’accident (l’e ´quivalent du « Directeur des soins me ´dicaux » du plan rouge) ;  avertir le chef de service du Samu 01 ;  avertir les SMUR ;  avertir le sous-directeur de l’unite ´ de me ´decine d’urgence a ` la Direction ge ´ne ´rale de la sante ´;  avertir le Directeur re ´gional de la sante ´ concerne ´;  avertir les diffe ´rents services d’accueil des urgences du grand Tunis.

M. Daghfous et al. traumatologie orthope ˆpital ´dique et les enfants vers l’ho d’enfants. Les blesse ´s le ´gers sans atteinte organique visible seront dirige ´s en dernier vers les urgences les moins sollicite ´es. Le moyen de transport d’une victime donne ´ sera de ´cide ´ par le directeur des soins me ´dicaux en fonction de l’e ´tat du malade et des moyens disponibles ou imme ´diatement mobilisables. Ainsi, les victimes pre ´sentant une de ´tresse vitale seront transfe ´re ´es par un moyen SMUR ou, le cas e ´che ´ant, par une ambulance de la Protection Civile avec a ` bord un me ´decin du Samu avec les moyens ne ´cessaires a ` la prise en charge du malade. Les autres victimes seront transporte ´es indiffe ´remment par un moyen SMUR ou de la Protection Civile vers la destination de ´cide ´e par le me ´decin re ´gulateur.

´e de l’alerte 2.4. La leve La leve ´e de l’alerte sera communique ´e au CRRA par le DSM apre `s l’acheminement de toutes les victimes. Le me ´decin re ´gulateur re ´percutera l’information notamment sur les SMUR et les services d’accueil des urgences.

2.5. Identification et analyse des dysfonctionnements

2.2. Examen et triage De `s l’arrive ´e sur les lieux de l’accident, le me ´decin qui dirige les soins me ´dicaux fournit un bilan primaire concernant le nombre re ´el des victimes et les besoins en renfort aussi bien en moyens humains et mate ´riels en tenant compte des moyens de la Protection Civile de ´ja ` en place ou potentiellement mobilisables. Il va aussi demander aux agents de la protection civile d’ame ´nager un lieu de rassemblement des victimes le ´ge `rement en retrait du site de l’accident et proche du site de stationnement des ambulances. Le triage se fera essentiellement en fonction de la se ´ve ´rite ´ de l’atteinte (respiratoire, he ´modynamique et neurologique), du nombre de victimes et des ressources disponibles ou imme ´diatement mobilisables. Ce triage aura pour objectif essentiel de hie ´rarchiser la prise en charge me ´dicale sur place et le transfert des victimes.

2.3. Transfert et orientation L’identite ´ et le bilan le ´sionnel initial sont note ´s par le me ´decin SMUR en charge de la direction des soins me ´dicaux sur la « fiche d’examen et d’orientation des blesse ´s en situation d’exception ». Ces donne ´es sont transmises a ` la re ´gulation au fur et a ` mesure pour que le me ´decin re ´gulateur organise le transfert des blesse ´s, en donnant le maximum d’informations aux me ˆpitaux ´decins des urgences des ho d’accueil. Le choix de l’orientation des victimes va se faire en fonction du bilan initial, du plateau technique disponible et du nombre de victimes par ho ˆpital. Ainsi, sur le « Grand Tunis », les polytraumatise ´s sont transfe ´re ´s en priorite ´ et seront dispatche ˆpitaux ge ´s entre les ho ´ne ´raux, viennent ensuite les victimes pre ´sentant des le ´sions osseuses sans atteinte vitale qui seront achemine ´es vers les centres de

Un « de ´briefing » syste ´matique apre `s chaque AVM est re ´alise ´ lors du staff du matin le lendemain de chaque intervention pour AVM. Les dysfonctionnements sont identifie ´s ainsi que leur cause directes et indirectes. Un rapport est re ´dige ´ et envoye ´a ` la Direction ge ´ne ´rale de la sante ´.

´sultats 3. Re Du 1er janvier au 31 de ´cembre 2007, le Samu 01 a eu a ` ge ´rer 1459 AVP dont 43 a ` victimes multiples, soit 2,94 % de l’ensemble des AVP. La proce ´dure spe ´cifique pour la gestion des AVM a e ´te ´ de ´clenche ´e dans tous les cas de `s la re ´ception de la premie `re alerte. La premie `re alerte a e ´te ´ donne ´e a ` la salle de re ´ception et de re ´gulation des appels du Samu par la salle d’ope ´ration de la protection civile dans 35 cas et par un citoyen dans huit cas. L’analyse de la re ´partition horaire, journalie `re et mensuelle de survenue d’AVM n’a pas montre ´ de recrudescence particulie `re permettant d’identifier des pe ´riodes a ` risque particulier. Les circonstances de survenue des AVM ont e ´te ´ une collision entre deux ou plusieurs voitures dans 17 cas, une collision entre un camion et plusieurs voitures dans neuf cas, un de ´rapage de bus dans cinq cas et un accident ferroviaire dans deux cas (de ´raillement d’un train a ` l’entre ´e d’une gare et de ´raillement d’une rame de me ´tro). Le nombre total de victimes a e ´te ´ de 419 blesse ´s (moy = 9,74/accident) et 28 de ´ce `s constate ´s sur les lieux de l’accident. Toutes les victimes ont e ´te ´ prises en charge sur les lieux de l’accident puis transfe ´re ´es vers les structures d’accueil en fonction du bilan le ´sionnel initial. Le transfert a e ´te ´ fait vers

Analyse des indicateurs de proce ´dure lors des accidents de la voie publique les six ho ˆpitaux ge ´ne ´raux de Tunis pour 375 victimes, vers les deux centres de traumatologie orthope ´dique pour 30 victimes et vers une urgence pe ´riphe ´rique ou une clinique prive ´e pour six victimes. Huit victimes ont refuse ´ le transfert vers une structure d’accueil. L’analyse des donne ´es relatives a ` chacune de ces interventions a identifie ´ les dysfonctionnements suivants :  alerte retarde ´e de la part de la Protection Civile ;  absence d’un me ´decin re ´fe ´rent identifie ´ et d’un nume ´ro de te ´le ´phone pre ´cise ´a ` l’avance aux services d’accueil des urgences pour recevoir l’appel initial du CRRA ce qui se traduit par un retard d’information des SAU concernant l’e ´ventualite ´ d’un afflux imminent de nombreux blesse ´s ;  retard d’acce `s au site de l’accident des moyens SMUR envoye ´s en renfort du fait des difficulte ´s de circulation aux abords du site. Des mesures correctrices sont en train d’e ˆtre mis en œuvre pour corriger ces dysfonctionnements notamment la mise en place d’un syste `me d’alerte imme ´diat et re ´ciproque avec la Protection Civile et de moyens de communications radio avec les SAU. L’e ´valuation de l’impact de ces mesures correctrices sur l’ame ´lioration de la qualite ´ de la gestion des AVP a ` victimes multiples est en cours.

4. Discussion Au Samu 01, nous avons conside ´re ´ les AVM comme ceux qui occasionnent plus de cinq victimes puisque au-dela ` de ce chiffre, nos capacite ´s de re ´ponse en termes de SMUR et donc en soins pre ´hospitaliers se trouvent de ´passe ´es. Le Samu 01 de Tunis couvre actuellement les quatre gouvernerats du district du « Grand Tunis » et dispose en permanence dans les diffe ´rents SMUR de quatre unite ´s mobiles hospitalie `res ainsi que d’une e ´quipe ope ´rant sur un ve ´hicule le ´ger. La capacite ´ d’accueil hospitalie `re est constitue ˆpitaux ge ´e de six ho ´ne ´raux (HCN, la Rabta, HHT, HMSlim, HMPIT et l’H des FSI), de deux centres de traumatologie orthope ˆpital ge ´dique (COKS et HAO) et d’un ho ´ne ´ral pe ´diatrique. Ainsi, au cours de l’anne ´e 2007, nous avons eu a ` ge ´rer 1459 AVP dont 43 a ` victimes multiples (2,94 % des AVP et un peu moins d’un AVM par semaine). L’ampleur de l’accident, le nombre de victimes et la capacite ´ de re ´ponse de soins en pre ´hospitalier et en intrahospitalier sont des e ´le ´ments importants pour de ´finir et classer les AVM. Ces e ´le ´ments sont pris en compte par la classification Potential Injury Creating Event (PICE) qui identifie les caracte ´ristiques d’un AVM et la capacite ´ de re ´ponse [3]. Pre ´fixes A (nature de l’accident) Statique Dynamique B (environnement) Contro ˆle ´ Perturbe ´ Paralyse ´

PICE Stage 0 I 0 I II

C (nature de la re ´ponse) Locale Re ´gionale Nationale Internationale

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0 I II III

La sommation de ces items simples permet de classer les AVM en quatre grades avec pour corollaire l’estimation du type de re ´ponse : grade 0 : pas de mobilisation de ressources supple ´mentaires ; grade I : mobilisation de toutes les ressources re ´gionales ; grade II : mobilisation de toutes les ressources nationales ; grade III : demande d’aide exte ´rieure. Ainsi, le terme de « catastrophe » s’applique aux grades II et III qui sont rares, voire exceptionnels, alors que les grades 0 et I correspondent a ` un large e ´ventail de situations d’AVM notamment dans les grandes agglome ´rations urbaines ou sur les grands axes routiers tel que les accidents majeurs de la voie publique, objet de cette e ´tude, les incendies et autres intoxications collectives. La fre ´quence des AVM est difficile a ` estimer vu que leur de ´finition est base ´e non seulement sur la nature et l’ampleur de l’accident lui-me ˆme mais aussi sur la capacite ´ de re ´ponse. Ainsi, un AVP survenant a ` Tunis et occasionnant quatre victimes est classe ´ grade 0 (accident statique, ne perturbe pas l’environnement et la re ´ponse est locale au vu des structures de secours et de sante ´ disponibles) alors que le me ˆme accident survenant dans une petite ville d’un autre gouvernerat est classe ´ grade I et donc conside ´re ´ a ` victimes multiples (mobilisation de ressources re ´gionales) ne ´cessitant une organisation et une re ´ponse des structures de sante ´ qui de ´passent les capacite ´s des structures de sante ´ locales. Il est, par ailleurs difficile de comparer la fre ´quence de ces AVM avec les autres Samu en Tunisie ou en Europe du fait d’une diffe ´rence e ´vidente de la capacite ´ de re ´ponse qui rend toute comparaison illusoire. La gestion me ´dicale pre ´hospitalie `re des victimes d’AVM impose une organisation rigoureuse et une coordination entre les diffe ´rentes structures de secours et de soins. Ainsi, l’absence de proce ´dure spe ´cifique pour les AVM va retentir aussi bien sur les soins en pre ´ hospitalier (sous-me ´dicalisation et retard de soins) que sur la prise en charge hospitalie `re des blesse ´s (mauvaise orientation et inade ´quation du plateau technique). L’application du « plan rouge » destine ´ au secours d’un grand nombre de victimes en situation de « catastrophe » semble inapproprie ´ et surdimensionne ´ pour ce type d’accidents [4]. L’application rigoureuse du « plan rouge » a ` Paris lors des attentats terroristes de 1986 a eu pour conse ´quence une mobilisation excessive et inutile de moyens humains et mate ´riels et une lenteur dans l’acheminement des victimes graves vers les centres hospitaliers [5]. En revanche, l’application de l’e ´vacuation rapide et syste ´matique des blesse ´s sans proce ´dure de soins a montre ´ ses limites lors de plusieurs attentats au Royaume-Uni et en Italie [6] ou ` les ho ˆpitaux ont e ´te ´ submerge ´s de victimes ne ne ´cessitant pas de soins. Ainsi, la mise en place de proce ´dures d’alerte et de coordination plus simples a ` mettre en œuvre et limite ´es dans

42 le temps est plus approprie ´ et permet une re ´ponse adapte ´e aux besoins. Au Samu 01 de Tunis, nous avons e ´labore ´ une proce ´dure simplifie ´e d’alerte et de re ´ponse adapte ´e aux AVM. Cette proce ´dure a e ´te ´ applique ´e lors de chaque AVM. Cette proce ´dure simplifie ´e est diffe ´rente du « plan rouge » en plusieurs points notamment pour l’organisation des soins me ´dicaux sur les lieux de l’accident. Ainsi, le caracte `re particulier de ces accidents catastrophiques a ` effet limite ´ rend illusoire l’installation d’un « poste me ´dical avance ´ » tel qu’il est conc¸u en situation de « catastrophe ». Au maximum, le DSM va demander aux agents de la protection civile d’ame ´nager un lieu de rassemblement des victimes le ´ge `rement en retrait du site de l’accident et proche du site de stationnement des ambulances. Le transfert des victimes va se faire en fonction du bilan le ´sionnel initial, du plateau technique disponible dans la structure d’accueil et aussi du nombre de victimes par ho ˆpital de destination. Il est, par ailleurs, admis que cette prise en charge me ´dicale sur les lieux de l’accident aussi bien au niveau des soins que de la de ´cision de transfert permet de diminuer le nombre de malades transfe ´re ´s « inutilement » vers les ho ˆpitaux d’accueil [7,8]. Il est impe ´ratif aussi, de de ´terminer les dysfonctionnements inhe ´rents a ` chaque intervention pour ame ´liorer la qualite ´ des soins me ´dicaux. Cette e ´valuation doit utiliser une de ´marche d’ame ´lioration continue de la qualite ´ des soins pour pouvoir prendre des mesures correctrices adapte ´es aux proble `mes identifie ´s [9,10]. Ainsi, Apre `s analyse pour chaque AVM, des diffe ´rents indicateurs de proce ´dure (de ´lai d’alerte, de ´lai de re ´ponse, dure ´e d’intervention, taux de transfert vers la structure adapte ´e. . .), les dysfonctionnements les plus retrouve ´s sont :  l’alerte retarde ´e de la part des agents de la Protection Civile qui appellent apre `s l’arrive ´e de leur unite ´ sur les lieux de l’accident ce qui retarde l’intervention du Samu et par conse ´quent la prise en charge adapte ´e des blesse ´s graves. Ce retard d’alerte se traduit aussi par le transfert d’un nombre important de blesse ´s vers une seule structure hospitalie ˆme l’arrive `re par la PC avant me ´e des moyens SMUR perturbant ainsi le fonctionnement des services des urgences et obligeant parfois a ` un transfert secondaire d’un ou plusieurs blesse ˆpital dis´s vers un ho posant d’un plateau technique adapte ´ au bilan le ´sionnel du malade ;  l’absence d’un me ´decin re ´fe ´rent identifie ´ et d’un nume ´ro de te ´le ´phone pre ´cise ´a ` l’avance aux services d’accueil des urgences pour recevoir l’appel initial du CRRA ce qui se traduit par un retard d’information des SAU concernant l’e ´ventualite ´ d’un afflux imminent de nombreux blesse ´s ;  le retard d’acce `s au site de l’accident des moyens SMUR envoye ´s en renfort du fait des difficulte ´s de circulation aux abords du site ;  le de ´lai de mise en œuvre d’e ´quipes supple ´mentaires par le Samu en cas de besoin obligeant les moyens SMUR a ` faire des alle ˆpitaux ´es-retour entre le site de l’accident et les ho d’accueil. Des mesures correctrices ont e ´te ´ mises en œuvre pour corriger ces dysfonctionnements :

M. Daghfous et al.  mise en place d’une proce ´dure commune d’alerte re ´ciproque et imme ´diate entre la Protection Civile et le Samu 01 en cas d’AVM ou de situations pouvant pre ´sager d’un nombre important de victimes (accidents ferroviaires, bus, plus de 4 voitures. . .) ;  information du CRRA du Samu 01 par la protection civile de la destination des victimes transporte ´es avant l’arrive ´e des moyens SMUR ;  mise en place de moyens de communication radio entre le Samu 01 et les SAU des ho ˆpitaux ge ´ne ´raux. L’e ´valuation de l’impact de ces mesures correctrices sur l’ame ´lioration de la qualite ´ de la gestion des AVP a ` victimes multiples est en cours quoique nous ayons note ´ une ame ´lioration sensible de ces indicateurs de proce ´dure lors de l’analyse des AVM survenus en 2008.

5. Conclusion Les AVM n’e ´tant pas rares, il convient d’assurer une organisation optimale et rigoureuse ainsi que des proce ´dures communes de coordination entre le Samu et les diffe ´rentes structures de secours en pre ´hospitalier, d’une part, et entre le Samu et les services d’accueil des urgences, d’autre part. Cette organisation, diffe ´rente en plusieurs points de celle de la situation de catastrophe, permettra d’optimiser aussi bien la prise en charge me ´dicale des victimes que les moyens humains et mate ´riels mises en œuvre. Ainsi seront e ´vite ´es les situations de mise en alerte intempestive des structures de sante ´ pour des accidents mineurs mais aussi les situations d’afflux inopine ´ d’un grand nombre de victimes vers un seul service d’accueil des urgences.

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