Analyse isocinétique de la balance des rotateurs de l’épaule chez des handballeuses féminines de haut niveau

Analyse isocinétique de la balance des rotateurs de l’épaule chez des handballeuses féminines de haut niveau

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ScienceDirect www.sciencedirect.com Journal de Traumatologie du Sport 32 (2015) 15–21

Mémoire

Analyse isocinétique de la balance des rotateurs de l’épaule chez des handballeuses féminines de haut niveau Isokinetic analysis of shoulder rotator balance in high-level female handballers F. Lagniaux 32, rue C.-Perrin, 93380 Pierrefitte, France Disponible sur Internet le 10 f´evrier 2015

Résumé Cette étude, menée sur un échantillon de 20 personnes, porte sur l’intérêt d’une analyse isocinétique, à visée préventive, de la balance des rotateurs de l’épaule chez des handballeuses de haut niveau. Les différents résultats obtenus semblent montrer que cette analyse, difficile à réaliser en raison de nombreux biais possibles et d’un manque de consensus sur les protocoles à utiliser, n’apporte pas d’éléments majeurs en faveur de son utilisation dans le champ de la prévention. © 2015 Publi´e par Elsevier Masson SAS. Mots clés : Balance des rotateurs ; Épaule ; Handball ; Isocinétique ; Prévention

Abstract This study, conducted on a sample of 20 people, wearing a reflection on the value of isokinetic analysis for preventive, the balance of the rotator cuff at the top-level handball. The different results obtained suggest that this analysis, difficult to achieve due to many possible biases and lack of consensus on the protocols to use, does not provide major components for use in the field of prevention. © 2015 Published by Elsevier Masson SAS. Keywords: Balance cuff; Shoulder; Handball; Isokinetic; Prevention

1. Introduction L’équilibre des muscles du complexe scapulo-huméral reste fondamental dans une optique de prévention des pathologies de l’épaule au sein des sports de lancer et tout particulièrement au handball. Cette discipline sollicite l’épaule sur l’ensemble de ses composantes de stabilité et de mobilité. Ce sport à haute vélocité connaît un nombre croissant de problématique de cette articulation liée aux contraintes imposées. Dans le handball féminin, on retrouve un taux de blessures relativement faible puisque le risque traumatique se situe entre 0,0014 et 0,0025 accidents par heure de pratique en équipe nationale (données de la Fédération franc¸aise de handball). Les Adresse e-mail : [email protected] http://dx.doi.org/10.1016/j.jts.2015.01.003 0762-915X/© 2015 Publi´e par Elsevier Masson SAS.

pathologies du membre supérieur représentent environ 14 % de tous les traumatismes. L’intérêt est grandissant quant à l’analyse du ratio des rotateurs de l’épaule et son impact sur le risque de décentrage articulaire antéro-supérieur de la tête humérale, à l’origine de conflits sous-acromiaux, sources de pathologies inflammatoires et/ou dégénératives. Parmi les outils permettant la mise en évidence de ce déséquilibre, l’isocinétisme est le plus utilisé. Cependant, et ce depuis de nombreuses années [1], une analyse de la littérature nous permet de constater que d’un point de vue pratique, il n’existe toujours pas de consensus franc sur la position du patient (couché, assis [position de Jones, Jones modifié, Davies. . .], voire debout) et les vitesses utilisées (entre 30◦ /s et 300◦ /s [2]) en fonction des modes de contractions choisis [2].

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Fig. 1. Position de Jones modifiée.

2. Objet de recherche

3. Matériel et méthode

Cette étude, basée sur une méthode expérimentale, avait pour objet l’analyse des performances isocinétiques de joueuses de handball de niveau international afin d’objectiver des déséquilibres pouvant être annonciateurs de pathologies. Une mise en parallèle des ratios obtenus avec ceux retrouvés dans la littérature pour les sports de lancer a également été réalisée.

Vingt joueuses ont participé à cette étude. La position retenue pour les tests a été celle de Jones modifiée : sujet assis, abduction de la gléno-humérale de 45◦ dans le plan de l’omoplate et de 30◦ par rapport au plan frontal (Fig. 1). Elle reprend les préconisations faites par Edouard et al. suite à une revue de littérature portant sur 16 études [3].

Fig. 2. Position de départ (A) et d’arrivée (B).

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• une série de 3 répétitions en excentrique à vitesse lente (60◦ /s), en rotations médiale et latérale. En cas de phénomènes douloureux, le test était interrompu. L’amplitude totale du mouvement était de 90◦ (Fig. 2). Ces tests ont été réalisés sur un dynamomètre isocinétique Biodex 3® (Fig. 3). Le traitement des données a été effectué à l’aide du logiciel Sphinx® et Microsoft Excel® . 4. Résultats Les résultats portent sur un échantillon de 17 personnes (3 joueuses exclues en raison de l’arrêt du protocole pour douleurs).

Fig. 3. Biodex 3® en montage Épaule.

Le test a été réalisé sur les deux épaules. Le protocole était le suivant : • phase d’échauffement de l’ensemble du complexe scapulohuméral : ergocyle bras libre, 10 minutes à intensité modérée, respiration libre ; • travail à l’élastique de faible résistance consistant en 10 répétitions en rotations médiale et latérale en position RE2 ; • avant chaque série, 1 à 2 répétitions d’échauffement à la vitesse correspondante ; • une série de 6 répétitions en concentrique à vitesse rapide (180◦ /s), en rotations médiale et latérale ; • une série de 3 répétitions en concentrique à vitesse lente (60◦ /s), en rotations médiale et latérale ;

4.1. Analyse de la population L’âge moyen était de 25 ans et 4 mois. La latéralité retrouve une proportion de 76,5 % de droitières pour 23,5 % de gauchères. L’ensemble des données morphologiques est indiqué dans le Tableau 1. La répartition par poste entre arrières et avants est équilibrée (Fig. 4). Les antécédents traumatiques ont également été notés (Tableau 2). À noter qu’une même personne pouvait être porteuse de plusieurs pathologies (Fig. 5). La répartition des pathologies montre une prédominance des conflits antéro-supérieurs.

Tableau 2 Antécédents traumatiques. Tableau 1 Données morphologiques.

Taille (en cm) Poids (en kg)

Latéralité

Moyenne

Médiane

Minimum

Maximum

177,88 72,12

177 73

169 61

189 85

Réparon des postes

Tendinopathies

Antécédents à gauche En % En nombre Antécédents à droite En % En nombre

0 0 5,9 1

Conflits

5,9 1 41,2 7

Lésions du bourrelet

Slaps

5,9 1

5,9 1

0 0

5,9 1

Réparons des pathologies Tendinopathie 8%

Arr 41%

Avant 41%

GB 18% Fig. 4. Répartition de l’échantillon par poste.

Lésion postérieure du bourrelet 8%

SLAP 17%

Conflit antérosupérieur 67 %

Fig. 5. Répartition des pathologies.

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Tableau 3 Récapitulatif des puissances (W) retrouvées en rotation médiale et latérale. Rot.Lat.Con 180◦ /s

Rot.Lat.Con à 60◦ /s

Rot.Lat.Exc à 60◦ /s

Rot.Méd.Con à 180◦ /s

Rot.Méd.Con à 60◦ /s

Rot.Méd.Exc à 60◦ /s

Moy Méd

33,82 34,20

20,09 20,70

14,76 15,20

49,98 54,60

24,59 25,20

30,88 32,50

Moy Méd

32,86 32,60

19,58 19,50

12,88 12,10

56,19 55,60

29,07 28,30

32,19 32,80

D

G

2 1,8 1,6 1,4 1,2

Droite

1 0,8

1,51 1,51 1,51

Gauche

1,81 1,7 1,78 1,22 1,33 1,25

0,6

1,48 1,59 1,51

TOTAL

0,4 0,2 0 RM/RL DC180

RM/RL GC180

RM/RL DC60

RM/RL GC60

Fig. 6. Moyenne des ratios RM/RL retrouvés sur la population totale (W).

4.2. Analyse des ratios par puissance (en watt) La puissance moyenne (travail total divisé par la durée de la série) donne une valeur indicative de la rapidité avec laquelle le muscle produit la force. Les puissances moyennes retrouvées concernant les rotations ont été regroupées dans le Tableau 3. À partir de ces résultats, une recherche des différents ratios a été effectuée (Fig. 6) concernant ceux généralement retrouvés dans la littérature, à savoir : • rotation médiale/rotation latérale (RM/RL) en concentrique ; • rotation médiale en excentrique/rotation latérale en concentrique (RME/RLC), appelant la notion de ratio fonctionnel comme indicateur de stabilité de la sangle antérieure telle que définie par Wang et al. [4] ; • à vitesse rapide, le ratio RM/RL est relativement équilibré ; • à vitesse lente, on retrouve un léger déséquilibre droite-gauche (Tableau 4).

Aucun critère ne permet de discriminer les catégories. Cependant, une comparaison de moyenne permet de noter des différences significatives entre les ratios droite/gauche retrouvés chez les droitières (t = 3,02 ; 1 − p = 99,5 % à 60◦ /s). La différence est, là aussi, peu significative pour les gauchères. On note que chez les droitières, le bras dominant est celui présentant le ratio le plus faible. Cette notion se retrouve, quelle que soit la strate (avec ou sans pathologie, analyse par poste). L’analyse des ratios rotateurs médiaux en excentrique/rotateurs latéraux en concentrique, évaluant la qualité de la sangle antérieure ne permet pas de faire une différence entre bras dominant et non dominant (Tableaux 6 et 7). L’analyse du travail maximal (performance musculaire maximale réalisée sur une répétition, donnant l’indication de la capacité musculaire développée sur toute l’amplitude articulaire) ne fait ressortir aucune autre indication spécifique en comparaison aux données déjà énoncées.

5. Discussion Aucun critère ne permet de discriminer les catégories. Cependant, une comparaison de moyennes permet de noter des différences significatives entre les ratios droite/gauche retrouvés chez les droitières (t = 3,11 ; 1 − p = 99,5 % à 60◦ /s). La différence est peu significative pour les gauchères. 4.3. Analyse des ratios par le moment de force (en N.m) Le moment de force (force maximale enregistrée au cours d’une répétition) donne une valeur indicative de la capacité musculaire (Fig. 7, Tableau 5).

Le niveau de pratique entraîne une sollicitation importante de l’ensemble du complexe articulaire thoraco-scapulo-huméral. Le nombre d’heures d’activités pour les joueuses testées s’échelonne de 12 à 20 heures par semaine. L’étude avait pour objectif de rechercher une éventuelle relation causale entre les pathologies déjà identifiées dans la littérature et d’éventuels déficits retrouvés lors de l’évaluation isocinétique. L’analyse des différents ratios n’a pas retrouvé de données différentes de celles communément connues. En effet, le

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1,8 1,6 1,4

1,2 Droite

1 0,8 0,6

1,421,361,41

1,551,541,55 1,27 1,32 1,28

1,47

1,57 1,49

Gauche TOTAL

0,4 0,2 0 RM/RL D180

RM/RL 180 G

RM/RL D Conc 60

RM/RL G Conc 60

Fig. 7. Moyenne de latéralité retrouvée sur la population totale (N.m). Tableau 4 Ratio RM/RL en concentrique à 180 et 60◦ /s sur la population totale (W). Puissance RM/RL concentrique (en watt)

FMRLDC180

RM/RL GC180

RM/RL DC60

RM/RL GC60

Moyenne Écart-type t de student Moyenne Écart-type t de student Moyenne Écart-type t de student Moyenne Écart-type t de student

Droite

Gauche

Total

1,51 0,33 < 0,01 1,81 0,40 0,17 1,22 0,22 0,33 1,48 0,22 0,32

1,51 0,33 < 0,01 1,70 0,53 0,29 1,33 0,15 0,94 1,59 0,24 0,65

1,51 0,32 1,78 0,42 1,25 0,21 1,51 0,22

RM/RL : rotation médiale/rotation latérale. Latéralité/RM/RL DC180 p = 94,7 % ; F = < 0,01 (NS). Latéralité/RM/RL GC180 p = 66,8 % ; F = 0,19 (NS). Latéralité/RM/RL DG30 p = 37,5 % ; F = 0,85 (NS). Latéralité/RM/RL GC60 p = 40,2 % ; F = 0,76 (NS).

Tableau 5 Ratio RM/RL en concentrique à 180 et 60◦ /s sur la population totale (N.m). RM/RL concentrique (En N.m)

RM/RL D180

RM/RL 180 G

RM/RL D Conc 60

RM/RL G Conc 60

Moyenne Écart-type t de student Moyenne Écart-type t de student Moyenne Écart-type t de student Moyenne Écart-type t de student

Droite

Gauche

Total

1,42 0,30 0,14 1,55 0,23 0,05 1,27 0,18 0,16 1,47 0,25 0,26

1,36 0,16 0,45 1,54 0,27 0,09 1,32 0,14 0,41 1,57 0,22 0,62

1,41 0,27

RM/RL : rotation médiale/rotation latérale. Latéralité/RM/RL D1 80 p = 70,4 % ; F = 0,15 (NS). Latéralité/RM/RL 180 G p = 86,8 % ; F = 0,02 (NS). Latéralité/RM/RL D Conc 60 p = 66,4 % ; F = 0,20 (NS). Latéralité/RM/RL G Conc 60 p = 49,3 % ; F = 0,51 (NS).

1,55 0,23 1,28 0,17 1,49 0,24

moment de force moyen du ratio RM/RL se situe à 1,48 à 180◦ /s et 1,39 à 60◦ /s. La notion de ratio fonctionnel reste très fluctuante en fonction des études. En effet, si Wang et al. [4] le définissent sur la base RME/RLC, Andrade et al. [5] font appel au ratio RL excentrique/RM concentrique. Pour Edouard et Calmels [6], « aucun facteur n’a pu être incriminé en tant que facteur de risque prédisposant à la pathologie ». Il semble qu’il n’existe pas de réel déséquilibre imputable à l’origine d’une pathologie de l’articulation. « Le déséquilibre musculaire agoniste/antagoniste serait “fonctionnellement” secondaire à une lésion organique initiale, et sa mise en évidence révèlerait un état de décompensation ; elle marquerait le signe d’une évolution péjorative et/ou longue » [6]. Au handball, les études montrent, du côté dominant, une force majorée en RM et RL en concentrique ainsi qu’en RM excentrique. Cependant, le ratio RM/RL n’est pas modifié [7,8]. Au niveau du couple de force, Bayios et al. [9] ne retrouvent d’ailleurs aucune différence significative entre les rotateurs médiaux et latéraux. Si Baltaci et al. [10] constatent une faiblesse des rotateurs latéraux (non retrouvée ici), ils notent l’apparition de déséquilibre musculaire sur le bras dominant. Ce déséquilibre, moins marquée au handball que dans d’autres disciplines (base-ball, basket-ball), se manifeste par une diminution globale de la force des rotateurs du côté dominant. Notre étude ne montre pas de différence significative entre ces données, le ratio RM/RL en concentrique marquant même une légère différence en défaveur du bras dominant, que celui-ci soit porteur ou non d’une pathologie (1,20 à droite vs 1,80 à gauche). L’analyse de la littérature permet de mettre en évidence la difficulté d’interprétation des données, principalement en raison des différences importantes dans les protocoles utilisés : position de test, vitesse du mouvement, nombre de répétitions dans une série, nombre de séries. . . Ce constat était déjà d’actualité il y a plusieurs années [1]. Nous avons émis l’hypothèse que le renforcement musculaire global est insuffisant, pouvant expliquer un certain nombre de problématiques (décentrage de la tête humérale, conflit antérointerne, conflit antéro-supérieur. . .). On ne retrouve pas de différences statistiquement significatives entre les deux bras,

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Tableau 6 Ratio RM excentrique/RL concentrique (W). Échantillon total – puissance (watt) Ratio RME/RLC droit 60

Droite Gauche Total

Ratio RME/RLC gauche

Moyenne

Écart-type

t de student

Moyenne

Écart-type

t de student

1,54 1,55 1,54

0,25 0,23 0,24

0,04 0,08

1,67 1,68 1,67

0,30 0,39 0,31

0,02 0,03

RME/RLC G-60 Moyenne

Écart-type

t de student

1,82 1,89 1,84

0,22 0,41 0,26

0,18 0,24

RME/RLC : rotation médiale en excentrique/rotation latérale en concentrique. Latéralité/ratio RME/RLC droit 60 p = 88,5 % ; F = < 0,01 (NS). Latéralité/ratio RME/RLC gauche p = 91,7 % ; F = < 0,01 (NS).

Tableau 7 Ratio RM excentrique/RL concentrique (N.m). Échantillon total – moment de force

Droite Gauche Total

RME/RLC D-60 Moyenne

Écart-type

t de student

1,72 1,71 1,71

0,25 0,22 0,24

0,01 0,03

RME/RLC : rotation médiale en excentrique/rotation latérale en concentrique. Latéralité/RME/RLC D-60 p = 92,2 % ; F = < 0,01 (NS). Latéralité/RME/RLC G-60 p = 66,9 % ; F = 0,19 (NS).

contrairement à l’étude menée par Edouard et al. [11] en 2013 sur 46 joueuses qui montrait une différence de ratio entre le côté dominant et celui non dominant. Des études plus centrées sur la population féminine [12] montrent qu’il n’existe pas de différence significative entre les joueuses de handball et la population classique (ratio RM/RL à 1,24 ± 0,07). La faiblesse de ces valeurs ne semble pas permettre, au regard d’une analyse de la littérature, de prévenir l’apparition de blessures [13]. Si l’analyse isocinétique permet d’évaluer de manière précise des déficits et des déséquilibres musculaires, elle reste une technique analytique (pas de travail fonctionnel) ne permettant pas l’amélioration de la performance. En réponse à notre question de recherche, il ne semble donc pas que l’analyse isocinétique soit un outil approprié pour améliorer la détection à titre préventif des problématiques de l’épaule. 6. Critiques de l’étude L’échantillon, s’il permet de dégager certaines tendances, ne permet pas d’extrapoler à l’ensemble d’une population. La difficulté de mise en place de consensus quant au placement de l’épaule au sein du protocole augmente la difficulté d’interprétation comparative par rapport aux autres études. De plus, les biais possibles restent importants. On peut noter, entre autres : • la difficulté de stabilisation du tronc par rapport au complexe de l’épaule ;

• la non-prise en compte de la cinématique globale du geste de l’armé imposé par la contrainte de l’appareil ; • la difficulté à intégrer le geste à effectuer (en particulier lors des sollicitations en excentriques) amenant un temps de réaction souvent long ; • la fatigabilité importante (en particulier des rotateurs latéraux) imposant un nombre limité de répétitions ; • la difficulté à dissocier, dans l’interprétation des résultats en rotation médiale, l’impact du pectoralis major (décentreur de la tête humérale) par rapport au subscapulaire (centreur actif). 7. Prospectives L’analyse isocinétique est-elle un bon outil pour détecter l’apparition de pathologies de l’épaule et pour permettre d’améliorer la prise en charge individuelle de celles-ci ? Si pour certains, il est nécessaire de tenir compte de cette analyse associée à la clinique pour mettre en place un programme individuel de réadaptation de l’épaule (étude réalisée sur 36 athlètes féminines pratiquant le handball ou le volleyball) [14], d’autres montrent qu’il n’y’a pas d’intérêt à utiliser le test isocinétique dans cette optique [8]. Pour autant, Edouard et al. [11] ont montré que le déséquilibre de la force musculaire pouvait être à l’origine d’une augmentation du risque de blessure. La Fédération franc¸aise de handball a entrepris la mise en place d’une étude à plus grande échelle afin de pouvoir bénéficier d’un échantillon plus important. De nouveaux critères pourraient alors être analysés : influence de la balance des rotateurs en fonction des postes, confirmation et consolidation des données déjà publiées. Si les résultats recueillis s’avéraient pertinents,

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il serait alors possible d’appliquer les protocoles préventifs existant (basés sur des techniques de recentrage actif et de tonification musculaire avec élastique) à l’ensemble de la filière : clubs et sections sport-études. Remerciements Je tiens à remercier pour l’aide apportée à cette étude le docteur Gérard Juin, médecin des équipes de France, Mme Annick Le Naour, masseur-kinésithérapeute à la Fédération franc¸aise de handball, ainsi que le service médical de l’INSEP. Déclaration d’intérêts L’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article. Références [1] Lagniaux F. Isocinétisme et épaule : 10 ans de recherche. KS 1999;385: 41–3. [2] Ellenbecker TS, Davies GJ. The application of isokinetics in testing and rehabilitation of the shoulder complex. J Athl Train 2000;35(3): 338–50. [3] Edouard P, et al. Reliability of isokinetic assessment of shoulder-rotator strength: a systematic review of the effect of position. J Sport Rehabil 2011;20:367–83.

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