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J O U R N A L OF T H E N E U R O L O G I C A L SCIENCES
Aspects Histo-Enzymologiques de la Maturation du Syst6me Nerveux E. B A R G E T O N - F A R K A S * ET A. G. E. PEARSE Laboratoire de Neuropathologie (Prof. Thieffry), Hdpital St. Vincent de Paul, Paris (France), et Department of Histochemistry, Postgraduate Medical School, Londres ( Angleterre)
INTRODUCTION
La composition du tissu c6r6bral subit d'importantes modifications au cours du d6veloppement. Ces modifications portent non seulement sur la composition chimique des tissus nerveux, mais aussi sur les activit6s enzymatiques dont les diff6rentes structures c6r6brales sont le si/~ge. L'6tude des activit6s enzymatiques, au cours de la maturation, a 6t6 abord6e par diff6rentes m6thodes. (1) Des m6thodes histochimiques qui ont le grand avantage pour le morphologiste d'etre applicables ~t des coupes histologiques. Ces techniques respectent l'architectonie tissulaire et permettent de ce fait une bonne localisation des activit6s enzymatiques 6tudi6es. Elles ont, par contre, l'inconv6nient de ne donner que des renseignements quantitatifs tr~s grossiers, bas6s sur une 6valuation de l'intensit6 color6e des r6actions. (2) Des m6thodes biochimiques, qui permettent la mise en 6vidence d'un plus grand nombre d'activit6s enzymatiques et donnent de meilleurs renseignements quantitatifs, mais ces m6thodes se pratiquent sur broyat de tissus et excluent ainsi toute localisation histologique d61icate. (3) Une voie d'abord, unissant les avantages de chacune des deux techniques mentionn6es pr6c6demment est repr6sent6 par les m6thodes cytochimiques (HVDEN 1960; KUHLMAN ET LOWRY 1956; POPE 1959; ROBINS El" LOWE 1961). Elle consiste dans l'application de dosages microchimiques fi des cellules ou ~. des groupes cellulaires isol6s par microdissection. Cette m6thode n'a 6t6 jusqu'5_ pr6sent que tr~s peu appliqu6e fi l'6tude de la maturation. I1 serait souhaitable pour une 6rude approfondie de la maturation enzymatique du syst~me nerveux d'utiliser conjointement ces diff6rentes voies d'abord, les renseignements fournis par chacune d'elle, se compl6tant mutuellement. L'alt6ration rapide des enzymes post-mortem explique que la plupart des 6tudes * Charg6e de Recherches/~ l'Institut National d'Hygi6ne, Paris. J. neural. Sci.
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enzymatiques concernant la maturation aient 6t6 pratiqu6s sur l'animal. Toutefois, du mat6riel humain pourrait ~tre utilis6 ~ une plus grande 6chelle, puisque de nombreux enzymes gardent leur activit6 pendant plusieurs heures apr~s la mort (LAZARUS et al. 1962). L'animal de laboratoire le plus souvent utilis6 pour ce type de recherches est le rat puisqu'il vient au monde avec un syst~me nerveux immature comme l'homme et toute la my61inisation s'accomplit chez lui dans les 20 premiers jours de la vie extraut6rine. Le but de cet expos6 est de rapporter quelques r6sultats obtenus par des 6tudes histochimiques de la maturation enzymatique des centres nerveux. Toutefois, pour compl6ter ces r6sultats encore trop parcellaires, quelques r6f6rences seront faites /l des donn6es biochimiques, mais seulement dans la mesure o~ celles-ci se rapportent tr~s 6troitement aux donn6es histo-enzymologiques. MATERIELET METHODES NOUS avons 6tudi6 les modifications, au cours de la maturation, de l'activit6 des est6rases carboxyliques, enzymes intervenant dans le m6tabolisme des lipides et celles des phosphatases acides et alcalines non-sp6cifiques. Les phosphatases en tant que lib6rateurs de l'ion phosphate des compos6s organiques permettraient d'une part la synth~se des phospholipides (Ph acides) et d'autre part celle des compos6s phosphate /l haute 6nergie (Ph alcalines). Les techniques utilis6es ont 6t6 respectivement celle de HOLT ET WITHERS pour les est6rases carboxyliques, celle de BARKA pour les phosphatases acides et celle de GOMORI pour les phosphatases alcalines. Ces 6tudes ont 6t6 pratiqu6es sur des cerveaux de rats nouveaux-n6s, ~g6s de 2, 3, 9, 18, et 26 jours, ainsi que sur des rats adultes. Des modifications importantes ont pu ~tre mises en 6vidence dans la r6partition et l'intensit6 de ces activit6s enzymatiques en fonction de l'age, aussi bien dans la substance grise qu'au sein de la substance blanche en rapport avec la my61inisation. RI~SULTATS Modifications des Estdrases Carboxyliques dans [a Substance Grise, au cours de la Maturation Chez l"adulte
En dehors de l'activit6 localis6e dans la m6ninge, les p6ricytes des parois vasculaires et l'6pendyme, l'activit6 de ces enzymes se trouve essentiellement dans le cytoplasme des corps neuronaux et distribu6e, par endroits, d'une faqon diffuse dans le neuropil (PEPLER ET PEARSE 1957). L'intensit6 de l'activit6 enzymatiqtaeet le rapport qui existe entre la distribution somatique (dans le cytoplasme des neurones) et la distribution diffuse dans le neuropil est caract6ristique de chaque r6gion consid6r6e. Ainsi, dans le cortex du t61enc6phale il ll'existe qu'une distribution somatique avec une activit6 plus intense des neurones dans la lamina ganglionaris et multiformis (Fig. 1). Tout au contraire, dans le striatum et le noyau amygdalien, l'activit6 des neurol. Sci. (1965) 2:213-240
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est6rases c a r b o x y l i q u e s a une r6partition s u r t o u t diffuse dans le neuropil, alors que dans le p a l l i d u m , elle est 5_ n o u v e a u p u r e m e n t somatique. A u niveau du t h a l a m u s , le n o y a u r6ticul6 et le n o y a u ant6rieur r6v~lent une d i s t r i b u t i o n p u r e m e n t somatique, le n o y a u lat6ral une activit6 mixte mod6r6e, le n o y a u m 6 d i a n et de l ' h a b e n u l a une activit6 mixte, mais avec une activit6 dans le n e u r o p i l plus forte q u ' a u niveau des
Fig. 1. Rat adulte. Coupe vertico-frontale d'un h6misph6re passant par la capsule interne. Est6rases carboxyliques. Technique de Holt et Withers; x 24. Activit6 est~rasique de type somatique dans les neurones du cortex surtout marqu6e dans la lamina ganglionaris et multiformis. Darts le striatum l'activit6 est de type diffus comme chez le rat nouveau-n6 mais l'intensit6 de cette activit6 est accrue. Absence d'activit6 dans la substance blanche. Activit6 somatique nette des neurortes du pallidum.
n o y a u x pr6c6dents. A u niveau du cervelet, il existe une activit6 s o m a t i q u e tr6s intense dans les cellules de Purkinj6 (Fig. 2) de marne que dans les n o y a u x denteWs et du toit. L a r6gion m6sodienc6phalique et le t r o n c c6r6bral r6v~lent 6galement une activit6 s o m a t i q u e pr6J. neurol. Sci. (1965) 2:213-240
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dominante avec pour certains noyaux la pr6sence d'une activit6 diffuse. Ce type mixte de r6partition de l'activit6 est6rasique est surtout marqu6 dans la substance grise cerrtrale et les noyaux moteurs des paires cr~miennes. La substance blanche du rat adulte est pratiquement d6pourvue de route activit6 ~t l'exception de celle se trouvant dans les p6ricytes vasculaires.
Fig. 2. Rat adulte. Lamelles c6r6belleuses. Est6rases carboxyliques Technique de Holt,, et Withers; × 60. Activit6 somatique tr6s nette dans les cellules de Purkinj6.
Cette absence de l'activit6 est6rasique dans la substance blanche de l'adulte a 6t6 confirm6e (en ce qui concerne les est6rases carboxyliques non-sp6cifiques), par les travaux biochimiques de BERNSOrtN et al. (1952) sur du mat6riel humain. Rat de 2 et 3 jours
Contrairement ~ l'adulte, il n'y a aucune activit6 somatique visible darts les neurones du cortex c6r6bral et c6r6belleux chez le rat nouveau-n6, ~t l'exception du subiculum. J. neurol. Sci. (1965)X: 2,,13-240
ASPECTS HISTO-ENZYMOLOGIQUESDE LA MATURATION DU SYST~ME NERVEUX 217 ll n'existe /t cet gtge dans le cortex q u ' u n e activit6 diffuse discr6te, et une activit6 dans les p6ricytes vasculaires (Fig. 3). Le s t r i a t u m r6v~le d6s le 26me j o u r son activit6 de type diffus caract6ristique, mais le r d p a t t i t i o n de cette activit6 est tachetde c o n t r a i r e m e n t / t celle uniforme de l ' a d u l t e (Fig. 3). Ce fait a ddj/t 6t6 signal6 p a r FRIEDE (1959) p o u r la rdpartition de la succino-
Fig. 3. Rat de 3 jours. Coupe vertico-frontale d'un h6misph6repassant par la commissure ant6rieure. Est6rases carboxyliques. Technique de Holt et Withers; × 24. Absence d'activit6 est6rasique dans les neurones du cortex. Activit6 nette darts les m~ninges et les parois vasculaires. Distribution tachet6e de l'activit6 dans le striatum (flOehe) et tr6sintense activit6 dans la couche germinative p6riventriculaire. Activit6 surtout diffuse dans le thalamus et la substance grise centrale du 36me ventricule.
d6shydrog~nase chez le r a t n o u v e a u - n & Le p a l l i d u m , la rdgion innomin6e, le t h a l a m u s , les r6gions mdso-dienc6phaliques, le bulbe olfactif, le t r o n c c6r6bral et les n o y a u x du cervelet r6v61ent d6s le 26me j o u r /l l ' o p p o s 6 du cortex c6r6bral et cdrdbelleux une certaine activit6 s o m a t i q u e dans les J. neurol. Sci. (1965) 2:213-240
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neurones quoique assez faible (Fig. 3). Dans toutes ces formations, contrairement cette faible activit6 somatique, il existe une tr6s importante activit6 diffuse dans le neuropil qui va diminuer avec l'ftge dans toutes les zones o/l le type adulte de r6partition enzymatique est de type somatique. Une activit6 est6rasique tr6s nette est noter dans la couche germinative p6riventriculaire.
Fig. 4. Rat de 9 jours. Lamelles c6r6belleuses. Est6rases carboxyliques. Technique de Holt et Withers; × 60. Activit6 tr6s nette dans la m6ninge et les parois vasculaires. Activit6 de type diffus un peu plus marquge dans la couche granulaire externe et interne. Absence d'activit6 de type somatique dans les cellules de Purkinj6.
R a t de 9 jours
Les cortex c6r6bral et c6r6belleux ne m o n t r e n t toujours pas d'activit6 somatique dans les neurones. Seule, s'6bauche une accentuation 16g6re de l'activit6 dans la lamina ganglionaris et dans la couche des cellules de Purkinj6 (Fig. 4). La disposition tachet6e de l'activit6 est6rasique a disparu dans le striatum; au J. neurol. Sci. (1965) 2:213-240
ASPECTS HISTO-ENZYMOLOGIQUESDE LA MATURATIONDU SYSTEME NERVEUX 219 niveau des autres n o y a u x gris centraux et le tronc c6r6bral, l'activit6 somatique est u n peu plus accentude dans les n e u r o n e s alors que l'activit6 diffuse t e n d / l d6croitre (Fig. 5). Les n e u r o n e s de la zona incerta et ceux des n o y a u x supraoptiques m o n t r e n t d6jg une activit6 somatique tr6s intense.
Fig. 5. Rat de 9 jours. Coupe vertico-frontale d'un h6misph6re passant par la capsule interne. Est6rases carboxyliques. Technique de Holt et Withers; × 24. 11n'y a toujours pas d'activit6 est6rasique dans les neurones du cortex, par contre la distribution tachet6e de ractivit6 du striatum a disparu. Dans le thalamus et le pallidum l'activit6 somatique des neurones commence h s'individualiser. Forte activit6 dans la glie de la capsule interne (ftdche).
Rat de 18 jours L'activit6 est6rasique a fait son a p p a r i t i o n dans le cytoplasme des n e u r o n e s d u cortex c6r6bral, mais elle est encore tr~s faible. Cette activit6 est plus intense dans la l a m i n a ganglionaris et multiformis, mais il n ' y a pas encore de tr6s grosses diff6rences entre les diverses couches c o m m e chez l'adulte. Les cellules de Purkinj6 m o n t r e n t une activit6 nette, mais encore assez faible.
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Les neurones du cortex rhinenc6phalique ont une activit6 plus forte que celle du cortex du t61enc6phale. L'activit6 est intense dans les neurones du pallidum et leur prolongement, rdalisant un aspect r6ticulaire des prdparations ~t ce niveau. Dans le thalamus, il existe une tendance/t l'individualisation de chacun des noyaux 6bauchant ainsi le type de r6partition enzymatique d6crit chez l'adulte, avec r6gres-
Fig. 6. Rat adulte. Lamelles c6r6belleuses. Phosphatases acides. Technique de Barka; x 60. Contrairement au rat nouveau-n6, forte activit6 dans les cellules de Purkinj6, pas d'activit6 dans la substance blanche en dehors des p6ricytes.
sion globale de l'activit6 diffuse. Darts les formations sous-jacentes, il n ' y a pas de modifications notables par rapport au rat de 9 jours. Rat de 26 jours
L'activit6 des est6rases carboxyliques s'est consid6rablement accrue dans les neuJ. neurol. Sci. (1965) 2:213-240
ASPECTS HISTO-ENZYMOLOGIQUESDE LA MATURATIONDU SYSTEMENERVEUX 221 rones du cortex c6r6bral avec diff6renciation plus nette de chacune des couches q u ' a u 18~me jour. Cette activit6 atteint pratiquement l'intensit6 de celle de l'adulte (Fig. 1). Les cellules de Purkinj6 r6v61ent aussi une forte activit6 (Fig. 2). Dans les formations sous-jacentes, il y a une augmentation globale de l'activit6 somatique qui rev~t l'aspect de I'adulte, mais en diff6re toutefois par une certaine persistance de l'activit6
Fig. 7. Rat de 9 jours. Lamelles c6r6belleuses. Phosphatases acides. Technique de Barka; x 60. Forte coloration des noyaux de la couche granulaire externe, pas d'activit6 somatique des cellules de Purkinj6. Par contre, activit6 nette dans l'axe blanc des lamelles. diffuse m~me dans les formations off le type adulte de localisation est6rasique est purement somatique.
Modifications des Phosphatases Acides Non-Sp~cifiques dans la Substance Grise, au eours de la Maturation Chez l'adulte L'activit6 phosphatasique est localis6e dans le cytoplasme de t o u s l e s neurones, les p6ricytes vasculaires et l'6pith61ium choroYdien et 6pendymaire; par contre, il
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n ' y a pas d'activit6 dans la glie, les cellules de Schwann, et la my61ine dans les conditions normales (Fig. 6). Les prdparations histochimiques, utilisant la pararosaniline et le naphtol A.S.B.I. c o m m e substrat, r6v61ent comrne p o u r les est6rases carboxyliques une modification de l'activit6 de ces enzymes en fonction de l'~tge, alors que leur taux est consid6r6
Figs. 8-10. Rats: de 3 jours (Fig. 8), de 9 jours (Fig. 9) et adulte (Fig. 10). Coupes horizontales du tronc c6r6bral. Est6rases carboxyliques. Technique de Holt et Withers x 24. On constate dans la plupart des formations la diminution de l'activit6 diffuse et l'accroissement de l'activit6 somatique des neurones avec l'fige.
c o m m e constant au cours du d6veloppement par les biochimistes
(FLEXNER1955).
Rats de 2 et 3 jours
D6s les 2~me et 3~rne jour, l'activit6 des phosphatases acides est comparable ~t celle du rat adulte, darts les p6ricytes, l'6pith61ium choroidien et 6pendymaire, alors qu'il est ~t peine perceptible dans les neurones du t61enc6phale et le cortex c6r6belleux. J. neurol. Sci. (1965) 2:213-240
ASPECTS HISTO-ENZYMOLOGIQUESDE LA MATURATIONDU SYSTEMENERVEUX 223 Contrairement aux est6rases carboxyliques, une activit6 nette est not6e d+s cet fige dans le cortex du rhinenc6phale. Au niveau des noyaux gris centraux, le tronc cdr6bral et les noyaux du cervelet, l'activit6 est d6j/t tr6s nette, pas trbs diffdrente de celle observde chez l'adulte.
Fig. 9.
Rats de 9, 18 et 26 jours
Chez le rat de 9 jours, on note une nette augmentation de l'activit6 dans les neurones du cortex t6lenc6phalique (Fig 7) et vers le 186me jour, cette activit6 est comparable /t celle de l'adulte avec une activit6 beaucoup plus forte dans la lamina ganglionaris et multiformis que dans les autres couches. L'intensification de t'activit6 phosphatasique acide se poursuit 6galement au niveau des cellules de Purkinj6, off le taux de l'activit6 de l'adulte ne semble atteint qu'apr6s le 266me jour. J. neurol. Sci. (1965)2:213-240
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Des modifications de l'activit6 des phosphatases acides existent non seulement dans la substance grise, mais 6galement au niveau de la substance blanche au cours de la maturation. Ces modifications 6voluant en sens inverse pendant certaines p6riodes du d6veloppement expliquent peut-~tre les taux d'activit6 constants trouv6s par FLEXNER (1955), par des m6thodes biochimiques dans le cortex c6r6bral, pris dans son ensemble, une certaine quantit6 de substance blanche incluse.
Fig. 10.
Modifications des Phosphatases Alcalines Non-Spdcifiques, dans la Substance Grise, au cours de la Maturation
Nos pr6parations de rats nouveaux-n6s indiquent une forte activit6 de ces enzymes dans la partie ventrale du tronc c6r6bral et le dienc6phale, la couche germinative p6riventriculaire et la couche granulaire externe du cervelet. Cette activit6 a d6j~ fortement diminu6 au 96me jour et elle ne persiste de fa9on J. neurol. Sci. (1965) 2" 213-240
ASPECTS HISTO-ENZYMOLOGIQUESDE LA MATURATIONDU SYSTEMENERVEUX 225 histochimiquement d6celable chez l'adulte que dans la m6ninge, les parois vasculaires, le stroma des plexus choroides, l'area postrema et le faisceau r6troflexe de Meynert (SH1MIZU 1950) avec une activit6 16g6rement plus intense dans la substance grise que dans la substance blanche. Ces donn6es concordent avec celles obtenues par ROGERSsur l'embryon de poulet;
Fig. 11. Rat de 3 hours. Centre ovale. Est6rases carboxyliques.Technique de Holt et Withers; × 60. Activit6 est6rasique dans la glie du centre ovale (fldche) avant le d6but de la my61inisation.
elles indiquent une activit6 beaucoup plus intense des phosphatase alcalines chez l'embryon et le foetus que chez l'adulte et une activit6 plus intertses dans les 616ments d6rivant de la lame basale que celles provenant de la lame alaire (ROGERS 1960; MOOG 1943; KALLENET VALMIN 1960) 11 semble que les taux 616v6s d'activit6s des phosphatases alcalines correspondent aux p6riodes de morphog6n~se avec une premi6re augmentation de l'activit6 lors de J. neurol. Sci. (1965) 2:213-240
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la prolif6ration cellulaire et un deuxi~me accroissement de celle-ci au moment de la diff6rentiation morphologique qui se situe juste avant l'6tablissement de l'activit6 fonctionnelle correspondant h la mont6e brusque de l'activit6 cholinest6rasique (ROGERS 1960).
Fig. 12. Rat de 9 jours (d6but de la my61inisation). Centre ovale. Est6rases carboxyliques. Technique de Holt et Withers; x 60. Activit6 est6rasique dans la glie de la couronne rayonnante plus nette qu'h l'~tge de 3 jours (flOche).
Modifications Enzymatiques dans la Substance Blanche, au cours de la My~linisation Nous avons 6galement 6tudi6 les variations de l'activit6 des est6rases carboxyliques des phosphatases acides et alcalines non-sp6cifiques, dans la substance blanche, en rapport avec la my61inisation. Des colorations my61iniques (Spielmeyer) et des colorations pour d6tecter les
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ASPECTS HISTO-ENZYMOLOGIQUESDE LA MATURATIONDU SYSTEMENERVEUX 227 lipides (Noir Soudan B, Scharlach) ont 6t6 pratiqu6es parall~lement aux 6tudes histo-enzymologiques pour chacun des enzymes consid6r6s, par la technique de coupes s6ri6es.
Fig. 13. Rat de 9 jours. Coupe vertico-frontale d'un h6misph6re passant par la capsule interne. Est6rases carboxyliques. Technique de Holt et Withers; × 24. Tr6s forte activit6 estdrasique dans les cellules gliales de la capsule interne (fldche) en voie de my61inisation. Par contre faible activit6 des neurones du pallidum.
Est~rases carboxyliques (Figs. 8-10) Chezlerat de 2 jours, il n ' y a danslasubstance des h6misph6res c6r6brauxetc6r6belleux qu'une activit6 est6rasique diffuse dans le neuropil et une activit6 dans les p6ricytes des parois vasculaires. A u 36me jour, apparait une activit6 dans les cellules gliales, dans le centre ovale (Fig. 11) /t la limite des fibres commissurales du corps calleux et la strata sagittalia dans la capsule externe et le p6doncule thalamique dorsal de la capsule interne.
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Vers le 96me j o u r l'activit6 est tr6s nette dans les cellules gliales a u niveau de la partie lat6rale des fibres commissurales du corps calleux, le stratum sagittale interne, tout le centre ovale "(Fig. 12), la capsule interne (Fig. 13), la couronne rayonnante et la capsule externe. Cette activit6 peut ~tre li6e aux lysosomes, est sous forme de tr~s gros grains intra-cytoplasmiques situ6s dans les cellules gliales et elle est bien plus
Fig. 14. Rat de 18 jours. Coupe vertico-frontale d'un h6misph6re passant par la capsule interne. Est6rases carboxyliques. Technique de Holt et Withers; x 24. Diminution de l'activit6 est6rasique dans les cellules gliales de la capsule interne (flOche). Les techniques my61iniques g cet ftge indiquent d6jh une my61inisation avanc6e. Par contre, accroissement de l'activit6 est6rasique dansles neurones du pallidum et du thalamus.
intense dans cette glie de my61inisation que dans les neurones. Vers le 186me jour, cette activit6 dans la glie de la substance blanche diminue dans la couronne rayonnante, la capsule externe et interne et en pattie dans le centre ovale, mais reste tr~s nette dans le stratum sagittale interne et e s t d6tectable mais ~tu n m o i n d r e degr6 aussi dans le stratumsagittale externe(Fig. 14).Elle devient6galement tr6s nette J. neurol. Sci. (1965) 2:213-240
ASPECTS HISTO-ENZYMOLOGIQUESDE LA MATURATIONDU SYSTEMENERVEUX 229 mais d'une faqon diffuse dans l'axe d e s lamelles c6r6belleuses fi cette p6riode, alors qu'elle n'6tait que peu marqu6e au 9bme jour. Enfin, le 266me jour, il ne reste d'activit6 dans les cellules gliales de la substance blanche que dans le stratum sagittale interne juste h la limite des fibres commissurales du corps calleux et dans la partie m6diane interh6misph6rique du corps calleux,
Fig. 15. Rat adulte. Coupe vertico-frontale d'un h6misph6re passant par la capsule interne. Est6rases carboxyliques. Tectmique de Holt et Withers; x 24. I1 n'y a plus d'activit6 est6rasique dans la capsule interne. Chacun des noyaux thalamiques montre un mode de distribution diff6rent.
formations qui se my61inisent en dernier. D a n s la substance blanche de l'adulte, toute activit6 a disparu dans les cellules gliales, et il ne persiste que celle des parois vasculaires et une tr~s 16g6re activit6 diffuse (Fig. 15). Phosphatases acides
Ces phosphatases acides subissent au cours de la my61inisation une 6volution ~t J. neurol. Sci. (1965) 2:213-240
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peu pros parall61e h celle des est6rases carboxyliques. Leur activit6 apparait 6galement dans les cellules gliales de la substance blanche h6misph6rique vers le 36me jour, est maxima au 96me jour dans la capsule interne (Fig. 16) et les fibres commissurales du corps calleux dans leur partie lat6rale, le stratum sagittale interne, le centre ovale et la capsule externe.
Fig. 16. Rat de 9 jours. Coupe vertico-frontale d'un h6misph+re passant par la capsule interne. Phosphatases acides Technique de Barka; × 24. Tr6s grosse activit6 phosphatasique acide dans la glie de la capsule interne (fldche).
Au 186me jour, l'activit6 ne persiste comme pour les est6rases carboxyliques, dans les h6misph6res c6r6braux qu'h la limite des fibres commissurales du corps calleux et le stratum sagittale interne, alors qu'elle atteint son activit6 maxima dans les cellules gliales de l'album c6r6belleux (Fig. 17). Phosphatases alcalines
I1 ne nous a pas 6t6 possible de mettre en 6vidence des modifications des phosphaJ. neurol. Sci. (1965) 2:213-240
ASPECTS HISTO-ENZYMOLOGIQUESDE LA MATURATIONDU SYSTEMENERVEUX 23l tases alcalines et des cholinest6rases spdcifiques avec l'acdtythiocholine iodure comme substrat, dans la substance blanche, en voie de my61inisation chez le rat. E n z y m e s et my~linisation
Les colorations histochimiques et my61iniques pratiqu6es 6galement chez des rats
Fig. 17. Rat adulte. Coupe vertico-frontale passant par la capsule interne. Phosphatases acides. Technique de Barka; × 24. 11 n'y a plus d'activit6 phosphatasique acide dans la capsule interne en dehors de celle des p6ricytes. de 2, 3, 9, 18, 26 jours ont permis les constatations suivantes. L'apparition des gaines my61iniques colorables par la technique de Spielmeyer 6volue /t peu pr6s parall61ement ~ l'augmentation des activitds est6rasiques et phosphatasiques ddcel6es dans la glie de my61inisation (Figs. 18 et 19). Quand les colorations my61iniques offrent un aspect adulte, les activit6s enzymatiques gliales ddcroissent et disparaissent. Ainsi la coloration de Spielmeyer montre la pr6sence de gaines au % m e jour dans la partie latdrale des fibres commissurales du corps calleux, dans la capsule externe J. neurol. Sci. (1965) 2:213-240
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et interne. Dans ces deux formations, elle est pratiquement compl&e au 186me jour, alors que les activit6s enzymatiques diminuent. C'est au niveau de la partie interh6misph6rique du corps calleux et le stratum sagittale interne que la my61inisation se compl&e le plus tardivement et qne les acti-
Fig. 18. Rat de 18 jours. Pleine p6riode de my61inisation. Lamelles c6r6belleuses; × 60. Tr6s forte activit6 est6rasique diffuse darts l'axe blanc des lamelles c6r6belleuses. vit6s enzymatiques ici 6tudi6es apparaissent le plus tardivement ou persistent le plus longtemps. Les colorations au Noir Soudan B montrent l'apparition de gaines lipidiques toutefois avec une certaine discordance dans le temps avec les r6sultats des techniques my61iniques ~t l'h6matoxyline furique. Ainsi, les gaines routes jeunes semblent mieux et plus pr4cocement se colorer par le Spielmeyer que par le Noir Soudan B. Ce fait pourrait 8tre attribu6 h une incorporation peut-~tre plus pr6coce des prot6ines que des lipides dans les gaines my61iniques. DIEZEL (1957) avait d6j~ soulev6 l'hypoth6se que les colorations dites my61iniques coloraient plut6t les prot6ines des gaines que leurs constituants lipidiques. J. neurol. Sci.
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ASPECTS HISTO-ENZYMOLOGIQUESDE LA MATURATIONDU SYSTEMENERVEUX 233 Rdsumd I1 existe des modifications importantes dans l'activit6 des estdrases carboxyliques et des phosphatases acides et alcalines au cours de la maturation, dans le cerveau du rat nouveau-n6. Ces modifications peuvent &re mises en 6vidence sur des prOparations histo-enzymologiques.
Fig. 19. Comme Fig. 18. Activit6 phosphatasique acide dans la glie de l'axe blanc des lamelles.
Est~rases carboxyliques L'activit6 des est6rases carboxyliques est absente 5, la naissance des corps neuronaux du cortex n6enc6phalique et c6r6belleux chez le rat. Elle apparait ensuite plus rapidement dans les neurones du cortex rhinenc6phalique que dans le n6opallium, o/J elle ne peut ~tre not6e qu'apr6s le 9~me jour, pour s'accroitre ensuite progressivement jusqu'aux environs du 266me jour. Les formations sous-corticales, par contre, r6v~lent une activit~ est6rasique d+s J. neurol. Sci. (1965) 2:213 240
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la naissance, mais le type de distribution et l'intensit6 de cette activit6 se modifient consid6rablement au cours des premi6res semaines de la vie. Phosphatases acides et alcalines
L'activit6 des phosphatases acides est 6galement absente du cortex du n6opallium et du cortex cdr6belleux, ~ la naissance, et ne fait son apparition que vers le 9~mejour pour s'accroitre ensuite progressivement. Par contre, elle est pr6sente dans les neurones du rhinenc6phale, d6s les premiers jours de la vie. Au niveau des formations grises sous-corticales, il n'y a pas de modifications importantes d6celables histochimiquement dans l'intensit6 de l'activit6 de ces enzymes. A l'oppos6 des est6rases carboxyliques et des phosphatases acides, l'activit6 des phosphatases alcalines diminue consid6rablement, dans le cerveau du rat, apr6s la naissance. Enzymes et my~linisation
Au cours de la my61inisation, une tr6s forte activit6 en est6rases carboxyliques et en phosphatases acides non-sp6citiques peut ~tre color6e dans la glie de my61inisation (probablement li6es aux lysosomes) au sein de la substance blanche. Ces activit6s 6voluent parall61ement avec la my61inisation; elles diminuent ou disparaissent apr6s l'ach6vement de celle-ci et semblent ~tre en rapport avec la synth6se des divers constituants de la gaine my61inique (RICHTER 1955; DAWSON 1955; EDGAR 1956), pour la plupart 61abor6s in situ dans le cerveau. I1 est ~ noter que les m6ninges et les vaisseaux c6r6braux r6v61ent d~s les premiers jours de la vie extra-ut6rine une activit6 enzymatique comparable ~t celui de l'adulte pour chacun des enzymes 6tudi6s (est6rases carboxyliques, phosphatases acides, phosphatases alcalines) indiquant qu'h l'oppos6 du parenchyme nerveux leur maturation est achev6e au moment de la naissance. La technique de HOLT ET WITHERS, employ6e dans cette 6tude, visualise l'activit6 des est6rases carboxyliques en g6n6ral, cholinest6rases comprises. Les aspects de maturation ainsi obtenus doivent donc ~tre partiellement attribu6s ~t celui de la cholinest6rase en particulier de l'ac6tylcholinest6rase. Toutefois aucune activit6 cholinest6rasique n'ayant pas 6t6 mise en 6vidence avec l'ac6tylcholinest6rase comme subtrat dans la substance blanche au cours de la my61inisation les images d'activit6s obtenues par la tecbnique de HOLT ET WITHERSdoivent ~tre attribu6es aux aliest6rases et peut-~tre partiellement aux pseudocholinest6rases.
DONNI~ES DE LA LITTERATURE
Activitd cholinestdrasique
Les modifications de l'ac6tylcholinest6rase, t6moin de l'activit6 cholinergique des neurones, ont 6t6 6tudi6es au cours de la maturation chez la souris par GEREBTZOFF (1955) par des m6thodes histo-enzymologiques. Cet auteur constate une intensit6 croissante de cette activit6 enzymatique dans la substance grise depuis la naissance jusqu'au 286me jour, avec une augmentation brusque de l'activit6 entre le 13~me et le 15~me jour. L'accroissement rapide au cours de cette p6riode correspond ~t une J. neuroL Sci. (1965) 2:213-240
ASPECTS HISTO-ENZYMOLOGIQUESDE LA MATURATIONDU SYSTEMENERVEUX 235 modification dans le comportement des animaux, qui devient moins st6r6otyp6. I1 est ~t noter qu'au cours de la maturation, la r6partition de l'activit6 ac6tylcholinest6rasique est identique ~t celui de l'adulte; seule diff6re l'intensit6 de cette activit6. Ce fait diff~re des caract6ristiques de maturation des est6rases non-sp6cifiques. Les donn6es biochimiques (APRISON ET HIMWICH 1954) confirment l'accroissement de l'activit6 cholinest6rasique dans le cerveau au cours des premiers mois de la vie, puis indiquent ensuite un certain degr6 de r6gression. La seule exception ~t cette 6volution est repr6sent6e par le bulbe qui a la plus forte activit6 cholinest6rasique ~t la naissance, mais dont l'activit6 s'abaisse ensuite considdrablement d+s le 156me jour et c'est le n6o-striatum et le cortex frontal qui poss6dent chez l'adulte la plus forte activit6. Activitd oxydative
D'autres travaux publi6s dans la litt6rature indiquent 6galement la modification, au cours de la maturation du syst~me nerveux, d'enzymes, t6moins de l'activit6 oxydative des tissus. F~IEDE (! 959) a 6tudi6 les modifications de la succino-deshydrog6nase (S.D.), enzyme du cycle de Krebs, qui peut 8tre consid6r6 comme le param&re de l'activit6 respiratoire des tissus. Cet auteur a mis en 6vidence l'augmentation de l'activit6 de cet enzyme, dans le cortex du rat au cours des 20 premiers jours de la vie extra-ut6rine, par des m6thodes histochimiques. I1 a montr6 6galement que la distribution de l'activit6 S.D. rev& dans le striatum un aspect tachet6 au cours des premiers jours de la vie, comme nous l'avons constat6 pour les est6rases carboxyliques et que la date d'apparition de cette activit6 enzymatique et le temps n6cessaire pour atteindre le mode de distribution adulte est sp6cifique pour chaque noyau gris consid6r6. Une 6tude d6taill6e, faite par le m~me auteur, a permis en particulier de mettre en 6vidence une individualit6 maturative de chacun des noyaux du tronc c6r6bral, fait qui n'avait pas pu &re 6tabli par les m6thodes biochimiques. Une forte activit6 de la S.D. et de la D.P.N. ou N.A.D~H. diaphorase a pu &re dgalement mise en 6vidence par FRIEDE (1961) et par YONEZAWA et al. (1962) en culture de tissu darts la glie et les cellules de Schwann, pendant la my61inisation. L'accroissement consid6rable de l'activit6 de la S.D. en fonction de l'~ge et celui de la cytochrome-oxydase dont le fonctionnement est coupl6 avec elle, de m~me que celle de l'A.T.P.-ase - - dispensateur d'6nergie - - a d6jfi 6t6 d6montr6 par les mSthodes biochimiques dans le cerveau du rat nouveau-n6 (FLEXNER 1955). Ces activit6s augmentent tr6s rapidement apr6s la naissance pour atteindre le taux de l'adulte vers le 156me-186me jour. Le m6tabolisme exclusivement ana6robie avant la naissance devient donc essentiellement a6robie apr~s celle-ci (CASSIN ET HEREON 1961). Des observations identiques faites par FLEXNER(1955) et POTTER et al. (1945) indiquent qu'il existe une p6riode ~t laquelle la S.D., la cytochrome-oxydase et l'A.T.P.-ase augmentent tr+s rapidement dans le cortex c6r6bral. Cette p6riode appel6e pdriode critique se situe chez le rat vers le 10-156me jour de la vie extra-ut6rine, chez le cobaye dont la maturation est plus pr6coce entre le 416me et 466me jour de la vie foetale. Dans les deux cas, l'augmenta-
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tion brutale de l'activit6 enzymatique correspond ~ l'6tablissement de l'activit6 61ectrique du cortex c6r6bral. La vuln6rabilit6 ~t l'anoxie est parall~le au degr6 de l'activit6 oxydative des tissus nerveux. Les rats nouveaux-n6s r6sistent en effet ~t une privation en oxygbne de 30-35 minutes alors que les rats adultes succombent au bout de 3-5 minutes. Ce sont les r6gions dont l'activit6 oxydative est la plus forte, qui vont ~tre le si6ge des 16sions les plus pr6coces et les plus graves au cours de l'anoxie (FRIEDE 1959). Ainsi, chez l'adulte, ce sont les 3 couches superficielles du cortex, le cortex c6r6belleux, le striatum, la corne d'Ammon qui seront les plus vuln6rables /t l'anoxie (FRIEDE 1959). On peut supposer que chez le nouveau-n6 les 16sions anoxiques puissent prendre un type particulier du fait de l'aspect tachet6 de l'activit6 oxydative dans le striatum et du fait aussi d'une assez forte activit6 oxydative dans la substance blanche au cours de la my61inisation. Ces donn6es pourraient peut-atre servir d'explication ~t des 16sions telles que l'6tat marbr6 du striatum (FRIEDE 1959) ou ~ des 16sions de la substance blanche au cours de certaines anoxies pr6coces du nouveau-n6. En ce qui concerne les autres enzyme du cycle Krebs, KUHLMANET LOWRY (1956), par des m6thodes microchimiques, ont constat6 une augmentation de la glutamic et de la malic deshydrog6nase dans le cortex, au cours de la maturation, et ROBINS ET LOWE (1961) ont 6tabli, par les m~mes m6thodes ap6s micro-dissection des diff6rentes couches du cervelet, l'existence d'une tr6s forte activit6 de l'isocitric deshydrog6nase dans le cortex c6r6belleux, au cours du d6veloppement, activit6 qui s'abaisse ensuite aux taux plus bas de l'adulte. Utilisation des glucides
Chez l'adulte, la principale voie d'utilisation des glucides est repr6sent6e par la voie oxydative du cycle de Krebs, mais celle-ci ne fonctionne, dans certaines esp~ces qu'apr6s la naissance. L'embryon et le foetus utilisent donc d'autres voies pour m6taboliser les glucides. Ce sont: le cycle du pentose et la glycolyse ana6robie. Les enzymes du cycle du pentose, en particulier la glucose-6-phosphate deshydrog6nase semblent avoir une activit6 plus intense chez un rat de 10 jours que chez un rat adulte comme l'indiqueraient nos pr6parations. I1 est int6ressant de noter que ce cycle, fournisseur de ribose-5-phosphate, indispensable ~ la synth6se des acides nucl6iques, joue un role tr6s important au cours de la vie embryonnaire faits 6tablis par des donn6es biochimiques - - pour diminuer ensuite jusqu'au taux de radulte (BURT ET WENGER 1961). Des enzymes de la glycolyse ana6robie, FRIEDE (1958) a 6tudi6 l'activit6 de la phosphorylase dans le cerveau de rats nouveaux-n6s. Cette auteur trouve une activit6 phosphorylasique intense dans la m6ninge et l'6pendyme, mais tr6s basse dans le tissu c6r6bral. Cette activit6 augmente ensuite jusque vers le 206me jour. Ces donn6es histochimiques sont en contradiction avec la notion biochimique d'une glycolyse embryonnaire active. Cette contradiction pourrait trouver une explication dans le fair que la glycolyse au cours de la vie intra-ut6rine se fait directement/l partir du glucose et non pas /~ partir du glycog6ne. -
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L'activit6 tr6s basse de la phosphorylase, chez le nouveau-n6, n'exclut donc pas l'existence d'une glycolyse tr6s active ~t cette p6riode de la vie, glycolyse qui continue ensuite h augmenter jusqu'au taux de l'adulte. FRIEDE a 6galement nots sur ses pr6parations l'apparition d'une activit6 phosphorylasique dans les axones, pr6c6dant la my61inisation. Un accroissement de l'activit6 de la lactic deshydrog6nase, de la fl-galactosidase et de la fl-glucuronidase en rapport avec la my61inisation ont 6galement6 t6 mises en 6vidence par ROBINS ET LOWE (1961) par des m6thodes utilisant la micro-dissection. Mdtabolisme des acides amines
Des enzymes intervenant dans le m6tabolisme des acides amin6s, seule l'6volution de la mono-amine oxydase (M.A.O.) a 6t6 6tudi6e par NACHMIAS (1960) par des m6thodes histochimiques. Cet enzyme jouerait un r61e dans l'activit6 adr6nergique des neurones en oxydant l'adr6naline. Cet auteur a trouv6 une activit6 ~. distribution diffuse de faible intensit6 chez le rat de 8 jours, alors que chez l'adulte, cette activit6 est localis6e essentiellement au noyau rouge, la substance grise entourant l'aqu6duc, le dienc6phale et le noyau amygdalien r6v61ant ainsi une corr61ation inverse avec la localisation de l'ac6tylcholinest6rase. Les 6tudes biochimiques et celles du comportement des animaux ont 6tabli qu'il existe un rapport entre le taux d'activit6 de la M.A.O. et le niveau de comportement global de l'animal. Ainsi, chez le cobaye dont l'activit6 fonctionnelle est d6velopp6e la naissance, le taux de M.A.O. est beaucoup plus 61ev6 que chez le rat qui naTt avec un d6veloppement fonctionnel tr6s pauvre (KARKI et al. 1952).
RESUME
Les activitds enzymatiques du syst6me nerveux subissent des modifications considdrables au cours de la maturation. Ces modifications portent non seulement sur le taux de ces activit6s, mais quelquefois aussi sur le mode de distribution de celles-ci. Les techniques histochimiques r6v61ent une enzyme-architectonie du tissu nerveux et une 6volution de cette architectonie, diffdrente pour la plupart des enzymes 6tudi6s. L'6volution de ces activit6s enzymatiques en fonction de l'gge n'est qu'une traduction des modifications subies par les diffdrentes voies de passage mdtaboliques au cours de la maturation. Nous avons pu mettre en 6vidence par des m6thodes histochimiques l'apparition post-natale progressive de l'activit6 des phosphatases acides non sp~cifiques et des est6rases carboxyliques dans le cortex c6rdbral et c6r6belleux chez le rat; et des modifications dans le type de-distribution de ces derni6res dans les structures sous-eorticales. De mame, FRIEDE a pu d6montrer par des techniques histo-enzymologiques l'accroissement progressif de l'activit6 de la succino-deshydrog6nase (enzyme du cycle de Krebs) et de la D.P.N. diaphorase, encore appel6e N.A.D.H. diaphorase, dans le cerveau du rat nouveau-n6, accroissement dont la durde est variable pour chacune des r6gions consid6r6es. Cette maturation s'accompagne comme pour les est6rases carboxyliques d'un changement dans le type de distribution de l'activit6 de ces d6shydrog6nases. J. neurol. Sci. (1965)2:213-240
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Un accroissement post-natal de l'activit6 de l'ac6tylcholinest6rase (sans changement dans le type de sa distribution) et de la mono-amine oxydase ont 6t6 mis 6galement en 6vidence. Dans l'ensemble, la maturation des parties phylog6n6tiquement plus anciennes du cerveau est plus avanc6e que celle des parties phylogdn6tiquement plus r6centes et la maturation du m6senchyme c6r6bral contrairement/t celui du parenchyme nerveux est parfaitement achev6 h la naissance chez le rat. L'accroissement post-natal de ces diverses activit6s enzymatiques en particulier, dans le cortex c6r6bral, indique conform6ment aux donn6es biochimiques un accroissement consid6rable du m6tabolisme qui d'ana6robie avant la naissance, devient essentiellement a6robie aprbs celle-ci en rapport avec l'6tablissement de l'activit6 fonctionnelle du cortex. II existe des rapports bien 6tablis entre les taux d'activit6s de la succino-d6shydrog6nase (S.D.), de l'ac6tylcholinest6rase et de la mono-amine oxydase, et le comportement des animaux 6tudi6s. D'autres activit6s enzymatiques du parenchyme c6r6bral qui semblent jouer un r61e au cours de la prolif6ration cellulaire, tels que les phosphatases alcalines et les enzymes du cycle du pentose montrent, par contre, une baisse consid6rable de leur activit6 apr6s la naissance. L'augmentation de l'activit6 m6tabolique n6cessit6e par la synth6se des constituants de la gaine my61inique se traduit sur les pr6parations histo-enzymologiques par l'apparition passag6re dans la glie de la substance blanche d'une activit6 intense des est6rases carboxyliques non-sp6cifiques, des phosphatases acides, de la S.D. et de la D.P.N. diaphorase au cours de la my61inisation. Ces 6tudes histo-enzymologiques permettent une 6rude r6gionale de la maturation plus minutieuse que les 6tudes biochimiques habituelles. Elles jettent de ce fait un jalon pour la meilleure compr6hension des variations dans la vuln6rabilit6 r6gionale sdlective du syst6me nerveux en fonction de l'~ge. Elles permettent d'entrevoir la raison pour laquelle des facteurs pathog6nes identiques peuvent d6terminer des alt6rations diffdrentes selon qu'ils agissent sur le syst~me nerveux de sujets adultes, ou sur celui de sujets en voie de maturation.
SUMMARY
Enzyme activities in the nervous system undergo considerable modifications in the course of maturation. These modifications affect not only the level of activity, but sometimes also the localization. Histochemical techniques reveal an enzyme-architectonic pattern in the nervous tissue whose development is different for the majority of enzymes studied. The evolution of these enzyme activities as a function of age is only an expression of the changes in metabolism which accompany maturation. We have shown by means of histochemical techniques the progressive post-natal development of non-specific acid phosphatases and carboxylic esterases in the cerebral cortex and cerebellum of the rat. We have shown also modifications in distribution of the esterases in the subcortical areas of the brain. J. neurol. Sci.
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ASPECTS HISTO-ENZYMOLOGIQUESDE LA MATURATIONDU SYSTEMENERVEUX 239 A progressive elevation of succinate dehydrogenase (SD) and N A D H (DPN) diaphorase (enzymes of the Krebs cycle) has been demonstrated histochemically by FRIEDE in newborn rat brain. This period of elevation was observed to vary for each of the regions considered, and maturation was accompanied by changes in the carboxylic esterases similar to those shown by the dehydrogenases. Increased post-natal activity of acetylcholinesterase (ACHE) (without change of distribution), and of monoamine oxidase (MAO), was noted by GEREBTZOFF, NACHMIAS and KARKI et al. On the whole, the maturation of those regions which are oldest from the phylogenetic point of view is more advanced than that of the newer regions. The maturation of the mesenchymal tissues of the brain, on the contrary, is completed at birth in the rat. The post-natal development of the different enzyme activities, particularly in the cerebral cortex, confirms biochemical data which indicate a considerable increase in metabolic processes which, before birth, are essentially anaerobic and which, after birth, become aerobic with the establishment of functional activity in the cortex. There are well-established correlations between the levels of succinate dehydrogenase, acetylcholinesterase and MAO, and the behaviour of the animals studied. Other enzymes of the cerebral parenchyma which appear to play a role in cellular proliferation, such as alkaline phosphatases and the pentose cycle enzymes, show a considerable fall in activity after birth. The increase in metabolic activity required by the synthesis of myelin is demonstrated histochemically by the temporary appearance, in the glia of the white matter, of an intense activity of non-specific carboxylic esterases, acid phsophatases, and of SD and NADH-diaphorase. Histo-enzymological techniques allow studies of maturation on a regional scale far smaller than that possible with conventional biochemical techniques. They permit also a better understanding of variations in selective regional vulnerability of the nervous system as a function of age, and an understanding of the reason why identical pathological factors produce different changes in adult and developing brains.
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