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Article original
Aspects e´pide´miologiques, cliniques et judiciaires des violences physiques faites aux femmes dans la re´gion de Tambacounda (Se´ne´gal) Epidemiological, clinical and forensic physical violence against women in Tambacounda (Senegal) M.M.M. Leye a,*, P. Ndiaye b, D. Ndiaye c, I. Seck a, A. Faye d, A. Tal Dia a a
Service de me´decine pre´ventive et sante´ publique, faculte´ de me´decine, pharmacie et odontologie, universite´ Cheikh Anta DIOP de Dakar, 16390 Dakar Fann, Se´ne´gal b Service de me´decine pre´ventive et sante´ publique, UFR sante´, universite´ Gaston Berger de Saint-Louis, Saint-Louis, Se´ne´gal c Me´decin au centre de sante´ de Goudiry, Tambacounda, Se´ne´gal d Institut de sante´ et de´veloppement (ISED), universite´ Cheikh Anta DIOP de Dakar, Dakar, Se´ne´gal Rec¸u le 8 fe´vrier 2016 ; accepte´ le 31 octobre 2016
Abstract Introduction. – To contribute to the fight against physical violence against women, this work aimed to make a 10-year review of cases treated at the Regional Court of Tambacounda. Methodology. – This observational, retrospective, descriptive and analytical study was conducted from 15 October 2014 to 15 April 2015. It covered all the court records of victims of intentional injury from 2006 to 2015. The data was entered and analyzed using Epi info 3.3.2 software. Results. – In all, 113 cases were treated. The mean age was 26.5 10.08 years for victims versus 32.5 13.8 years for the aggressors. The victims were all female, and 77.9% of offenders were male. The assaults took place mostly during the day (57.5%), and especially in the homes of victims (61.0%), in the street (16.8%) in the bush (12.4%). The consultation period was less than 24 hours for 54.9% of the victims. Clinical examination differentiated: fractures (15%); contusions (13.5%); penetrating wounds (10.6%); bruises (9.7%); eye injuries (7.9%); broken teeth (7.9%); diffuse pains (7.1%), 6.2% polytrauma (6.2%), and 5.3% of trauma on pregnancies. Among the violence, 33.6% were domestic; 11.5% were associated with rape (7.1%); psychological violence (3.6%); rape and death threat (1.8%). Rape was statistically more common among child victims [OR = 10.7 (3.2–35.5)] and/or educated victims [OR = 5.8 (1.7–19.9)] and aggression in the bush [OR = 7.5 (2.2 to 14.2)]. The attackers were lonely and imprisoned in 94.7% and 73.5% of cases respectively. The sentence was firm imprisonment for 89.2% of cases. Conclusion. – In Tambacounda, health and judicial authorities should enhance public awareness concerning the risk of violence. The extension of this type of study to the national level would have enabled better orientation of control strategies against this scourge. # 2016 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. Keywords: Gender; Violence; Woman; Prevention; Senegal
Re´sume´ Introduction. – Pour contribuer a` la lutte contre les violences physiques faites aux femmes, ce travail avait pour objectif d’effectuer le bilan de´cennal des cas traite´s au tribunal re´gional de Tambacounda. Me´thodologie. – Une e´tude d’observation re´trospective, descriptive et analytique a porte´ sur l’ensemble des dossiers judiciaires des victimes de coups et blessures volontaires de 2006 a` 2015. Les donne´es ont e´te´ collecte´es entre le 15 octobre 2014 et le 15 avril 2015, et saisies et analyse´es avec le logiciel Epi info 3.3.2.
* Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (M.M.M. Leye). http://dx.doi.org/10.1016/j.respe.2016.10.061 0398-7620/# 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s.
Pour citer cet article : Leye MMM, et al. Aspects e´pide´miologiques, cliniques et judiciaires des violences physiques faites aux femmes dans la re´gion de Tambacounda (Se´ne´gal). Rev Epidemiol Sante Publique (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.respe.2016.10.061
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Re´sultats. – Au total, 113 cas ont e´te´ traite´s. L’aˆge moyen e´tait de 26,5 (10,08) ans pour les victimes contre 32,5 (13,8) ans pour les agresseurs. Les victimes e´taient toutes de sexe fe´minin, et 77,9 % des agresseurs de sexe masculin. Les agressions se de´roulaient surtout durant la journe´e (57,5 %), et au domicile des victimes (61,0 %), dans la rue (16,8 %) et dans la brousse (12,4 %). Le de´lai de consultation e´tait infe´rieur a` 24 heures pour 54,9 % des victimes. L’examen clinique a identifie´ 15 % de fractures, 13,5 % de contusions, 10,6 % de plaies pe´ne´trantes, 9,7 % d’he´matomes, 7,9 % de traumatismes oculaires, 7,9 % d’avulsions dentaires, 7,1 % d’algies diffuses, 6,2 % de polytraumatismes, et 5,3 % de traumatismes sur grossesse. Parmi les violences, 33,6 % e´taient conjugales ; 11,5 % e´taient associe´es a` un viol, 3,6 % a` des violences psychologiques, et 1,8 % a` un viol et des menaces de mort. Le viol e´tait statistiquement plus fre´quent chez les victimes mineures [OR = 10,7 (3,2– 35,5)] et/ou instruites [OR = 5,8 (1,7–19,9)] et quand les violences avaient eu lieu dans la brousse [OR = 7,5 (2,2–14,2)]. Les agresseurs ont agi seuls dans 94,7 % des cas et ont e´te´ emprisonne´s pour 73,5 % d’entre eux, avec emprisonnement ferme dans 89,2 % des cas. ` Tambacounda, les autorite´s sanitaires et judiciaires devraient renforcer la sensibilisation des populations au risque de Conclusion. – A violence. L’extension d’une telle e´tude au niveau national permettrait de mieux orienter les strate´gies de lutte contre ce fle´au. # 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s. Mots cle´s : Genre ; Violence ; Femme ; Pre´vention ; Se´ne´gal
1. Introduction Les violences restent un fle´au universel qui de´truit le tissu social et menace la vie, la sante´ et la prospe´rite´ de tous. Dans le monde, elles font plus de 1,6 millions de morts chaque anne´e. Pour une personne qui meurt des suites d’un acte de violence, beaucoup d’autres sont blesse´es ou confronte´es a` tout un e´ventail de proble`mes physiques, sexuels, ge´ne´siques ou mentaux [1]. La violence a` l’e´gard des femmes par un partenaire intime est caracte´rise´e par des controˆles coercitifs. Elle est a` la fois plus fre´quente et plus se´ve`re que celle visant les hommes, car les femmes sont plus susceptibles de souffrir de blessures et de craindre pour leur vie [1]. Les violences figurent parmi les principales causes de de´ce`s des personnes aˆge´es de 15 a` 44 ans ; elles sont responsables de 7 % des causes de de´ce`s chez les femmes [2]. Il ressort de 48 enqueˆtes en population re´alise´es dans le monde que de 10 a` 69 % des femmes de´clarent avoir e´te´ agresse´es physiquement par un partenaire intime de sexe masculin a` un moment de leur vie [3]. En Afrique subsaharienne, 13 a` 49 % des femmes ont e´te´ frappe´es ou agresse´es physiquement par un partenaire intime masculin, 5 a` 29 % de´clarant avoir subi une violence physique durant l’anne´e pre´ce´dant l’enqueˆte [3]. De´sormais, l’espace public se pre´sente comme un lieu de pre´dilection de la violence sexiste, notamment dans les milieux politique et scolaire. Les coups et blessures constituent 44,3 % des cas de violence sexiste au Nigeria, 43,2 % au Niger, et 20 % au Burkina Faso, pour ne citer que ces pays [4]. Au Se´ne´gal, en 2009, une e´tude de la Banque Mondiale a re´ve´le´ que 60 % des femmes ont rapporte´ avoir e´te´ victimes de violences conjugales [4]. Pour la meˆme e´tude, le Comite´ de lutte contre les violences faites aux femmes (CLVF) a enregistre´, a` travers ses antennes re´gionales, 463 cas de violences, soit une moyenne de 1,3 victimes par jour. Parmi ces cas, 65 % se sont de´roule´s dans l’espace conjugal. Au cours du second semestre de 2009, une femme a e´te´ tue´e chaque mois et 3 cas de viols sont traite´s chaque jour au Tribunal de Dakar. En 2011, le CLVF a de nouveau note´, au niveau de ses antennes re´gionales, 62 cas de violences physiques [4]. Face a` cette situation, le Se´ne´gal a pris des mesures pour lutter contre ce fle´au. Lors de la premie`re de´cennie des anne´es
2000, le Se´ne´gal a pris un ensemble de dispositions le´gislatives et re´glementaires sanctionnant les violences contre les femmes. Sont notamment cible´s la violence conjugale, le harce`lement sexuel et les mutilations ge´nitales fe´minines ; les peines sont aggrave´es en cas de de´lit de viol. Malgre´ ces dispositions, on note une recrudescence des cas de violences sexuelles, d’agressions physiques et de maltraitance pouvant prendre des formes extreˆmes conduisant a` la mort ou a` des conse´quences particulie`rement graves [5]. Au Se´ne´gal, il ne peut pas se passer un jour sans que les me´dias ne re´ve`lent un cas de viol [6]. Cette forme de violence sexuelle a des re´percussions ne´fastes sur la sante´ des femmes a` type de le´sions physiques, de troubles psychologiques etc. La re´gion de Tambacounda ne dispose pas encore de donne´es fiables sur les violences faites aux femmes. Ainsi, l’objectif de cette e´tude est de de´terminer les aspects e´pide´miologiques, cliniques et judiciaires des violences physiques faites aux femmes dans cette re´gion. L’identification des facteurs associe´s au viol chez les victimes va permettre de formuler des strate´gies efficaces et cible´es dans le cadre de la pre´vention contre les violences.
2. Cadre de l’e´tude La re´gion de Tambacounda est limite´e au nord par la re´gion de Louga, de Saint-Louis et la re´publique de Mauritanie, au sud par la re´publique du Guine´e Conakry, a` l’ouest par la re´publique du Mali et de la Mauritanie, a` l’ouest par les re´gions de Kolda, de Kaolack et de la re´publique de Gambie. Elle constitue la plus vaste re´gion du Se´ne´gal avec une superficie de 59 602 km2, repre´sentant ainsi le tiers du territoire national. En 2012, sa population a e´te´ estime´e a` 688 973 habitants avec un taux d’accroissement intercensitaire de 2,9 % et un taux de pauvrete´ de 60,4 % [7,8]. La population de la re´gion est essentiellement jeune puisque l’aˆge moyen est de 20,6 ans. Du fait de sa tre`s grande superficie et de sa faible population, la re´gion de Tambacounda a une densite´ de population relativement faible compare´e a` celle d’autres re´gions du Se´ne´gal, caracte´rise´e par une ine´gale re´partition sur le territoire re´gional avec une densite´ de 16 habitants/km2 [8]. Dans cette re´gion 9,1 % des me´nages
Pour citer cet article : Leye MMM, et al. Aspects e´pide´miologiques, cliniques et judiciaires des violences physiques faites aux femmes dans la re´gion de Tambacounda (Se´ne´gal). Rev Epidemiol Sante Publique (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.respe.2016.10.061
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sont dirige´s par une femme [8]. Certaines coutumes et pratiques ont une influence ne´faste sur la sante´ : l’excision est un facteur de propagation des maladies transmises par le sang ; le le´virat et le sororat sont de re´els facteurs d’exposition au VIH et a` d’autres maladies transmissibles ; et le recours a` la me´decine traditionnelle est souvent la premie`re intention pour des pathologies diverses. Sous l’impulsion du Ministe`re de la famille et de la solidarite´ nationale, les femmes se sont organise´es autour de diffe´rentes structures. En s’organisant, ainsi elles jettent les bases d’une solidarite´ entre elles et offrent un cadre d’appui et d’aide au de´veloppement. C’est ainsi qu’elles be´ne´ficient, de plus en plus du soutien des ONG et des programmes et de structures de financement (caisses locales). En ce qui concerne les infrastructures de sante´, il y a un seul hoˆpital pour toute la re´gion de Tambacounda, qui a un caracte`re sous re´gional du fait qu’il rec¸oit aussi les populations de la re´gion de Kolda et des zones frontalie`res des quatre pays limitrophes. La re´gion compte un centre de sante´ pour 129 510 habitants, un poste de sante´ pour 69 071 habitants et une case de sante´ pour 2345 habitants, avec un personnel de sante´ encore insuffisant. Le taux de mortalite´ maternelle y est de 850 de´ce`s pour 100 000 naissances vivantes contre une moyenne nationale de 392 pour 100 000 naissances vivantes [9,10]. Nous avons choisi comme cadre de notre e´tude le tribunal, ce qui va permettre d’avoir des donne´es sur l’agresseur et sur la victime de la violence physique. 3. Me´thodologie
3
d’expertises et fiches d’examen des victimes de CBV) ont constitue´ les sources de collecte des donne´es. Un de´pouillement des rapports d’expertise et des fiches d’examen a e´te´ re´alise´. 3.5. Analyse des donne´es Les donne´es collecte´es ont e´te´ saisies et analyse´es graˆce au logiciel Epi Info 3.3.2. La premie`re e´tape a e´te´ une description des diffe´rentes variables. Pour les variables quantitatives, la moyenne et l’e´cart-type ont e´te´ calcule´s. Quant aux variables qualitatives, les fre´quences et leur intervalle de confiance ont e´te´ calcule´s. La deuxie`me e´tape a concerne´ l’e´tude analytique et a comporte´ une analyse bi-varie´e. Des croisements entre variables ont e´te´ effectue´s pour re´pondre a` l’objectif concernant les facteurs associe´s a` la survenue de viol chez les victimes de CBV, a` l’aide des tests du Chi2 ou de Fisher selon leurs conditions d’applicabilite´. Le test e´tait significatif si le p e´tait infe´rieur a` 0,05. L’odds ratio entoure´ de son intervalle de confiance a permis de quantifier la force du lien. 3.6. Conside´rations e´thiques Une autorisation du procureur du tribunal re´gional de Tambacounda a facilite´ l’acce`s aux dossiers. L’anonymat et la confidentialite´ ont e´te´ respecte´s sous demande du procureur. La collecte a e´te´ faite en zone se´curise´e dans la salle d’archivage avec l’appui d’un aide-greffier qui collait des e´tiquettes sur les initiales des victimes pour e´viter toute identification.
3.1. Type et pe´riode d’e´tude 4. Re´sultats Une e´tude d’observation re´trospective, descriptive et analytique a e´te´ mene´e. La pe´riode de l’e´tude s’est e´tendue du 15 octobre 2014 au 15 avril 2015.
Au total, 113 cas de dossiers de victimes de violences physiques ont e´te´ recense´s.
3.2. Population d’e´tude
5. Description
Elle e´tait constitue´e des dossiers judiciaires des personnes victimes de violences physiques durant la pe´riode d’e´tude. E´tait inclus tout dossier judiciaire de femme victime de violence physique a` type de coups et blessures volontaires (CBV) traite´s au niveau du tribunal re´gional de Tambacounda de janvier 2006 a` de´cembre 2015, et le recueil des donne´es a` partir des dossiers s’est fait. E´tait non inclus tout dossier judiciaire de femme victime de CBV inexploitable (mal rempli ou abıˆme´).
5.1. Caracte´ristiques sociode´mographiques des victimes
3.3. E´chantillonnage Un recrutement exhaustif de l’ensemble des dossiers des femmes victimes de CBV re´pondant aux crite`res d’inclusion a e´te´ effectue´.
L’aˆge moyen des victimes e´tait de 26,5 (10,08) ans et variait de 8 a` 59 ans. Les femmes majeures e´taient les plus nombreuses (78,8 %). Les victimes e´taient femmes au foyer (64,5 %), e´le`ves (10,6 %), commerc¸antes (8 %) et autres (5,3 %), a` savoir essentiellement marchandes, paysannes, mendiantes et travailleuses du sexe ; 11,5 % des victimes n’avaient aucune profession. Les marie´es e´taient majoritaires chez les victimes (64,6 %). La plupart des victimes n’e´taient pas instruites (81,4 %), 7,1 % e´taient de niveau d’e´tudes primaire et 7,1 % de niveau secondaire. Le niveau d’instruction n’e´tait pas pre´cise´ chez 4,4 % d’entre elles. 5.2. Caracte´ristiques sociode´mographiques des agresseurs
3.4. Donne´es Un formulaire de recueil des donne´es a e´te´ confectionne´ en fonction des objectifs de l’e´tude et des donne´es disponibles au niveau des dossiers des victimes. Les dossiers (rapports
Les agresseurs, a` pre´dominance masculine (77,9 %), e´taient aˆge´s de 12 a` 74 ans, avec une moyenne de 32,5 ( 13,8) ans, et la plupart e´taient majeurs (82,9 %). Concernant la profession, non pre´cise´e dans 4,4 % des cas, on retrouvait des cultivateurs
Pour citer cet article : Leye MMM, et al. Aspects e´pide´miologiques, cliniques et judiciaires des violences physiques faites aux femmes dans la re´gion de Tambacounda (Se´ne´gal). Rev Epidemiol Sante Publique (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.respe.2016.10.061
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(25,6 %), des femmes au foyer (15,9 %), des commerc¸ants (7,1 %), des e´le`ves/e´tudiants (5,3 %), des menuisiers (5,3 %), des bergers (4,4 %) et des retraite´s (3,5 %), des chauffeurs (2,7 %), des fonctionnaires (0,9 %). Les autres professions e´taient repre´sente´es par les me´caniciens, orpailleurs, bijoutiers, e´lectriciens etc, et 4,4 % des agresseurs n’avaient aucune profession. Les agresseurs e´taient en majorite´ marie´s (66,4 %), avec 10,6 % de niveau primaire, 9,7 % de niveau secondaire et 0,9 % de niveau supe´rieur et non instruits (68,1 %). Le niveau d’instruction n’e´tait pas pre´cise´ chez 9,7 %. 5.3. Ante´ce´dents et motifs d’emprisonnement Parmi les agresseurs, 7 (6,2 %) avaient e´te´ emprisonne´s dans le passe´. Les motifs de leur emprisonnement e´taient la violence physique (42,9 %), le vol (28,6 %) et la drogue (28,6 %). 5.4. Caracte´ristiques des violences En termes de fre´quence, le phe´nome`ne a e´te´ plus marque´ dans les anne´es 2010 (17 cas), 2011 (15 cas) et 2012 (21 cas). On note une recrudescence en 2014 (12 cas) apre`s une baisse en 2013 (Fig. 1). Les violences conjugales constituaient 33,6 % des cas. Les violences physiques e´taient associe´es aux viols dans 11,5 % des cas, aux viols avec menace de mort dans 1,8 % des cas et aux violences psychologiques dans 3,6 % des cas. L’e´tat d’ivresse e´tait pre´sent chez cinq agresseurs (4,4 %). Les violences physiques se passaient pour la plupart au domicile des victimes (61 %), dans la rue (16,8 %), dans la brousse (12,4 %) et chez l’agresseur (7,1 %). Ailleurs, la boutique (0,9 %) et les maisons abandonne´es (1,8 %) pouvaient aussi servir d’abris. Les agressions se de´roulaient le plus souvent en dehors du week-end et pendant la journe´e, respectivement dans 77 % et 57,5 % des cas. Les victimes connaissaient leurs agresseurs dans 94,7 % des cas. L’agresseur e´tait le plus souvent seul (94,7 %). Les armes les plus fre´quemment utilise´es e´taient le baˆton (11,2 %), les armes blanches (6,5 %), le pilon (3,7 %). Les autres armes (16,9 %) e´taient la barre de fer, la lame, cravache a` cheval, la chaıˆne antivol, le mortier, le fouet, l’eau bouillante, le gourdin,
les ustensiles, le coupe-coupe etc. Dans 61,7 % des cas, aucune arme n’a e´te´ utilise´e. 5.5. E´tat clinique des victimes Apre`s les agressions, 54,9 % des victimes consultaient ` l’examen aupre`s du personnel de sante´ en moins de 24 h. A clinique des victimes, les fractures repre´sentaient 15 % des cas, les contusions 13,5 %, les plaies pe´ne´trantes 10,6 %, les traumatismes oculaires 7,9 %, les avulsions dentaires 7,9 %, les algies diffuses 7,1 %, les polytraumatismes 6,2 %, le traumatisme sur grossesses 5,3 %, les he´matomes 9,7 %, les morsures 2,6 % et les ecchymoses 1,7 %. Les autres le´sions e´taient des bruˆlures, e´pistaxis, e´tranglements, trismus, amputations de l’oreille, luxations, entorses etc. Sur les 18 cas de violences sexuelles associe´es, 83,8 % e´taient des pe´ne´trations vaginales avec 64,7 % de de´florations re´centes, 29,4 % de de´florations anciennes et 5,9 % de cas d’hymen intact. Les attouchements (11,1 %) et harce`lements sexuels (56 %) repre´sentaient le reste des violences sexuelles. Seuls deux cas de stress post-traumatiques ont e´te´ diagnostique´s par le personnel de sante´ concernant les violences psychologiques. 5.6. Sanctions judiciaires des agresseurs Les agresseurs ont e´te´ emprisonne´s dans 73,5 % des cas et 2,7 % ont e´te´ confie´s a` leur responsable civil. Par ailleurs, 89,2 % ont eu une peine de prison ferme et 10,8 % avec sursis. La dure´e moyenne d’emprisonnement ferme e´tait de 99,8 jours, la me´diane de 60 jours et les extreˆmes de 5 et 3650 jours (10 ans). 5.7. Caracte´ristiques des victimes associe´es au viol Nous avons observe´ un lien statistiquement significatif entre l’aˆge, le niveau d’instruction, le type de CBV, le lieu de l’agression et la survenue de viols (Tableau 1). Le viol e´tait plus fre´quent chez les mineures (< 18 ans) victimes d’agressions physiques (OR = 10,7), et chez les femmes instruites (OR = 5,8). Les victimes de CBV extra-conjugaux e´taient plus fre´quemment viole´es (OR = 9) que les autres. Les autres caracte´ristiques n’e´taient pas lie´es a` la survenue de viol. 5.8. Caracte´ristiques des agresseurs associe´s a` la survenue de viols Nous n’avons pas retrouve´ de lien significatif entre les caracte´ristiques des agresseurs et la survenue de viol (Tableau 2). 5.9. Caracte´ristiques de l’agression associe´e a` la survenue de viols
Fig. 1. E´volution du nombre de cas de violences physiques au cours des anne´es.
La seule caracte´ristique de l’agression lie´e de fac¸on significative a` la survenue de viol e´tait le lieu : les viols
Pour citer cet article : Leye MMM, et al. Aspects e´pide´miologiques, cliniques et judiciaires des violences physiques faites aux femmes dans la re´gion de Tambacounda (Se´ne´gal). Rev Epidemiol Sante Publique (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.respe.2016.10.061
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Tableau 1 Analyse des caracte´ristiques des victimes influenc¸ant la survenue de viols. Caracte´ristiques
ˆ ge (ans) A Instruction Coups et blessures volontaires Profession Agresseur
Modalite´s
Viols, n (%)
< 18 18 Oui Non Extraconjugaux Conjugaux Oui Non Connu Inconnu
Oui
Non
9 6 6 9 14 1 1 14 13 2
12 86 10 88 61 37 13 85 94 4
(42,9) (6,5) (37,5) (9,3) (18,7) (2,6) (7,1) (14,1) (12,1) (33,3)
(57,1) (93,5) (62,5) (90,7) (81,3) (97,4) (92,9) (85,9) (87,9) (66,7)
p
OR (IC a` 95 %)
0,00001
10,7 (3,2–5,5)
0,002
5,8 (1,7–19,9)
0,02
9 (1,1–71)
0,4
–
0,13
–
Tableau 2 Analyse des caracte´ristiques des agresseurs influenc¸ant la survenue de viols. Caracte´ristiques
Donne´es sur l’agresseur ˆ ge (ans) A Instruction Ivre Nombre
Modalite´s
Viols, n (%)
< 18 18 Oui Non Oui Non Collective Solitaire
p
Oui
Non
3 12 12 3 15 0 1 14
11 87 77 21 93 5 5 93
(21,4) (12,1) (13,5) (12,5) (13,9) (0) (16,7) (13,1)
(78,6) (87,9) (86,5) (87,5) (86,1) (100) (83,3) (86,9)
0,27 0,6 0,48 0,58
Tableau 3 Analyse des circonstances des agressions physiques influenc¸ant la survenue de viols. Caracte´ristiques
Modalite´s
Solitaire Donne´es sur l’agression Lieu : brousse Moment : nuit
Oui Non Oui Non
Viols, n (%) Oui
Non
14 (13,1)
93 (86,9)
6 9 7 8
(42,9) (9,1) (14,9) (12,1)
avaient plus fre´quemment lieu dans la brousse (OR = 7,5) (Tableau 3). 6. Discussion 6.1. Limites de l’e´tude Les principales limites de l’e´tude re´sident dans le fait que les dossiers des victimes vus par le tribunal re´gional de Tambacounda n’e´taient pas bien tenus avant 2006, ce qui rendait quasi-impossible toute exploitation avant cette pe´riode. Autrement dit, la population d’e´tude aurait pu eˆtre beaucoup plus importante concernant les violences faites aux femmes : le nombre de dossiers semble faible pour la pe´riode
8 90 40 58
(57,1) (90,9) (85,1) (87,9)
p
OR (IC a` 95 %)
0,0005
7,5 (2,2–14,2)
0,66
–
(de 2006 a` 2015). Cette situation pourrait s’expliquer aussi par une sous-de´nonciation des cas de violences dans notre socie´te´, lie´e a` la faiblesse des me´dias dans le passe´, et a` certaines conside´rations socioculturelles (honte, peur d’eˆtre stigmatise´e, faible pouvoir de de´cision de la femme). Par conse´quent, certaines femmes violente´es renoncent a` porter plainte et l’entourage intervient pour trouver une solution a` l’amiable. Ce travail s’est centre´ sur les dossiers judiciaires des victimes. Un suivi des victimes avec l’implication des parents aurait pu apporter des comple´ments d’informations relatives aux conse´quences a` moyen et long terme de ces violences physiques. Malgre´ ces limites, l’enqueˆte s’est bien de´roule´e et les re´sultats obtenus ont permis la discussion suivante.
Pour citer cet article : Leye MMM, et al. Aspects e´pide´miologiques, cliniques et judiciaires des violences physiques faites aux femmes dans la re´gion de Tambacounda (Se´ne´gal). Rev Epidemiol Sante Publique (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.respe.2016.10.061
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6.2. Circonstances de l’agression physique Dans beaucoup d’e´tudes les victimes connaissent leurs agresseurs [11]. Hassen et Deyessa et Feseha et al. montrent que pre`s de la moitie´ des femmes ont subi des violences physiques au cours de leur vie de la part de leur mari ou de leur partenaire intime [12,13]. Pour beaucoup d’auteurs, le fait de connaıˆtre l’agresseur constitue un facteur de gravite´. Cependant, on peut penser que ces de´lits sont sous enregistre´s, en raison des difficulte´s sociales a` faire poursuivre les agresseurs par les tribunaux, lorsque ce sont des actes de violences a` l’encontre de leurs e´pouses. En outre, l’essentiel des liens sociaux n’est pas explicite. En effet, les autres parame`tres familiaux, de voisinage et/ou de hie´rarchie socioprofessionnelle, interviennent dans la survenue des actes de violences [5]. Dans notre e´tude, la quasi-totalite´ des agressions e´tait le fait d’agresseurs solitaires (94,7 %). Cette tendance est en baisse au Mali ou` elles repre´sentaient 65,5 % [14]. La proportion d’agressions collectives est plus e´leve´e par rapport a` celle d’une e´tude dans 8 tribunaux du pays, estime´e a` 1 % [5]. Dans notre se´rie, ce taux a` 5,3 % peut eˆtre la conse´quence de l’e´troitesse des liens de parente´. Par ailleurs, ces agresseurs peuvent appartenir a` des gangs arme´s de machettes et autres pour mener des re´pressions violentes aupre`s des populations civiles, notamment les femmes qui constituent un groupe vulne´rable [15]. La consommation d’alcool facilite les agressions et les passages a` l’acte, entraıˆnant une diminution de l’autocritique ou une exage´ration du sentiment de pouvoir. La consommation quotidienne d’alcool par le partenaire est un facteur pre´dictif de violence physique au sein du couple [16]. L’abus d’alcool entraıˆne une perte controˆle de soi et peut pousser ine´luctablement a` des agressions violentes. En effet l’alcool joue un roˆle central dans le cycle de la violence [17]. Si l’on prend comme re´fe´rence la pe´riode apre`s 18 ans, c’est au sein de la cellule familiale qu’ont lieu, pour les femmes, les faits de violences de´clare´s les plus graves. Ces faits rele`vent de situations de violence re´pe´te´es. Les familles se transforment aujourd’hui en un espace non se´curisant, voire dangereux pour les femmes et les enfants qui y vivent [18]. L’entourage proche de la victime peut entraıˆner ou renforcer les le´sions posttraumatiques. Cet e´tat de fait est corrobore´ par l’e´tude de Albutt et al., ou` 44,3 % des femmes de´clarent avoir souffert du rejet de leur famille apre`s les violences [19]. Le milieu extrafamilial est aussi un lieu de pre´dilection des violences. En effet, le fait de retrouver la brousse comme lieu pre´dictif de violences est naturellement lie´ au milieu d’e´tude, les femmes y vont pour leurs activite´s domestiques et e´conomiques (travaux champeˆtres, recherche de bois entre autres). En plus, dans la brousse, la victime est vulne´rable et sans possibilite´ de secours. Le milieu scolaire est e´galement touche´. Ceci est corrobore´ par une e´tude mene´e en Ouganda ou` 94,2 % des filles fre´quentant l’e´cole primaire ont rapporte´ eˆtre victimes de violences physiques de la part du personnel de l’e´cole [20]. Doku et Asante ont relate´ au Ghana que les femmes de niveau d’instruction secondaire ou supe´rieur approuvent moins les violences physiques domestiques que les autres [21]. L’espace scolaire doit eˆtre une opportunite´ pour les e´le`ves d’acque´rir une bonne instruction
leur permettant entre autres de moins approuver les violences physiques et de briser le silence lorsque les faits sont ave´re´s ; en de´nonc¸ant l’agresseur aupre`s des autorite´s policie`res et judiciaires. Nos re´sultats sont similaires a` ceux d’un travail mene´ a` la clinique gyne´co-obste´tricale Le Dantec paru en 2008 et montrant que plus de la moitie´ des victimes (58,2 %) avaient e´te´ agresse´es entre 7 heures et 18 heures, donc pendant les heures de travail [22]. La plupart des agressions ont lieu en dehors du week-end, donc a` des moments de fatigue, de stress lie´ au travail ou` la moindre contrarie´te´ peut exacerber un conflit banal. Cette situation a un impact direct dans l’e´conomie du pays car, au lieu d’aller au travail, les protagonistes usent de temps et de peines pour re´gler leur diffe´rend. Une part non ne´gligeable de ces conflits se passe pendant la nuit, a` un moment ou` la victime peut eˆtre sans de´fense et livre´e volontiers a` son agresseur. Le fait de retrouver fre´quemment le baˆton dans les armes des agresseurs peut s’expliquer par le fait qu’il tre`s utilise´ dans diverses activite´s en milieu rural. Une e´tude mene´e a` Madagascar montre que 8 % des femmes ont e´te´ frappe´es avec un objet et 3 % avec une arme ; et reconnaıˆt que ces violences physiques peuvent avoir des conse´quences tre`s graves sur la sante´ des femmes [23]. Les armes utilise´es comme les barres de fer et les cravaches, entre autres, te´moignent de la cruaute´ des violences a` l’e´gard des femmes, et les victimes peuvent subir des dommages corporels importants. 6.3. E´tat clinique des victimes 6.3.1. De´lai de consultation Dans une e´tude mene´e au Mali, dans 59,5 % des cas les femmes ont consulte´ dans les 24 heures qui ont suivi l’agression, 32,4 % entre 1 et 7 jours apre`s l’agression et 8,1 % plus de 15 jours apre`s [24]. Ceci est comparable, a` quelques exceptions pre`s, a` nos re´sultats, et contraire a` ceux de Faye Dieme et al. ou` seules 29,6 % des victimes avaient e´te´ admises moins de 24 heures apre`s l’agression [22]. Le retard de consultation est encore plus alarmant dans l’e´tude de AdamaHonde´gla et al. ou` seules 2,4 % des victimes ont consulte´ en moins de 24 h [25]. Le de´lai relativement court permettrait d’ame´liorer le pronostic vital et fonctionnel des victimes. En plus, il permet de diagnostiquer rapidement les le´sions preuves de l’agression, ne´cessaires aux poursuites judiciaires ; en effet, plus le de´lai est long plus les preuves peuvent eˆtre dissimule´es. Enfin, la majeure partie de ces violences sont tues et re´gle´es au sein de la famille a` cause de conside´rations socioculturelles, donc a` l’insu des structures sanitaires qui seraient le tremplin vers une correction juridique. 6.3.2. Le´sions physiques De 2006 a` 2012, on note une augmentation irre´gulie`re du nombre de cas pour atteindre un pic en 2012. Selon le CLVF de Tambacounda, cette hausse s’explique par une conscientisation des populations sur les risques de violences lors des activite´s de sensibilisation qui les incitaient a` de´noncer les cas de violences physiques aupre`s des autorite´s sanitaires, policie`res et
Pour citer cet article : Leye MMM, et al. Aspects e´pide´miologiques, cliniques et judiciaires des violences physiques faites aux femmes dans la re´gion de Tambacounda (Se´ne´gal). Rev Epidemiol Sante Publique (2017), http://dx.doi.org/10.1016/j.respe.2016.10.061
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judiciaires [26]. Ces diffe´rentes activite´s ont e´te´ possibles graˆce au soutien d’Amnesty International. Son retrait apre`s 2012 a contribue´ au ralentissement des activite´s de sensibilisation sur les risques des violences faites aux femmes [26]. Ceci pourrait expliquer la sous de´nonciation de 2013 a` 2015, bien qu’en 2015 seul le premier trimestre a e´te´ inclus dans la pe´riode d’e´tude. Dans de nombreux travaux, le constat est le meˆme, les le´sions sont diverses, sachant qu’on ne peut pas s’attendre aux meˆme proportions. Ainsi, Be´ne´dicte Gatineau soutient que ces violences physiques peuvent avoir des conse´quences tre`s graves sur la sante´ des femmes [23]. Presque la moitie´ (46 %) des femmes violente´es physiquement ont de´clare´ avoir de´ja` eu des he´matomes, environ un quart (23 %) des plaies avec saignement, et 15 % ont eu un membre foule´ ou fracture´. Vingtdeux pour cent ont de´ja` duˆ consulter un me´decin pour soigner des blessures suite a` une violence conjugale et 29 % ont e´te´ dans l’incapacite´ d’aller travailler apre`s avoir e´te´ frappe´es par leur mari. L’e´tude de Niang et al., mene´e dans les tribunaux de 8 re´gions du pays, a trouve´ un taux de fracture proche (13 %) [5]. Les autres formes de le´sions physiques autres que sexuelles repre´sentaient 18 % des le´sions. Dans ces 3 e´tudes, les pourcentages semblables de fracture te´moignent de la brutalite´ des faits et de leurs conse´quences invalidantes. Ne´anmoins aucun cas de de´ce`s n’a e´te´ objective´ dans notre enqueˆte. 6.3.3. Le´sions associe´es Faye et al. ont trouve´ qu’a` l’admission les patientes manifestaient, soit une agressivite´ pour 5,5 %, une peur pour 5,5 %, un mutisme pour 23,6 % ou une indiffe´rence pour 27,2 %. Dans plus d’un tiers des cas (38,2 %), l’e´tat psychologique n’avait pas e´te´ e´value´ [22]. Dans un travail mene´ en Afrique du sud et au Malawi, 45,4 % de la population enqueˆte´e a subi une forme de violence psychologique [27]. Le faible pourcentage de violences psychologiques note´ dans notre e´tude peut eˆtre duˆ a` un de´faut de diagnostic et de suivi posttraumatique dans les structures sanitaires de la re´gion, lie´ a` un manque de spe´cialiste ou de formation dans ledit domaine. 6.4. Sanctions judiciaires de l’agresseur Contrairement a` notre e´tude, Faye et al. avaient trouve´ 57,4 % d’absence de poursuites et 42,6 % de plaintes ayant abouti a` une condamnation [22]. Au Mali, 78,4 % de cas de poursuites judiciaires suite aux diffe´rentes re´quisitions e´mises par les officiers de police judiciaire ont e´te´ note´s et dans 21,6 % des cas il n’y a eu aucune poursuite [24]. E´videmment, dans notre contexte, la non-sanction de pre´sume´s coupables est souvent lie´e a` la fuite de ces derniers vers les pays limitrophes, vu la position frontalie`re de Tambacounda avec la Guine´e Conakry, le Mali, la Mauritanie et la Gambie, comme relate´ dans certains dossiers. L’immensite´ du territoire et l’inaccessibilite´ de certaines zones posent aussi un re´el proble`me dans l’investigation des faits. Mais cela peut eˆtre aussi lie´ a` un manque de preuves suffisantes pour inculper les pre´sume´s agresseurs. Dans notre travail, un des facteurs associe´s a` la survenue de viol e´tait l’aˆge de la victime. Dans une e´tude mene´e a` Lome´, la victime d’agression sexuelle e´tait souvent une fillette d’un aˆge
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moyen de 12 ans. Le viol par pe´ne´tration vaginale (62,2 %) e´tait le mode pre´ponde´rant [25]. Cette situation s’explique par la vulne´rabilite´ de ces jeunes femmes : en lien avec la force de leurs agresseurs souvent plus aˆge´s, elles sont victimes de CBV suivis de violences sexuelles a` type de viol. Souto et al. montrent que l’aˆge avance´ des agresseurs a un lien significatif avec la survenue de viols chez les victimes [28]. Dans notre e´tude, le viol e´tait plus fre´quent chez les femmes instruites, contrairement aux re´sultats de Souto et al. ou` plus de la moitie´ (55,3 %) des victimes de viols avaient un bas niveau d’e´tudes [28]. Nous avons montre´ que la fre´quentation de la brousse est un facteur de risque de survenue de viol. En milieu rural, les jeunes filles doivent parcourir la brousse pour aller a` l’e´cole, aux champs ou pour chercher du bois. Les agresseurs profitent de cette situation pour les violenter physiquement en vue de les affaiblir davantage et les violer ensuite. La pre´dilection des viols en brousse s’explique par le fait que les victimes sont souvent sans de´fense et sans possibilite´ de secours. Les femmes victimes de CBV extra conjugaux avaient plus de risque d’eˆtre viole´es que les autres. Les femmes en situation conjugale, meˆme quand elles ont e´te´ victimes de CBV suivis de rapports sexuels force´es, ont du mal a` de´noncer le viol compte tenu de cette situation maritale. Par conse´quent, elles se contentent de de´noncer seulement les le´sions physiques a` type de CBV. Une autre e´tude mene´e au Se´ne´gal n’a pas non plus retrouve´ de lien entre le type de CBV et la survenue de viol. Les re´cits de cas mettent en e´vidence l’existence tre`s re´pandue de viol conjugal au Se´ne´gal [5]. Il s’agit de rapports sexuels violents sans consentement. Ils peuvent prendre une forme particulie`rement brutale au cours des mariages force´s, qui ont souvent lieu au moment ou` la femme est encore tre`s jeune [5]. L’e´tat d’ivresse de l’agresseur n’e´tait pas un facteur de risque de survenue de viol ; Leye et al. rapportent le contraire dans leur e´tude mene´e a` Kolda chez les mineurs [6]. En effet, les viols e´taient 3,57 fois plus fre´quents chez les victimes dont les agresseurs e´taient ivres par rapport aux autres. Ce lien peut s’expliquer par le fait que leur travail visait uniquement les mineurs, population tre`s fragile facile a` agresser sur les plans physique et sexuel. Face a` ces constats, la sensibilisation des populations aux risques de violences, une e´ducation de base des enfants au sein de la famille et en milieu scolaire, couple´es a` des patrouilles de se´curite´ surtout en brousse, restent des strate´gies efficaces pour contribuer a` la re´duction des violences dans toutes ses formes au sein de notre socie´te´. Des auteurs annoncent dans leurs e´tudes que les interventions pre´ventives visant a` ame´liorer le niveau d’instruction des femmes peuvent aider a` briser le cycle de la violence. Ces interventions devraient aussi accorder une attention particulie`re aux femmes et aux enfants qui sont tre`s sensibles aux conditions de´favorables dans la rue, afin de pre´venir la de´linquance [16,29]. 7. Conclusion Au Se´ne´gal, dans la re´gion de Tambacounda, 113 cas de violences physiques ont e´te´ traite´es au niveau du tribunal re´gional de 2006 a` 2015. Les femmes mineures, instruites,
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agresse´es physiquement en brousse ou victimes de CBV extraconjugaux e´taient plus enclines a` eˆtre viole´es. Cette situation justifie l’extension de l’enqueˆte au niveau de l’ensemble des tribunaux re´gionaux, en vue de rendre disponibles des donne´es sur ce fle´au au niveau national, de sensibiliser les populations sur les risques de violences faites aux femmes, leur place dans la socie´te´ et sur l’importance de la de´nonciation des cas de violences en vue d’une bonne prise en charge me´dicale et judiciaire. De´claration de liens d’inte´reˆts Les auteurs de´clarent ne pas avoir de liens d’inte´reˆts. Re´fe´rences [1] Ansara DL, Hindin MJ. Formal and informal help-seeking associated with women’s and men’s experiences of intimate partner violence in Canada. Soc Sci Med 2010;70(7):1011–8. [2] Agence des droits fondamentaux de l’Union europe´enne. La violence a` l’e´gard des femmes, une enqueˆte a` l’e´chelle de l’Union europe´enne. FRA; 2014 [4 p]. [3] Krug EG, Dahlberg LL, Mercy JA, Zwi A, Lozano-Ascencio R. Rapport mondial sur la violence et la sante´. Gene`ve: Organisation mondiale de la Sante´; 2002 [44 p]. [4] Faye ON. Rapport final sur la violence a` l’e´gard des femmes en Afrique de l’ouest. Dakar: ONU-Femmes/AFARD Se´ne´gal; 2013 [85 p]. [5] Niang CI, Diop N, Diop ML, Sow S, Gue´ye MA, et al. Rapport final de l’e´tude situationnelle sur les violences base´es sur le genre dans les re´gions de Dakar, Diourbel, Fatick, Kaffrine, Kaolack, Louga, Saint-Louis, Thie`s. Se´ne´gal: ONUFEMMES; 2012 [85 p]. [6] Leye MMM, Fare A, Wone I, Diedhiou D, Diongue M, Niang K, et al. E´tude des de´terminants de viols chez les mineurs dans la re´gion de Kolda au Se´ne´gal. Sante Publique 2014;26(1):131–8. [7] District de Tambacounda. Informations ge´ne´rales sur le district de Tambacounda. Ministe`re de la sante´; 2014 [20 p]. [8] Ba SG, Kaba MA, Daff MA. Rapport de la situation e´conomique et sociale re´gionale 2012. ANSD – Service Re´gional de la Statistique et de la De´mographie de Tambacounda; 2013 [17 p]. [9] Mille´nium Challenge Account (MCA). Rapport final de l’e´tude diagnostique dans les cinq re´gions d’intervention des projets e´ligibles au MCA. Tambacounda: PRESTIGE; 2009 [69 p]. [10] Agence Nationale de la Statistique et de la De´mographie. Enqueˆte de´mographique et de sante´ continue (EDS-Continue) 2014. Rockville, Maryland (USA): The DHS Program ICF International; 2015 [254 p]. [11] WHO. Strengthening the role of the health system in addressing violence, in particular against women and girls, and against children. Geneva: WHO; 2014. [12] Hassen F, Deyessa N. The relationship between sexual violence and human immunodeficiency virus infection among women using voluntary counseling and testing services in South Wollo Zone, Ethiopia. BMC Research Notes 2013;6(271):1–9.
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