LETTRE A LA REDACTION
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ArrCt cardio-respiratoire et traitement par interferon o~-2a
La cardiotoxicit6 de l'interf6ron est connue depuis 1982 [1]. Les m~canismes sont divers, allant des troubles du rythme b6nins au d6c~s par arret cardiaque [2]. Nous rapportons le cas d'un patient trait6 par interffiron ~-2a en raison d'une hfipafite virale chronique B, C et 8 ayant pr6sent6 un arret cardio-respiratoire et une insuffisance cardiaque aigu6 congestive par cardiomyopathie d'~volution favorable. Monsieur J., 38 ans, ancien toxicomane, 6thylo-tabagique, s~ropositif pour le VHB, VHD et VHC, s6ron6gatif pour le VIH est trait6 depuis le 08/03/1994 par interf6ron a -2a (3 M U I en sous-cutan~ 3 fois/semaine). I1 pr6sente le 22/03/1994, 3 heures apr~s l'injection d'interffiron, une syncope avec pertede connaissance, absence de pouls carotidien et f6moral, cyanose. Un massage cardiaque externe (MCE) et une ventilation bucco-buccale sont imm~diatement pratiqu6s par des secouristes. L'intervention m~dicalis~e rapide (< 10 ran) constate l'arret circulatoire (pas de pouls f6moral ni carotidien, pas de bruits du coeur, P A imprenable), l'arr~t respiratoire (gasp, pas de cyanose) ainsi qu'un coma hypotonique. I1 n'est pas r6alis6 de monitorage cardioscopique ni ECG. Le patient est intub6, ventilfi, le MCE est poursuivi, 2 mg IVD d'adr6naline restaurent une efficacit6 cardio-circulatoire : pouls p6riph~riques frappfis, Fc 120/rain, PA 120/75 mmHg. Un ECG montre un rythme sinusal r6gulier ~ 110/rain, pas de trouble de la conduction auriculo-ventriculaire, pas d'hyperexcitabilitfi auriculoventriculaire, allongement du QT h 0,40 seconde (QT thfiorique 0,32). A l'admission en r6animation : coma Glasgow 3, pas de signe de localisation ni syndrome refining6, hypotonie globale, mydriase bilatfirale pauci-rfiactive. Collapsus tension~nel avec intol6rance au remplissage (PA 80/ 38 mmHg, PVC 26 cm d'eau apr~s 500 ml de Plasmion ®) bien contr6lSe par dobutamine 8 ~/kg/mn. Auscultation cardio-pulmonaire normale. Le brian biologique standard sanguin et urinaire est normal en dehors d'une cytolyse hfipatique et d'une thrombop~nie. L'ECG, le Holter ECG, l'exploration du faisceau de His et la radio du thorax sont normaux. L'6chocardiographie retrouve une ballonisation Re~u en juillet 94, acceptd en fdvrier 95.
de la valve mitrale, sans aucune autre anomalie. L'~chodoppler des membres inf6rieurs ne retrouve pas de phl6bite. La recherche de toxiques gastriques et urinaires est n6gative. L ' E E G montre un ralenfissement diffus sans signe de comitialit6. Le traitement est symptomafique (ventilation m~canique, apports hydro~lectrolytiques, pr6vention de la thrombose veineuse, arrSt de l'interf6ron). L'6volution est favorable en 48 heures ; le patient retrouve une conscience normale, est extub6 le 25/03/1994, la dobutamine est arr~t~e progressivement d~s la 5 e heure avec maintien d'une stabilit6 h6modynamique. L'EEG de contr61e du 25/03/1994 est normal. Le patient sort vivant de la r6animafion le 28/03/1994, sans s6quelle neurologique ni insuffisance cardiaque. La cardiotoxicit6 de l'interf6ron peut s'exercer ~ plusieurs niveaux : hyperexcitabilit6 auriculaire, arythmie complete par fibrillation auriculaire, bloc auriculoventriculaire du l~rdegr6, dissociation auriculoventriculaire, fibrillation ventriculaire, infarctus du myocarde, 6panchement p6ricardique, cardiomyopathie dilat~e, arr~t cardiaque et d6c~s [2]. La dose unitaire utilis6e, la dose totale cumul6e, le type d'interf~ron ne sont pas en relation avec la toxicit6 [2]. Une pathologie c a r d i a q u e pr6existante et une th6rapeutique cardiotoxique favofisent la survenue de troubles sans que leur fr6quence puisse ~tre pr6cis~e [3]. Des poussfies hypertensives sont possibles [3]. Le mficanisme d'action de l'interffiron dans la gen~se de ces effets secondaires n'est pas connu. Le patient de notre observation, indemne d'anomalie cardiaque ant6rieure, semble avoir pr6sent6 une cardiomyopathie aigu~ sans n6crose, 15 jours apr~s l'initiation du traitement. La survenue de myocardiopathie n'a 6t6 d6crite jusqu'alors qu'apr~s 11 semaines de traitement [3] et il est nficessaire de rappeler la [oossibilit6 de survenue tr~s pr6coce de complications 16thales. REFERENCES [1] DICKSOND. -- Death halts interferon trials in France. Science, 1982, 218, 772. [2] SONNENBLICKM., ROSIN A. -- Cardiotoxicity of interferon, a review of 44 cases. Chest., 1991, 99, 557-561. [3] FERRARI E., TAILLAN B., GIBELIN P., FUZIBET J.G., DUJARDIN P., BAU9OUY M., MORAND Ph. -- Les complications cardio-vasculaires de l'interf6ron. Ann. CardioL Angdio1., 1992, 41, 437-441 .
O. GIRAUD,F. THOMAS,J.J. JUPAS, Y. RAVAUD, Service de R6animation Polyvalente, H6pital des Diaconesses, 18, rue du Sergent Bauchat, F 75571 Paris cedex 12. R#an. Urg., 1995, 4 (6), 645