Médecine palliative — Soins de support — Accompagnement — Éthique (2008) 7, 238—243
Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com
14e CONGRÈS NATIONAL DE LA SFAP
Bilan du Comité national de suivi du développement des soins palliatifs et de l’accompagnement de la fin de vie夽 Report of the national committee on the development of palliative care and end-of-life support
Régis Aubry Département douleurs - soins palliatifs, pôle autonomie handicap, CHU de Besanc¸on, hôpital Jean-Minjoz, 3, boulevard Alexandre-Flemming, 20030 Besanc¸on, France Rec ¸u le 28 mai 2008 ; accepté le 28 mai 2008 Disponible sur Internet le 3 août 2008
MOTS CLÉS Culture palliative ; Travail en réseau ; Formation
夽
Résumé Le Comité national de suivi du développement des soins palliatifs et de l’accompagnement de la fin de vie a été chargé par le ministre de la Santé en 2006 de proposer une politique nationale de développement des soins palliatifs. Le comité a suivi une démarche de santé publique. Il a d’abord pris la mesure des enjeux éthiques, économiques, politiques et démographiques du futur, dans lequel devra se développer une politique de soins palliatifs. Le choix fondamental fait par le comité a constitué en même temps un objectif ambitieux à atteindre : il s’agit en France de créer une culture des soins palliatifs et de l’accompagnement intégré à la pratique soignante, d’une part, et à l’éducation citoyenne, d’autre part. Pour atteindre cet objectif, le rapport — et ses annexes, consultables sur le site de la Sfap — expose et justifie une série de propositions pour une politique de développement des soins palliatifs. Les principales mesures préconisées par le comité concernent trois champs : l’organisation, la formation et la recherche, les aspects sociétaux. Ce rapport fixe en quelques sorte le cap à atteindre. Si ces propositions sont mises en œuvre concomitamment, cela permettrait à terme, de changer le regard que notre société porte sur l’homme malade, sa finitude ; cela devrait permettre l’intégration d’une culture de l’accompagnement et des soins palliatifs dans la pratique de tous les acteurs de santé ; cela devrait contribuer à modifier leur fac ¸on de travailler. © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
14e Congrès de la SFAP. Nantes, 19, 20 et 21 juin 2008. Cultures et soin : diversité des approches, complexité des réponses. Adresse e-mail :
[email protected].
1636-6522/$ — see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.medpal.2008.05.011
Bilan du Comité national de suivi du développement des soins palliatifs
KEYWORDS Palliative care; Network; Training
239
Summary In 2006, the Ministry of Health asked the national committee on the development of palliative care and end-of-life support to propose a national policy for the development of palliative care. The committee approached the subject from the point of public health, starting with the fundamental ethical, economical, political and future demographic issues, upon which a palliative care policy could be developed. The fundamental choice was to establish an ambitious objective: create a culture of palliative care and end-of-life support in France as an integral part of health care and citizen education. To achieve this goal, the report and its appendices, which can be consulted on the Sfap web site, presents the proposals — and their justification — for a policy developing palliative care. The main measures advocated by the committee concern three dimensions: organization, training and research, societal aspects. This report outlines the objectives to be reached. If these proposals can be implemented concomitantly, this will enable a new approach to the process of human disease, i.e. its finality; this will enable the integration of a culture of palliative care and support which should contribute to changing awareness and practices among healthcare professionals. © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Le Comité national de suivi du développement des soins palliatifs et de l’accompagnement de la fin de vie a été créé en 20061 , à la demande du ministre de la Santé. Sa mission était de « proposer une politique nationale de développement des soins palliatifs, d’accompagner la mise en œuvre et le déploiement de cette politique, d’évaluer l’application des textes législatifs et réglementaires concernant les soins palliatifs et l’accompagnement de la fin de vie ».
Les enjeux d’une politique de développement de soins palliatifs sont majeurs au plan de la santé publique, de l’organisation du système de santé, de l’économie de la santé, de l’éthique Les progrès dans le champ de la santé génèrent une augmentation de l’espérance de vie. Ils s’accompagnent d’une augmentation du nombre de personnes âgées, du nombre de personnes vivant avec une maladie, un handicap, une perte d’autonomie. De plus en plus de personnes vivent de plus en plus longtemps avec des maladies ou un handicap de plus en plus graves. Ce progrès impose l’exigence d’un questionnement rigoureux concernant les limites du savoir, les limites de la vie, la qualité et le sens de la vie prolongée. Le développement des soins palliatifs est un champ d’observation pour la modernisation de l’organisation du système de santé. C’est une approche transversale aux disciplines médicales, aux différents lieux de soins et de vie, aux champs sanitaire et médicosocial, incarnée par l’action des équipes mobiles et des réseaux de soins palliatifs. 1 Arrêté du 9 février 2006 relatif à la création et à la composition du Comité national de suivi du développement des soins palliatifs et de l’accompagnement de la fin de vie. Arrêté du 6 juin 2006 relatif à la désignation des membres du Comité national de suivi du développement des soins palliatifs et de l’accompagnement de la fin de vie.
Notre société est marquée à la fois par un certain déni de la mort et par l’émergence de la notion de droit des personnes malades. Les questions de la finitude de l’homme et de la relativité de la vie ne sont pas solubles uniquement dans la médecine. Ce sont des questions de société, des questions qui concernent l’éducation, qui engagent l’action politique. Elles imposent le développement de nouvelles solidarités envers les plus vulnérables, afin de lutter contre leur isolement, leur exclusion.
Comment le comité a-t-il travaillé ? Plus de 50 réunions du comité plénier, du comité restreint et de cinq groupes de travail2 ont rassemblé au total près de 70 personnes (décideurs, financeurs, acteurs et représentants 2
Les groupes de travail du comité : Groupe 1 : « Suivi du développement de la démarche palliative ». Les objectifs étaient de connaître et d’analyser la réalité de la culture actuelle des soins palliatifs dans les services ou activités non dédiés ; de proposer des mesures de correction ou d’optimisation. Ce groupe a comporté en particulier des représentants de 15 sociétés savantes concernées par les soins palliatifs. Groupe 2 : « Recherche, formation des professionnels ». Les objectifs étaient de proposer des mesures ou réformes éventuelles nécessaires pour que les soins palliatifs deviennent à terme réellement une culture centrée sur l’approche globale de la personne malade, partagée en interdisciplinarité. Groupe 3 : « Information du public ; accueil et soutien des proches ; bénévolat ». Les objectifs étaient de proposer les mesures pour la sensibilisation et l’information du grand public, pour l’aide aux aidants naturels, pour penser la place et l’organisation du bénévolat d’accompagnement. Groupe 4 : « Valorisation et financement des soins palliatifs ». Les objectifs étaient d’envisager les mesures financières pour inciter à la mise en œuvre de la politique de développement des soins palliatifs et de proposer les mesures d’évaluation et de contrôle nécessaires. Groupe 5 : « Interfaces et organisation des soins palliatifs et de l’accompagnement ». Les objectifs étaient de penser les coopérations en santé, les interfaces nécessaires entre ville et hôpital, entre champs sanitaire et social, entre les thématiques « soins palliatifs » et « douleur », entre les organisations en santé des différents pays constitutifs de l’Europe.
240
R. Aubry
des malades) pendant 18 mois. Ces travaux ont abouti à la rédaction d’un rapport remis en début d’année à Mme la ministre de la Santé, de la Jeunesse et des Sports, afin de servir de référence à l’élaboration d’un plan de développement des soins palliatifs. Ce rapport a été enrichi par une étude de l’organisation de la politique de santé et des législations en matière de soins palliatifs et des questions de fins de vie dans les autres pays réalisée par le Dr Lucie Hacpille. De plus, s’agissant de définir un projet de politique de santé publique, le comité a souhaité appuyer ses propositions sur une réelle évaluation de l’offre et des besoins tant sur le plan quantitatif que qualitatif. Des études ont été menées ou sont en cours par la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES)3 . Les résultats de ces travaux seront publiés fin 2008. Ils viendront infléchir ou renforcer les conclusions du comité. La Sfap était représentée dans chacun des groupes de travail, ainsi que dans le comité plénier, le comité restreint et le comité de suivi des études menées par la DREES.
Quelles sont les principales propositions et recommandations faites par le comité ? Le choix fondamental fait par le comité a constitué en même temps un objectif ambitieux à atteindre : il s’agit en France de créer une culture des soins palliatifs et de l’accompagnement intégrés à la pratique soignante, d’une part, et à l’éducation citoyenne, d’autre part. Pour atteindre cet objectif, le rapport — et ses annexes, consultables sur le site de la Sfap — expose et justifie une série de propositions pour une politique de développement des soins palliatifs. Ce rapport fixe en quelques sorte le 3 Les études menées à la demande du comité par la DRESS. Credoc : étude des perceptions et des attentes des professionnels de santé, des bénévoles et des familles des malades concernant la prise en charge de la fin de vie dans les hôpitaux et au domicile. Credoc : étude des perceptions et des attentes des professionnels, des bénévoles, des familles et des malades dans les établissements médicosociaux prenant en charge soit des personnes âgées, soit des enfants ou des adultes lourdement handicaps. Artemis : La prise en charge des soins palliatifs : rapport sur l’état des lieux en France. Synthèse : des études du Credoc ; des bilans annuels centralisés par la DHOS sur les dispositifs mis en place par chaque région ; des éléments du volet de soins palliatifs des schémas régionaux d’organisation sanitaire de troisième génération (SROS III) ; des données du registre des structures de soins palliatifs tenu par la Sfap ; de l’enquête Pathos en USLD ; des données la base PMSI-MCO - RSA classés dans le GHM 23Z02Z (soins palliatifs, avec ou sans acte) ; des données relatives aux formations réalisées en soins palliatifs (données ANFH, OCPA, CNAMTS, DGS-SFGG-Sfap) ; du rapport « la France palliative » de la mission confiée à Mme Marie de Hennezel par le ministre de la Santé en janvier 2005.
cap à atteindre. Si ces propositions sont mises en œuvre concomitamment, cela permettrait à terme, de changer le regard que notre société porte sur l’homme malade, sa finitude ; cela devrait permettre l’intégration d’une culture de l’accompagnement et des soins palliatifs dans la pratique de tous les acteurs de santé ; cela devrait contribuer à modifier leur fac ¸on de travailler. Les décideurs politiques vont proposer des actions à partir de nos propositions. Ces propositions d’actions seront à la mesure des moyens que notre économie et notre société peuvent actuellement mobiliser sur un tel sujet. Les principales mesures préconisées par le comité concernent trois champs : l’organisation, la formation et la recherche, les aspects sociétaux.
Concernant l’organisation des soins palliatifs en France Deux textes de référence ont été élaborés et publiés récemment : • Circulaire no DHOS/O2/2008/99 du 25 mars 2008 relative à l’organisation des soins palliatifs ; • Circulaire no DHOS/O2/O3/CNAMTS/2008/100 du 25 mars 2008 relative au référentiel national d’organisation des réseaux de santé en soins palliatifs. Ces textes vont servir de référence pour organiser et financer le développement des soins palliatifs.
Au niveau des établissements de santé La logique qui préside est la suivante : les soins palliatifs se pratiquent dans tous les lieux de soins. Les recours sont les suivants : les équipes mobiles ont un rôle de soutien, d’appui et de formation des équipes soignantes et médicales ; les lits identifiés permettent la prise en charge dans leur service habituel de patients en situation difficile ; les unités de soins palliatifs sont des lieux spécialisés, destinés à accueillir les patients dans des situations complexes. Les incitations financières vont être poursuivies. À noter qu’au niveau des « lits identifiés de soins palliatifs », compte tenu de la valorisation très attractive, la Sfap et la Cnam élaborent, sur la base de la circulaire ci-dessus citée, un outil de contrôle qualité. L’enjeu est que les moyens mis en œuvre servent bien l’objectif fixé et permettent les résultats attendus. L’avenir passera également par la création de lits identifiés dans les secteurs de soins de suite et de réadaptation, dans les unités de soins de longue durée. Le renforcement du financement des EMSP par les missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation est essentiel. Il est nécessaire de réfléchir à l’adaptation ultérieure de ce financement en fonction de l’activité réelle et correspondant au cahier des charges des EMSP, particulièrement dans la perspective d’une activité élargie en directions d’autres établissements de santé du territoire et en direction des structures médicosociales.
Bilan du Comité national de suivi du développement des soins palliatifs
Pour ce qui concerne le développement des soins palliatifs à domicile Une éthique de la santé implique que le domicile puisse être le lieu de la fin de la vie (et le lieu du soin) quand cela est souhaité par la personne malade. Le développement de la démarche palliative à domicile fait appel à un travail interdisciplinaire, à une collaboration entre les différents acteurs et dispositifs existants au bénéfice du malade et de ses proches (acteurs libéraux, SSIAD, auxiliaires de vie et, quand ils existent, réseau de soins palliatifs, service d’HAD, structures hospitalières de recours. . .). Dans les faits, l’évolution de la démographie médicale et soignante rend difficile la pratique des soins palliatifs à domicile. C’est pourquoi les dispositions annoncées par la loi du 9 juin 1999, en particulier le décret relatif aux conditions d’exercice des professionnels de santé délivrant des soins palliatifs à domicile pris par l’application de l’article L. 162-1-10 du Code de la Sécurité sociale, pour faciliter la démarche palliative au domicile du patient nécessitent une refonte en profondeur. Comment développer une culture de l’interdisciplinarité et du travail en réseau, à domicile ? L’analyse de la pratique et l’expérience des réseaux de soins palliatifs permettent de proposer les recommandations suivantes pour l’avenir. L’évolution des réseaux doit se faire dans le sens d’un regroupement de thématiques. Ainsi, les réseaux de soins palliatifs devraient évoluer vers un rapprochement d’autres réseaux en plateformes territoriales regroupant des réseaux impliquant une prise en charge globale (gérontologie, perte d’autonomie, handicap, maladies chroniques. . .). Le niveau territorial est le niveau opérationnel de proximité des réseaux. La mission est une mission de conseil, de soutien, de diffusion de culture, de facilitation pour les acteurs libéraux à l’accès à une expertise. Une plateforme territoriale doit coordonner les différentes offres existantes (dans le champ sanitaire, médicosocial, privé, public), afin de faciliter le travail des acteurs libéraux et la continuité et la qualité des soins pour les malades et leurs proches. Le développement de l’hospitalisation à domicile apparaît nécessaire, voire indispensable surtout dans certains secteurs « défavorisés », isolés. La fonction de coordination est ainsi une fonction essentielle à développer pour l’avenir des réseaux. Il est nécessaire que des formations préparent à cette fonction.
241
tion de l’importance des soins médicotechniques, ou de la dépendance ou des complications médicales ? Comment trouver le juste milieu entre le devoir d’accompagnement des personnes sans (sur)médicalisation et la nécessité de la permanence des soins ? Le rapport fait une série de propositions concrètes pour donner aux EHPA la possibilité de devenir un haut lieu de la culture palliative.
La place des hôpitaux locaux sera de plus en plus importante Les hôpitaux locaux constituent idéalement une plateforme, un espace d’immédiate proximité. Ils sont animateurs de soins dans un territoire de proximité, dans et en dehors de l’hôpital (liens avec les EHPAD, les réseaux), facilitateurs de la continuité et la permanence des soins. La reconnaissance de lits dédiés de soins palliatifs dans ces structures souvent « non MCO » doit pouvoir être assortie d’une valorisation.
L’interface soins palliatifs et douleur Ce qui réunit les deux dynamiques est essentiel : la complexité des douleurs dans le cadre des situations de soins palliatifs, l’approche globale de la personne, la transversalité des actions, le travail interdisciplinaire, la dimension sociale et la souffrance intriquées dans la douleur chronique et les soins palliatifs. La complémentarité ne doit pas être source de rivalité. Les mutualisations ne doivent pas être des soustractions de moyens. Les acteurs de soins palliatifs et ceux de la douleur, s’ils sont complémentaires, ne sont pas interchangeables. Le rapprochement, l’adossement des structures et des organisations d’évaluation et de prise en charge de la douleur chronique des structures et organisations de soins palliatifs est donc une recommandation forte.
La spécificité des soins palliatifs pédiatriques Il apparaît nécessaire de mener une réflexion particulière à propos des soins palliatifs pédiatriques. La mise en place d’équipes ressources pluridisciplinaires semble essentielle. Elles seraient chargées de coordonner au niveau régional l’activité des soins palliatifs pédiatriques, d’insuffler progressivement une culture de soins palliatifs pédiatriques dans toutes les structures où cela s’imposerait.
Une information en direction des acteurs de santé La place des établissements médicosociaux, et particulièrement les établissements d’hébergement pour personnes âgées (EHPA), va être majeure dans l’organisation des soins palliatifs Compte tenu de l’évolution démographique de la population franc¸aise, le champ de la gérontologie sera massivement investi dans la réflexion sur une politique de développement des soins palliatifs. Comment respecter le choix du lieu de (fin) de vie fait par les personnes âgées ? Comment garantir une unité de lieu de (fin) de vie pour les personnes âgées qui deviennent dépendantes ? Comment ne pas déplacer la personne mais déplacer les compétences vers cette personne en fonc-
Le champ des soins palliatifs est mal connu ou incompris de certains soignants, en particulier des médecins. Les textes de loi (et en particulier la loi « droits des malades et fin de vie ») et les textes réglementaires concernant l’organisation (et en particulier le guide de la démarche palliative) ne sont pas connus. Ils ne peuvent donc pas être appliqués. Les conséquences peuvent être un préjudice concernant la qualité des soins, leur continuité et la mise en œuvre d’une véritable éthique de soin dans les situations relevant de soins palliatifs. Le comité souhaite une incitation officielle des ARH pour piloter la politique de soins palliatifs au plan régional, pour pousser les établissements de santé à veiller au développement de la démarche palliative. Les CME et les directions pourraient réaliser un bilan annuel en invitant un médecin responsable d’une équipe de soins palliatifs afin d’informer la communauté médicale des avancées concer-
242
R. Aubry
nant l’organisation des soins palliatifs, la législation et la réglementation dans ce domaine. Concernant les établissements de santé publics et PSPH, dans le cadre de la nouvelle gouvernance hospitalière, la signature des contrats de pôle pourrait être accompagnée d’une recommandation à la mise en œuvre d’une démarche palliative intégrée au sein de chaque projet de pôle. En outre, le comité a élaboré un document d’information sur la loi « fin de vie et droit des malades » qu’il conviendrait d’adresser à tous les acteurs de santé.
Concernant la formation et la recherche Formation et recherche sont les deux leviers principaux du changement de culture souhaité. Les modalités et les contenus actuels de l’enseignement pour les études en santé ne préparent pas à la réalité à laquelle sont et seront confrontés les professionnels dans le champ des soins palliatifs.
Les soins palliatifs et l’avenir des études en santé La réforme des études en santé est nécessaire et inévitable. Les accords de Bologne modifieront à terme la formation des médecins et des soignants en l’orientant vers une configuration de type licence — master — doctorat (LMD). Le comité, prenant en compte les évolutions démographiques, les perspectives d’augmentation considérable des situations relevant des soins palliatifs, l’augmentation asymptotique des savoirs, le développement des nouvelles technologies de l’information et de la communication, l’émergence des questions éthiques, l’évolution et l’élargissement obligé du champ et des fonctions des soignants dans l’avenir. . . a voulu contribuer à la réflexion sur une refonte de la formation des acteurs en santé. Il a élaboré un document de travail « réflexions et propositions pour la formation médicale » (à consulter dans les annexes du rapport), à partir d’un descriptif du « cœur de métier » de médecin. Il est apparu que la pratique du médecin s’appuie sur quatre pôles de compétences : pôle technoscientifique, pôle relationnel, pôle éthique (la visée, l’organisation du questionnement), pôle coordination et communication. Pour permettre l’acquisition de ces compétences, il sera nécessaire de construire une formation médicale qui articule des apports cognitifs, l’apprentissage d’une pratique, un parcours personnel. Par ailleurs, et en attendant qu’une telle réforme aboutisse, le comité a élaboré des propositions pour modifier la formation médicale et infirmière dans leur configuration actuelle.
Concernant la formation continue Outre les diplômes interuniversitaires de soins palliatifs et d’accompagnement, accessibles aux différents profes-
sionnels de santé, il est recommandé de prévoir une action nationale pour inciter à des actions de formation à l’interdisciplinarité pour l’ensemble des acteurs de santé. L’interdisciplinarité constitue, en effet, la clé de la prise en charge globale de la personne malade, elle-même à la base des soins palliatifs. Une formation à l’interdisciplinarité consiste essentiellement à réaliser une formation en interdisciplinarité. Pour pouvoir réaliser une action nationale d’une telle envergure, il serait essentiel que tous les OPCA priorisent cette action concomitamment au niveau des établissements, aussi bien privés à but lucratif qu’au niveau des acteurs libéraux
Propositions concernant la recherche La particularité et la complexité de la recherche en soins palliatifs tient à plusieurs raisons ; elle concerne plusieurs champs : biomédical, psychosocial, éthique, santé publique, pédagogique ; elle doit être conc ¸ue dans une transversalité qui conditionne la composition des équipes entre différentes sociétés savantes, entre les différents champs universitaires, entre différents professionnels (médecins, IDE, psychologues, sociologues, philosophes. . .). Le lancement de la dynamique de recherche doit être facilité par : • le financement de la formation de méthodologistes et de coordinateurs des équipes interdisciplinaires dans les différents champs concernés ; • la création de postes d’universitaires en soins palliatifs : des professeurs associés (qui permettraient l’interfac ¸age entre les champs), des chefs de clinique-assistants, et des PU PH avec valence dans les domaines de la douleur et des soins palliatifs en envisageant la création d’une nouvelle sous-section grâce à une intersection entre différentes spécialités concernées par les soins palliatifs ; • la poursuite de financements avec thématique ciblée « soins palliatifs » dans le cadre des appels à projets PHRC, PHRQ, INCA, Fondation de France, Ligue, Fondation CNP. . . (à noter que les financements de la recherche proviennent peu souvent de l’industrie pharmaceutique) ; • la création des départements de sciences humaines et sociales tels que décrits dans le document « propositions pour la formation médicale » afin, entre autres, de faciliter et de développer la recherche inter UFR et interdisciplinaire. . .
Concernant l’évolution vers une culture des soins palliatifs auprès du grand public Une information doit être envisagée en direction du grand public sur la fin de vie, la mort, la définition et les enjeux des soins palliatifs. Les malades et leurs proches doivent connaître et faire respecter les droits des malades. Une sensibilisation du grand public en région est essentielle. La forme reste à définir (états généraux de la fin de vie préconisés dans le rapport de Mme Marie de Hennezel en 2003 ; sensibilisation via les associations de bénévoles d’accompagnement ; mobilisation du grand public lors de la
Bilan du Comité national de suivi du développement des soins palliatifs journée mondiale des soins palliatifs ; appui sur les conférences régionales de santé dans le cadre des plans régionaux de santé publique). Il serait souhaitable ; qu’en miroir d’un document destiné aux professionnels de santé, un « 4 pages » concernant la loi « fin de vie et droit des malades » soit mis à disposition des usagers. Une action d’information et de formation à destination des malades et de leur proches par le biais des collectifs interassociatifs sur la santé et de l’Union nationale des associations familiales est envisagée pour faire connaître les enjeux et l’organisation des soins palliatifs, la loi « fin de vie — droit des malades », diffuser le numéro de téléphonie sociale « Accompagner la fin de vie ».
Un programme d’éducation familiale et scolaire
Le proche est dans les faits et en permanence une personne « écartelée » entre trois fonctions qu’elle cumule : elle doit être à la fois elle-même, proche de celui qui souffre, et soignant par défaut et souvent par excès.
•
•
Parler de la mort à l’école semble essentiel pour limiter la tendance de notre société au déni de la finitude. Parler de la mort comme issue normale et obligée de la vie n’a fait pas peur aux enfants contrairement à une crainte des adultes et de certains enseignants. Parler de la mort, c’est parler de la vie, de sa signification, du sens que chacun doit tenter de lui donner dans cette temporalité et cette relativité qu’est la vie. Il est probable qu’introduire un programme de ce type dans l’Éducation nationale aurait un impact sur la qualité de vie, pourrait modifier les références de nos concitoyens, contribuer à limiter certaines violences de notre société. Il serait intéressant, en accord avec le ministère de l’Éducation nationale, de mettre en œuvre un programme de formation sensibilisation, d’y adosser un véritable travail de recherche en sociologie.
•
Les moyens d’une solidarité envers les personnes malades ou leurs proches • Le soutien aux associations pour la formation et l’accompagnement des bénévoles est essentiel : les bénévoles sont l’incarnation de la solidarité nécessaire pour l’accompagnement des plus vulnérables. La CNAMTS subventionne depuis cinq ans, sur ses fonds d’action sanitaire et sociale la formation initiale et continue des bénévoles, dans le cadre d’une convention avec la Sfap. Près de 200 associations d’accompagnement ont été qualifiées par le comité de pilotage pour pouvoir bénéficier du dispositif. Le nombre de bénévoles accompagnants est d’environ 4800. L’impact de cette formation est primordial car chaque bénévole formé, même devenu inactif, reste vecteur de cette culture d’accompagnement des malades en fin de vie et de leurs proches. La CNAMTS a décidé de poursuivre cette action de financement ; • l’aide aux aidants :
243
•
Un proche a au moins trois raisons de souffrir : l’autre (le malade), les autres et soi. Pour toutes ces raisons il est indispensable de penser l’aide aux aidants : construire un programme de formation des aidants : à l’instar des expériences canadiennes dans ce domaine, en lien avec le plan Alzheimer et le plan cancer il sera nécessaire d’élaborer un cahier des charges de formation. Les modalités de délivrance d’une telle formation seront ensuite discutées. Un tel programme pourrait être expérimenté au sein d’un réseau par exemple, ou dans une région ; penser les modalités de soutien des aidants (là encore éventuellement via les réseaux de soins palliatifs). Un document de travail pourrait être entrepris : qui soutient qui ? Quand ? Comment ? Pourquoi ?. . . Quel lien avec les libéraux ? Avec l’hôpital ?. . . ; la ligne de téléphonie sociale « Accompagner la fin de vie », inaugurée le 19 mai 2005 par le ministre de la Santé et des Solidarités, concrétise l’une des préconisations de la mission « Fin de vie et accompagnement » (rapport remis par Marie de Hennezel au ministre de la Santé en octobre 2003). Sa mission se situe à deux niveaux : informer, orienter, d’une part, et écouter soutenir les appelants pour des questions relatives aux soins palliatifs et à la fin de vie, d’autre part. À l’issue de 24 mois de fonctionnement du dispositif, une évaluation externe du dispositif a été réalisée en 2006 à la demande de la Direction générale de la Santé. Cette analyse remise au cabinet du ministre amènera celui-ci à annuler, poursuivre en l’état ou réorganiser ce dispositif pour qu’il soit plus actif, utile et efficient. Le comité souhaite le maintien de cette ligne, ainsi que la mise en place d’une vraie campagne de communication ; la rémunération du congé d’accompagnement de la fin de vie. La loi no 99-477 du 9 juin 1999 visant à garantir le droit d’accès aux soins palliatifs a instauré un congé d’accompagnement de la fin de vie. Ce congé n’est pas rémunéré. À l’instar du congé de solidarité familiale, qui concerne la personne gravement malade ou handicapée, ce congé devrait être financé. Plusieurs arguments justifient cette attente : contribuer à la valorisation du temps et de la place de l’accompagnement de la fin de la vie ; prévenir les deuils compliqués ; inscrire le congé pour l’accompagnement de la fin de vie dans le contexte plus général de l’aide aux aidants ; sortir de la confusion entre arrêts de travail et congés d’accompagnement ; faciliter le maintien au domicile de la personne malade ; tendre vers une éthique de justice distributive.