Autosurveillance glycémique : Un outil formidable mais mal utilisé ? Par le patient ou par les prescripteurs ?

Autosurveillance glycémique : Un outil formidable mais mal utilisé ? Par le patient ou par les prescripteurs ?

Éditorial Diabète • Lipides • Obésité • Risques cardio-métaboliques • Nutrition Autosurveillance glycémique : Un outil formidable mais mal utilisé ? ...

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Éditorial Diabète • Lipides • Obésité • Risques cardio-métaboliques • Nutrition

Autosurveillance glycémique : Un outil formidable mais mal utilisé ? Par le patient ou par les prescripteurs ? S. Halimi Directeur de la rédaction Pôle DigiDUNE Clinique d'endicronologiediabète-nutrition CHU de Grenoble

Self-monitoring of blood glucose: A great tool but poorly used? By the patient or by the prescribers?

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urieux de suivre de près les publications qui remplissent les colonnes des journaux médicaux et les controverses au sujet de l’autosurveillance glycémique qui animent ça et là les congrès je reste néanmoins sur une fâcheuse impression, celle de « déjà vu, de déjà entendu ». Après des années de discussion, quelle est en effet la question posée aux débatteurs, aux experts, aux soignants ? Laquelle de ces quatre questions ? – L’autosurveillance glycémique (ASG) a-t-elle fait la preuve de son utilité ? Preuve que pour « conduire » correctement un diabète, quel qu’il soit, son usage est indispensable, un vrai plus, sur des critères durs et sur la qualité de vie ? - niveau 1 : de l’ordre de l’« Evidence based medicine » – Ceux qui la pratiquent et surtout ceux la prescrivent s’en servent-ils correctement ? L’ASG estelle suffisamment inscrite dans la prise en charge globale, le nécessaire est-il fait pour accompagner le patient dans cette démarche, sans se cantonner à la rédaction d’une ordonnance ? - niveau 2 : de l’ordre de la « Motivation et du « Savoir-faire » » – Savent-ils où regarder, comment et pourquoi s’en servir en fonction de la typologie du patient et des traitements afin d’en tirer de véritables enseignements ? - niveau 3 : de l’ordre du « Savoir » – Ou enfin : le diabète coûte cher donc comment limiter les dépenses de santé ? Ne serait-ce pas sur ce qui, en première lecture, « semble » le moins indispensable. - niveau 4 : de l’ordre de l’« Economie de santé » En fait toutes ces questions sont légitimes.

© 2010 - Elsevier Masson SAS - Tous droits réservés. Médecine des maladies Métaboliques - Septembre 2010 – Vol. 4 – Suppl. 1

En France, la Haute Autorité de Santé (HAS) a précisé, en 2007, le cadre dans lequel s’inscrit l’ASG dans une fiche de « Bon usage des dispositifs médicaux » validé par la CEPP (Commission d’Evaluation des Produits et Prestations). Pour l’institution, seule en charge des recommandations, le diabète de type 1 et lorsque qu’un diabétique de type 2 a recours à l’insulinothérapie, constituent les indications indiscutables d’ASG. Certes sont ensuite cités : le risque d’hypoglycémie sous sulfamides hypoglycémiant ou l’usage de l’ASG comme élément de motivation du patient. Mais à juste titre il est rappelé que « l’autosurveillance passive ne débouchant pas sur des conséquences thérapeutiques n’est pas recommandée ». Et plus loin que « toute » ASG doit « s’inscrire dans une démarche bien construite où l’éducation du patient est importante ». C’est qu’il convient d’entendre ce qu’en disent des patients. L’ASG constitue une des principales contraintes du diabétique malgré les indéniables progrès accomplis pour améliorer la précision des résultats, en simplifier l’usage, en réduire la pénibilité. Parce que, même moins pénible, elle le demeure si on ne sait pas pourquoi on la pratique, si les soignants s’intéressent peu aux résultats, si elle est prescrite de façon non réfléchie, sans en préciser les buts, horaires, ni objectifs, sans expliciter la signification des résultats et encore moins qu’en faire… Sinon c’est beaucoup d’angoisse pour rien et alors, en effet, des dépenses inutiles. Mais comment peut-on en 2010, nous, supposés experts, poser de telles questions ? En réalité il faut les poser aux principaux intéressés : les prescripteurs de soins de premier recours, « le médecin traitant ou le paramédical » et puis « aux… patients ». Pour ces derniers, les maigres données dont on

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Éditorial dispose sont formelles : « je ne fais pas ou bien, cela me pèse parce que je ne sais ni comment, ni pourquoi, ni qu’en faire ? ». Et si le prescripteur ne le fait pas c’est probablement faute de temps pour expliquer et peut-être aussi faute de savoir suffisant sur l’usage de l’ASG et plus largement sur la maladie, les profils glycémiques, les principes d’action des nombreux traitements disponibles aujourd’hui. Mais peut-être est-ce aussi pour bien d’autres raisons qui nous échappent. Donc posons leur la question, ensuite il sera temps de mettre en place, ensemble, des programmes qui rendront utile, non pénible ni anxiogène une pratique remarquable, incontournable, un vecteur irremplaçable de motivation dans la prise en charge d’une maladie sinon asymptomatique. Ceci vaut d’abord pour l’ASG dans le cadre du diabète de « type 2 non insulinotraité » mais pas uniquement. Certains avancent aujourd’hui qu’avec la venue sur le marché d’antidiabétiques (inhibiteurs des DPP-4 et analogues du GLP-1), ne faisant courir aucun risque d’hypoglycémie, on peut s’affranchir de l’ASG. Ceci me semble absurde, puisque cela ne changera pas le besoin de recourir au seul instrument capable de guider le patient durant les 3 à 4 mois qui séparent deux HbA1C. Sa boussole, son sextant

entre deux escales. L’usage de l’ASG bien conduite, peut limiter l’escalade de ses coûts et éviter d’en venir à envisager sa restriction drastique pénalisant par la même le très grand nombre de diabétiques qui peuvent légitimement en tirer un bénéfice. Le choix est donc entre une meilleure formation pour un meilleur usage et la limitation stricte aux seuls insulinotraités. Pour moi la réponse est claire, tous les patients diabétiques ont besoin d’une véritable éducation thérapeutique incluant l’ASG. Pour les diabétiques de type 2, au moins, pour l’essentiel, ces programmes restent à construire. Mais soyons lucides, il reste aussi beaucoup à faire pour en optimiser l’usage chez les diabétiques insulinotraités, dans le cadre de l’insulinothérapie basale, basale bolus ou de l’insulinothérapie fonctionnelle. Pas mal de travail en somme pour ceux qui se sentent concernés par la santé des diabétiques. Conflits d’intérêt Pour le contenu de ce manuscrit l’auteur déclare être consultant pour le groupe Roche Diagnostics et avoir reçu des honoraires ou invitations des groupes Lifescan, Abbott Diabetes Care, NovoNordisk, MSD, Novartis, Roche Pharma, Boerhinger Ingelheim, Sanofi Aventis.

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